Les Etats-Unis sont-ils encore une démocratie?
Cette question aussi stupéfiante qu’elle peut paraître et
qui aurait été moquée avec raison avant le 21 janvier, est pourtant tout à fait
légitime désormais.
Depuis, Donald Trump a entamé son deuxième mandat et, petit
à petit, ses décisions érodent l’Etat de droit et rognent quotidiennement un
peu plus l’ordre démocratique.
Que ce soit en matière de politique intérieure qu’extérieure,
celles-ci sont à l’opposé de celles que prendrait un véritable démocrate.
Que ce soit sa rencontre avec Poutine ou le déploiement de
la garde nationale à Washington après celui de Californie – deux fiefs démocrates,
comme par hasard –, pour ne parler que des dernières en date, il agit en
véritable autocrate alors que son parti tente de truquer les prochaines
élections législatives pour ne pas les perdre comme cela est prévu par les
sondages et que la justice est de plus en plus phagocytée avec la nomination de
personnages d’extrême-droite dont la seule qualification est leur adoration de
Trump à qui ils vouent une fidélité que l’on voit souvent dans les pires
totalitarismes.
Le tout sur fond de corruption et d’enrichissement
personnel.
Bien sûr, tout cela n’est guère surprenant connaissant le
personnage – qui avait annoncé qu’il agirait en dictateur un fois élu – mais la
transformation de la première puissance mondiale, de démocratie en autocratie
est un bouleversement immense dont beaucoup ne prennent pas la mesure.
Ainsi, les réactions des gouvernants du monde libre, notamment
en Europe, ne sont pas à la hauteur de l’enjeu colossal qui se présente à
l’existence même de la démocratie américaine et peut-être mondiale dans les années
qui viennent.
Quant à l’opposition démocrate aux Etats-Unis, à part l’indignation,
peu ou pas grand-chose sauf des recours constants contre les décisions de l’extrémiste
populiste devant les tribunaux sachant qu’en dernier recours la Cour suprême à
la botte de Trump donnera raison à ce dernier.
Ici, le défi n’est pas de contredire un opposant mais contrecarrer
et bloquer les agissements d’un apprenti dictateur qui rêve de changer le
régime politique de son pays et d’être président à vie.
Ici désobéissance civile et résistance ne doivent pas de
vains mots pour tout défenseur des valeurs humanistes.
Ce qui est abasourdissant, c’est avec quelle facilité et
rapidité Trump et ses sbires peuvent détruire l’ordre démocratique et introduire
le chaos dans relations internationales.
Du vice-président qui insulte le dirigeant d’une démocratie,
Zelensky, dont le pays est attaqué par un des pires despotes de la planète au
secrétaire à la Défense qui relaie les appels d’un religieux illuminé qui
demande la suppression du droit de vote des femmes en passant par les
tentatives de l’Attorney general (ministre de la Justice) d’étouffer le
scandale du trafiquant sexuel Epstein où Trump est impliqué jusqu’au cou ou à
la chasse aux immigrés qui touchent même ceux qui sont légaux et des Américains
de nationalité menée par la secrétaire à la Sécurité intérieure (ministre de l’Intérieur),
tous ces fidèles d’entre les fidèles mettent en place un régime autocratique au
seul profit de Trump.
Sans parler bien sûr de Musk, ce personnage malsain d’extrême-droite
adepte du salut nazi, que Trump avait embauché pour faire imploser les services
publics afin de les rendre inefficaces, avec des résultats déjà catastrophiques
même si, depuis, l’«ami Elon» a été viré.
Et sans oublier le licenciement de la fonctionnaire qui a eu
le malheur de publier les dernier chiffres très mauvais de créations d’emploi
et de ne pas avoir eu le réflexe de les maquiller comme le font tous les gouvernements
autocratiques avec les statistiques qui ne leur conviennent pas.
Cerise sur le gâteau pour Trump, la fin de l’émission de
Stephen Colbert, le talk-show le plus populaire des Etats-Unis afin que
Paramount, propriétaire de CBS où officie l’humoriste et fervent adversaire de
l’extrémiste populiste, puisse obtenir l’autorisation de l’administration de
vendre une partie de son empire médiatique, ce qui passait par faire plaisir à celui-ci
– peu de temps auparavant, la société lui avait même donné 16 millions de
dollars afin d’éviter un procès où était en jeu la liberté d’information et
alors même que Trump n’avait aucune chance de le gagner…
Oui, la démocratie américaine craque de partout et ce n’est
qu’un début.