La stratégie municipale du Mouvement     démocrate peut être décrite de deux manières. Une manière « old school »     qui fait penser aux plus mauvaises heures des alliances opportunistes de la III° et de la     IV° République et de la politique italienne depuis 60 ans (voir la raison de la     prochaine élection législative anticipée en Italie suite à la défection d’un     groupuscule) où l’on se tourne vers le plus offrant afin d’obtenir des     strapontins voire plus. Une manière « postmoderne » où l’on fait son     marché en s’alliant, à l’envie, avec n’importe qui, celui qui vous est le     plus sympathique, le moins antipathique, celui qui peut vous en donner le plus, celui qui     est le plus « bankable », etc. dans une stratégie d’individualisme     absolu. Dans cette vision, le Mouvement démocrate n’est en fait qu’un agrégat     d’individualistes qui a chacun sa vision politique et qui revendique son « moi     je » total cher à la jeunesse depuis les années 80 et donc aux bobos     d’aujourd’hui.
Si c’est cela,     et cela y ressemble beaucoup, cela n’a plus beaucoup à voir avec le Centrisme tel     que nous le définissons ici et que le définissent de nombreux auteurs plus férus de     fonds que de salades électorales ou de visions individualistes. Cela n’a plus rien     à voir à la Démocratie chrétienne, famille dont est issu François Bayrou, où     l’on est une personne dans une communauté au lien social fort et non un individu     dans une société basée uniquement sur « chacun fait ce qu’il lui     plaît » dans la sphère sociale.
Rappelons que le     Mouvement démocrate n’a obtenu que 4% des voix et monnaye à droite et à gauche son     désistement et son intégration dans des listes en vue du second tour afin d’obtenir     plus que ce à quoi il aurait pu prétendre. Bien évidemment, peut-être qu’au soir     de ce deuxième tour, cette stratégie sera un fiasco et les manchettes vendeuses des     journaux qui ne parlent que de ce marchandage (et qui rappellent celles de la     peopolisation sarkozienne…) nous paraîtront ridicules. Néanmoins, il restera la     stratégie.
François Bayrou     veut devenir Président de la république depuis que ce farceur de François Mitterrand     lui a soufflé à l’oreille qu’il en a l’étoffe. Tout est donc bon pour     lui pour exister alors qu’électoralement il ne représente – si l’on prend     les résultats de la présidentielle – que moins de 20% des électeurs. Il est dans     une stratégie de communication qui n’est pas très pointue mais qui donne des     résultats, stratégie que tous les « trublions » de la politique utilisent     aujourd’hui de Nicolas Sarkozy contre Jacques Chirac à Barack Obama contre Hillary     Clinton en passant par François Bayrou contre Nicolas Sarkozy… Il faut     s’opposer à celui qui est en place ou qui représente soi-disant     l’establishment en promettant un « changement », changement qui est     tellement peu concret que l’on n’en connaît pas la teneur.
Que François     Bayrou obtienne le poste qu’il convoite est fort possible au vu des nouvelles donnes     électorales et des discours politiques qui touchent les électeurs (rappelons-nous ici     l’inconsistance de celui de Ségolène Royal qui surfait, quand elle était en tête     dans les sondages, sur des idées tellement vagues qu’elle pouvait prétendre être     d’accord avec tout le monde !).
Reste que François     Bayrou prétendait voici deux ans sortir le Centre de sa stratégie opportuniste, de le     rendre indépendant totalement des autres partis et de proposer de reconstruire un lien     social fort qui est l’apanage du Centrisme. Force est de constater, actuellement,     qu’il est un opportuniste qui s’allie tantôt avec l’UMP (Bordeaux),     tantôt avec le PS (Marseille), tantôt avec les communistes (Dijon) tout, en créant un     parti postmoderne qui est en train de casser ce qui reste du lien social… Et le     Centre dans tout cela ? Bonne question à laquelle François Bayrou avait répondu     lors de la campagne présidentielle en déclarant qu’il n’avait jamais était du     Centre. Drôle d’idée de vouloir faire gagner le Centre tout en n’en étant     pas !
Jean-Louis     Pommery
Directeur     des études du CREC