samedi 9 novembre 2013

Vues du Centre - La Chronique de Jacques Rollet. A propos de l’Alternative

Dans cette rubrique, nous publions les points de vue de personnalités centristes qui ne reflètent pas nécessairement ceux du CREC. Ces points de vue ont pour but d’ouvrir le débat et de faire progresser la pensée centriste.
Jacques Rollet, chroniqueur régulier sur Le Centrisme est politologue, auteur de plusieurs livres dont Tocqueville (Montchrestien 1998), Religion et politique (Grasset 2001), La tentation relativiste, DDB, 2004), Le libéralisme et ses ennemis (DDB, septembre 2011).

L’accord signé entre le président de l’UDI et le président du MoDem ne peut que réjouir tous ceux qui aspiraient à une réunion des Centres depuis la fin de l’UDF due à François Bayrou …On peut espérer que cette alliance sera durable, ce qui cependant, n’est pas garanti, les ambitions présidentielles du président du MoDem étant semble-t-il, intactes. Un certain nombre d’élus UDI ne sont pas ravis de cette introduction de la brebis galeuse qui a voté François Hollande.
Notre propos n’est pas d’épiloguer davantage sur cet évènement mais plutôt de réfléchir à l’absence maintenue de réflexion de fond sur l’identité philosophique du Centre, problème que nous avons déjà évoqué dans des chroniques précédentes. Deux points me semblent poser problème dans le texte du protocole signé par les deux partis: qu’en est-t-il de l’humanisme républicain dont se réclament les signataires? Quelle est cette social-démocratie avec laquelle on déclare pouvoir s’allier éventuellement?
Signalons avant d’exposer notre point de vue qu’une affirmation préalable du texte nous pose problème: il est déclaré que l’alliance a lieu parce que la situation est grave dans le pays, ce qui signifie qu’elle est conjoncturelle alors que selon nous elle doit avoir lieu en tout état de cause: le Centre doit être unique ou ne pas être, sinon c’est qu’il n’a pas de véritable identité…
Mais venons-en au premier problème. Affirmer l’humanisme  et le déclarer identique à la République, c’est très bien mais cela reste flou. J’en veux pour preuve le fait que rien n’est dit sur le rôle négatif joué dans la vie politique française par le vote de la loi sur le «mariage» homosexuel. Faut-il rappeler que le mariage civil en France est une institution et non pas seulement la consécration de deux désirs subjectifs… C’est le mariage républicain qui est mis en cause par cette loi voulue par la Gauche. Le mariage est l’union reconnue d’un homme et d’une femme constituant alors une cellule de la société et donnant naissance à des enfants. C’est tout cela qui est mis en cause totalement par cette loi même si on s’acharne à le nier. Il faudrait bien mesurer le poids de la déstabilisation institutionnelle créée par cette loi. Le doute a été institué par les politiques qui ont voté ce texte, doute portant sur la confiance qu’on peut faire aux élus qui doivent respecter les bases de l’anthropologie et non pas la déstructurer. Un certain nombre de députés et sénateurs centristes ont voté cette loi, ce qui nous semble ahurissant si on considère que le Centre doit incarner l’équilibre et la sagesse politique au sens de la prudence aristotélicienne.
Le deuxième point problématique réside dans le rapprochement jugé possible avec la vision social-démocrate de la société. L’impasse dans laquelle se trouve la France est précisément due à la conception de l’Etat-Providence que développe cette famille politique. C’est bien l’Etat-Providence qui est en crise financière mais également idéologique: prendre de l’argent aux citoyens essentiellement de la classe moyenne pour le donner à d’autres de façon automatique et bureaucratique est tout le contraire d’une véritable solidarité qui doit être un rapport visible entre personnes. L’assistanat se généralise en France et explique une grande part de la dette française: les dépenses publiques représentent en France 56% du PIB contre 46% en Allemagne: cherchez l’erreur. Or les Allemands ne vivent pas moins bien que les Français. C’est bien la social-démocratie ainsi comprise qui est en fin de course. Il serait bon que les centristes le comprennent, ce qui est le cas d’élus comme Jean Arthuis et Christophe Lagarde.
On aura compris, je l’espère, qu’il y a un énorme travail de réflexion et de mise au point à faire au sein de l’Alternative. Bon vent tout de même!
Jacques Rollet.