► Emmanuel Macron (Président de la République)
> [Droit à l’aide à
mourir] Le vote par l'Assemblée nationale
des textes sur le développement des soins palliatifs et l'aide à mourir est une
étape importante. Dans le respect des sensibilités, des doutes et espoirs, le
chemin de fraternité que je souhaitais s'ouvre peu à peu. Avec dignité et
humanité.
> Cela fait 600 jours que 58 otages sont toujours retenus par le Hamas. 600 jours de calvaire insoutenable pour eux et leurs proches. 600 jours, pas un sans penser à eux. La France se tient à leurs côtés, mobilisée, déterminée. Pour leur libération, pour un cessez-le-feu immédiat, pour la paix et la sécurité de tous. C’est notre priorité.
> Main dans la main avec l’Indonésie. Ce sont plus de 17 milliards d’euros d’accords signés aujourd’hui par les entreprises françaises qui bénéficieront à nos deux pays, à nos entreprises, à notre avenir commun.
> Avec l’Association des Nations du Sud-Est asiatique, nous partageons le même objectif : la paix et la prospérité pour nos peuples et nos régions. Merci Secrétaire général Kao Kim Hourn pour votre accueil et nos échanges constructifs.
> Visite d’État
exceptionnelle, à l’image de l’Indonésie ! Merci, Président Prabowo Subianto,
pour votre accueil si chaleureux. L’Indonésie et la France partagent une même
volonté d’indépendance. Par un partenariat de souveraineté, nous agissons
ensemble pour renforcer notre autonomie stratégique. Les projets sont très
concrets en matière de défense, mais aussi dans les secteurs des métaux
critiques, des énergies décarbonnées, des satellites, de l’agriculture, de la
culture ou encore des transports.
Nous portons aussi une certaine idée de l’ordre du monde, une vision des
équilibres dont nous avons besoin, du respect et de la souveraineté des
peuples. Nous sommes attachés au respect du droit international, sans double
standard. Une paix durable en Ukraine commence par un cessez-le-feu immédiat,
préalable à une négociation exigeante. Au Proche-Orient, faire avancer la cause
d’une paix juste et durable passe par une solution politique : celle
de deux États vivant côte à côte en paix. La France organisera prochainement
avec l'Arabie saoudite une conférence à New York pour faire avancer cette
perspective. Jakarta - Paris.
Nos capitales sont éloignées de 11 700 km, pourtant nous sommes si
proches, et à travers cette visite nous nous rapprochons encore !
► Gouvernement
[Nota: Ce gouvernement est
dirigé par un centriste, François Bayrou ; nous avons donc décidé de
reprendre les propos de tous les ministres puisqu’ils agissent sous l’autorité
d’un Président de la République et d’un Premier ministre centristes/centraux ;
néanmoins nous avons fait une distinction avec d’un côté les ministres
centristes-centraux et les autres puisqu’il s’agit d’un gouvernement de
coalition du fait que le Président de la République et le Premier ministre ne
disposent pas d’une majorité à l’Assemblée nationale]
● Ministres
centristes/centraux
François Bayrou (Premier ministre)
> [Loi agricole / Intervention à l’Assemblée] Puis-je vous rappeler [à
la Gauche] que la motion de rejet a été votée, non par le gouvernement, mais
par l’Assemblée nationale ? Vous savez très bien que l’Assemblée nationale
l’a votée pour parer la tentative de blocage destinée, grâce à la
multiplication d’amendements – des milliers –
à faire en sorte que ce texte
ne puisse être examiné. Vous connaissez bien les motions
de rejet puisqu’en décembre 2023, vous avez vous-même fait adopter une motion
de rejet afin que la loi immigration ne puisse être débattue.
Ma conviction personnelle, c’est
que la manière dont nous
organisons les choses n’est ni
durable ni responsable. Nous
devons trouver une façon d’organiser les dialogues et les débats pour que le
Parlement puisse pleinement jouer son rôle et ne soit pas entièrement bloqué
par tel ou tel groupe qui dépose des milliers d’amendements.
Je rappelle – mais
vous le savez très bien – qu’à raison de trois minutes par amendement, les trois mille cinq
cents amendements déposés représentaient quinze jours pleins de débats. Ces quinze jours de débats auraient empêché l’examen du
texte sur la simplification de la vie économique, du texte sur Mayotte et,
peut-être, du texte sur le statut des élus.
Avec une telle méthode, nos concitoyens voient blocage sur blocage et se
détournent de la manière dont vous débattez.
Je vous donne l’assurance que le gouvernement n’exerce aucune pression sur les
élus. Je ne l’ai jamais accepté et je ne l’accepterai jamais. La ministre de l’Agriculture,
n’a pas demandé de cibler tel ou tel ; elle a demandé aux agriculteurs
d’expliquer à leurs élus quel était le texte.
C’est la moindre des choses ! Vous le faites aussi, que je sache.
C’est ce que nous faisons tous ! Les élus sont les représentants du peuple
et il est normal que le peuple parle avec eux, sans pression. (…)
La situation doit nous permettre de trouver un jour des manières nouvelles
d’examiner les textes. (
> Hier, la Cour des comptes a déclaré que les dépenses
sociales étaient – je cite entre guillemets – « hors
de contrôle ». Si nous ne sommes pas
capables, tous, de prendre la situation comme elle est, d’essayer de construire
un projet qui puisse rassembler les sensibilités différentes autour d’une
réalité qui, elle aussi, nous rassemble, alors nous allons vers de très graves
déboires.
J’ai proposé que les organisations syndicales et les représentations des
entreprises se réunissent dans ce qu’on a appelé un conclave – le mot, en ce début d’année, a été à la mode.
Elles sont au travail. J’ai bon
espoir que le progrès qu’elles réalisent ensemble soit capable de présenter un chemin qui puisse
réunir très largement les sensibilités du pays, mais je sais que, la situation
étant ce qu’elle est, il n’existe aucun chemin de progrès qui ne tienne compte
de la réalité et ne choisisse au travers du temps un projet pluriannuel de
retour à l’équilibre des finances publiques, des finances de l’action publique
et des finances sociales du pays.
Si nous nous éloignons de cette nécessité, nous allons avoir de très graves
déboires et toute la société le paiera, avec toutes les entreprises, tous les
salariés et toutes les familles.
> Une attaque contre notre réseau électrique a été
conduite dans les Alpes-Maritimes. J’en ai suivi l’évolution heure par heure
avec Philippe Tabarot, le ministre des Transports. Elle a touché le Festival de
Cannes et a causé des troubles qui auraient pu être graves si l’on pense à la
circulation dans les tunnels ou à l’organisation des secours d’urgence. Vous
l’avez dit, un pylône de haute tension a été scié à la base et deux postes
électriques ont été incendiés. Les revendications sont également celles que
vous avez indiquées. Comme vous, je considère que de tels événements
constituent une mise en cause extrêmement grave de l’ordre public et visent à
impressionner, voire à terrifier alors que, dans deux semaines, le président de
la République organise dans la région un sommet mondial sur l’avenir des
océans.
Nous allons étendre la surveillance à tous les lieux critiques, en sachant que
la situation est risquée en raison de la connaissance que ces groupuscules
semblent avoir de l’organisation du réseau électrique. Il s’agit d’un travail
de surveillance et de sécurisation. Je ne doute pas qu’avec l’ensemble des
services de sécurité le préfet soit mobilisé sur le sujet. Il faut toutefois
rappeler que le risque zéro n’existe pas. Je ne veux pas prétendre devant vous
que le risque serait annihilé. Il est présent, et c’est notre devoir de le
prévenir.
> La situation des finances publiques du pays est
catastrophique. Nous sommes devant un mur, une falaise, que nous n'avons pas le
droit d'ignorer, devant des problèmes que nous n'avons pas le droit d'éluder. J'ai dit qu'avant le 14 juillet,
le Gouvernement proposerait un plan général de retour à l'équilibre des
finances publiques. Aucune des mesures qui le composeront n'est pour l'heure
arrêtée. À la question de savoir si la TVA sociale est écartée, je réponds que
pour l'heure, rien ne l'est.
Il faudra repenser totalement le financement de notre modèle social.
D'ailleurs, les partenaires sociaux réunis en conclave ont émis cette idée. Ils
s'en saisiront peut-être.
La première nécessité est de revaloriser le travail. Le gouvernement
d'Élisabeth Borne a baissé les charges sur le travail. Nous n'avons pas laissé les difficultés s'accumuler sans rien
faire !
Nous donnerons au pays, avant le 14 juillet, un plan global de retour à l'équilibre. C'est l'engagement du Gouvernement. Ne laissons pas s'accréditer des idées fausses, il y va de la qualité du débat public.
Elisabeth Borne (ministre d’Etat, ministre de l’Education
nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche)
> [Intervention à l’Assemblée] Tout d’abord, sur les rapports de
la Cour des comptes qui font des constats déjà partagés et avancent des
propositions dont la mise en œuvre est bien engagée.
Nous avons par exemple maintenu dans le budget 2025 4 000 postes
dont la suppression était prévue, si bien que le taux d’encadrement dans
l’enseignement primaire est historiquement haut, notamment au bénéfice des
territoires ruraux.
La réforme de la formation initiale de nos enseignants, qui portera ses fruits
dès la rentrée 2026, permettra d’avoir, devant les élèves, des professeurs
mieux préparés et mieux formés.
Quant à la politique d’éducation prioritaire, elle continuera tant que les
difficultés persisteront. Je souhaite mener une politique efficace, qui tire le
meilleur parti des moyens qui y sont consacrés. Je viens d’ailleurs de confier
une mission d’évaluation à l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de
la recherche, qui fera des propositions afin de faire évoluer la carte et les
dispositifs déployés.
Enfin, nous sommes pleinement mobilisés dans la lutte contre l’islamisme
radical.
Vous n’avez sans doute pas voté la loi du 24 août 2021 garantissant le
respect des principes de la République et des exigences minimales de la vie en
société, qui a, dans la continuité de la loi dite Gatel de 2018, conduit à
renforcer les contrôles sur les établissements privés hors contrat.
Le plan que j’ai annoncé mi-mars, prévoit également de passer de moins de dix
contrôles par an dans les établissements privés sous contrat, à 1 000
cette année – 500
sont d’ores et déjà en cours ou réalisés.
Nous nous préoccupons donc à la fois d’élever le niveau de nos élèves et d’assurer le respect des valeurs républicaines dans nos établissements,
comme dans les établissements
privés sous et hors contrat.
Nous sommes parfaitement mobilisés,
monsieur le député.
> [« Quelle politique de protection et
d'accompagnement des élèves dans les établissements scolaires, avec quelles
modalités de contrôle ? » / Intervention au Sénat] Je vous remercie d'avoir organisé ce débat
sur des sujets qui sont au cœur de mes priorités. Ces derniers mois, d'anciens
élèves ont témoigné de violences morales, sexuelles et physiques
inqualifiables. Je leur dis mon soutien et ma solidarité. Nous leur devons la
vérité et la justice. Les auteurs des actes doivent répondre de leurs actes.
L'État n'a pas été au rendez-vous : il doit l'être désormais.
Le plan « Brisons le silence, agissons ensemble » repose sur
trois piliers : recensement et remontée systématique des faits, recueil de
la parole des élèves, intensification des contrôles dans les établissements
privés sous contrat.
L'école doit être un lieu protégé où chacun se sent en sécurité. Il faut
protéger les élèves de toutes formes de violences.
Le plan interministériel de septembre 2023 contre le harcèlement
scolaire poursuit trois objectifs : 100 % prévention, 100 %
détection et 100 % solution. Les actions déployées seront la formation de
tous les personnels d'ici à 2027, une séance d'information et des
ressources numériques à destination des parents, la sensibilisation des
collégiens, des cours d'empathie dès l'école primaire, la mise en place de
questionnaires et le déploiement du 3018.
Nous devons aussi lutter contre la surexposition aux écrans - j'ai déjà
évoqué ce que nous avons prévu s'agissant des logiciels de vie scolaire.
Nous devons enfin lutter contre le port et l'usage d'armes blanches, car
des drames ont coûté la vie à des élèves ces derniers mois. Avec le ministre de
l'Intérieur, nous avons prévu que tout élève en possession d'une arme blanche
comparaîtra devant le conseil de discipline et nous avons adressé une
instruction conjointe pour des contrôles de sacs devant les établissements. En
un mois, plus de 1 000 contrôles ont été réalisés et une centaine
d'armes blanches ont été trouvées. Nous apporterons à chaque fois une réponse
ferme, allant jusqu'à un signalement au procureur de la République.
Je rappelle que 170 postes de CPE et 600 postes d'assistants
d'éducation ont été créés afin d'améliorer le climat scolaire.
Les enjeux de santé mentale doivent être pris à bras-le-corps. C'est le
sens des mesures annoncées avec Yannick Neuder, le 14 mai, lors des
assises de la santé scolaire. D'ici à la fin de l'année, chaque établissement
devra s'être doté d'un protocole de repérage et de prise en charge de la
souffrance psychique des élèves. Des personnels repères en santé mentale seront
formés pour orienter les élèves en souffrance vers une prise en charge adaptée.
L'institution doit aussi soutenir les professeurs menacés ou agressés.
Je vous redis mon soutien à l'octroi d'une protection fonctionnelle
systématique en cas de violence verbale ou physique. Je suis également
favorable à la possibilité d'un dépôt de plainte par l'administration en lieu
et place du personnel victime.
La violence n'aura jamais sa place à l'école. Soyez assurés de ma
détermination à tout mettre en œuvre pour qu'elle n'y trouve pas sa place.
> Le rapport de
la Cour des comptes traite d'un sujet absolument essentiel : le lieu où
nos élèves doivent acquérir les savoirs fondamentaux et les compétences qui les
accompagneront toute leur vie. Ce rapport fait état de constats
largement partagés, mais il est assez peu nuancé. Il ne souligne pas ce qui va
bien. Certaines recommandations formulées sont d'ores et déjà mises en œuvre
avec beaucoup de motivation par mon ministère, notamment la réforme du
recrutement et de la formation initiale des professeurs, qui sera mise en place
au printemps 2026.
Le rapport pointe l'importance du travail avec les collectivités
territoriales. Or les projections à trois ans réalisées dans les observatoires
des dynamiques rurales que j'avais lancés permettent aux collectivités
d'anticiper. Je sais que vous réalisez actuellement une mission d'information
sur le maillage territorial des établissements scolaires et je serai
naturellement très attentive à vos propositions.
> [Droit à l’aide à mourir / Intervention à l’Assemblée] En 2022, nous lancions avec le Président de la République une convention citoyenne sur la fin de vie. Aujourd’hui, l'Assemblée nationale a adopté les propositions de loi sur les soins palliatifs et la fin de vie. C’est un pas de plus vers la liberté de choisir dans le respect de la dignité de chacun.
Manuel Valls (ministre d’Etat, ministre des Outre-mer)
> [Agriculture outre-mer / Intervention à l’Assemblée] Pour les profanes, le Poséi c'est la PAC
adaptée à nos outre-mer. Les outre-mer ont besoin d'un accompagnement sur
mesure pour tenir compte de leur singularité. C'est un enjeu français et
européen.
Les outre-mer font face à de nombreux défis : éloignement,
étroitesse des marchés, évolution des modes de consommation et des pratiques
agricoles, changement climatique. Il faut absolument préserver une PAC forte et
un Poséi renforcé dans le cadre budgétaire européen. Le Gouvernement est
pleinement mobilisé à cette fin, et je travaille en liaison avec Annie Genevard
et Benjamin Haddad.
Au début du mois, le Parlement européen a adopté une résolution pour
prendre en compte les spécificités des RUP et développer le Poséi. Nous nous
sommes entretenus avec le commissaire Raffaele Fitto. Avec les parlementaires,
dont vous-même, qui êtes très impliqué, nous serons aux côtés des agriculteurs
ultramarins.
> > [Guyane / Intervention à l’Assemblée] Je connais
vos travaux sur l’avenir institutionnel des territoires d’outre-mer et je
connais évidemment, et surtout, votre engagement en faveur de la Guyane et de
son évolution institutionnelle. Vous l’avez rappelé, sous la présidence de
Gabriel Serville, le congrès des élus de Guyane a adopté plusieurs résolutions
en faveur d’un projet d’évolution statutaire. La dernière de ces résolutions,
examinée au printemps 2024, avait pour objet la représentation des peuples
autochtones de Guyane.
Il appartient donc au gouvernement – et croyez que c’est
une préoccupation du premier
ministre – d’y répondre. Je mesure bien sûr l’attente des élus. Nous
voulons y répondre avec transparence et méthode. C’est pourquoi j’entends
instaurer un dialogue selon des modalités concertées, respectueuses non
seulement des élus mais aussi de l’histoire et de la culture de la Guyane.
Il ne me revient pas d’engager d’emblée des discussions en vue d’une révision
constitutionnelle. En revanche, les élus de Guyane auront toute mon écoute,
dans la perspective d’approfondir – et sans tabou –
toutes les options avancées. Lors de mon prochain déplacement en Guyane, dans
un peu plus de quinze jours, la question institutionnelle sera évidemment au
programme de mes échanges avec les élus. Ces échanges se tiendront dans le
cadre défini en mars 2024 par le président de la République qui, je n’en doute
pas un instant, désirera lui aussi vous recevoir. Ce cadre prévoit que l’État
conserve ses compétences régaliennes, que la population soit consultée, et que
les forces politiques guyanaises soient unanimes – ce qui semble acquis.
Au-delà de la question institutionnelle, ce qui m’importe, c’est l’action
publique concrète déployée au bénéfice des Guyanais qui méritent l’attention et
le soutien de toute la nation. Je suis attaché à ce que les travaux intègrent
l’élaboration d’un projet stratégique pour la Guyane. Le cadre juridique doit
être mis au service d’un projet, point sur lequel nous pouvons nous mettre
d’accord, et, je le répète, avec, toujours, le souci de respecter la culture de
la Guyane.
Jean-Noël Barrot (ministre de l’Europe et des Affaires
étrangères)
> [Crise de Gaza / Intervention à l’Assemblée] La situation humanitaire
se dégrade considérablement à Gaza. Le cessez-le-feu a été brisé il y a deux
mois. Depuis, plus de 4 000 personnes ont perdu la vie, dont, sans
doute, une majorité de femmes et d’enfants – l’histoire
nous le dira –, et plus de
70 000 enfants attendent des
traitements d’urgence.
Certes, depuis quelques jours, l’aide
humanitaire parvient à nouveau à Gaza, de manière très insuffisante, vous l’avez
dit. À cet égard, le système mis sur pied par le gouvernement israélien pour distribuer l’aide ne présente pas les caractéristiques
qui en constituent les piliers : l’humanité, l’indépendance, la neutralité
et l’impartialité. C’est pourquoi nous nous y opposons. Les agences des Nations
unies, les travailleurs humanitaires doivent pouvoir accomplir leurs missions
sans délai à Gaza.
Vous avez évoqué la sécurité. Nous le disons avec force : les offensives
militaires sont une impasse. Elles hypothèquent la sécurité d’Israël. C’est la
France qui le dit, alors même qu’elle a fait la démonstration de son
attachement indéfectible à cette sécurité en mobilisant ses moyens militaires
lorsqu’Israël a été attaqué.
Nous le disons avec force au peuple israélien : il existe une autre
solution, une solution politique qui passe par le désarmement du Hamas, par la
réforme de l’Autorité palestinienne, par l’intégration d’un État de Palestine
et de l’État d’Israël dans une architecture régionale de sécurité et par les
reconnaissances, auxquelles nous travaillons, de cet État de Palestine, seule
voie vers la stabilité et la paix dans la région.
> [Ambitions chinoises dans le Pacifique / Intervention à
l’Assemblée] Le Gouvernement, sous l'autorité du Premier ministre, est
pleinement mobilisé sur cette question, dont nous échangeons régulièrement avec
le ministre d'Etat, ministre des Outre-mer.
Effectivement, la commission C24 des Nations unies s'est réunie il y a quelques
jours. La France a développé avec cette commission une relation de travail
approfondie sur la Nouvelle-Calédonie, dans le respect de l'accord de Nouméa,
qui prévoit une telle coopération. Mais nous ne reconnaissons pas la compétence
du C24 sur la Polynésie française, réinscrite comme territoire non autonome en
2013. Et par ailleurs, à cette occasion, une proposition - non consensuelle
parmi les participants - a été faite d'y accueillir le séminaire du C24 en
2027. Cette proposition faite sans aucune concertation préalable ne recueille
pas le soutien du Gouvernement.
A propos de l'influence de puissances régionales dans les îles du Pacifique, et
particulièrement les îles françaises. Quelle est la manière d'y répondre ?
C'est de projeter dans la région notre puissance.
Ça a été le cas pendant les cinq premiers mois de l'année, avec le déploiement
dans l'océan Pacifique du groupement aéronaval - le porte-avions Charles de
Gaulle, accompagné d'un sous-marin nucléaire d'attaque, de bâtiments de lutte
anti-sous-marine et de défense aérienne, d'un bâtiment ravitailleur et d'un
groupement aérien embarqué - qui, pendant cinq mois, a réalisé des exercices
avec des armées partenaires, en Indonésie d'abord, avec neuf autres pays, avec
l'armée de l'air australienne, un peu plus tard avec le Japon, exercice qui a
impliqué trois porte-avions et 100 aéronefs, et puis enfin, un exercice commun
avec la marine indienne, d'une ampleur inédite.
Et puis, il y a le déplacement actuel du Président de la République dans la
région - il était au Vietnam ces deux derniers jours, il est en ce moment même
en Indonésie et il ira à la fin de la semaine à Singapour - pour exprimer la
position de la France et sa vision de la relation de la France et de l'Europe
avec l'Indopacifique - puisque la France est une nation indopacifique -, qui
est fondée sur les objectifs de sécurité, la préservation du multilatéralisme,
le renforcement de nos relations économiques et la coopération avec les îles du
Pacifique sur le climat.
Ces îles, et en particulier le Forum des îles du Pacifique, seront conviées à
la troisième conférence des Nations unies sur l'océan, qui se tiendra la
semaine prochaine à Nice.
> [Crise de Gaza / Intervention au Sénat]
Vous avez décrit la situation tragique à Gaza avec des mots particulièrement
justes, et je veux vous en remercier.
Sur votre première question - ce que la France peut faire dans l'immédiat pour
mettre fin à la catastrophe -, nous avons soutenu l'initiative portée par les
Pays-Bas, appelant la Commission européenne à examiner le respect par le
gouvernement israélien de l'article 2 de l'accord d'association entre l'Union
européenne et Israël, article 2 qui prévoit que chacune des deux parties
respecte les droits de l'Homme.
Par ailleurs, comme nous l'avons fait par le passé, nous nous tenons prêts, au
niveau national comme au niveau européen, à prendre à nouveau des sanctions si
la colonisation extrémiste et violente qui a miné le territoire de la
Cisjordanie en fragilisant la perspective d'un Etat - puisqu'il faut la
contiguïté territoriale pour pouvoir assurer l'existence d'un Etat - devait se
poursuivre.
Et puis au-delà, parce que la France, comme d'autres pays dans le monde, comme
les sociétés civiles qui doivent jouer un rôle important dans ce processus de
paix, soutient l'idée selon laquelle il n'y a aucune solution militaire au
conflit israélo-palestinien et que seule une solution politique est susceptible
d'apporter la paix et la stabilité de la région.
Dans cette solution politique, chacun a une clé entre les mains. La France et
d'autres pays européens, pays occidentaux, ont la capacité de reconnaître
l'Etat de Palestine. L'Autorité palestinienne - je m'entretenais mardi matin
avec la ministre des Affaires étrangères - doit pouvoir avancer dans son chemin
de réforme, que nous soutenons, pour être en capacité, le moment venu,
d'exercer pleinement sa mission de gouvernement d'un Etat de Palestine. Les
pays arabes de la région, quant à eux, détiennent une clé, qui est celle de la
normalisation à terme avec l'Etat d'Israël et de l'acceptation d'une
architecture régionale de sécurité, comme nous l'avons avec l'OTAN, qui
permette l'insertion de l'Etat de Palestine à venir et l'insertion de l'Etat
d'Israël. Et enfin, l'une des clés, c'est aussi le désarmement définitif du
Hamas, son exclusion de toute forme de gouvernance à Gaza à l'avenir et l'exil,
sans doute, de son leadership politique.
C'est ainsi que nous préparons cette conférence pour les deux Etats, qui doit
amener chacune des parties prenantes à prendre sa part pour faire advenir cette
solution politique.
> [Crise de Gaza / Intervention à l’Assemblée]
Si tous les pays du monde, si tous les pays européens avaient adopté la même
position que la France depuis le début de cette crise tragique, nous n'en
serions pas là. Et ce n'est pas en vous substituant aux magistrats de la Cour
internationale de justice que vous servez la cause palestinienne.
Alors oui, les militants de la paix considèrent qu'il faut exercer une pression
sur le gouvernement israélien - qu'ils ne confondent pas avec le peuple
israélien. Et c'est la raison pour laquelle nous avons soutenu l'initiative
portée par les Pays-Bas de réexaminer l'accord d'association entre l'Union
européenne et Israël.
Mais les militants de la paix considèrent également qu'une des clés de la
résolution du conflit israélo-palestinien est entre les mains des Palestiniens.
J'ai rencontré mardi matin la ministre des Affaires étrangères de l'Autorité
palestinienne pour l'appeler une nouvelle fois à une réforme profonde de
l'Autorité palestinienne, de manière à ce qu'elle soit en capacité de gouverner
la Palestine une fois qu'un Etat aura été créé.
Les militants de la paix considèrent que l'une des clés est entre les mains des
pays arabes de la région, qui doivent soutenir l'Autorité palestinienne et qui
doivent accepter par avance de s'inscrire dans une architecture régionale de
sécurité aux côtés de l'Etat d'Israël et d'un Etat palestinien.
Et les militants de la paix n'hésitent pas à dénoncer le Hamas, qui porte une
immense responsabilité dans la situation aujourd'hui à Gaza, qui s'est rendu
responsable du pire massacre antisémite de notre histoire depuis la Shoah, qui
a emporté 48 de nos compatriotes, et que je vous invite, comme nous le faisons
constamment, à dénoncer et à condamner pour la responsabilité qu'il porte dans
le sort tragique des Palestiniens à Gaza.
> [Crise de Gaza / Intervention à l’Assemblée] Vous avez décrit la situation tragique à
Gaza, avec des mots justes. Que peut la France dans l'immédiat ? Nous
avons soutenu l'initiative des Pays-Bas appelant la Commission européenne à
examiner le respect par Israël de l'article 2 de l'accord d'association,
qui exige le respect des droits de l'homme.
De plus, nous nous tenons prêts à prendre des sanctions si la
colonisation violente devait se poursuivre en Cisjordanie. Au-delà, la France,
comme les sociétés civiles que vous avez citées, soutient qu'aucune solution
militaire n'apportera la paix et la stabilité dans cette région, mais seulement
une solution politique.
Chacun a une clé en main. La France a celle de la reconnaissance de
l'État de Palestine. L'autorité palestinienne doit avancer dans son chemin de
réorganisation. Les pays arabes détiennent la clé de la normalisation de leurs
relations avec Israël et l'acceptation d'une architecture régionale de
sécurité. Enfin, l'une des clés est le désarmement définitif du Hamas, qui doit
être exclu de toute gouvernance à Gaza.
> [Audition devant la Commission des affaires étrangères
de l'Assemblée nationale / 20 mai]
C'est pour moi un honneur et un plaisir de vous retrouver pour une autre étape
de notre dialogue diplomatico-parlementaire. Je salue à nouveau la contribution
décisive des membres de votre commission à la diplomatie française, qu'il
s'agisse de vos déplacements à venir au Liban, au Maroc et aux Etats-Unis ou
dans le cadre de la 3ème conférence des Nations unies sur l'océan. Le 13 mai,
jour de mon anniversaire, j'ai accueilli au Quai d'Orsay les présidents des
groupes d'amitié de l'Assemblée nationale en présence de la présidente de
celle-ci. C'était une première, et une manière de manifester l'intérêt et la
considération que nous portons à la diplomatie parlementaire, parfaitement
complémentaire du travail que nous menons.
- Le 2 avril, nous avons évoqué le bilan de l'action diplomatique conduite au
cours des cent premiers jours du gouvernement de François Bayrou. Je viens vous
rendre compte de ce qu'a été notre action depuis lors et je commencerai par le
sujet de la semaine : l'attractivité de notre pays. Sur la carte projetée à
l'écran figurent, pour l'ensemble de notre territoire, les lieux concernés par
les annonces d'implantation d'entreprises industrielles résultant de la
politique d'attractivité de la France, notamment des sommets Choose France,
dont la huitième édition s'est tenue hier à Versailles. J'insiste sur le rôle
de nos ambassadeurs et de nos agents en service dans les missions diplomatiques
et les postes consulaires. Ils ne passent pas leur temps dans des réceptions :
ils accompagnent sans relâche nos entreprises à l'export et identifient les
investisseurs internationaux pour les amener à prendre des décisions
d'investissement qui concernent notre pays. La carte montre qu'au cours des six
ou sept années écoulées, les bénéficiaires de la politique d'attractivité menée
ont été toutes les Françaises, tous les Français et toutes les régions de
France. Notre politique d'attractivité conduit à réindustrialiser ou à engager
la réindustrialisation de sites particulièrement éprouvés par des décennies de
désindustrialisation : ainsi de l'implantation à venir, sur le site de
l'ancienne centrale à charbon de Saint-Avold, d'une usine de recyclage de
textiles qui redynamisera le bassin d'emploi.
En Ukraine, nous continuons de jouer un rôle central dans la mobilisation des
Européens et la coordination avec les Américains pour bâtir une coalition pour
la paix et créer les conditions d'une paix solide et durable sur la base d'un
soutien à l'Ukraine et, lorsqu'un cessez-le-feu sera intervenu, de capacités de
réassurance et d'arrangements de sécurité. Nous avons réuni à Paris, le 17
avril dernier, les partenaires européens et américains et, pour la première
fois, l'Ukraine, les Européens et les Américains étaient assis à la même table.
Le 9 mai dernier, j'étais à Lviv, à l'Ouest de l'Ukraine, avec mes collègues
ministres des affaires étrangères : nous avons acté la création du tribunal
spécial qui jugera le crime d'agression russe contre l'Ukraine. Le 10 mai, j'ai
accompagné le Président de la République à Kiev. Avec nos partenaires
européens, nous avons réaffirmé notre priorité : un cessez-le-feu immédiat de
30 jours complet et inconditionnel. L'Ukraine l'a accepté et tous nos
partenaires soutiennent cette démarche ; seule la Russie refuse d'y adhérer.
Pas de cessez-le-feu côté russe, pas de discussions en direct à Istanbul : si,
donc, Vladimir Poutine ne veut pas la paix, nous devons l'y contraindre. Depuis
trois ans, les sanctions européennes ont eu pour effet d'infliger 400 milliards
d'euros de pertes à l'économie russe, l'équivalent de trois années d'effort de
guerre. La semaine dernière, le dix-septième paquet de sanctions européen a été
adopté par la Commission européenne. Il vise principalement la «flotte fantôme»
utilisée par la Russie pour contourner l'embargo sur son pétrole et financer
son économie de guerre. Nous sommes prêts à aller plus loin, en coordination
avec les Etats-Unis, où les sénateurs préparent un train de sanctions massif
visant les secteurs financier et pétrolier. Ils envisagent notamment
d'instaurer des droits de douane de 500 % sur les importations de pétrole russe
et sur toutes les importations en provenance de pays qui continueraient
d'importer du pétrole russe. La Commission européenne travaille à une
proposition un peu différente mais dissuasive. Ne demandons pas aux Etats-Unis
ce qu'ils peuvent faire pour nous ; demandons-nous ce que nous pouvons faire
pour l'Ukraine. Il nous appartient aussi de faire cesser à la guerre coloniale
que la Russie mène contre cet Etat.
À Gaza, nous appelons inlassablement à un cessez-le-feu afin qu'un avenir
politique se dessine pour les Palestiniens et les Israéliens. Gaza est une
plaie ouverte aux yeux du monde. Tout y manque : l'eau, la nourriture, les
soins, les médicaments. Selon le Fonds des Nations unies pour l'enfance
(UNICEF), plus de 70 000 enfants ont besoin d'un traitement d'urgence contre
une malnutrition aiguë. Dimanche dernier, après trois mois d'efforts
diplomatiques constants, le gouvernement israélien a annoncé le déblocage d'une
partie de l'aide humanitaire. Cette annonce est insuffisante. J'appelle à ce
que l'aide humanitaire parvenant à Gaza soit immédiate, massive et sans entrave
pour répondre à l'ampleur de la tragédie humaine en cours. Je condamne
fermement la volonté exprimée par certains membres du gouvernement israélien de
contraindre les populations, à force de destructions, à quitter définitivement
Gaza. Ce projet est inacceptable et il est contraire aux intérêts de sécurité
d'Israël. On ne construit pas la paix, la stabilité, la sécurité sur
l'injustice et la violence.
Mon homologue néerlandais a demandé à la Commission européenne de réexaminer
l'accord d'association entre l'Union européenne et Israël si son article 2, qui
impose le respect des droits de l'Homme, est violé. Nous avons appelé la
Commission européenne à se saisir du dossier et à apporter une réponse à la
hauteur de ce que vivent les Palestiniens. En attendant, il est urgent d'aller
vers un cessez-le-feu, que cessent les souffrances des populations civiles, que
soient libérés sans conditions tous les otages du Hamas - qui doit être désarmé
-, dont les dirigeants doivent quitter la bande de Gaza et qui doit être exclu
à l'avenir de toute forme d'administration de Gaza ou de la Palestine.
Dans ce contexte dramatique, nous préparons activement la conférence sur la
solution à deux Etats que la France co-présidera avec l'Arabie saoudite du 17
au 20 juin prochains à New York ; c'est la seule initiative diplomatique
porteuse d'espoir. Nous avons pour priorités la reconnaissance de l'Etat de
Palestine, la normalisation par des pays musulmans de leurs relations avec
Israël, les réformes de l'Autorité palestinienne, le désarmement du Hamas et
l'architecture régionale de sécurité. Je recevrai, vendredi en principe, les
représentants des pays arabes pour que nous puissions progresser.
J'ajoute que le ministère des affaires étrangères a réalisé deux opérations
d'évacuation de la bande de Gaza les 16 et 25 avril. Elles ont permis de mettre
à l'abri 174 personnes, ressortissants français et leurs ayants-droits,
personnels de l'Institut français de Gaza et leurs familles et personnalités
palestiniennes proches de notre pays.
Nous œuvrons à la stabilisation de la Syrie. Le 7 mai, le Président de la
République a été le premier chef d'Etat occidental qui ait reçu le président
intérimaire Ahmed al-Charaa. Cette visite a permis de sécuriser des engagements
importants dans la lutte contre le terrorisme de Daech - dont nous voulons
écarter le risque de résurgence en Syrie -, les négociations avec nos alliés
kurdes et la lutte contre l'impunité des crimes commis par le régime de Bachar
al-Assad comme par les auteurs des exactions contre les communautés alaouites
et druzes au cours des derniers mois. En contrepartie, nous avons annoncé la
levée des sanctions économiques visant la Syrie, adoptée aujourd'hui au Conseil
des affaires étrangères de l'Union européenne; le clan Assad et les groupes
terroristes demeurent évidemment sous sanctions.
Sur place, nous rouvrons notre dispositif diplomatique. Le chargé d'affaires
nommé pour renforcer l'action de la France auprès de toutes les composantes de
la société syrienne s'est rendu à Damas pour la première fois la semaine
dernière. Nous sommes lucides sur la situation politique en Syrie, où des
affrontements ont eu lieu ces dernières semaines. Un accord a été trouvé le 2
mai entre le gouvernement syrien et les notables druzes mais la situation reste
fragile. Comme il n'y a pas de paix possible sans justice, nous avons demandé
aux autorités syriennes de traduire devant les tribunaux les auteurs des
exactions et, à mon initiative, nous avons fait adopter des sanctions
européennes visant les responsables des massacres perpétrés en mars contre la
population alaouite, comme je m'y étais engagé publiquement.
Le dossier nucléaire iranien engage la sécurité du territoire national. Nous
encourageons le dialogue ouvert par les Etats-Unis avec l'Iran et souhaitons
qu'il aboutisse mais nous sommes vigilants. Si, dans quelques semaines, lorsque
l'accord sur le nucléaire iranien expirera, nos intérêts de sécurité n'étaient
pas garantis, nous appliquerions à nouveau les sanctions que nous avions décidé
de lever lors de la signature de cet accord, il y a dix ans.
Nous sommes mobilisés sans relâche pour obtenir la libération des otages Cécile
Kohler et Jacques Paris, couple de professeurs emprisonné arbitrairement depuis
trois ans en Iran et détenu dans des conditions assimilables à de la torture.
Je remercie l'Assemblée nationale de leur avoir rendu hommage. Comme je vous
l'avais annoncé, nous avons fait adopter le 14 avril dernier des sanctions
européennes contre les responsables des services pénitentiaires et judiciaires
iraniens qui mettent en œuvre cette politique d'otages d'Etat. Le 16 mai, comme
je m'y étais également engagé devant vous, nous avons déposé plainte devant la
Cour internationale de justice pour violation du droit international par les
autorités iraniennes, qui refusent à nos ressortissants la protection
consulaire à laquelle ils ont droit. Ne leur ont été permises que quatre
visites consulaires en trois ans, dans des conditions extrêmement restrictives.
Les services du ministère continuent d'accompagner étroitement les familles et
les proches de Cécile Kohler et de Jacques Paris dans cette épreuve
douloureuse.
Au Soudan, la guerre entre l'armée et la milice paramilitaire des Forces de
soutien rapide continue de plonger le pays dans la crise humanitaire la plus
grave que connaît le monde ; 12 millions de personnes sont déplacées et 30
millions sont au bord de la famine. Pour marquer les deux ans de ce conflit,
nous avons organisé le 15 avril dernier, à Londres, avec le Royaume-Uni,
l'Allemagne, l'Union européenne et l'Union africaine la deuxième Conférence
humanitaire pour le Soudan que j'ai co-présidée. La première s'était tenue à
Paris. Vingt-deux Etats et organisations internationales et régionales ont
participé à cette rencontre qui a permis de lever près d'un milliard d'euros
d'aide supplémentaire pour soutenir la population soudanaise. Nous continuerons
de nous mobiliser pour éviter de devoir marquer le troisième anniversaire de ce
conflit.
En Europe, nous avons fait redémarrer au quart de tour le moteur
franco-allemand. Le nouveau chancelier, Friedrich Merz, est venu à Paris
rencontrer le Président de la République le 7 mai, dès le lendemain de son
élection. J'ai rencontré mon homologue allemand le même jour et nous nous
sommes rendus ensemble à Varsovie, puis à Lviv le 9 mai, pour rappeler notre
détermination à soutenir l'Ukraine. Face à la menace russe et compte tenu de la
posture de l'administration américaine, nous sommes décidés à rebâtir un couple
franco-allemand fort, capable de redonner une impulsion solide à l'Europe. La
compétitivité sera au cœur de notre action. Nous agirons pour renforcer nos
convergences en matières économique, fiscale, sociale, de sécurité et
d'immigration.
Le 9 mai, nous avons aussi célébré le 75ème anniversaire de la déclaration de
Robert Schuman, point de départ de la construction européenne et, le même jour,
signé le traité pour une coopération et une amitié renforcées avec la Pologne
dit «traité de Nancy». Je salue l'engagement des agents de mon ministère qui
ont rendu ce succès diplomatique possible au terme de négociations très dures.
Ce traité touche à de très nombreux domaines : énergie, mobilité étudiante,
industrie et coopération de défense. Il comporte notamment une clause de
solidarité mutuelle en cas d'agression. C'est le premier accord d'une telle
ampleur signé par la France avec un pays qui ne lui est pas limitrophe.
Je me rendrai la semaine prochaine en Arménie pour poursuivre nos initiatives
en faveur d'une paix respectueuse de l'intégrité territoriale et de la
souveraineté des deux Etats concernés. J'invite les membres du groupe d'amitié
qui le souhaitent à se joindre à ce déplacement. Lors de ma dernière audition,
je vous avais indiqué combien nous étions mobilisés en faveur de la signature
rapide du traité de paix entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan ; cette mobilisation
ne faiblit pas et le Président de la République s'est entretenu avec le premier
ministre arménien vendredi dernier à Tirana. Les deux pays se sont mis d'accord
sur les termes d'un traité de paix mais les travaux se poursuivent sur la
délimitation de la frontière. La France a exprimé avec l'Union européenne et
les Etats-Unis le souhait de voir le traité signé et ratifié dans les meilleurs
délais. L'Arménie accueillera d'autre part à Goris, les 2 et 3 juin, les
Assises de la coopération décentralisée franco-arménienne. Je souligne
l'importance de l'implication des élus au service de notre action diplomatique.
Les collectivités territoriales, par le biais de la coopération décentralisée
et de leur action internationale, sont le premier partenaire du ministère des
affaires étrangères.
La Communauté politique européenne a tenu son sixième sommet à Tirana le 16 mai
dernier. Quarante-sept dirigeants européens ont répondu à l'appel, dont
Volodymyr Zelensky, et des échanges importants ont eu lieu sur la sécurité
européenne et la lutte contre les ingérences étrangères. La Communauté, lancée
en 2022 pendant la présidence française de l'Union européenne, a démontré sa
pertinence ; elle illustre la force créative de la diplomatie française.
Du 2 au 13 juin prochains, nous accueillerons à Nice la 3ème Conférence des
Nations unies sur l'océan. L'océan est l'affaire de tous. Il produit la moitié
de l'oxygène que nous respirons : c'est notre plus grand puits de carbone - il
absorbe 30 % de nos émissions de CO2 - et un réservoir de biodiversité, un
quart des espèces y ayant leur habitat. Pourtant, l'océan reste méconnu, ne
dispose ni d'une gouvernance globale ni des financements nécessaires à sa
préservation, et il est en danger. Nous souhaitons que la 3ème Conférence
marque pour l'océan un tournant équivalent à ce que fut l'accord de Paris pour
le climat il y a dix ans. Vous êtes toutes et tous invités à participer, le 8
juin, au Parlement de la mer qui rassemblera des parlementaires du monde entier.
Je remercie les députés Eléonore Caroit et Hervé Berville qui se sont fortement
mobilisés pour donner le maximum d'impact à ce très important sommet.
Je reviens sur les deux chantiers de transformation du ministère dont j'avais
fait état devant vous le 2 avril.
Le premier vise à mesurer l'impact de notre action sur la vie quotidienne des
Françaises et des Français. Nous avons lancé un travail interne permettant non
seulement de faire valoir tout ce que le ministère apporte à nos compatriotes
établis à l'étranger - je parle, ce disant, du service public sans doute le
mieux géré de France, qu'il s'agisse de la délivrance des actes, de l'accès à
l'enseignement ou de l'organisation des votes, qu'ils peuvent réaliser par
Internet - mais aussi de démontrer précisément l'impact de l'action
diplomatique de la France sur les préoccupations de nos concitoyens. Je vous
parlais tout à l'heure de l'importance de la politique d'attractivité pour
l'emploi mais il n'y a pas que cela : les agents du ministère à Paris et dans
les postes diplomatiques sont pleinement mobilisés dans la lutte contre
l'immigration irrégulière, le narcotrafic et le terrorisme. Le groupe de
travail que nous avons constitué avec des volontaires issus de toutes les
directions du ministère nous permettra de le faire apparaître. J'en dirai un
mot demain à la commission des finances de votre Assemblée, qui m'auditionnera
sur le bilan de l'année 2024 dans le cadre du Printemps de l'évaluation.
Je vous avais aussi dit notre intention de monter le son, afin que la voix de
la France soit entendue pour ce qu'elle est et pour ce qu'elle dit dans un
monde structuré par des réseaux sociaux qui déforment et fragmentent l'espace
public. Cela vaut pour les messages que porte la France. Cela vaut aussi pour riposter
lorsque la France ou son image sont prises pour cibles par des acteurs
étrangers qui veulent lui causer du tort.
Pour mieux faire comprendre l'action de la France à l'étranger, nous avons
engagé une démarche auprès des diasporas, notamment africaines, en France. Le
Forum Ancrages, que nous avons organisé à Marseille il y a quelques semaines,
visait à mettre en valeur les créateurs et les entrepreneurs issus des
diasporas qui forment des ponts entre la France et les pays africains et
montrent par leurs activités et les programmes dont ils sont les bénéficiaires
ou les lauréats l'approche transformée de la France vis-à-vis des pays
d'Afrique. Cette approche partenariale qui respecte la souveraineté des pays
africains tend à des coopérations mutuellement bénéfiques. J'ai aussi engagé le
dialogue avec les principales figures des grandes diasporas africaines en
France. Je poursuivrai ce travail.
S'agissant de la riposte, je signale que, pour la première fois, nous avons
officiellement attribué au service de renseignement militaire russe des
cyberattaques sur le mode APT28 ayant pris pour cibles l'organisation des Jeux
olympiques et paralympiques de Paris 2024 et la campagne présidentielle de
2017, le dénonçant donc publiquement comme nous avions dénoncé l'origine russe
d'une campagne de désinformation, par le mode opératoire informationnel
Storm-1516, visant des élections un peu partout en Europe - y compris, en
France, les élections européennes et législatives de 2024. Vous aurez aussi
constaté que nous avons riposté avec plus de vigueur que par le passé à deux
opérations récentes. L'une, dite "du mouchoir", tendait à faire
passer un mouchoir en papier pour un pochon de cocaïne dans le train emmenant
les dirigeants européens jusqu'à Kiev. Plus récemment, nous avons été la cible
d'allégations infondées sur une supposée ingérence de la France dans le
processus électoral en Roumanie alors que, chacun s'en souvient, si les
élections ont eu lieu dimanche dernier dans ce pays c'est parce que la première
tentative a dû être annulée après qu'il eut été établi que les règles de
financement de la campagne électorale avaient été dévoyées avec l'aide du
réseau TikTok pour favoriser l'émergence d'un des deux candidats. Nous avons
très vigoureusement réagi aux allégations infondées dont la France était la
cible ce week-end, et vous pouvez vous attendre à ce que, dans les semaines et
les mois qui viennent, nous montions également le son en matière de riposte.
- Il est vrai que l'absence de Vladimir Poutine à Istanbul n'était pas un
détail mais un message. Initialement, nous considérions qu'un cessez-le-feu ne
suffisait pas car nous voulions une paix durable mais Donald Trump, jugeant que
l'on ne peut pas négocier sous les bombes, a beaucoup insisté en ce sens. Il
avait raison, puisque les discussions engagées il y a trois ans, à Istanbul
déjà, avaient été interrompues par le massacre de Boutcha. Cela signifie que
lorsqu'on se bat pour un cessez-le-feu et que l'on essaye de structurer
l'architecture de sécurité d'une région comme celle-là, on a assez peu de
chances d'y parvenir. Nous avons désormais intérêt à bloquer la continuation de
la guerre coloniale de Vladimir Poutine par la menace de sanctions suffisamment
dissuasives pour produire un effet utile : le cessez-le-feu.
Je parle presque un jour sur deux au téléphone au sénateur américain Lindsey
Graham, qui est à l'origine de la proposition de loi tendant à taxer à 500 %
les importations en provenance de pays qui continuent d'acheter du pétrole
russe. La base de réflexion de la Commission européenne pour le nouveau paquet
de sanctions dissuasives n'est pas tout à fait la même mais nos échanges avec
les sénateurs américains nous ont permis de faire accélérer ce travail, la
Commission n'ayant pas l'intention, avant que nous fassions monter la pression,
de remettre l'ouvrage sur le métier avant l'été. Nous avons donc obtenu qu'elle
se retrousse les manches et c'est une bonne chose. Je veux une nouvelle fois
mettre en valeur le travail des agents du ministère : pour le 17ème paquet de
sanctions que nous avons adopté et qui n'est pas de nature à interrompre la
progression de Poutine, le Quai d'Orsay a fourni à lui seul près de la moitié
des désignations, alors que l'Union européenne compte vingt-sept membres.
J'appelle tous les Européens à trouver des moyens de contribuer à cet effort de
sanctions.
Avec l'Algérie, nous avons appliqué les ripostes que j'avais annoncées :
immédiates, fermes et proportionnées. La vérité, c'est que, par leurs
décisions, les autorités algériennes ont dénoncé de facto l'accord de 2013
régissant la délivrance et l'utilisation des passeports diplomatiques entre nos
deux pays. Ce faisant, elles creusent encore le fossé qu'elles ont contribué à
établir entre nos deux gouvernements. C'est donc à elles qu'il faut demander
comment rétablir le dialogue ; pour notre part, nous ne voyons, à ce stade,
aucun espace de dialogue possible. Nous sommes très préoccupés par l'état de
santé de Boualem Sansal et très attentifs à sa situation. Le procès en appel a
encore été repoussé et je le déplore. Je souhaite que le jugement intervienne
au plus vite et qu'ensuite les autorités algériennes, comme nous les y avons
appelées, fassent un geste d'humanité à son égard.
- Nos diplomates ont des raisons d'être fiers de l'action qu'ils mènent. Je
vais néanmoins vous répondre point par point.
Au Sahel, je vous le disais, notre point d'entrée, même si des difficultés -
que nous devons régler - subsistent sur la question des visas des étudiants,
est la société civile. C'est pourquoi la première des diasporas que j'ai
rencontrées est la diaspora malienne : l'une des principales en France, dont
certains représentants sont opposés à la junte au pouvoir dans leur pays, ont
envie d'un autre avenir pour le Mali et sont attachés à la France comme ils le
sont à leur pays d'origine. C'est avec eux que nous voulons rebâtir une
relation. C'est la raison pour laquelle, au Sahel et ailleurs, les liens
établis par la diplomatie parlementaire dans les pays où vous vous déployez
sont si précieux.
Il n'y a aucune raison que la décision prise par la France au sujet du Sahara
occidental ait un impact sur notre relation avec l'Algérie. Beaucoup de pays
européens ont pris cette décision avant nous sans que l'Algérie en tire des
conséquences pour sa relation avec eux. La France a le droit souverain
d'entretenir les relations qu'elle entend, différentes les unes des autres,
avec chacun des pays de son voisinage immédiat.
Je trouve aussi dure l'appréciation que vous portez sur l'annonce que la France
est déterminée à reconnaître l'Etat de Palestine à brève échéance. Cette
annonce a soulevé une espérance et de nombreux pays européens attendent que
nous fassions ce mouvement pour le faire avec nous. On ne peut s'empêcher de
vouloir que cette décision ne reste pas que symbolique, même si les symboles
comptent, surtout quand la perspective d'une solution politique est fragilisée
comme elle l'est aujourd'hui. Imaginons que l'on parvienne ainsi au désarmement
du Hamas et à une réforme en profondeur de l'Autorité palestinienne la mettant
en mesure, le moment venu, d'administrer l'Etat de Palestine ? Il est difficile
de ne pas vouloir le tenter.
On peut toujours faire mieux, certes, mais l'accord de Paris sur le climat est
l'un des grands succès de ces dernières décennies de la diplomatie française.
Nous démontrerons, lorsque nous célébrerons son dixième anniversaire cette
année, qu'il a eu un impact mesurable sur la baisse des émissions de gaz à
effet de serre. L'accueil de la 3ème Conférence des Nations unies sur l'océan,
auquel nous consacrons tant d'énergie et de ressources, est une nouvelle
démonstration de la volonté de la France de ne rien lâcher à ce sujet, comme
sur les autres.
- Vous avez raison, Vladimir Poutine a pour stratégie la conquête par les armes
sur le champ de bataille en Ukraine mais aussi l'influence dans les urnes lors
des derniers scrutins européens. Il est heureux que les dégâts causés lors du
scrutin de la fin 2024 aient pu être réparés, mais le mal est fait. Se pose
bien sûr la question de savoir si la Roumanie, située sur le flanc oriental de
l'Union européenne et en prise directe avec une Russie désormais armée
jusqu'aux dents, a intérêt ou non à se donner un dirigeant nationaliste et
pro-russe. Mais, de manière plus grave et plus profonde, l'annulation de
l'élection présidentielle a indiqué qu'à moins que nous nous réveillions, nous
prenions le risque de voir démontré que les élections peuvent être facilement manipulées
- et si le sentiment s'installe qu'il en est ainsi, s'installe aussi le
sentiment qu'elles sont peut-être insincères et que ce n'est peut-être pas la
meilleure manière de prendre les décisions.
Nous devons donc prendre cette question très au sérieux, d'abord en détectant
ces manœuvres. Cela suppose de disposer de moyens d'expertise particuliers et
la France a pris un peu d'avance avec Viginum. Cela suppose aussi de préserver
et de défendre une presse libre, indépendante, pluraliste, l'un des leviers
principaux pour détecter ces manœuvres. Il faut ensuite leur faire échec. J'ai
parlé de la riposte mais les plateformes de réseaux sociaux doivent prendre
leurs responsabilités. Elles sont codifiées par le règlement sur les services
numériques démocratiquement adopté au niveau européen et que la Commission
européenne est chargée d'appliquer. Ce règlement établit que les plateformes de
réseaux sociaux doivent veiller à ce que leurs services ne perturbent pas le
débat public et l'exercice démocratique. Des enquêtes ont été diligentées ; il
est temps qu'elles soient conclues et que des sanctions soient prononcées. Il y
a enfin une question d'immunité collective : nul d'entre nous ne doit se
laisser contaminer, afin de ne pas contaminer les autres. Cela suppose le
développement de l'esprit critique.
La plainte que nous avons déposée contre l'Iran devant la Cour internationale
de justice va être plaidée et si, comme je l'imagine, l'Iran est estimé
coupable par les juges, il sera condamné. Cette plainte est aussi un levier de
pression. Si nous avons pu obtenir une très courte visite consulaire cette
année, c'est grâce à la pression que nous avons collectivement fait monter sur
l'Iran, et je vous invite à continuer de faire pression sur ce pays au sujet de
nos deux otages.
- Je trouve dans cet accord une satisfaction presque personnelle, parce qu'il y
a un an exactement, j'étais à Boulogne-sur-Mer avec des pêcheurs très inquiets
sur le sort qui leur serait réservé. Alors qu'approchait la renégociation des
accords du Brexit, l'accès aux eaux britanniques risquait de leur être interdit
en 2026. Grâce à l'accord trouvé par la Commission européenne - et la France a
tapé du poing sur la table ou, en tout cas, a rechigné à laisser filer un
accord sans avoir de garanties -, cet accès sera préservé jusqu'en 2038.
S'agissant des programmes militaires, nous défendons la même position que vous
: nous travaillerons plus étroitement avec le Royaume-Uni tout en conservant
notre objectif, celui de la souveraineté européenne, en matière de défense
comme en d'autres domaines. Et si le rapprochement est manifeste, le
Royaume-Uni ne peut pas être traité tout à fait comme un Etat membre de l'Union
européenne, ni même comme les membres de l'Espace économique européen, qui
contribuent financièrement à la politique de cohésion.
- Le Président de la République, en déplacement dans la région la semaine
prochaine, abordera la question du Myanmar avec tous ses interlocuteurs. Avec
plus de 11 millions d'euros d'aide humanitaire en 2024 et son soutien aux
organisations de la société civile et de l'opposition démocratique, la France
est au premier rang de l'aide donnée par l'Union européenne, qui a été de 46
millions d'euros en 2024. Pour porter assistance aux populations touchées par
le séisme du 28 mars dernier, la France a apporté une aide exceptionnelle de 2
millions d'euros, dont 1 million est allé aux ONG françaises sur place, 0,5
million au Programme alimentaire mondial et 0,5 million au Comité international
de la Croix-Rouge. Nous continuerons de soutenir la population birmane au Myanmar
et les personnes déplacées dans les pays voisins. Nous poursuivrons aussi nos
pressions sur le régime issu du coup d'Etat, par le biais de la politique
européenne de sanctions à l'encontre des entreprises et des individus birmans
impliqués dans la fourniture de matériel militaire ; le neuvième train de
sanctions a été adopté en octobre 2024. La France appelle également à l'arrêt
durable des violences et à l'ouverture d'un dialogue incluant toutes les
parties, conformément au consensus en cinq points de l'Association des nations
de l'Asie du Sud-Est (ASEAN) et à la résolution 2669 du Conseil de sécurité des
Nations unies.
Nous sommes très opposés aux modalités de la délivrance de l'aide humanitaire à
Gaza présentées par le gouvernement israélien et que vous avez décrites. Elles
contreviennent au droit international humanitaire en prévoyant le criblage des
organisations qui peuvent délivrer l'aide ainsi que le criblage des
bénéficiaires. On ne peut méconnaître le détournement par le Hamas d'une partie
de l'aide humanitaire, qui a contribué à entraver la tâche des travailleurs
humanitaires sur place, mais la solution proposée créerait un précédent
dangereux et nous ne pouvons que nous y opposer.
- Avant de vous répondre, je vous indique qu'une dépêche tombée à l'instant
nous informe que le Royaume-Uni dénonce son accord de libre-échange avec
Israël. L'accord d'association entre l'Union européenne et Israël suppose le
respect de son article 2 stipulant que les relations entre les parties sont
fondées sur le respect des droits de l'Homme. Les Pays-Bas ont proposé - et
nous soutenons cette proposition, je vous l'ai dit - que la Commission
européenne examine le respect de l'article 2 par le gouvernement israélien. La
discussion doit avoir lieu aujourd'hui à Bruxelles mais j'ai préféré être avec
vous plutôt qu'avec mes collègues au Conseil européen.
S'il est avéré que le gouvernement israélien ne respecte pas l'article 2 de cet
accord, plusieurs possibilités sont envisageables. La première est, comme
l'avait proposé Josep Borrell, le précédent Haut représentant de l'Union
européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, de
convoquer les Européens et les Israéliens pour que l'on en discute. Cela a été
fait mais Israël n'a pas répondu à cette sollicitation. La deuxième
possibilité, c'est la suspension de l'accord d'association dans son entier :
elle requiert l'unanimité, hors d'atteinte aujourd'hui. La troisième
possibilité est la suspension du volet commercial de l'accord : elle suppose
une majorité qualifiée qui, selon nos estimations actuelles, n'est pas tout à
fait à portée. C'est pourquoi nous avons, en première intention, soutenu
l'effort des Pays-Bas. Mais lorsque nous avons pris des initiatives au niveau
européen, nous avons privilégié celles qui avaient toutes les chances d'aboutir
rapidement. Ce fut le cas pour les sanctions contre les colons extrémistes et
violents et les entités favorisant ou participant d'une manière ou d'une autre
à la colonisation. C'est aussi ce qui explique nos efforts en perspective de la
conférence internationale, en juin, visant à la reconnaissance de l'Etat de
Palestine et à faire progresser la solution à deux Etats.
Pour le Salon du Bourget, nous prendrons une décision en temps et en heure.
Vous savez quelle a été la politique de la France pour les salons Eurosatory et
Euronaval et ce qu'est sa position au sujet des exportations d'armes à
destination d'Israël.
J'ai épuisé mon temps de parole, monsieur le président, mais
je reparlerai très volontiers du Sahara occidental.
- Je comprends que le profil du président de transition de la Syrie ne vous
réjouisse guère mais, si vous étiez à ma place, votre principale préoccupation
serait précisément de contenir le risque de résurgence de Daech en Syrie en
profitant de la période intérimaire. Daech qui n'a qu'une chose en tête : aller
ouvrir les prisons qui, dans le Nord-Est syrien, contiennent plusieurs dizaines
de milliers de combattants terroristes, dont des combattants terroristes
étrangers et leurs familles. C'est cela notre priorité absolue parce que, comme
vous l'avez dit, c'est en Syrie qu'ont été fomentés les attentats du 13
novembre 2015, au Bataclan et ailleurs.
C'est aussi de Syrie que, fuyant les persécutions et les crimes du régime de
Bachar al-Assad, sont partis des millions de réfugiés prenant le risque de
perdre leur vie en Méditerranée pour chercher l'asile en Europe.
Donc, oui, quelques semaines après la chute de Bachar al-Assad, je me suis
rendu en Syrie avec ma collègue allemande pour dire aux autorités quelles
étaient nos attentes et dans quelles conditions nous pouvions espérer coopérer
avec elles. Nous leur avons demandé de laisser l'Organisation pour
l'interdiction des armes chimiques entrer en Syrie pour recenser et détruire
les stocks d'armes ; c'est chose faite. Nous leur avons demandé d'engager un
dialogue avec les Kurdes, avec lesquels nous avons des liens historiques, parce
qu'ils sont nos alliés dans la lutte contre Daech et parce qu'ils gardent les
prisons dans lesquelles sont détenus les combattants terroristes de Daech ; ce
dialogue a commencé. Nous leur avons demandé de constituer un gouvernement un
peu plus représentatif ; la pleine représentativité de toutes les composantes
syriennes n'est pas encore atteinte mais, de fait, le nouveau gouvernement est
plus représentatif que le précédent. Nous ne faisons pas de chèque en blanc :
nous jugeons sur les actes et nous veillons à tout instant à ce que nos
attentes soient respectées.
Il en est deux en particulier, que nous avons formulées lors de la visite du
président intérimaire. La première, c'est l'engagement ferme de lutter contre
Daech. Il n'a guère eu d'hésitation à ce sujet, Daech voulant faire tomber le
président et même, à mon avis, l'exécuter à la première occasion. Mais parce
que nous voulions un engagement beaucoup plus ferme, publiquement assumé, nous
avons demandé que le gouvernement syrien écrive au Conseil de sécurité des
Nations unies pour réclamer le soutien explicite de la coalition internationale
contre Daech, à laquelle nous appartenons. Nous avons aussi demandé que soient
traduits en justice tous les responsables - quels qu'ils soient et quelle que
soit leur proximité avec le gouvernement actuel - des exactions commises à
l'encontre des communautés alaouites et druzes. Notre dialogue est donc très
exigeant.
Je note que vous n'avez pas mentionné la décision prise par le président Trump
de rencontrer Ahmed al-Charaa, parce qu'il en vient à la même conclusion que
nous : il voit que, dans l'intérêt de la sécurité des Etats-Unis, pour éviter
la résurgence de Daech et sa prolifération partout au Moyen-Orient, il est
obligé d'être réaliste et donc de travailler avec cette autorité de transition.
- Il a eu le même tarif, si je puis dire, que n'importe quel dirigeant en
visite dans notre pays. La question qui se pose à nous, lorsque nous nous
intéressons à la sécurité des Français, c'est d'éviter le risque, que vous ne
devez pas sous-estimer, d'une très forte résurgence de Daech en Syrie. La
France a toujours été du côté des Syriennes et des Syriens. Nous avons toujours
dénoncé la répression sanglante du régime de Bachar al-Assad ; nous avons
permis l'exfiltration de César, le lanceur d'alerte syrien qui par ses milliers
de photos des corps torturés par les bourreaux du régime de Bachar al-Assad a
éveillé la conscience internationale, permis aux Etats-Unis et aux Européens de
prendre des sanctions contre ce régime qui a assassiné près de 500 000 personnes,
utilisé des armes chimiques contre son propre peuple et développé la torture à
l'échelle industrielle. Lorsque, par une coalition de mouvements aux origines
troubles - c'est vrai -, le régime est tombé, les Syriens que nous avions
soutenus pendant dix ans nous ont dit : soyez exigeants avec eux mais
donnez-leur une chance de rétablir le pays.
La perception est celle-là, y compris chez ceux qui ont été les victimes du
terrorisme en Syrie : il faut encourager les autorités de transition, celles
qui ont été reçues à Paris, à œuvrer sur la bonne voie : celle qui ne laisse
aucune place au terrorisme de Daech et au terrorisme islamiste tout court, une
voie qui permet à toutes les composantes de la société syrienne de vivre dans
un pays unifié, où chacun a le droit d'accéder à la pleine citoyenneté, un pays
qui redevient un foyer de stabilité dans la région en coopérant de manière
pacifique avec ses voisins, le Liban, Israël et l'Irak. S'il n'en va pas ainsi,
nous risquons de voir se perpétuer ce que le régime de Bachar al-Assad a fait de
la Syrie : un pays réduit en quelque sorte à un entrepôt logistique pour
l'activité de tous les proxies de l'Iran que sont les Houthis, le Hamas et le
Hezbollah, un foyer d'instabilité d'où partent les projections d'attaques
terroristes et d'immenses vagues migratoires qui déferlent vers l'Europe et où
prolifèrent les armes chimiques.
- Le désarmement d'un groupe armé, et même d'un groupe terroriste, a fonctionné
dans certaines situations historiques desquelles on peut s'inspirer pour
construire un processus ordonné de désarmement, démobilisation et
réintégration. C'est évidemment d'autant plus difficile que la guerre fait rage
à Gaza, puisqu'à chaque fois que l'armée israélienne lance une offensive, elle
donne en quelque sorte un prétexte au Hamas pour ne pas désarmer. La situation
n'est pas spécifique à Gaza et c'est pourquoi nous appelons Israël à ne pas
donner de prétexte au Hezbollah au Liban pour se reconstituer ou perturber un
processus désormais sur les rails. Certains pays se sont manifestés après nos
déclarations récentes ; ils veulent non seulement reconnaître l'Etat de Palestine
mais aussi contribuer à notre démarche qui, vous l'avez compris, est de faire
levier, par la puissance symbolique d'une telle décision, pour obtenir des
contreparties. L'Egypte et le Qatar sont en attente d'une telle décision
puisqu'ils soutiennent la cause palestinienne mais ils ont aussi compris que
nous pouvons peut-être, grâce à eux, obtenir des concessions de certains
acteurs, Palestiniens ou pays de la région.
Avons-nous les moyens d'amener le gouvernement israélien à cesser le feu ? Ce
que je peux vous dire à ce sujet, c'est que si tous les pays du continent
européen ou nord-américain s'étaient comportés comme la France depuis le 7
octobre 2023, nous n'en serions sans doute pas là. Certains des leviers dont
nous disposons sont européens ; nous avons tenté de les activer lorsque nous le
pouvions et, par nos déclarations récentes, nous avons déclenché une dynamique
diplomatique. Il n'est pas innocent que le Royaume-Uni et le Canada aient
emboîté le pas de la France avec la déclaration des chefs d'Etat et de
gouvernement, historique par ses termes et par les engagements dont elle
témoigne. Nous allons travailler dur, avec l'aide des parlementaires, pour
aboutir aux meilleurs résultats possibles à la conférence de New York, en
espérant aboutir. Mais pour cela, il faut se retrousser les manches.
- Dénonciation de l'accord d'association entre l'Union européenne et Israël,
embargo européen immédiat sur les armes, soit ; mais comme l'indique l'intitulé
de ces propositions, cela ne dépend pas que de la France. D'autre part, je vous
l'ai dit, si d'autres avaient adopté la même attitude que la nôtre au sujet des
livraisons d'armes, nous ne serions pas dans la situation que nous connaissons
aujourd'hui. Mais la situation humanitaire catastrophique à Gaza fait que de
plus en plus de voix s'élèvent, que de plus en plus de pays font mouvement.
Ainsi de l'initiative des Pays-Bas tendant au réexamen de l'accord
d'association en cas de violation avérée de l'article 2 du texte. De même, le
Canada et le Royaume-Uni ont accepté de signer la déclaration que la France
leur a proposée. Ce sont des mouvements auxquels on ne se serait pas attendu il
y a encore quelques mois. Nous avons donc aussi une capacité d'entraînement
pour essayer d'exercer la bonne pression sur le gouvernement israélien.
Le travail de mémoire au Sénégal est très important ; vous le rappelez à juste
titre. Il appartient aux instances du Parlement de décider si une commission
d'enquête est indispensable. Pour ce qui me concerne, je soutiens la poursuite
de ce travail ; je l'ai dit à Thiaroye. Nous ne voulons pas que notre histoire
soit entachée d'une manière que nous n'avons pas pris le soin de confier à
l'examen des historiens.
En Côte d'Ivoire, nous soutenons tous les efforts en faveur d'un processus
électoral inclusif, transparent et apaisé. Nous entretenons un dialogue avec
toutes les forces politiques et la société civile ivoiriennes. Nous suivons la
situation avec attention, sans ingérence parce que nous respectons la
souveraineté de nos partenaires comme nous exigeons qu'ils respectent la nôtre,
et sans indifférence car nous sommes liés à ce pays par un partenariat ancien
et étroit. La décision de réviser la liste électorale relève de la
responsabilité des institutions ivoiriennes.
- Les sanctions ont un impact, je le pense comme vous. Elles ont privé la
Russie d'environ 400 milliards d'euros, l'équivalent d'un effort de guerre de
trois ans. N'eussent-elles pas été prises qu'Odessa serait peut-être aux mains
des Russes et peut-être auraient-ils réussi une percée jusqu'à Kiev. Les
sanctions ont aussi une portée symbolique, ce pourquoi, vous l'avez dit, la
plupart des pays sanctionnés en demandent la levée. Mais les régimes de
sanction européens sont parfois frustrants en ce qu'ils supposent l'unanimité.
Aussi ai-je demandé que nous révisions notre capacité à prendre des sanctions
plus facilement au niveau national, ce que nous faisons volontiers quand nous
le pouvons : ainsi des sanctions à l'encontre de 28 colons extrémistes et
violents qui ont pris la forme de restrictions d'accès au territoire national
et, par extension, à l'espace Schengen, mais nous voudrions aussi pouvoir
prononcer des gels d'avoirs, ce qui est beaucoup plus compliqué. J'ai donc
demandé la réforme de notre dispositif de sanction, s'agissant des personnes ou
entités visées et de la constitution des dossiers, un exercice long et pénible.
Je vous l'ai dit, la France a, à elle seule, apporté près de la moitié des
preuves permettant de préparer le 17ème paquet de sanctions contre la Russie ;
c'est beaucoup de temps mobilisé pour aller les chercher et les rassembler.
S'agissant d'Israël, l'émotion est très vive dans plusieurs Etats membres de
l'Union européenne et nous verrons jusqu'où ira le Conseil européen la
prochaine fois qu'il se réunira et qu'il sera saisi de la question. Certains
pays ont déjà reconnu l'Etat de Palestine ; d'autres s'interrogent. Le Conseil
européen a une plus grande latitude si un quasi-consensus se dessine pour agir.
C'est peut-être ainsi que, comme vous l'avez dit, les choses pourraient se
débloquer.
- Notre objectif est de faire faire mouvement à l'ensemble des parties. J'ai
des échanges avec mes collègues européens et je constate que mon collègue
norvégien, qui a déjà pris la décision, souhaite aider à rassembler un certain
nombre de pays pour aller dans la même direction que la nôtre. Je recevrai
vendredi, je vous l'ai dit, des représentants des pays arabes. J'aurai des
contacts avec l'Autorité palestinienne et avec les principaux interlocuteurs du
Hamas au sujet du désarmement. La société civile ne doit pas être oubliée et
c'est pourquoi je vous invite à ne pas confondre complètement le gouvernement
israélien et le peuple d'Israël car des voix s'élèvent dans la société civile
israélienne qui aspirent à la paix. Il faut toujours faire cette différence, et
la conférence de New York doit aussi être l'occasion de les mettre en valeur et
de faire dialoguer des Israéliens et des Palestiniens pour parvenir à la
solution politique de deux Etats. Tel est notre programme de travail.
- C'est aux autorités algériennes, dont les décisions récentes sont
injustifiables, qu'il faut poser la question. L'expulsion de douze agents
français en poste à Alger a été brutale sur le plan diplomatique et très
brutale pour les agents eux-mêmes, sommés de quitter leur domicile et leur
famille sous 48 heures. Nous avons dû répondre par la fermeté, de manière
proportionnelle et immédiate. Quelques jours plus tard, nous avons assisté au
renvoi des agents français en Algérie titulaires de passeports diplomatiques en
mission de moins de 90 jours : autrement dit, à la dénonciation tacite de
l'accord de 2013 régissant la délivrance et l'utilisation des passeports
diplomatiques. Ces très graves décisions des autorités algériennes ne sont au
bénéfice ni de la France ni de l'Algérie, et tous les binationaux qui vivent
d'un côté ou de l'autre de la Méditerranée en subissent les conséquences les
plus lourdes. C'est vraiment aux autorités algériennes qu'il appartient de se
poser la question.
- Il y a un partage des rôles entre le ministère de l'intérieur et le ministère
des affaires étrangères. Pour notre part, nous sommes en train d'appliquer les
propositions du rapport Hermelin. Elles sont fondées sur le constat que la
délivrance de visas est un levier d'attractivité et d'influence et qu'elle
concourt à notre prospérité quand elle a pour effet de faire venir des talents
qui, par leurs travaux de recherche, leurs entreprises, leurs créations
artistiques, enrichiront notre pays. J'ai pris note du cas que vous avez
mentionné ; je l'examinerai pour vous apporter une réponse plus détaillée sur
les raisons ayant conduit les agents de nos postes consulaires à ne pas
délivrer ces visas.
- Nous avons restreint l'accès à la France de membres de la nomenklatura
algérienne en janvier et ces mesures ont été vivement ressenties par les
personnes concernées. Ensuite, nous avons répondu aux mesures prises par les
autorités algériennes avec une stricte réciprocité : pour douze agents expulsés
d'Algérie, douze agents expulsés de France, puis renvoi des agents algériens
titulaires de passeports diplomatiques sans visa en mission de courte durée.
Les autorités algériennes nous ont fait savoir que tout Français se rendant en
Algérie en mission de moins de 90 jours devrait désormais obtenir leur
agrément. C'est une violation des termes de l'accord de 2013, qui ne prévoit
rien de cela. Nous appliquons donc la même mesure. Comme je vous l'ai dit, par
ces décisions les plus récentes, les autorités algériennes ont de facto dénoncé
cet accord.
- D'abord, pour compléter ma réponse à M. Pfeffer, je n'exclus évidemment rien,
y compris les bonnes idées du président Hollande : dès lors que de nouvelles
atteintes seraient portées aux intérêts français, on ne peut exclure de prendre
des sanctions pour rétablir la France dans ses intérêts.
S'agissant de la bataille des communiqués, si vous entendez donner des leçons
de droit international au Quai d'Orsay, madame la députée, commencez par
prendre connaissance de ce que ce droit est précisément. Contrairement à ce que
vous affirmez régulièrement, le droit coutumier international prévoit des
régimes d'immunité et il n'y a pas de consensus absolu sur la manière
d'équilibrer les obligations faites aux Etats membres de la CPI, dont fait
partie la France, et le respect de ce droit. Dans tous les cas, ce n'est ni à
vous ni à moi de décider de faire justice : c'est à l'autorité judiciaire qu'il
appartient de mettre en œuvre et d'exécuter les mandats d'arrêt de la CPI.
Faisons donc chacun notre métier : je suis membre du gouvernement, vous êtes
parlementaire et c'est à la justice de trancher ce type de questions. C'est
d'ailleurs ce que nous disons dans le communiqué.
- Les Etats-Unis ont effectivement une approche nouvelle de certains sujets et
l'ouverture du dialogue en direct sur le nucléaire iranien est spectaculaire.
Nous l'avons accueillie favorablement parce que, pour nous, il n'y a pas de
solution militaire au programme nucléaire iranien. Certains pensent que l'on
peut réduire ce programme à néant par la force ; ce n'est pas notre analyse.
Nous considérons qu'il faut agir par la négociation pour que l'Iran ne puisse
pas disposer de la bombe et que notre sécurité soit préservée. Concrètement,
avec un missile balistique d'une portée de 2.000 kilomètres pouvant être chargé
d'un engin nucléaire, l'Iran pourrait théoriquement - il n'est pas aujourd'hui
en situation de le faire - tenir en joue le territoire national à brève
échéance. Nous voulons absolument éviter cela et c'est pourquoi nous soutenons
les efforts américains. Mais nous serons très exigeants : tout accord devra
être suffisamment protecteur. Pour la suite, nous continuerons de dialoguer
avec les Etats-Unis, pas uniquement sur la crise iranienne, pour tenter de trouver
au Proche-Orient des solutions bénéfiques pour la région et pour nous-mêmes.
Madame Josserand, je partage votre opinion sur l'insuffisante efficacité de la
gestion de l'épargne européenne, notre principale force. Nous nous sommes
interrogés plusieurs fois sur la manière de faire entendre la voix de l'Europe.
C'est en prenant conscience que nous sommes un continent riche et en acceptant
de consacrer une partie de cette richesse à notre influence dans notre
voisinage et dans le monde que nous parviendrons à des résultats. Cela dit, il
faut prendre garde aux effets d'optique. Les investisseurs américains et
étrangers détiennent beaucoup de notre capital, c'est vrai, mais la zone euro a
une exposition plus forte - elle est de 10.000 milliards d'euros - aux actifs
américains, avec beaucoup de bons du Trésor américains, que ne l'est l'exposition
des Etats-Unis à la zone euro, avec 7.000 milliards d'euros. La différence
réelle est donc de 3.000 milliards d'euros, au bénéfice des Etats-Unis puisque
cette épargne va s'y placer, soit dans de la dette de l'Etat, soit dans des
titres d'entreprises ou d'autres actifs.
Nous apportons de l'argent aux Etats-Unis, ce qui est invraisemblable. Au
moment où nous aurions besoin d'investir dans notre propre économie, nous
prêtons aux Etats-Unis, nous y investissons, nous finançons l'économie
américaine, de fait très dépendante de notre épargne. Pour résoudre cela, il
faut construire l'union des marchés de capitaux en Europe mais nous devons
aussi agir au niveau national. En France, l'épargne réglementée et
l'assurance-vie fiscalement encouragée ont pour effet que les ménages investissent
beaucoup dans des placements exigibles à tout moment, très liquides et sans
risque, et une partie significative de cette épargne va se placer sur des
actifs sans risque à l'étranger, notamment aux Etats-Unis. Nous aurons intérêt
à bouger quelques curseurs.
- Je veux d'abord vous annoncer que Kaja Kallas, Haute représentante pour les
affaires étrangères et la politique de sécurité de l'Union européenne, vient
d'annoncer qu'elle consentait à examiner le respect par le gouvernement
israélien de l'article 2 de l'accord d'association signé entre l'Union
européenne et Israël. Je salue cette décision soutenue par dix-sept Etats
membres.
Au Soudan, la guerre est alimentée par des puissances étrangères qui ont fait
de ce pays le lieu de leur confrontation. C'est pourquoi, lorsque je me suis
rendu à la frontière entre le Soudan et le Tchad, j'ai appelé solennellement
les puissances étrangères à cesser de jeter de l'huile sur le feu en continuant
d'alimenter le conflit. Nous avons ressenti cette tension lors de la conférence
à Londres que j'évoquais tout à l'heure. Elle a été un succès pour ce qui est
des engagements en matière de soutien humanitaire mais nous avons eu les plus
grandes difficultés à obtenir une déclaration politique commune, certains pays
s'opposant frontalement sur la manière de qualifier les parties au conflit.
Pour espérer trouver une voie de sortie, un dialogue doit se nouer entre les
principales puissances régionales impliquées et nous les y appelons, en
particulier l'Egypte et les Emirats arabes unis, qui ont une empreinte très
forte dans la région. Nous souhaitons qu'un dialogue permette une solution
politique et nous sommes disposés à faciliter ces discussions.
Dans son discours d'investiture, la présidente de la Commission européenne a
annoncé la création d'un bouclier européen pour la démocratie prévoyant le
renforcement des moyens de coordination dans la lutte contre les ingérences
étrangères. Ce bouclier n'existe pas encore et les sanctions prévues aux termes
du règlement sur les services numériques n'ont pas été prononcées. Nous devons
donc continuer de nous mobiliser car les épisodes d'ingérence dans les
processus électoraux préoccupent, plus qu'avant, Parlements et gouvernements
nationaux. La France, qui a commencé à construire des outils, peut montrer la
voie. Nous devons aussi monter le son au niveau national. C'est le chantier
engagé au sein du ministère, je l'ai dit, pour que notre message porte et pour
riposter plus efficacement. Dans "l'affaire du mouchoir", le
ping-pong entre influenceurs des sphères de l'extrême droite américaine et
personnalités russes a fait que le trucage a été vu plusieurs dizaines de
millions de fois. Pour limiter l'impact de ces fausses nouvelles, nous devons
être capables de riposter ou de produire des contenus tout aussi viraux.
Parlementaire dans l'âme, je me réjouis de l'évaluation exigeante que les parlementaires comptent faire des activités de l'AFD et de l'aide publique au développement en général. La commission d'évaluation de l'aide publique au développement qui a été installée montrera que l'aide publique au développement en général sert les intérêts des Françaises et des Français. Elle entraîne de l'activité économique, et donc des emplois sur le territoire national. Elle permet de lutter contre les maux qui nous viennent de l'extérieur, tel le narcotrafic : vous verrez que certains projets de cultures alternatives soutenus par l'AFD permettent de faire reculer la culture du pavot dans certaines régions du monde. Elle contribue à la lutte contre les filières d'immigration irrégulière : ainsi, aux Comores et dans certains pays africains, l'aide publique au développement permet aux autorités de se doter des moyens d'état civil qui leur permettent de mieux contrôler leurs propres ressortissants et de maîtriser l'immigration irrégulière. Que vous ayez pour priorité la lutte contre l'immigration irrégulière, la lutte contre le narcotrafic, la préservation de l'environnement, l'emploi ou le pouvoir d'achat, vous verrez que l'aide publique au développement est un formidable outil pour exercer une forme d'influence sur les pays dont nous attendons qu'ils fassent mouvement pour répondre à nos intérêts. C'est ainsi qu'il faut envisager cette politique, qui est une politique de partenariat.
Agnès
Pannier-Runacher (ministre de la
Transition écologique, de la Biodiversité, de la Forêt, de la Mer et de la Pêche)
> De sa propre turpitude on ne peut se prévaloir. Le texte de la
proposition de loi «entraves au métier d’agriculteur» a été retravaillé en
profondeur au Sénat. Malheureusement, l’obstruction parlementaire et le refus
de discuter de la part des écologistes et de LFI à l’Assemblée nationale ont
empêché d’aller plus loin dans l’amélioration de ce texte. Vous connaissez mes
réserves sur l’article 2 visant à autoriser par dérogation et dans des
conditions strictement encadrées l’acétamipride. Mais je peux soutenir tous les
autres articles de cette proposition parce que j’ai travaillé à leur
compatibilité avec la protection de la santé et de la nature, je les ai amendés
à ma manière, et je n’ai jamais refusé le débat démocratique. Vous vous
inquiétez des phytosanitaires. Permettez-moi de rappeler que le gouvernement
porte un plan Écophyto ambitieux, avec un objectif clair : réduire de 50 % les
usages et les risques liés aux produits phytosanitaires. C’est plus de 300
millions d’euros qui ont été engagés pour développer des alternatives concrètes
pour les agriculteurs. C’est une augmentation de plus de 30% des produits de
biocontrôle qui se substituent aux phytosanitaires, c’est une baisse l’année
dernière du Nodu, l’indicateur que vous avez tant soutenu comme le plus
approprié pour mesurer l’impact des phytosanitaires.
> Du 9 au 13 juin, la France accueillera plus de 60 chefs d’État et de Gouvernement à Nice lors de la Conférence des Nations Unies sur l’Océan. Objectif : relever le niveau d’ambition mondial en faveur de l’océan. La France sera au rendez-vous, dans son rôle diplomatique, pour obtenir de la part des pays participants des engagements complémentaires en matière d’aires marines protégées, de lutte contre la pêche illégale, de décarbonation du transport maritime, de lutte contre la pollution plastique et de protection du littoral face à l’érosion côtière. Nous serons aussi présents, aux côtés de la Présidente de la Commission européenne, pour porter ce Pacte pour l’océan, un pacte auquel la France a largement contribué. Enfin, au niveau national, le Président de la République portera des annonces fortes pour rehausser le niveau de protection de nos aires marines protégées — des annonces construites en concertation avec les scientifiques, les pêcheurs et les organisations non-gouvernementales.
> Parce que protéger l'océan c'est nous protéger, la France portera haut ses couleurs à la Conférence des Nations Unies sur l'Océan, qui s'ouvrira le 9 juin prochain à Nice. Sans relâche, nous œuvrerons pour la protection des océans et ferons de cet évènement un jalon crucial pour l'avenir de la planète.
> La France et
l'Europe ont obtenu une grande victoire diplomatique la semaine dernière sur
l'accord post-Brexit. Je voulais donner de la visibilité et de la stabilité à
nos pécheurs, éviter que nous ayons à renégocier chaque année l'accès aux eaux
britanniques. La position de la France était constante : pas d'accord
global avec le Royaume-Uni sans accord sur la pêche. Nos pêcheurs français sont
désormais protégés jusqu'en 2038, sans remise en cause des licences, pour aller
dans les eaux britanniques.
Mais le travail n'est pas fini : je vais m'assurer des textes
publiés et de la mise en œuvre concrète de l'accord. Je veillerai aux mesures
techniques : aires marines protégées, taille des filets, type d'engins
autorisés - ces freins prétendument techniques empêchant les pêcheurs de
travailler.
Dans la Manche, la coopération avec les îles Anglo-Normandes est
essentielle. Le dialogue se poursuit. J'ai rencontré le gouvernement de Jersey
la semaine dernière, avec le président de la région Normandie, en lien avec
celui de la région Bretagne. Vous pouvez compter sur moi.
Aurore Bergé (ministre déléguée auprès du Premier
ministre chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte
contre les discriminations)
> Un procès hors norme tant par le nombre de victimes que par
l’ignominie des faits reprochés à Joël Le Scouarnec : 111 viols et 188
agressions sexuelles sur des patients, pour la plupart mineurs au moment des
faits. Sa propre petite fille parmi les victimes. Il a été condamné aujourd’hui
à la peine maximale, 20 ans de reclusion criminelle. Ce procès nous rappelle
notre responsabilité. Détecter, former, protéger, réparer. Et ne jamais
détourner le regard. Je pense aujourd’hui à toutes les victimes, à celles d’hier,
celles d’aujourd’hui et à celles qui parleront demain. À leur douleur, à leur
dignité. Je rencontrerai très prochainement le collectif des victimes.
> Je ne crois pas qu'il faille d'impôts supplémentaires. Il ne faut pas aller plus loin sur la question de la fiscalité.
> Il faut être lucides et implacables pour défendre la République. Lucides face à l’entrisme islamiste, les tentatives de déstabilisation dans le sport, dans l'éducation, dans nos associations. Lucides sur les discriminations qui résistent. Et qui créent une chair à canon électorale pour LFI et un terreau pour les Frères Musulmans.
> Oui à tout moment le gouvernement peut être censuré. Donc assumons de prendre des risques ! Celui de la baisse de la dépense publique. Celui des réformes. Celui du courage. Sans changer notre fiscalité, sans dette supplémentaire.
> [Règles féminines / Intervention à l’Assemblée] Les
règles ne devraient pas susciter des ricanements : elles sont une réalité
concrète. La précarité menstruelle constitue un enjeu majeur, puisqu’elle
atteint à la dignité des femmes. Quand une femme n’est pas protégée, elle ne
peut ni sortir, ni étudier, ni travailler, ni avoir de vie sociale dans de
bonnes conditions.
C’est pourquoi Élisabeth Borne, lorsqu’elle était première ministre, avait
souhaité que le remboursement des protections hygiéniques figure dans le Plan
interministériel pour l’égalité entre les femmes et les hommes 2023-2027 ix
et qu’il soit instauré. Vous avez raison, il y a du retard. C’est inacceptable.
C’est la raison pour laquelle, avec M. Yannick Neuder, ministre chargé de
la santé et de l’accès aux soins, nous nous engageons à ce que cette mesure
soit instaurée avant la fin de l’année et que les protections hygiéniques
soient remboursées car en garantissant aux femmes l’accès aux protections, donc
à la dignité, nous ferons honneur à la République.
Amélie de Montchalin (ministre délégué auprès du ministre
de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et Numérique,
chargée des Comptes publics)
> [Finances publiques / Intervention à l’Assemblée] Oui, la situation
des finances publiques nécessite l’union nationale. En effet, les finances
unissent la nation et la nation a besoin d’avoir confiance dans ses finances
publiques. Reste que je ne comprends pas pourquoi vous avancez que nous
masquerions la réalité au point de susciter le soupçon. Le 15 avril
dernier, autour du premier ministre, nous avons réuni tous les acteurs des
collectivités, de la sécurité sociale, tous les parlementaires et nous avons
tout mis sur la table : les données pour l’année 2025, celles qui
expliquent la situation, en particulier le fait que le pays travaille moins et
produit moins qu’ailleurs ; nous avons, j’y insiste, donné tous les
chiffres et nous le referons d’ici à la fin du mois de juin.
Il ne s’agit pas que les uns et les autres s’opposent, il faut que la nation
dans son ensemble retrouve confiance et agisse. Nous avons choisi à cette fin
une méthode : la transparence. Nous ne cachons rien et nous agissons.
Nous avons pris des décisions dès le mois d’avril pour que nous puissions
maintenir le déficit à 5,4 % du PIB, comme s’y est engagé le premier
ministre. Nous avons réuni les comités d’alerte sur tous les sujets sans jamais
avoir pour objectif de dissimuler quoi que ce soit. Surtout, nous avons défini
des objectifs partagés afin que la dette cesse d’augmenter d’ici à 2029. Un
pays qui n’a plus de marge de manœuvre met en danger sa souveraineté. Si nous
n’agissons pas ensemble, nous paierons davantage de charges d’intérêts et nous
disposerons dès lors de moins d’argent pour les hôpitaux, pour la défense, pour
l’éducation.
Nous agissons sans qu’on puisse nous soupçonner d’une quelconque dissimulation.
Je vous inviterai, comme tous vos collègues, à la fin du mois de juin, à ce
moment de transparence nationale car les comptes doivent être publics :
c’est la condition d’une action commune.
> [Sécurité sociale / Intervention à l’Assemblée] si nous
réalisons les objectifs du PLFSS, les comptes de la sécurité sociale accuseront
un déficit de quelque 22 milliards d’euros à la fin de l’année. Catherine
Vautrin et moi-même avons dès le mois de mars lancé des travaux très sérieux
afin que la réunion de la commission des comptes de la sécurité sociale, mardi
3 juin, destinée à établir le bilan de l’année 2024, soit surtout
l’occasion de définir les mesures de redressement que nous devons prendre en
nous appuyant non pas sur nos seules idées, des idées anecdotiques, mais sur le
travail du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge, sur celui du
Haut Conseil pour le financement de la protection sociale et sur celui du Haut
Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie.
Il s’agit de préparer l’avenir et nous ne pouvons agir que dans une seule
direction : remettre les comptes de la sécurité sociale à l’équilibre. À
la fin de l’année 2025, le déficit social accumulé sera de plus de
60 milliards d’euros. Cela ne peut pas continuer car cela signifie que
nous dépendons de financements extérieurs pour la sécurité sociale, qui se
trouve au cœur du pacte républicain.
Concrètement, quinze jours après la réunion de la commission des comptes de la
sécurité sociale, j’y ai fait allusion, le comité d’alerte de l’Ondam rendra
son diagnostic sur les mesures à prendre. À la fin du mois de juin, nous
réunirons le comité d’alerte avec l’ensemble des collectivités locales, des
acteurs de la sécurité sociale, des parlementaires, évidemment, afin que, sous
la conduite du premier ministre, nous prenions toutes les décisions pour
l’année en cours. Et notre objectif ne se limitera pas à 2026 puisqu’il s’agira
pour les comptes de la sécurité sociale de retrouver l’équilibre en 2029 au
plus tard.
> [Sécurité sociale / Intervention au Sénat] Il y a quelque chose que nous n'avons pas
vraiment essayé : c'est le travail. Si nous avions les mêmes taux
d'emploi des jeunes et des seniors qu'en Allemagne, 25 milliards d'euros
de cotisations supplémentaires entreraient dans les caisses de la sécurité
sociale.
Bien sûr, Catherine Vautrin, moi-même et tout le Gouvernement cherchons des
pistes d'efficacité et lutter contre la fraude et le gaspillage. Mais avant de
chercher des recettes, avant de taxer, nous devons rechercher ce qui nous
mettra à l'abri des temps difficiles et permettra de continuer à financer la
protection sociale des Français. Cette protection, la meilleure qui soit, c'est
le travail.
Dans notre pays, ceux qui travaillent ne le font pas moins qu'ailleurs, mais
nous sommes moins nombreux à travailler. Je pense aux jeunes qui mettent deux
ans de plus que chez nos voisins à trouver un emploi et aux seniors que l'on
pousse dehors parce qu'ils coûteraient trop cher.
Là est le cœur de notre problème : nous avons 20 % de moins de PIB
par habitant qu'ailleurs, alors que nous disposons d'entrepreneurs,
d'innovateurs et d'exportateurs de talent. Si nous n'arrivons pas à procurer à
chaque Français un emploi stable et bien payé, nous parlerons toujours de
déficits, jamais de réussite !
> [Sécurité sociale / Intervention au Sénat] L'enjeu, c'est le travail. Le taux d'emploi
n'a jamais été aussi élevé depuis 1970, et il peut encore augmenter. La
sécurité sociale est un acquis intangible, mais fragile. Nous ne devrions pas
laisser une telle dette à nos enfants. Si nous la laissons exploser, il n'y
aura plus de sécurité sociale.
Avec Catherine Vautrin, mardi prochain, nous réunirons la commission des
comptes de la sécurité sociale. Nous ferons un bilan implacable et complet de
l'année 2024, et étudierons toutes les mesures de redressement. L'objectif est
de revenir à l'équilibre avant 2029.
Entre 2010 et 2019, la sécurité sociale était à l'équilibre. Nous
devrions pouvoir trouver les moyens d'y revenir. Le 15 juin prochain, le
comité d'alerte de l'Ondam présentera le déroulement de
l'année 2025 ; il a des moyens à disposition pour tenir l'objectif.
Nous avons mis en réserve 1,1 milliard d'euros ; on verra si on peut
les utiliser. Nous ferons le point avec tous les acteurs, avec pour objectif
5,4 % de déficit.
Nous voulons un pays qui protège les Français, qui n'augmente pas sa dette et
qui tienne ses comptes - il y va de notre souveraineté.
Marc Ferracci (ministre délégué auprès du ministre
de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et Numérique,
chargé de l’Industrie et de l’Energie)
> [Intervention à l’Assemblée] Notre industrie est confrontée à des
défis majeurs, mais je n’irai pas jusqu’à dire, comme vous l’avez fait, qu’elle
s’effondre. Nous avons recréé des emplois industriels : 150 000
depuis 2017, 10 000 rien qu’en 2024. Ce sont les chiffres de l’Insee. Depuis
quelques années, nous rouvrons des sites industriels. La réindustrialisation du
pays est une réalité.
Tout cela n’est pas suffisant ; tout cela n’est pas satisfaisant. Je suis
d’accord avec vous. Nous devons continuer d’agir.
D’abord, nous devons agir pour former. La réforme de l’apprentissage a permis
de faire de cette voie d’insertion professionnelle une voie d’excellence, mais
nous devons encore conduire la réforme des lycées professionnels, sous la
direction d’Élisabeth Borne, afin qu’ils soient davantage en phase avec les
besoins du marché du travail, en particulier ceux des entreprises
industrielles.
Ensuite, nous devons agir pour simplifier. En ce qui concerne le ZAN que vous
avez évoqué, je défends, avec M. François Rebsamen, ministre de l’Aménagement
du territoire et de la Décentralisation, l’idée que les projets industriels
puissent ne pas y être soumis. Nous aurons bientôt l’occasion d’en discuter.
Nous devons aussi agir pour rendre les entreprises industrielles plus
compétitives. Le coût de l’énergie est un des leviers pour y parvenir. La
feuille de route d’EDF est très claire : fournir à nos industriels l’accès
à une énergie décarbonée à des prix compétitifs, garantis pour un temps
suffisamment long pour permettre les investissements.
Nous devons également agir sur le coût du travail. Nous pourrons en discuter à
l’occasion des prochaines échéances budgétaires.
Enfin, nous nous battons à l’échelle européenne pour créer des mesures de
protection permettant à nos industriels de lutter à armes égales avec une
concurrence féroce, souvent déloyale.
L’industrie est un facteur de prospérité, de souveraineté et de cohésion dans
nos territoires. Notre ligne est claire : nous continuerons à nous battre.
> [Intervention à l’Assemblée] Le gouvernement est
évidemment très attaché à ce que la réindustrialisation irrigue nos
territoires. La réindustrialisation, c’est un enjeu de prospérité mais aussi un
enjeu de souveraineté et un enjeu de cohésion territoriale. Nous étions tous
deux ce matin, avec mon collègue François Rebsamen, à l’assemblée générale des
territoires d’industrie. Le dispositif Territoires d’industrie incarne la
volonté de réindustrialisation dans les territoires, et il produit des
résultats : entre 2008 et 2020, 150 territoires perdaient des emplois
industriels mais, depuis 2020, 110 d’entre eux en regagnent. Nous sommes
donc convaincus qu’investir dans un travail coopératif, dans une logique qui
soit ascendante, c’est-à-dire en partant des besoins du territoire, les
territoires d’industrie étant constitués de binômes entre un élu et un
industriel qui œuvrent avec le soutien des services de l’État, est une logique
gagnante.
Nous sommes également convaincus qu’il faut améliorer ce dispositif – comme il faut par ailleurs œuvrer également aux niveaux national et européen pour la réindustrialisation.
Améliorer, je l’ai dit ce matin, signifie consolider
notamment les soutiens apportés
aux entreprises en matière d’ingénierie et miser sur l’innovation : parmi les axes à suivre, l’innovation dans les territoires et pas seulement dans les
métropoles, en est un extrêmement important. Améliorer signifie aussi
simplifier un certain nombre de procédures en matière d’accès au foncier :
nous y sommes prêts, nous avons fait des annonces à ce sujet et continuerons à
travailler dans les prochaines semaines et dans les prochains mois avec les
acteurs des territoires et avec Intercommunalités de France.
> Le mécanisme de contrôle des investissements étrangers
en France est un élément essentiel au maintien de notre souveraineté
industrielle. Ce mécanisme a connu depuis 2014 une profonde rénovation, avec
une extension de son champ d’application, un approfondissement du pouvoir de
sanction et une augmentation des moyens et des effectifs destinés à faire
appliquer le contrôle. Cette rénovation se traduit par la montée en puissance
des opérations faisant l’objet d’un contrôle IEF : de 100 par an en 2014,
on est passé à 400 en 2024. Dans 44 % des cas, soit une proportion
significative, ces opérations donnent lieu à des restrictions ou à des
conditions, lesquelles peuvent porter sur la continuité des opérations
stratégiques, sur le maintien de l’emploi et des savoir-faire dans les
territoires ou encore sur la protection des données sensibles. Ces chiffres en
témoignent : nous sommes extrêmement vigilants à ce que notre souveraineté
industrielle ne soit pas remise en question par des investissements ou des
prises de participation étrangères.
Cependant, nous devons également veiller au maintien de l’attractivité de la
France. Les 40 milliards d’euros d’investissements réalisés dans le cadre
de Choose France auxquels vous faites référence ne relèvent pas des IEF, ce
sont des investissements directs étrangers. Nous avons besoin de maintenir
cette attractivité, qui est génératrice d’emplois dans nos territoires ;
Choose France, ce sont 180 000 emplois créés depuis le début.
Nous avons besoin de trouver un équilibre entre maintien de la souveraineté et
maintien de l’attractivité. Pour cela, nous devons appliquer la procédure IEF
de manière proportionnée et réduire les délais d’instruction réglementaires
afin de ne pas entraver les opérations.
La ligne du gouvernement est donc claire : il s’agit de conserver ces deux
jambes que sont la souveraineté et l’attractivité.
Patricia Mirallès (ministre déléguée auprès du ministre
des Armées, chargée de la Mémoire et des Anciens combattants)
> [Message à l'occasion de la Journée nationale de la Résistance du 27
mai]
Dans l'étreinte sourde de l'Occupation, quand le pays semblait s'être effondré
sous le pas de l'ennemi, quand l'espérance paraissait se taire jusque dans les
pierres les plus anciennes, il y eut des âmes debout. Il y eut des femmes, des
hommes, des jeunes parfois à peine sortis de l'enfance, qui ne voulurent pas
croire que la France pouvait mourir sans avoir lutté jusqu'au bout.
Une poignée d'ombres marchèrent à la lumière de leur seul refus. Leurs gestes,
certains petits, d'autres grands, étaient chargés de toute la gravité du monde.
Dans les greniers, les forêts, les soupentes, des promesses furent semées. Un
regard dérobé devenait un serment. Une main tendue une insurrection. Un bout de
papier contenait le monde entier dans sa pliure.
Ainsi naquit la Résistance.
Le 27 mai 1943, dans la pénombre où la peur faisait son nid, des femmes et des
hommes, unis par l'urgence et la fidélité, prirent le risque immense de
s'asseoir à la même table. Réunis autour de Jean Moulin, ils venaient de
partis, de courants, de traditions différentes, parfois opposées. Mais ils
partageaient une même foi : celle que la France ne mourrait pas, tant que des
Français refuseraient l'abaissement, tant qu'ils sauraient s'unir au-delà des
divergences politiques.
Ils ne s'étaient pas choisis, ils s'étaient reconnus. Et pourtant, ni uniforme,
ni étendard pour les distinguer. Leur seule bannière : l'idée que la France ne
serait pas mise à genoux sans combattre, et qu'elle ne pouvait vivre sans
liberté. Mais l'idée, quand elle brûle au fond des âmes, devient plus
tranchante que le fer.
Et déjà, dans le huis clos de cette nuit politique se dessinait l'inespéré : un
avenir qu'on arrache au présent. Un destin qu'on arrache à l'oubli.
Ce jour-là est né le Conseil national de la Résistance. Et ce jour-là, déjà, se
révélait ce qu'était véritablement la Résistance : un sursaut moral avant
d'être une force armée. Le sursaut d'un peuple qui se souvenait de ce qu'il
était, et qu'il ne voulait pas cesser d'être.
Le Conseil national de la Résistance, c'est le nom de deux volontés qui ne
cédèrent jamais : combattre l'oppression et préparer l'après. Résister à
l'ennemi, et reconstruire la France.
Les résistants n'avaient pour eux que la parole, l'honneur, la foi en la
liberté et cette idée de la France que l'ennemi ne pouvait comprendre : une
France fraternelle, rebelle, éprise de justice.
En cette année 2025 où nous commémorons les 80 ans des Débarquements, de la
Libération et de la Victoire, nous pensons à celles et ceux qui, dans l'ombre,
tracèrent les premiers sillons du relèvement, des studios de la BBC à la rue du
Four.
Ils préparèrent l'aube, quand tout semblait voué au crépuscule. Ils semèrent
les cailloux blancs du retour, quand tout chemin paraissait perdu. Et, s'ils
n'avaient pas la certitude de vivre, ils portaient en eux la promesse que la
France, elle, vivrait encore après eux.
Ils préparèrent le terrain, transmirent les renseignements, organisèrent les
sabotages, dressèrent des obstacles, permirent les soulèvements. Ils furent le
socle invisible et invincible de la Libération. Sans eux, les Alliés auraient
trouvé une terre moins préparée, un peuple moins debout, un pays plus seul.
Sans eux, la victoire aurait été plus incertaine, plus lointaine, peut-être
même plus vide de sens. Car il ne s'agit pas seulement d'être libérés. Encore
faut-il être dignes d'être libres.
La Résistance fut le visage de cette dignité. Une dignité arrachée à la honte
de la compromission, une dignité de combat, une dignité française. Le visage de
la France, lorsqu'elle reste fidèle à la République.
Sans la Résistance, la France aurait peut-être été libérée, mais elle n'aurait
pas été relevée.
Sans la Résistance, la République aurait survécu, mais elle n'aurait pas été
rétablie avec cette force intérieure, cette légitimité du sang versé pour elle.
Aujourd'hui, nous ne devons pas seulement mémoire à ces visages disparus : nous
leur devons fidélité. Il y a celles et ceux que l'Histoire a retenus, et il y a
aussi les milliers de visages anonymes, jeunes ou vieux, croyants ou athées,
patriotes de naissance ou Français de cœur, qui surent, qu'à certaines heures,
résister, c'est vivre pleinement.
Leur demeurer fidèle, c'est, aujourd'hui encore, cultiver leur héritage.
Choisir la droiture contre les faux semblants.
La mémoire contre l'amnésie.
La parole juste contre l'imposture.
Les peines de la veille au confort du sommeil.
Vive la République, vive la France.
● Autres
ministres
Catherine Vautrin (ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des
Familles)
> [Droit à l’aide à mourir
/ Intervention à l’Assemblée] À travers vous, madame la présidente,
permettez-moi de saluer l’Assemblée au sens le plus large du terme : je
salue votre présidence et celle de vos vice-présidents et je remercie tous les
services qui ont contribué au travail de la commission et au débat en séance
publique pendant deux semaines. Monsieur le président de la commission, merci à
votre commission et aux rapporteurs. Ce soir, je pense à toutes celles et ceux
qui se sont succédé depuis 2022 pour faire droit à la demande du président de la
République et pour susciter l’engagement en vue de l’aboutissement de cette
première lecture.
Chacun, dans cet hémicycle, quelles que soient ses opinions, avait les patients
et les soignants à l’esprit. Chacun ici reconnaît la nécessité d’entendre les
patients et d’écouter les soignants et leurs demandes.
Le gouvernement prend acte du vote unanime de la proposition de loi sur les
soins palliatifs et s’engage à la mettre en œuvre. Je rappelle que, grâce au
vote de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, le budget des
soins palliatifs a déjà augmenté. Nous devons poursuivre dans cette voie. Je le
dis aux associations du secteur des soins palliatifs : le gouvernement
continuera d’agir ; ces votes ne marquent pas la fin des soins palliatifs.
Soyez tous assurés de l’engagement du gouvernement.
S’agissant de l’aide à mourir, le chemin sera encore long : le texte va
désormais être examiné au Sénat, où il fera j’espère l’objet de la même écoute
et de la même recherche de consensus.
L’accompagnement du patient peut prendre diverses formes. Nous devons avoir
l’humilité de comprendre que certaines souffrances réfractaires ne trouveront
jamais de réponse et que l’accompagnement de ceux qu’elles touchent peut
prendre la forme d’une aide à mourir. N’abandonner personne, jamais, quelle que
soit la pathologie concernée, c’est aussi cela.
Merci à chacune et à chacun d’entre vous pour ce débat !
Annie Genevard (ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté
alimentaire)
> [Loi agricole / Intervention à l’Assemblée] Tout d’abord, les
organisations professionnelles sont des corps intermédiaires et je dialogue
constamment avec les cinq organisations syndicales agricoles. Par conséquent,
ne m’accusez pas d’être la porte-parole de tel ou tel – un procès fait, invariablement, à
tous les ministres de l’agriculture.
Par ailleurs, de tous les députés, vous êtes celui qui a déposé le plus
d’amendements sur ce texte. Dès lors, vous ne devez pas vous
étonner ! Comme le disait Bossuet, on ne saurait déplorer les effets dont
on chérit les causes. Vous avez voulu empêcher ce texte d’aller jusqu’au bout
de son parcours, vous en payez les conséquences.
Sur le fond, je vous rappelle que ce texte d’initiative sénatoriale, très
attendu par les agriculteurs, a fait l’objet d’un travail très précis avec ma
collègue ministre de la transition écologique.
La position du gouvernement sur ce texte est celle qui a été défendue hier par
plusieurs députés. Je suis trop respectueuse de la séparation des pouvoirs et
du respect du travail parlementaire pour ne pas vous rappeler qu’une
majorité de députés a choisi d’adopter cette motion de rejet pour que le texte
aille jusqu’au terme de son parcours et qu’ainsi la démocratie puisse
s’exercer.
> [Intervention à l’Assemblée] La souveraineté
alimentaire est fondamentale. C’est la liberté d’un peuple, son autonomie. Le
jour où il n’y aura plus, dans notre assiette, que des produits importés, vous
serez les premiers à pleurer.
Puis-je vous rappeler quelques chiffres ? En 2000, en matière de
volailles, nous étions souverains à 149 %. Aujourd’hui, seul un poulet sur
deux consommé en France y est élevé.
La souveraineté alimentaire, c’est ne pas se satisfaire qu’un fruit ou un
légume sur deux ne soient pas produits dans notre pays. C’est une arme
géostratégique que des ennemis sont prêts à activer contre un peuple agressé,
comme on le voit avec le conflit russo-ukrainien.
La souveraineté alimentaire, c’est prévoir l’avenir, préserver et sauvegarder
les assiettes de nos enfants.
Vous donnez des leçons mais ne connaissez pas la situation dans laquelle nous
sommes aujourd’hui. Notre souveraineté alimentaire est gravement menacée.
Par ailleurs, vous expliquez que l’agroalimentaire, c’est de l’agrobusiness – vous n’avez que ce mot à
la bouche. Or là où il y a transformation, il y a
production. S’il n’y a pas de transformation, il n’y a pas de production. J’en veux pour preuve le blé dur : le fait que nous ne le transformions pas pose un problème.
Vous avez tort : l’agroalimentaire emploie 350 000 personnes dans notre pays, essentiellement dans les
territoires ruraux. Cette industrie remarquable a fait énormément d’efforts
pour économiser l’eau et l’énergie et pour contractualiser avec les
producteurs.
Vous devriez défendre l’agroalimentaire parce qu’il sert la production
agricole. Or vous ne le savez pas, vous ne voulez pas le voir.
Vous vous contentez de mantras qui ne correspondent en rien à la réalité.
> S’agissant du Mercosur. M. le premier ministre, le
président de la République et l’ensemble du gouvernement n’ont cessé d’exprimer
une opposition à ce traité tel que le projet en a été signé il y a quelques
mois à Montevideo par Ursula von der Leyen. Encore à l’état de projet, il n’est
en effet pas bon pour les quatre filières qui sont concernées : la filière
bovine, la filière volailles, le sucre et l’éthanol, vous l’avez rappelé. Il y
a un problème de volumétrie, et dans ces accords de libre-échange j’observe
deux choses : un, l’agriculture est toujours un volet d’ajustement, deux,
ce sont presque systématiquement les filières d’élevage qui sont les plus
concernées. De surcroît, ce projet d’accord pose encore un autre problème
puisqu’il prévoit des clauses de sauvegarde pour les pays du Mercosur qui pourraient,
eux, les activer individuellement – je pense, par exemple, à l’industrie
automobile –, alors que l’Union européenne devrait être
unanime pour demander une clause de sauvegarde générale et non
pas filière par filière. C’est donc un projet d’accord
qui n’est pas équilibré… Il est très déséquilibré. Et je
crois que la possibilité de
recourir à des clauses miroirs
ne suffit pas l’équilibrer
parce que qui dit clauses miroirs, dit contrôle alors qu’il
faut bien convenir que les contrôles
sont impossibles du côté des pays du Mercosur et très difficilement effectués
du côté de l’Union européenne. Il y a beaucoup de choses qui ne vont pas dans
cet accord.
J’ai été la semaine dernière en Hongrie et en Autriche, où j’ai recueilli
l’opposition de ces pays. Je n’arrête pas de rencontrer les ministres de
tous les pays de l’Union européenne, hier encore : mes homologues
Irlandais, grecs et Polonais et moi-même avons ainsi été d’accord pour
considérer que ce projet d’accord ne convient pas en l’état, et je continuerai
à le combattre dans sa version signée à Montevideo.
> En 2024,
4 000 attaques et 11 000 bêtes tuées ou blessées ; au
11 mai 2025, 759 attaques et 2 617 bêtes prédatées.
L'État consacre 52 millions d'euros à des mesures de prévention et
d'indemnisation. Je préférerais employer cet argent pour soutenir la production
alimentaire.
Je redis mon total soutien aux éleveurs. Nous devons obtenir le
déclassement du loup, car l'espèce est désormais dans un bon état de
conservation. Cela devrait être fait le 8 juin. Nous passerons ainsi d'une
logique de défense à une logique de régulation.
Il faudra ensuite agir au niveau national. Un projet d'arrêté est en
cours de consultation, et achèvera son parcours le 10 juin. Signé par
Agnès Pannier-Runacher et moi-même, il permettra les tirs même sans attaque.
Nous devons donner des signes puissants à nos éleveurs, qui sont découragés par
ces prédations trop nombreuses.
Yannick Neuder (ministre délégué auprès de la ministre du
Travail, de la Santé, de la Solidarité et des Familles, chargé de la Santé et
de l’Accès aux soins)
> [Santé mentale /
Intervention à l’Assemblée] Depuis 153 jours que je suis à la tête de ce
ministère, la santé mentale est l’une de mes priorités.
Nous partageons ensemble le principe suivant lequel les annonces ne valent pas
un vrai plan d’action structuré avec l’ensemble des acteurs.
Le rapport que vous avez rédigé, je l’avais dit, alors que j’étais à la
commission des affaires sociales, doit donner lieu à des mesures concrètes,
inscrites dans la loi.
Cela sera fait le 11 juin prochain, à l’occasion de la marche pour la
santé mentale, puisqu’un comité de stratégie santé mentale permettra d’adopter
de telles mesures.
Certaines l’ont déjà été, notamment dans le plan Santé scolaire que nous avons
déployé avec Élisabeth Borne, ministre de l’éducation nationale.
D’autres, relatives en particulier aux quartiers prioritaires le seront, à
Montpellier lors du comité interministériel des villes, qui se tiendra le
6 juin en présence du premier ministre.
Enfin, le grand plan Sport et santé permettra encore d’en adopter d’autres,
sous l’égide de la ministre des sports.
Ainsi, un grand nombre de propositions que vous avez faites avec
Mme Sandrine Rousseau pourront être adoptées par la voie réglementaire,
tandis que d’autres auront besoin d’un vecteur législatif.
J’espère que nous saurons le trouver ensemble puisque la situation est très
urgente : il faut déstigmatiser et surtout dépister les troubles mentaux
et de sauver notre jeunesse.
Charlotte Parmentier-Lecocq (ministre déléguée auprès de
la ministre du Travail, de la Santé, de la Solidarité et des Familles, chargée
de l’Autonomie et du Handicap)
> [Sécurité sociale /
Intervention à l’Assemblée] Le rapport
de la Cour des comptes retrace la situation très tendue de notre sécurité
sociale, qui fait l'objet d'un suivi permanent du Gouvernement.
Cette situation s'explique, et nous ne sommes pas hors des crises :
la sécurité sociale subit les impacts des crises sanitaire, inflationniste et
géopolitique.
Vos propositions ont été écoutées lors du débat sur le projet de loi de
financement de la sécurité sociale, qui a conduit à une forme d'accord. Il
fallait trouver une issue pour préserver notre sécurité sociale.
Nous suivons de près la situation. Nous devrons encore prendre des
mesures, parfois difficiles, d'efficience, d'allègement, d'économie, de baisse
des dépenses. Cela nécessitera du courage ; nous en discuterons dès juin
prochain, puis en 2026.
Face au mur démographique, aux nouveaux besoins qu'entraîne le
vieillissement de la population, nous allons devoir nous pencher sur le
financement de notre sécurité sociale. C'est tout l'enjeu des discussions
demandées par le Premier ministre.
Véronique Louwagie (ministre déléguée auprès du ministre
de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique,
chargée du Commerce, de l’Artisanat, des Petites et moyennes entreprises et de
l’Economie sociale et solidaire)
> Lithium, graphite, germanium,
tantale : les métaux rares présents dans nos réveils, nos véhicules ou nos
téléphones portables sont indispensables à notre travail et à nos loisirs, mais
aussi à notre défense. Ils sont indispensables à notre avenir.
Les convoitises américaines à l'égard du Groenland
illustrent l'intérêt stratégique de ces ressources, qui ne sont pas des biens
de consommation comme les autres, mais des leviers géopolitiques. Ce qui est en
jeu, c'est notre souveraineté.
Nous voulons d'abord mieux connaître nos propres ressources. C'est le sens de
l'inventaire dont nous avons chargé le BRGM.
Il faudra ensuite relancer l'exploitation. Une seule mine, celle de
Varangéville, en Meurthe-et-Moselle, est encore en action. L'État soutient un
projet autour du lithium dans l'Allier. Nous avons également évoqué la Guyane.
Par ailleurs, la France est engagée dans des partenariats stratégiques. Une
quinzaine d'accords ont déjà été conclus, notamment avec l'Indonésie,
l'Argentine et le Kazakhstan.
Nous voulons aussi réindustrialiser, car extraire des métaux sans les raffiner
et les transformer n'aurait que peu d'intérêt. Nous devons pour cela attirer
des investissements. C'est le cas avec Carester ou la coentreprise entre XTC et
Orano.
Enfin, il nous faut recycler sur notre sol : c'est un enjeu crucial pour
notre souveraineté.
Nous devons penser et agir en Européens, car nous avons besoin d'une Europe
puissante pour être efficace.
Françoise Gatel (ministre déléguée auprès du ministre de
l’Aménagement du territoire et de la Décentralisation chargée de la Ruralité)
> [« Comment nos politiques publiques peuvent-elles contribuer à
relever les défis auxquels sont confrontées les zones rurales de notre
pays ? »/ Interventions lors du débat au Sénat]
La ruralité représente 22 millions
d'habitants, 88 % de nos communes et 31 % de l'industrie française.
Pourtant, elle est souvent réduite à quelques clichés, au risque d'en oublier
le potentiel. Je me réjouis donc de ce débat.
Le potentiel de la ruralité tient d'abord à sa complémentarité avec les
villes : ne pensons pas les deux en opposition ! Les ruralités sont
de fabuleux espaces d'innovation où foisonnent les trucs qui marchent.
Diverses, les ruralités ont longtemps été les grandes absentes de nos
politiques publiques. Mais, depuis quelques années, nous avons fait bien du
chemin - en témoigne l'existence d'un ministère dédié. Grâce à votre
engagement et à celui des élus, la ruralité s'est installée au centre du débat
public, notamment avec le plan France Ruralités. Je salue le travail mené par
la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales, présidée par Bernard
Delcros.
En ruralité, se déplacer, accéder à un professionnel de santé, trouver
un logement ou aller à l'université est souvent un défi. Le plan France
Ruralités, lancé par Élisabeth Borne, vise à répondre à ces difficultés.
Depuis mon entrée en fonction, j'ai visité trente-six départements. Avec
François Rebsamen, j'ai engagé des actions concrètes.
En matière de santé, le plan France Ruralités s'est traduit par
l'ouverture de plus de 1 500 maisons de santé. Avec la quatrième
année d'internat, nous entendons inciter les jeunes médecins à s'installer en
zone rurale : 3 700 docteurs juniors seront à pied d'oeuvre dès
l'année prochaine. Nous devons aller plus loin encore : c'est le sens du
pacte de lutte contre les déserts médicaux annoncé par le Premier ministre. Je
salue le travail du Sénat, notamment avec la proposition de loi du président
Mouiller.
Dans le domaine éducatif, les inquiétudes des élus devant les fermetures
de classes doivent être entendues. La création de 203 territoires
éducatifs ruraux, couvrant 200 000 élèves, a été très bien
accueillie. Nous avons voulu donner une visibilité sur trois ans aux
territoires en matière d'évolutions démographiques.
En matière de logement, nous travaillons sur plusieurs fronts :
accélération des rénovations, lutte contre la vacance - avec une prime de
sortie réservée aux zones rurales -, extension du PTZ à tout le
territoire. Près de 80 % des communes rurales bénéficient d'un programme
de l'Anah.
En matière de mobilités, nous prévoyons un investissement de
80 millions d'euros sur trois ans dans le cadre du fonds vert. Au début du
mois, lors de la conférence nationale Ambition France Transports organisée par
Philippe Tabarot, j'ai rappelé l'importance de ces enjeux pour la ruralité et
fait des suggestions.
D'autres dispositifs sont mis en œuvre pour faciliter la vie dans les
territoires ruraux : 2 800 maisons France Services, 2 880
Villages d'avenir, 1 650 Petites Villes de demain.
Convaincue que nous devons aller plus loin, j'ai entrepris un tour de
France de la ruralité. Un comité interministériel à la ruralité se réunira très
prochainement pour faire le bilan de France Ruralités et prolonger l'action
engagée par de nouvelles propositions. Je crois davantage au sur-mesure du
jardin à l'anglaise qu'à l'uniformité du jardin à la française.
Les réalités plurielles de nos territoires ruraux doivent inspirer le
Gouvernement, mais aussi le législateur. Car ce n'est qu'ensemble, État,
Parlement et élus locaux, que nous construirons l'avenir d'une ruralité où l'on
reste, revient ou s'installe. Si nous sommes tous des enfants de ruraux, je
souhaite que nous ayons aussi des enfants ruraux heureux. (…)
Le réseau ferré est un enjeu essentiel pour lutter contre l'assignation
à résidence dans les territoires ruraux.
Les régions sont des acteurs moteurs, mais elles ne sont pas seules.
Dans le cadre des contrats État-région, le premier a investi 104 millions
d'euros en 2023, puis autant en 2024.
Nous devons maintenir la plupart des lignes, mais aussi réfléchir à des
solutions alternatives lorsque la fréquentation est trop faible. Je pense à des
lignes légères aux normes assouplies : un projet existe sur le trajet
Nancy-Contrexéville.
Nous avons besoin d'une vision stratégique pour le ferroviaire de
proximité. (…)
L'accès de nos jeunes à un chemin professionnel choisi est essentiel.
Jusqu'au collège, les élèves des zones rurales réussissent aussi bien que ceux
des villes. Mais, ensuite, ils sont plus nombreux à s'orienter vers des voies
professionnelles, et trop peu accèdent à l'enseignement supérieur.
Je travaille à une nouvelle approche avec Élisabeth Borne et Philippe
Baptiste. Le Premier ministre a annoncé une première année de médecine au
niveau local et nous expérimentons une option médecine dans certains lycées,
qui devra être élargie. Nous devons développer les formations de premier cycle
dans les villes moyennes.
J'ai visité le campus connecté de Nevers, dont les résultats sont assez
remarquables. Il est exact que ces campus doivent, pour certains, être
améliorés. Ils ne constituent pas non plus la solution unique.
Avec Élisabeth Borne, je travaille sur l'idée d'une première année de
formation supérieure dans les lycées, afin de proposer au plus près des jeunes
une large palette de formations. (…)
La ruralité est la clé du développement durable. Oui, elle rencontre des
difficultés, mais il n'y a pas de fatalité : elle doit être vivante,
productive et accueillir de nouveaux habitants.
Dans les trente-six départements que j'ai visités, je n'ai pas senti de
résignation. J'entends les difficultés, mais les élus se battent. Nous devons
les aider.
Les Villages d'avenir sont 2 888 et les Petites Villes de demain,
1 650. Ces évolutions doivent être poursuivies.
S'agissant de la valorisation des aménités rurales, nous sommes passés
de 40 à 110 millions d'euros en deux ans.
Je ne suis pas naïve, mais je vois l'énergie qui se manifeste dans les
initiatives locales. (…)
> [Internet] La
ruralité doit bénéficier de ces technologies. La situation est inégale selon
les départements. L'État a investi plus de 3,5 milliards d'euros dans le
plan France Très Haut Débit. Les raccordements sont parfois complexes ;
ils incombent aux opérateurs.
Un dispositif piloté par la Direction générale des entreprises (DGE)
sera expérimenté à partir du mois de septembre sur 3 141 communes
pour lesquelles la fermeture du réseau cuivre est prévue d'ici à 2027,
afin d'aider au financement des travaux.
Le dispositif Cohésion numérique des territoires finance les solutions
de substitution hertziennes, comme le satellite, en attendant la fibre.
La fermeture du réseau cuivre est soumise à de strictes conditions, dont
des délais de prévenance. Des comités locaux, sous l'égide du préfet, assurent
le suivi du plan de fermeture sur le territoire. (…)
L'éducation, c'est l'école mais aussi le périscolaire. Lorsque la loi a
imposé les nouveaux rythmes scolaires, l'État a accordé aux communes une aide à
la mise en place du temps périscolaire. L'obligation a été supprimée, et les
communes sont libres de revenir au rythme de quatre jours. L'État a
maintenu cette dotation jusqu'à cette année ; elle va être supprimée en
effet, vu le contexte budgétaire contraint. Nous travaillons avec Élisabeth
Borne pour développer les territoires éducatifs ruraux, avec une aide pour le
périscolaire. Pour avoir une école de qualité dans nos territoires ruraux, il
faut faire venir des habitants, et donc des entreprises. (…)
Il y a désormais un consensus pour renforcer les pouvoirs du préfet de
département. Ce doit être le chef d'orchestre de tous les services de l'État et
des agences. Il doit arbitrer en écoutant chaque administration, dans l'intérêt
général, en hiérarchisant les urgences. Nous voulons lui donner un pouvoir
d'appréciation de la norme, qui ne saurait être la même pour une petite ou une
grande entreprise, au nord ou au sud de la Loire. Ce préfet doit enfin être
sécurisé face au sport national qu'est la judiciarisation. Nous approchons du
but ! (…)
► Assemblée
nationale
Yaël Braun-Pivet (présidente)
> [Droit à l’aide à mourir
/ Intervention à l’Assemblée] Je me suis engagée pour que la proposition de loi
sur l’aide à mourir soit examinée et débattue. Certains redoutaient des
tensions. C’est tout l’inverse qui s’est produit : des échanges apaisés,
respectueux des convictions de chacun. L’Assemblée a montré son plus beau
visage. J’en suis fière.
> [Droit à l’aide à mourir / Intervention à l’Assemblée] Mon objectif, c'est qu'à l'été 2026, nous puissions avoir voté définitivement ce texte, ce serait une grande avancée pour tous.
> Dire que notre bilan régalien n’est pas à la hauteur, c’est ignorer le travail mené. J'étais pendant cinq ans à la présidence de la commission des Lois, nous avons voté des textes structurants : immigration, sécurité intérieure, lutte contre le terrorisme. L’action est là, et elle se poursuit.
> L'équité est le maître-mot des économies budgétaires que nous devons faire. Chacun doit pouvoir apporter sa pierre à l'édifice.
Je me suis engagée pour que la proposition de loi sur l’aide à mourir soit examinée et débattue. Certains redoutaient des tensions. C’est tout l’inverse qui s’est produit : des échanges apaisés, respectueux des convictions de chacun. L’Assemblée a montré son plus beau visage. J’en suis fière.
> C'est compliqué de faire un référendum sur la loi de finance. Juridiquement, à mon sens, il n'y a pas de voie de passage sur la loi de finance pour passer par referendum.
> Une partie des socialistes aimerait s'engager dans une voie de dialogue avec la majorité. J'appelle à un large rassemblement. J'aspire à ce qu'il y ait un dialogue beaucoup plus nourri avec le PS.
► Partis
politiques
● Renaissance
[Nota: dans ce parti, les propos de ses membres qui ne sont pas centristes
et se considèrent à droite ou à gauche ne sont plus retranscrits]
David Amiel (député)
> Si rien n’est fait, en 2026, le déficit de l’assurance maladie aura
doublé par rapport à 2023 et atteindra 22 milliards d’euros. Ces chiffres
ne sont pas les miens mais ceux de la Cour des comptes, publiés lundi. Ils
appelleront bien sûr une réforme à la fois d’urgence et d’ampleur de notre
système de santé et nous obligent à ne pas détricoter ce qui a été lancé. Or il
est difficile de trouver des économies aussi documentées, justifiées et
concertées que celles résultant de la réforme des transports sanitaires.
Il y a urgence à agir. Les dépenses de taxis sanitaires dépassent les
3 milliards d’euros et ont augmenté de plus de 7 % par rapport à
2023. Cette dérive financière peut être jugulée sans nuire en rien à l’accès
aux soins. Ni les facturations des transports à vide, ni les disparités
territoriales invraisemblables, ni les fraudes importantes ne peuvent être
comprises par nos concitoyens. Nous ne pouvons pas demander des efforts à
l’ensemble des Français si nous ne sommes pas capables de répondre à des dysfonctionnements
aussi évidents.
Certes il n’y a pas d’économie facile et certes le dialogue doit toujours être
maintenu, comme il l’a été depuis plus d’un an par l’assurance maladie. Mais
nous ne serons jamais de ceux qui appellent à des économies dans les discours
et reculent quand il s’agit de passer aux actes. Le premier ministre a tenu bon
ce matin à propos de l’entrée en vigueur de la nouvelle convention le 1er octobre.
Nicole Dubré-Chirat (député)
> [Droit à l’aide à mourir
/ Intervention à l’Assemblée] Après deux semaines d’examen en séance sur les
deux textes relatifs aux soins palliatifs et à la fin de vie, l’Assemblée se
prononce aujourd’hui lors d’un vote solennel. Attendue par 85 % des
Français, et par des soignants, la proposition de loi sur la fin de vie
intervient dans la continuité et la complémentarité de la proposition de loi
sur les soins palliatifs et d’accompagnement. Elle est défendue par notre
collègue Olivier Falorni, dont je veux saluer l’engagement depuis une quinzaine
d’années sur ce sujet. Je remercie aussi les corapporteurs Brigitte Liso, Élise
Leboucher, Stéphane Delautrette et Laurent Panifous pour leur travail, ainsi
que Mme la ministre pour sa présence et son appui.
Ce texte est la traduction concrète des travaux menés depuis longtemps sur
cette question intime et complexe. Les débats successifs ont permis la
rédaction d’un texte équilibré et solide, proposant un droit à l’aide à mourir.
L’aide à mourir est avant tout une liberté qui n’enlève rien à personne :
ce droit offre une possibilité, il propose une réponse à la demande du patient,
dont l’éventuelle mise en œuvre est conditionnée par un choix qui lui
appartient et que nous n’avons pas à juger. Ce droit repose sur un cadre
juridique précis, avec des conditions rigoureuses et cumulatives, prévues par
l’article 4, ainsi qu’une procédure très encadrée aux articles 5 à
13. Ces critères sont semblables et communs à ceux en vigueur dans d’autres
pays qui pratiquent l’aide à mourir.
Les facteurs d’éligibilité sont les suivants : la majorité ; la
nationalité ou la résidence en France ; l’affection, grave et
incurable ; les douleurs réfractaires à tout traitement ; et, enfin,
la manifestation de la volonté. Ils entraînent de fait la non-éligibilité des
personnes atteintes d’une maladie psychiatrique, des personnes âgées, des
personnes en situation de handicap et des mineurs. On peut regretter la
suppression de la faculté de choisir entre autoadministration et administration
par un professionnel de santé, seule l’autoadministration ayant été retenue – sauf en cas d’inaptitude physique. J’appelle votre attention sur le fait
que la demande réitérée jusqu’à la
dernière minute ne permettra
pas aux personnes dans l’incapacité d’exprimer cette demande, d’accéder à l’aide à mourir si elles souffrent, par
exemple, d’une maladie neurodégénérative. J’insiste aussi sur un point très important : le droit de recourir à l’aide à mourir repose, d’une part, sur le choix du malade,
dans le respect de la dignité
de la personne, et d’autre part
sur le respect des convictions des soignants d’y participer ou non – le texte leur accordant une
protection par la clause de conscience.
Après un long parcours
chaotique, il est temps pour la représentation
nationale de se prononcer sur ce sujet d’importance.
Je crois qu’il est de notre
devoir de répondre à la demande exprimée depuis des années par certains malades et par les
associations qui les représentent,
et de concrétiser les
propositions de la Convention citoyenne sur la fin de vie. Les débats ont été respectueux,
parfois tendus, mais ils ont permis des votes transpartisans et l’on ne peut
que s’en réjouir. L’Assemblée nationale a été à la hauteur de la gravité de la
question. Ce texte est conforme aux valeurs de la République : liberté
comme liberté de choix, égalité comme égalité d’accès aux soins sans
discriminations, et fraternité de l’accompagnement en fin de vie. Notre droit
doit pouvoir proposer à chacun une fin de vie libre et choisie dans les
conditions les plus dignes, lorsque la maladie ou la douleur ne sont plus
supportables et qu’aucun traitement n’est efficace.
L’aide à mourir est une liberté propre à chacun, alors même que la mort fait
partie de la vie. « La vie, pour citer Paul Morand, est une maladie dont
tout le monde meurt. »
Si j’appelle, à titre personnel, à faire évoluer le cadre législatif, le groupe Ensemble pour la République laissera à ses membres la liberté de vote sur l’ensemble du texte, au nom du respect des valeurs de chacun.
Vincent Ledoux (député)
> [Droit à l’aide à mourir
/ Intervention à l’Assemblée] « Ce n’est pas la mort que l’on redoute,
c’est de mourir sans avoir été compris. » Cette phrase de François Cheng
exprime avec une justesse bouleversante ce qui habite chacun face à la
finitude : le besoin d’être reconnu dans sa singularité, son histoire,
dans sa douleur comme dans ses choix.
Être compris, c’est être reconnu jusqu’au bout comme une personne, et non
uniquement comme un corps. C’est recevoir la main tendue, le cœur ouvert à la
souffrance : le fardeau est moins lourd à porter lorsque l’on n’est pas
seul. Être compris dans sa vulnérabilité, sa faiblesse, sa dépendance, n’est-ce
pas là, au fond, la plus belle promesse de la fraternité républicaine ?
Cette compréhension a été rendue possible par les pionniers des soins
palliatifs, qui ont permis d’affirmer le refus de l’obstination déraisonnable,
la reconnaissance des directives anticipées, et le droit à la sédation
profonde. Les Français leur en sont reconnaissants : ils font massivement
confiance à cette approche pour soulager les souffrances en fin de vie.
J’aimerais exprimer ma gratitude à nos soignants, si courageux, si
bienveillants – ils sont la fierté
de notre République du soin.
Pourtant, vingt ans après leur
création, les soins palliatifs
restent trop méconnus. Les Français les plébiscitent, mais les identifient mal. Ils demandent aujourd’hui un accès effectif, pour tous et partout. C’est à cette
attente qu’il nous faut répondre par un développement massif, ambitieux et équitable de ces soins, ce que défend avec conviction notre collègue Annie Vidal. Son texte
concrétise une exigence républicaine essentielle – l’égalité devant l’accompagnement ultime.
La République, c’est aussi garantir, jusqu’à la dernière heure, la bienveillance des soins, la chaleur d’une présence, la dignité
d’un accompagnement, non
seulement dans les unités spécialisées, mais aussi à
domicile, dans les Ehpad, dans les hôpitaux
généraux et dans ces maisons d’accompagnement à
taille humaine que nous allons créer.
Il est temps de bâtir une véritable culture palliative, intégrée
à la formation, aux parcours de soins, et aux mentalités.
Cette proposition de loi qui s’inscrit dans la stratégie décennale du
gouvernement, dotée de 1 milliard d’euros, structure et amplifie cette
ambition en tissant des liens entre les acteurs du soin et en reconnaissant la
place des aidants, ces piliers silencieux et essentiels. D’ici dix ans, chaque
département devra être doté d’au moins une unité de soins palliatifs, afin de
corriger les disparités territoriales. La coordination sur le terrain sera
renforcée pour garantir une prise en charge fluide et continue des patients.
Les tarifs seront encadrés pour prévenir toute inégalité d’accès liée au coût.
Un plan de soins personnalisé sera systématiquement proposé, intégrant les
besoins médicaux, psychologiques et sociaux de chaque patient. Des campagnes
d’information seront déployées pour sensibiliser le grand public et
déconstruire les idées reçues. Par ailleurs, le gouvernement devra présenter au
Parlement des rapports sur plusieurs réformes attendues.
Notre groupe, Ensemble pour la République, laisse à chacun de ses membres la
liberté de vote, mais j’espère que nous soutiendrons unanimement ce texte.
Il ne s’oppose pas à celui sur l’aide à mourir, bien au contraire. Ces deux
propositions de loi sont les deux volets d’un même regard porté sur la fin de
vie, qu’il convient d’envisager dans toute sa complexité. Lorsque la souffrance
devient réfractaire, lorsque le pronostic vital est engagé, certains ne
demandent plus seulement à être soulagés, mais à pouvoir choisir, en
conscience, les conditions de leur départ. Ils ne réclament pas la mort, mais
la liberté de mourir dignement, lorsque la vie n’est plus que souffrance.
Comprendre, c’est aussi entendre cette demande. C’est reconnaître que la
fraternité, parfois, consiste à ne pas imposer à l’autre de vivre ce qu’il ne
peut plus endurer. C’est l’objet du second texte, qui fixera un cadre strict à
cette possibilité.
En soutenant ce plan ambitieux de soins palliatifs, nous faisons le choix de
mieux accompagner, de mieux comprendre celles et ceux qui s’apprêtent à quitter
la vie et de leur offrir, jusqu’au bout, la possibilité d’être reconnus pour ce
qu’ils sont, ce qu’ils vivent et ce qu’ils ressentent.
« Ce n’est pas la mort que l’on redoute, c’est de mourir sans avoir été
compris », affirmait l’académicien : mieux entendus et respectés dans
nos choix de vie, nous redouterons peut-être un peu moins notre fin.
Annie Vidal (députée)
> [Droit à l’aide à mourir
/ Intervention à l’Assemblée] Je voudrais vous remercier, chers collègues, pour
le beau vote unanime de la proposition de loi relative à l’accompagnement et
aux soins palliatifs, ainsi que pour la qualité des débats, riches et nourris,
que nous avons menés pendant deux longues semaines. Je remercie tout
particulièrement Mme la ministre, qui inlassablement a répondu à toutes
nos questions et parfois plusieurs fois à la même question.
Ce vote unanime envoie un message très fort aux malades, à leurs proches, mais
aussi aux soignants. Tous les jours, dans des conditions parfois difficiles,
ces derniers prennent soin de celles et ceux qui nous sont chers en leur
manifestant écoute, respect, solidarité et humanité. Je veux les remercier, eux
qui promettent de les accompagner jusqu’à leur dernier souffle et de ne pas les
abandonner. Avec ce vote unanime, nous réaffirmons notre engagement à leurs
côtés.
En tant que législateurs, nous pouvons nous réjouir de cet acte collectif, mais
il nous appartiendra de veiller au développement effectif des soins palliatifs.
Nos successeurs et nous-mêmes devrons continuer d’agir pour que
l’accompagnement et les soins palliatifs soient accessibles partout, à toutes
celles et ceux dont l’état de santé les requiert. Voilà ce que nous disons haut
et fort aujourd’hui aux malades, à leurs proches et aux soignants. Merci pour
eux !
Laure Miller (députée)
> [Entrisme des Frères musulmans] Il y a quelques jours,
un rapport relatif à l’évaluation de la mouvance des Frères musulmans a été
rendu public. Leur stratégie d’entrisme à bas bruit dans notre pays et la
diffusion de leur idéologie au sein de nos écosystèmes locaux y sont dépeintes.
Nous savons que la stratégie des Frères musulmans repose en grande partie sur
la victimisation. Or cette stratégie est partiellement gagnante en raison de
certains groupes qui, ici même, abîment le débat par leurs postures
idéologiques et clientélistes ! Ainsi l’extrême droite, en faisant
l’amalgame entre islamisme et islam, et une partie du NFP, en refusant de voir
la menace en face, sont en réalité des alliés objectifs des Frères
musulmans !
Si la polarisation du débat public et médiatique ne semble laisser le choix
qu’entre une dangereuse restriction de nos libertés publiques et une passivité
coupable, nous défendons une autre voie ! En effet, la réponse est
nécessairement multiple.
Elle consiste sans aucun doute à soutenir nos concitoyens de confession
musulmane qui pratiquent leur religion en parfaite harmonie avec les valeurs de
la République.
Nous pensons que dénoncer l’entrisme des Frères musulmans, c’est précisément
protéger nos compatriotes de confession musulmane dont l’image est profondément
abîmée par ceux qui dévoient leur religion.
La réponse réside aussi dans un réveil de notre promesse républicaine. C’est
parce que notre République est en difficulté dans certains quartiers, parce que
l’école a en partie perdu sa vocation émancipatrice, parce que nous avons
laissé prospérer des discriminations dans notre pays, que l’islam radical s’est
engouffré dans nos manquements.
Enfin, la réponse doit nécessairement consister aussi à mettre fin à nos
petites lâchetés et à nos grandes hypocrisies en faisant preuve
d’intransigeance à la moindre entaille infligée à nos valeurs républicaines,
qu’il s’agisse de la liberté de conscience parmi nos enfants ou de l’égalité
entre les femmes et les hommes.
● MoDem
Erwan Balanant (député)
> La semaine dernière, devant le tribunal de Vannes, les victimes
du médecin Joël Le Scouarnec ont dénoncé le silence de la société mais
aussi, plus grave encore, celui du monde politique face à ce qu’elles avaient
vécu et face à sa propre responsabilité – notre responsabilité.
Ayons une pensée pour les
victimes et pour leurs souffrances indélébiles, dans leur corps et dans leur âme. Nous ne pouvons tolérer
que des abus sexuels aient pu être perpétrés de manière sérielle sans qu’aucune
véritable mesure ait été prise et – ce qui est encore pire – par un individu qui avait déjà été condamné en
2005 pour recel d’images pédopornographiques.
Le parquet a requis il y a quelques jours la peine maximale. Le verdict doit être rendu demain.
Pourquoi notre société n’a-t-elle pas su entendre ?
Pourquoi n’a-t-elle pas su voir ? Pourquoi n’a-t-elle pas su prendre la mesure
des événements ?
Il est urgent de mieux prendre en considération les enfants victimes de
violences dans les familles, dans les clubs de sport, dans les écoles, dans les
lieux de protection de l’enfance, dans les établissements de soin, dans les
milieux artistiques, bref partout où nos enfants devraient se sentir protégés.
Toutes ces victimes sont légitimes à dénoncer l’invisibilisation. Nous en
portons notre part de responsabilité.
En notre nom à tous, je tiens à leur présenter nos excuses, à leur demander
pardon et à les assurer que nous les entendons et qu’elles ne sont plus seules.
Ces affaires ne doivent pas être passées sous silence.
Pour que cette promesse ne soit pas vaine, comment garantir que notre société a
les moyens d’écouter, de croire et d’accompagner les victimes ?
Philippe Vigier (député)
> [Droit à l’aide à mourir
/ Intervention à l’Assemblée] C’est avec humilité que je m’exprime sur ces
textes au nom du groupe Démocrate, à la demande de notre président, Marc
Fesneau. Je tiens d’emblée à le dire : tous les députés démocrates
voteront en faveur de la proposition de loi qui permettra de pourvoir tout le
territoire français en soins palliatifs et d’accompagnement, madame la
ministre ; une grande majorité d’entre eux votera pour la proposition de
loi relative au droit à l’aide à mourir, quelques-uns voteront contre, d’autres
ont choisi de s’abstenir. Tous sont respectables dans leur choix et je porterai
leur parole.
Comme l’a rappelé Mme la présidente, dont je salue l’implication, après
ces quatre semaines de discussions – deux en commission, deux en séance publique –,
nous sommes fiers d’être
parlementaires. Le débat a été apaisé,
argument contre argument. Je remercie le rapporteur général qui, avec
humilité, enthousiasme et pondération, a su élever le débat
au niveau où il devait l’être. Je remercie le président de la commission des affaires
sociales, dont je n’oublie pas
les interventions à plusieurs
moments. Je vous remercie aussi, madame la ministre. Nous avons en partage,
tous les deux, d’avoir cheminé, d’avoir évolué. La concision de vos réponses et
votre volonté constante d’introduire des précisions grâce aux amendements
gouvernementaux ont contribué à la qualité de nos débats.
Sur nombre de sujets sociétaux, l’autorisation de l’interruption volontaire de
grossesse (IVG), l’abolition de la peine de mort, l’autorisation de la
procréation médicalement assistée (PMA), le mariage pour tous, les échanges en
ce lieu n’étaient pas apaisés, ils ne l’ont pas été davantage lors de l’examen
de la loi Claeys-Leonetti – j’ai lu les
comptes rendus des débats de l’époque. Nous avions un devoir, celui
d’être collectivement à la hauteur. Nous l’avons été, pour les malades d’abord, qui nous écoutent, qui nous regardent et dont
certains, dans l’impasse,
attendaient ce nouveau droit, pour
les soignants, cette communauté
généreuse, professionnelle, que nous avons applaudie pendant l’épidémie de covid, en particulier ceux qui, comme le dirait ma
collègue Blandine Brocard, accompagnent les patients « jusqu’au bout de leur
vie ».
Plusieurs textes ont ponctué notre cheminement sur ces questions : la
proposition de loi relative au droit de vivre sa mort du sénateur Caillavet, la
loi Kouchner, relative aux droits des malades, la loi Leonetti qui visait – il y a vingt ans déjà – à mettre
un terme à « l’obstination déraisonnable
n’ayant d’autre effet que le seul maintien
artificiel de la vie ». Ce
texte envisageait déjà la situation des personnes
« en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable »
dont on ne peut soulager les souffrances qu’en leur appliquant « un
traitement qui peut avoir pour effet secondaire d’abréger la vie » – autrement dit, de hâter la mort.
En 2016, une nouvelle étape a été franchie avec la loi Claeys-Leonetti, qui avait été votée à l’Assemblée avant
d’être totalement démantelée au Sénat ; il a fallu trouver un équilibre lorsqu’elle est revenue dans l’hémicycle. Un droit nouveau a été alors créé, je cite Jean Léonetti, « le
droit du malade de dire : lorsque je souffre trop (…), je demande,
si je le souhaite, qu’on arrête et qu’on m’endorme pour que la mort survienne
dans mon sommeil ».
Le fait que certains d’entre nous aient voté contre la loi Claeys-Leonetti ne
les a pas empêchés de se faire les ambassadeurs du droit à l’aide à mourir ces
derniers jours. C’est bien la preuve que chacun peut évoluer au cours de sa
vie !
S’agissant de l’accompagnement et des soins palliatifs, vous serez, madame la
ministre, celle qui aura enfin permis, grâce à la stratégie décennale, de
remédier à ce que nous avons tous dénoncé : vingt et un départements sont
dépourvus d’unités de soins palliatifs ; 50 % des Français ne peuvent
accéder à ces services. Mais permettez-moi de réitérer encore une fois une
demande : la médecine palliative doit devenir une discipline universitaire
reconnue, sans quoi la filière peinera à attirer les médecins. Osons
avoir cette ambition et défendons-la ! De même, faisons valoir la
nécessité de sensibiliser l’ensemble des soignants en introduisant une
formation aux soins palliatifs et à la fin de vie non seulement dans les études
de médecine, mais aussi dans les cursus d’infirmiers et d’aides-soignants.
Quant à la proposition de loi relative au droit à l’aide à mourir, son histoire
a commencé ici même, il y a quatre ans, avec l’examen en première lecture de la
proposition de loi donnant le droit à une fin de vie libre et choisie – qui s’est interrompu le premier jour, après l’adoption de
l’article 1er. Son parcours
s’est poursuivi avec le projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et
de la fin de vie, adopté par la commission spéciale, dont l’examen en séance
publique a malheureusement pris fin avec la dissolution.
L’année 2025 marque donc une renaissance : 240 députés, issus de tous
les bancs, ont signé la proposition de loi relative à la fin de vie, nourrie du
formidable travail de la Convention citoyenne sur la fin de vie. Regardez
encore une fois ce qu’ont accompli ces citoyens : c’est un exemple dont il
faut s’inspirer ! On a tendance à l’oublier et il n’est pas souvent cité,
mais je voulais aussi mentionner le Comité consultatif national d’éthique
(CCNE) qui nous a dit deux choses : débrouillez-vous pour qu’il y ait des
soins palliatifs pour tous ; faites en sorte d’ouvrir une voie éthique
pour l’application de l’aide à mourir. Nous sommes ici au rendez-vous !
Alors, que permettra cette nouvelle loi ? Elle donnera d’abord à des
hommes et à des femmes le droit de bénéficier d’une aide à mourir : c’est
un droit en plus, pas un droit en moins ! Les patients atteints de la
maladie de Charcot ne sont pas les seuls concernés ; je pense aussi à ceux
qui souffrent de cancers à tumeurs multiples, pour lesquels l’impasse
thérapeutique est totale. Ce texte est équilibré, solide, il définit cinq
critères cumulatifs et s’appuie sur un mot : le discernement. Quiconque a
perdu son discernement ne pourra accéder à l’aide à mourir, a contrario des
dispositions de la loi Claeys-Léonetti – je vous renvoie aux propos de Jean Leonetti qui expliquait
qu’un patient ayant perdu son
discernement pourrait bénéficier, au travers des soins
palliatifs, de la sédation
profonde et continue jusqu’à la
mort.
Le texte prévoit que le patient réitère sa demande d’accéder à l’aide à mourir
et la collégialité de la procédure a été renforcée par l’adoption de plusieurs
amendements. Je le dis donc avec force : non, les résidents des Ehpad,
s’ils ne remplissent pas les cinq conditions, ne pourront accéder à l’aide à
mourir ; non, les enfants ne sont pas concernés ; pas plus que les
handicapés – je
le dis à Perrine Goulet –, que les personnes atteintes
de la maladie d’Alzheimer ou d’une affection psychiatrique, dès lors qu’elles ont perdu leur
discernement !
J’ajoute que les professionnels de santé sont protégés. Notre collègue
Geneviève Darrieussecq a beaucoup insisté sur cette question, en particulier
sur la clause de conscience. Tous les soignants peuvent la faire jouer. Je
sais, chers collègues, que certains parmi vous souhaiteraient insister
davantage sur le volontariat. Nous en reparlerons lors de la navette et je suis
persuadé que nous trouverons ensemble une voie de passage.
Quant aux directives anticipées, elles n’ont pas été intégrées au texte. C’est
ce qui lui a permis de garder son équilibre et j’en remercie encore Olivier
Falorni ! Nous voulions éviter que l’aide à mourir puisse faire partie
d’un projet de vie ; elle ne pourra donc pas être demandée dans des
directives anticipées.
« On a bougé sur rien », ai-je entendu. Ce n’est pas vrai ! Nous
avons bougé sur la collégialité, sur les soins palliatifs – qui continueront d’être proposés jusqu’au bout – ou encore sur la définition des notions de « pronostic vital engagé à moyen
terme » et d’« affection en phase avancée ou terminale », pour
lesquelles nous avons repris les mots de la Haute Autorité de santé (HAS).
Ensuite, voilà enfin un acte médical – je le dis aux collègues
médecins – qui fera l’objet
d’une vraie évaluation ! Elle sera faite a posteriori, certes, mais vous connaissez
des actes médicaux évalués a priori ? Non ! En revanche,
l’évaluation a posteriori permettra de corriger toute dérive éventuelle.
Par ailleurs, le délit d’entrave à l’aide à mourir a été calqué à l’identique
sur celui qui avait été introduit pour l’IVG.
Je tiens enfin à m’adresser aux collègues qui s’opposent au texte. Il faut
respecter leur pensée et je sais que pour eux, ce n’est pas une loi d’humanité
ni de fraternité. Chacun son chemin ; chacun jugera en son âme et
conscience. Dans notre groupe, la liberté de vote prévaut, vous l’avez compris.
Nous avons essayé de légiférer sérieusement, en ayant une pensée affectueuse
pour celles et ceux qui nous regardent, afin d’ouvrir un nouveau chemin dans
lequel le respect est présent à tout instant. C’est avec une immense humilité
que nous l’avons fait et nous serons toujours prêts, si jamais des dérives se
font jour par rapport au texte que nous nous apprêtons à voter, à les corriger.
Connaissez-vous beaucoup d’actes médicaux pour lesquels, lorsqu’une dérive a
été constatée, il est possible de saisir soit le procureur de la République,
soit les ordres des professions de santé ?
La liberté de vote, chez nous, est donc la règle, mais nous soutiendrons
majoritairement ce nouveau droit. Merci à ceux qui en ont été les artisans – ils ont fait preuve de détermination, d’équilibre et de solidité – et, une nouvelle fois, à Olivier Falorni. Chacun va se déterminer en conscience dans quelques
minutes mais quoi qu’il arrive,
je suis convaincu que nous avons donné
une belle image de l’Assemblée. Surtout, nous avons apporté une vraie réponse à nos
malades.
Olivier Falorni (député)
> [Droit à l’aide à mourir
/ Intervention à l’Assemblée] Chers collègues, merci d’avoir fait de ce débat
un beau débat parlementaire. Merci d’avoir voté une belle loi républicaine qui
défend en son cœur les valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité. En cet
instant, je pense à tous les malades et à tous leurs proches que j’ai
rencontrés depuis plus d’une décennie. Beaucoup, qui ne sont plus parmi nous,
m’ont dit : « Battez-vous ! Ne vous battez pas pour nous – pour nous, ce sera trop tard –, mais pour les autres, ceux
qui viendront après nous. » Il est des jours dont on sait
qu’on ne les oubliera jamais. Je n’oublierai jamais cette journée. Merci à
tous ! (
● Parti radical
> [Le Parti Radical salue l’adoption par les députés de la loi sur la
fin de vie et l’aide à mourir] À l’issue des débats parlementaires et du vote
ayant eu lieu le mardi 27 mai sur le projet de loi relatif à la fin de vie, le
Parti radical salue la décision des députés d’adopter une loi incluant l’aide à
mourir dans le respect de la liberté de choix de chacun. Il revient à présent
aux sénateurs d’étudier ce texte éminemment intime dans le cadre d’un débat
apaisé avec la même exigence de responsabilité et d’humanisme.
Offrir une fin de vie dans la dignité est un combat que nous menons depuis les
années 1980, lorsque le Dr Pierre Simon, membre du Parti radical a cofondé
l’Association pour le droit de Mourir dans la dignité.
Le Parti radical rappelle que ce nouveau droit ne saurait occulter l’absolue
nécessité d’un accès universel et renforcé aux soins palliatifs pour tous sur
l’ensemble du territoire. Nous appelons à la mise en œuvre rapide d’un plan
d’investissement ambitieux pour répondre aux besoins des patients et de leurs
familles, tout en poursuivant l’effort de formation et de sensibilisation des
professionnels de santé.
Fidèles à notre histoire et à nos valeurs humanistes, nous continuerons de
défendre une société plus juste, plus solidaire et respectueuse de la liberté
individuelle, convaincus que la dignité de chacun doit rester au cœur de
l’action publique.
► Autres
● Personnalités centristes
Sarah El Hairy (haut-commissaire à
l’Enfance)
> Le procès Le Scouarnec révèle une réalité douloureuse et
insupportable : 299 victimes, 35 ans d'impunité. Ce
n'est pas seulement un drame personnel, c'est une défaillance collective qui
nous engage toutes et tous. J'ai lu attentivement le courrier que m'a
adressé le collectif de victimes et mes équipes ont également pu échanger avec
elles. Je comprends leur frustration au regard de ce qu'elles ont vécu durant
toutes ces années, tout simplement parce que je serai toujours du côté des
victimes.
Mais ce temps du procès, c'était le temps judiciaire. Maintenant, après
trois mois de procès, vient le temps de l'action politique. Le temps du réveil
institutionnel. Je leur tends la main, je les recevrai avec le ministre de la
Santé dans quelques semaines et je le redis ici : je serai à leurs côtés.
Pour écouter leur ressenti à la suite du procès, mais surtout pour changer
structurellement ce qui a permis qu'un homme puisse agresser des enfants dans
plusieurs hôpitaux, en toute impunité, sous l'autorité de structures censées
protéger.
Nous devons traduire cette étape judiciaire en réformes fortes, durables et
structurelles. Je ferai tout mon possible pour que jamais plus un tel drame ne
puisse se reproduire.
> [Prise en compte de la parole de l'enfant] Beaucoup a
été amorcé, mais tout reste à amplifier. Nous avons déployé et renforcé les
UAPED (unités d'accueil pédiatriques enfants en danger dans les hôpitaux,
initiées par Martine Brousse de La Voix de l'Enfant) et nous en ouvrirons
vingt-cinq de plus en 2025. Pourquoi ? Parce que leur modèle fonctionne.
Alors que 160 000 enfants sont victimes d'inceste chaque année, qu'un
enfant meurt tous les cinq jours sous les coups de ses parents, le rôle
des UAPED, au sein de nos hôpitaux, est crucial.
Parce qu'elles incarnent une vérité simple : c'est aux institutions
d'aller vers l'enfant, pas l'inverse.
C'est bien là que réside toute la force des UAPED : prévenir, repérer,
accueillir, auditionner, protéger. Aujourd'hui encore, ce sont les enfants qui
doivent trouver la force de parler. Ce sont les enfants qu'on attend de voir
« crédibles » et « clairs » dans leurs mots. Mais où est
notre responsabilité collective quand ce sont les plus vulnérables qui
doivent alerter ? Notre devoir, c'est d'écouter sans condition,
d'intervenir sans délai. Et ça commence par une détection systématique dans les
lieux où ils sont : l'école, la PMI, l'hôpital, les foyers… Alors non,
tout n'est pas réglé. Mais oui, les lignes bougent. Et elles doivent trembler
encore davantage.
La libération de la parole de l'enfant est ma priorité.
> Une condamnation pour détention d'images d'enfants
attouchés, violés, est déjà un passage à l'acte. Une capture de violence. Un
consentement à l'abject. Je n'ai pas besoin d'un diplôme en criminologie pour
affirmer qu'un professionnel de santé condamné pour de tels faits n'a rien à
faire en contact avec des enfants, ni même avec des patients. >
Là aussi, l'institution doit changer de logiciel : on ne peut plus fermer
les yeux.
> [Plus d'affaires Le Scouarnec dans les hôpitaux] Je ne
fais pas de promesses vides. Mais je peux vous dire une chose : l'État a
ouvert les yeux, et je ferai en sorte qu'il ne les referme plus. L'État sera au
rendez-vous. Le ministre de la Santé l'a dit : les ordres professionnels
auront un accès renforcé au casier judiciaire, y compris pour les soignants non
condamnés définitivement. Le FIJAIS, fichier des délinquants sexuels, doit
devenir un outil de prévention, pas un simple registre de condamnations
passées. Le gouvernement veut aussi qu'une inscription au casier judiciaire
soit faite même s'il y a appel de la personne condamnée, pour éviter que
celle-ci ne passe entre les mailles du filet. Les ministres de la Santé et de
la Justice mènent un travail conjoint pour permettre qu'il y ait un suivi de
l'honorabilité des professionnels de santé par les conseils de l'ordre.
Je soutiens l'ensemble de ces mesures qui permettront de mieux prévenir.
Il n'est plus possible qu'un professionnel mis en cause puisse continuer à
exercer sans qu'un feu rouge ne clignote.
La libération de la parole des victimes a créé un électrochoc. Je serai au
rendez-vous. Pour elles, comme pour toutes les femmes, hommes et enfants que
nous devons protéger à l'avenir.
> C'est un fait choquant et inacceptable. Et ce n'est pas une question de droit, mais de décence. Quand une personne est mise en examen pour des violences sexuelles, la première des précautions, c'est de la suspendre de tout contact avec des patients.
Je crois en la présomption d'innocence, mais aussi au principe de précaution, et je crois encore plus à la protection des innocents. Et dans ce genre de situation, c'est simple : s'il y a doute, on protège.
> Le numérique est devenu une zone de chasse pour les
pédocriminels. Plus jeunes. Plus organisés. Plus invisibles. Tout cela est
particulièrement inquiétant : d'un côté, les mineurs sont de plus en plus
tôt sur les réseaux sociaux et, de l'autre, les prédateurs y sont de plus en
plus présents. Face à cela, on ne peut pas rester avec les réponses d'hier. Les
deepfakes, la pornographie générée par l'IA, les messageries chiffrées :
ce sont les nouvelles armes des prédateurs. Avec la ministre Clara Chappaz,
nous travaillons à des solutions de régulation forte.
J'en profite pour remercier les associations, qui mènent un travail remarquable
pour repérer les contenus pédopornographiques, les faire retirer et les
interdire dans les meilleurs délais, ainsi qu'accompagner les mineurs et leurs
parents. Je recevrai très rapidement le « Groupe Miroir » de la
Ciivise, composé de jeunes [15 adolescents et adolescentes de 14
à 17 ans, NDLR], pour écouter leurs propositions de terrain.
Par ailleurs, les plateformes telles que Mym et OnlyFans participent à une
hypersexualisation et peuvent être une porte d'entrée vers des relations
tarifées, notamment chez les jeunes.
Elles doivent assumer leur part de responsabilité (contrôle de l'âge,
suppression des contenus, etc.). Si un contenu pédopornographique reste en
ligne plus de quelques minutes, alors c'est déjà trop tard pour une victime.
> Je le dis comme haut-commissaire à l'Enfance :
Quand un individu est dangereux pour les enfants, notre responsabilité ne s'arrête pas à la porte de la prison. Il faudra aller plus loin. Mieux encadrer, mieux suivre, mieux traiter et je vais y veiller. Pour les enfants qu'on doit protéger demain. Parce que ces enfants ne sont pas que ceux des autres : ce sont les nôtres.
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