vendredi 30 décembre 2011

L’année du Centrisme dans le monde. 2011, année difficile pour Obama pendant que le printemps arabe faisait éclore de nombreux partis centristes… pas toujours centristes!


Un courant centriste existe dans tous les pays du monde. Il n’est évidemment pas uniforme. Le corpus des valeurs et des références peut varier d’un pays à l’autre. Mais ce qui fait l’unité de ce courant, où qu’il soit implanté, c’est sa vision humaniste de la société, le consensus qu’il recherche et la liberté dans l’égalité qu’il entend promouvoir.
Il serait donc inexact de vouloir relativiser le Centrisme mondial uniquement par rapport aux différences culturelles qui existent dans chaque pays ou dans des groupes de pays, comme c’est aujourd’hui la mode dans les sciences sociales,
Bizarrement, les tenants et les défenseurs de cette thèse relativiste du culturalisme, sont les mêmes qui prétendent exécrer le colonialisme qui l’utilisa pour démontrer sa légitimité.
Affirmant que les fameuses «différences culturelles» sont toujours légitimes (alors que ce sont souvent des créations superficielles de dictatures ou de régimes autoritaires qui les mettent en avant pour refuser la liberté à leur peuple comme en Chine), ils expliquent que la démocratie républicaine prônée par le Centre et le Centrisme «occidental» n’est pas exportable en dehors de sa sphère géographique, sauf à imposer un soi-disant néocolonialisme de la pensée au monde…
Pourtant, à chaque fois que la révolte et la révolution ont germé cette année, c’est bien cette «démocratie occidentale» qui était demandée par des peuples qui sont privés de liberté depuis si longtemps.
C’est ce qui s’est passé, par exemple, pour le Printemps arabe.
Il est vrai, toutefois, qu’une des difficultés à parler du Centre et du Centrisme dans les pays arabes vient de ce qu’il y a deux centrismes. Ou, plutôt, qu’il y a une utilisation fallacieuse du mot «centrisme» par un courant qui ne l’est pas.
Le premier courant centriste est laïc et il ressemble à celui qui a cours dans le reste du monde. L’autre est porté par certains partis islamiques dits «modérés» qui prône un entre-deux entre un régime laïc et un régime religieux afin de ne pas trop effaroucher une partie de la population et de l’opinion mondiale. Autrement dit, il ne s’agit en rien de Centrisme.
Beaucoup ont été dupés par ce discours qui justifiait, selon eux, cette, soi-disant, fameuse «modération»  de partis comme les Frères musulmans!
Aux Etats-Unis
Le Centrisme a connu une année agitée aux Etats-Unis. Vilipendé par les courants extrémistes, en particulier celui d’extrême-droite et populiste du Tea Party, qui hait par-dessus tout les «modérés» dans le Parti républicain (mais aussi par le courant le plus «libéral» du Parti démocrate qui les dénonce dans son propre camp et qui a abouti au mouvement Occupy Wall Street), il a eu pourtant les honneurs tout au long de l’année.
D’abord, parce que la radicalisation des républicains, majoritaires à la Chambre des représentants, a fait voler en éclats ce qui restait d’un certain consensus à l’américaine où l’on arrive toujours, au dernier moment à se mettre d’accord sur une ligne médiane où chacun a fait les concessions nécessaires pour parvenir à un compromis.
Or, en 2011, les élus les plus à droite ont constamment refusé de lâcher du lest sauf sous la pression de leur électorat ou des sondages, et encore. D’où une volonté de trouver une solution centriste à la crise politique.
Ensuite, parce qu’un débat, initié là aussi par les républicains les plus à droite (et qui n’est que la continuation d’autres attaques du même genre les années précédentes), s’est instauré sur le centrisme de Barack Obama (qui est pourtant de plus en plus évident, ce qui d’ailleurs lui est reproché par certains qui estiment qu’il recherche trop le consensus).
Par des manœuvres pourtant très grossières, c’est-à-dire en défendant des thèses extrémistes et ensuite en accusant le président des Etats-Unis de ne pas faire le grand pas qu’ils lui demandaient dans leur direction (c’est-à-dire très à droite), les républicains proches de l’extrême-droite ont réussi à faire vivre ce débat repris par certains commentateurs peu inspiré sur ce coup comme deux des éditorialistes-vedettes du New York Times, Thomas Friedman (démocrate) et David Brooks (républicain) qui se présentent comme modérés.
Enfin, parce que le blocage de Washington a remis au goût du jour le «troisième homme» (assez récurrent dans les élections américaines) pour la prochaine présidentielle, en novembre 2008, qui serait le candidat centriste idéal capable de réunir les Américains et de refonder un lien social mis à mal par les extrémistes de tous bords.
Une organisation baptisée «no labels» («pas d’étiquettes») a ainsi vu le jour, regroupant des démocrates et des républicains modérés qui souhaitent promouvoir une candidature indépendante des deux grands partis. Une autre initiative, veut faire désigner un candidat modéré par un vote sur internet, candidat qui ensuite se lancerait dans la bataille présidentielle.
De même, les partis centristes (on oublie qu’il existe plusieurs partis centristes aux Etats-Unis, comme le Centrist Party, le Modern Whig Party ou l’American Centrist Party, même s’ils sont peu puissants et que nombre de centristes préfèrent militer dans les deux grands partis, démocrate et républicain), sont montés au créneau pour réclamer une candidature centriste.
En Grande Bretagne
Les Libéraux démocrates («Lib Dem»)de Nick Clegg, vice-premier ministre du gouvernement de David Cameron, ont vécu une année très mouvementée et très difficile. Avec la crise économique et la rigueur, ils ont poursuivi leur descente aux enfers dans les sondages qui avait déjà débuté en 2010. Car leur électorat, plutôt de centre-gauche, ne leur pardonne pas les mesures d’austérité prises et leur allégeance aux conservateurs.
Incapables de reprendre la main, noyés entre les travaillistes et les conservateurs, les Libéraux démocrates n’ont pu imposer une image d’un parti fort et capable, à terme, d’être une alternative crédible aux deux mastodontes qui se partagent le pouvoir depuis des décennies.
Même le débat sur l’Union européenne lancé par le refus de David Cameron de faire partie d’une union plus resserrée n’a pas permis aux Libéraux démocrates, qui sont très pro-européens, de faire entendre leur différence. En tout cas, pour l’instant.
Si une élection avait lieu aujourd’hui, les enquêtes d’opinion promettent une débâcle aux amis de Nick Clegg qui attendent des jours meilleurs.
Dans les pays arabes
Le Printemps arabe a fait fleurir de très nombreux partis centristes, que ce soit en Tunisie, en Egypte ou au Maroc. De même, au Liban, s’est instauré un débat sur le centrisme revendiqué d’un certain nombre de leaders politiques.
Nous avons vu, plus haut, que le terme de «centrisme» a été détourné par les partis islamistes pour se donner une certaine respectabilité de la modération en expliquant que leur «centrisme» se trouvait à équidistance de la laïcité et de la religion…
Mais, dans le même temps, de très nombreux partis laïcs et répondant aux critères du Centrisme ont été mis sur pied. Ils sont, à la fois, trop nombreux (pas moins de trente-trois en Tunisie!) et pas assez puissants pour prétendre au jour d’aujourd’hui, gagner seuls une élection.
Des regroupements ont déjà eu lieu dans des «alliances centristes» comme au Maroc) et il faudra voir, dans les mois et les années qui viennent comment ils vont se positionner et s’ils auront la capacité à s’imposer comme des partis puissants dans un environnement délicat où l’on ne sait pas encore si la libéralisation des régimes issus de ce Printemps arabe débouchera sur une vraie démocratie ou si cette fenêtre de liberté sera récupérée par les réactionnaires laïcs ou religieux.
Dans le reste du monde
En 2011, plusieurs autres faits saillants ont marqué la galaxie centriste.
- Dans les pays africains, la création de partis centristes a continué sans pour autant que ceux-ci parviennent à occuper le pouvoir sauf dans des coalitions où ils sont généralement minoritaires. Mais il semble que de plus en plus de personnes sur le continent noir pensent que le salut démocratique passe par des partis situés au centre de l’échiquier politique.
- En Suisse, les élections législatives ont vu une poussé centriste en même temps qu’une poussée des socialistes.
- En Belgique, les centristes wallons de CdH se sont réorganisés et participent au gouvernement d’union nationale du socialiste wallon, Elio di Rupo.
- En Irlande, le parti de centre-droit au pouvoir, Fianna Fail, a été remplacé par le parti de… centre-droit dans l’opposition, le Fine Gail allié au Travaillistes. Et pour couronner le tout, le Fine Gail est plus à droite que le Fianna Fail et a pourtant noué une alliance avec la gauche! Cette recomposition politique est due en grande partie à la faillite du pays qui l’a plongé dans une forte récession.
- En Espagne, un embryon de parti centriste a remporté cinq sièges aux élections législatives dans un pays où le Centre était jusque là totalement phagocyté par les deux grands partis de gauche et de droite (même s’il existe depuis longtemps un parti centriste catalan).
- En Pologne, le premier ministre centriste Donald Tusk a remporté les législatives et s’est succédé à lui-même.
- En Bulgarie, le candidat du Centre. Rosen Plevneliev, a remporté l'élection présidentielle avec 52,5% des suffrages.

Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC

jeudi 29 décembre 2011

L’Humeur du Centriste. Les vœux centristes pour 2012


Messieurs les centristes, s’il vous plait,
- arrêtez de vous chamailler pour tout et n’importe quoi;
- mettez donc vos querelles d’égos en sourdine;
- comprenez que vous n’êtes pas la cinquième roue du carrosse;
- ayez des ambitions à la hauteur des valeurs et des idées du Centre.
Car,
- la France a besoin d’une politique centriste humaniste pour se sortir de ses difficultés dont certaines viennent de la crise économique mondiale mais d’autres sont directement la conséquence de politiques erronées dont nous sommes, nous Français, les seuls responsables;
- l’Europe a besoin que tous les centristes de l’Union européenne se réunissent et lancent une initiative pour que les peuples européens se réveillent enfin et se mettent vraiment à construire l’étape fédéraliste du projet européen sans quoi cette Europe, terre de civilisation, d’innovation, d’excellence dans tous les domaines, patrie de l’humanisme et du progrès, déclinera inexorablement et plus rapidement qu’on ne le croient pour le malheur de ceux qui y habitent mais aussi pour tous les habitants de la planète;
- le monde a besoin du Centrisme pour bâtir une vraie mondialisation humaniste qui profite à tous et pas seulement à quelques uns ou quelques pays pendant que les autres, surtout dans les pays en développement, s’appauvrissent et se précarisent comme c’est aussi le cas pour certaines populations des pays avancés;
- les hommes, les femmes et les enfants de la planète terre ont besoin de cette humanisme qui se fixe comme but une personne libre, indépendante, responsable et solidaire, cette personne respectueuse des autres qui sera capable de construire l’avenir de l’humanité et non de détruire celle-ci.
Oui, messieurs les centristes, il y a vraiment du boulot sur la planche.
Tout de suite.

Le Centriste

mardi 27 décembre 2011

2012 -Carnet de campagne centriste – Bilan de précampagne présidentielle


C’est la trêve des confiseurs dans la campagne électorale pour la présidentielle de 2012. Un premier bilan à quatre mois du premier tour peut être dressé dans le camp du Centre, d’autant que plus aucune incertitude ne demeure sur ses candidats.
Hervé Morin s’est déclaré officiellement le 27 novembre en Normandie et François Bayrou l’a imité le 7 décembre à Paris puis à Pau. Corinne Lepage, dont on peut considérer qu’elle est aux marges de la galaxie centriste est également entrée dans la danse.
Voilà pour les trois «vrais» candidats du Centre.
De son côté, Dominique de Villepin s’est également déclaré. Ce néogaulliste tente de trouver un point d’ancrage pour crédibiliser sa candidature. Pour cela, il navigue entre la Droite et la Gauche, laisse dire les médias quand ils le présentent du Centre et tente de récupérer à son profit le discours d’union nationale en appelant tout le monde à se regrouper derrière lui.
Non seulement, Villepin n’est pas du Centre mais il n’est même pas au centre. Son opportunisme, seul, peut rappeler ces politiciens qui tentent, dans un flou artistique qui insulte la démocratie, de manger à tous les râteliers et de se positionner partout et nulle part, dans le phénomène bien connu d’«attrape-tout» et que, faute de mieux, les médias ont tendance, à tort, à vouloir situer au centre.
On peut citer Christine Boutin, la catholique, qui peut attirer une partie de l’électorat démocrate-chrétien qui vote traditionnellement pour le candidat du Centre. Mais son évolution, ces dernières années, sur des positions très radicales dans certains domaines ne peuvent en faire une candidate centriste, ce qu’elle ne revendique pas d’ailleurs.
Pour en revenir au Centre, le vrai, la situation semble aujourd’hui claire. Il y a un leader incontesté dans la course, François Bayrou, qui a décollé dans les sondages. Il y a un outsider, loin derrière, Hervé Morin. Et il y a une franc-tireuse, Corinne Lepage qui, sans pratiquement aucune couverture médiatique, attire autour d’1% des intentions de vote.
De même, dans les positionnements, la clarté semble prédominer. François Bayrou a décidé de faire campagne avec une parole «néosouverainiste» comme la nomme François Fressoz dans Le Monde. Hervé Morin développe un discours mondialiste et européen. Corinne Lepage exprime un centrisme écologique ou un écologisme centriste, au choix. Tous en appellent plus ou moins au rassemblement des Français et parlent d’«union nationale» devant les difficultés du pays et de l’Europe.
Les rapprochements entre ces trois candidats sont, pour l’instant, exclus du fait de leurs inimitiés personnelles. Et chacun a besoin de cette présidentielle pour exister politiquement dans le présent mais, surtout, dans le futur.
Pour autant, tout ceci n’est que du hors-d’œuvre et n’est que la photographie à un instant donné d’une situation qui pourrait être beaucoup plus fluctuante qu’on ne l’imagine.
Plusieurs scénarios sont possibles dans les premières semaines de 2012 qui vont être cruciales pour nos trois candidats.
Tout d’abord en matière d’intentions de vote dans les sondages.
Le premier scénario est que la situation se fixe définitivement jusqu’au premier tour de la présidentielle avec un François Bayrou entre 12% et 15%, un Hervé Morin aux alentours d’1%, tout comme Corinne Lepage et donc, un Centre entre 15% et 18%. Des scores insuffisants évidemment pour envisager un second tour pour un candidat centriste mais qui n’est pas mauvais intrinsèquement et qui permet de pouvoir peser d’une manière ou d’une autre sur les deux finalistes (soit en demandant des postes dans un futur gouvernement, soit en demandant un accord politique pour les législatives qui suivront la présidentielle).
Le deuxième scénario est une nouvelle progression de François Bayrou dans les sondages, vers les 20% d’intention de vote. Le président du Mouvement démocrate devient alors le troisième homme de la présidentielle, derrière Hollande et Sarkozy mais devant Marine Le Pen. Il peut dès lors espérer qu’une dynamique lui permettra de dépasser l’un des deux hommes encore devant lui pour se qualifier pour le second tour. Cette option laisse penser qu’Hervé Morin demeurera dans des intentions de vote très basses. Il pourrait, dans ce cas, se retirer si le candidat menacé par Bayrou est Sarkozy.
Le troisième scénario est une forte progression de François Bayrou mais aussi de Marine Le Pen, les deux candidats «protestataires» et «antisystème», du fait d’une situation économique et sociale qui empire dramatiquement. Ce scénario assez improbable actuellement est pourtant privilégié par certains soutiens du leader du MoDem qui semblent croire à la fameuse posture du «recours» qui a porté De Gaulle au pouvoir en 1958. Rappelons-nous, toutefois, que c’est elle qui fit aussi les beaux jours du général Boulanger…
Le quatrième scénario est une stagnation puis une baisse des intentions de vote en faveur de François Bayrou qui ne parvient pas à concrétiser le début de frémissement du à sa déclaration officielle de candidature. Hervé Morin peut en profiter et décoller enfin. On aurait deux candidats centristes assez proches l’un de l’autre en terme d’intentions de vote. Toutefois, cela ne permettrait pas à un candidat du Centre d’être en troisième position. Il se pourrait même qu’il soit alors dépassé par le candidat du Front de gauche, Jean-Luc Mélenchon et, pourquoi pas, par la candidat écologiste, Eva Joly. Dans cette option catastrophique pour le Centre, son meilleur candidat ne se trouverait qu’en sixième position. Il pourrait néanmoins négocier son ralliement entre les deux tours mais pour un maigre butin, sauf si les intentions de vote sont extrêmement serrées.
Ces quatre scénarios sont évidemment contingents de la situation qui prévaudra dans le pays dans les semaines à venir.
Le premier scénario en la matière est une sorte de glacis. Economiquement et socialement les choses demeurent en l’état. Elles ne vont ni mieux, ni plus mal. L’effondrement redouté n’a pas lieu, l’embellie espérée non plus. On peut supposer que les candidats des deux grands partis seront alors largement favoris pour le second tour, laissant peu de place à celui du Front national mais aussi à celui du Centre, même si cela n’empêche pas que ce dernier puisse continuer à grimper dans les sondages sans pour autant avoir la possibilité de se qualifier pour le second tour.
Le deuxième scénario est une amélioration de la situation économique et sociale. Le principal bénéficiaire en est évidemment le président sortant, Nicolas Sarkozy, qui pourra se targuer de son action et de son expérience. Ce qui peut lui permettre de s’envoler dans les sondages. Dès lors, le candidat du Parti socialiste, François Hollande sera très fragilisé, d’autant qu’il a adopté la posture de l’«homme tranquille» mitterrandien face à l’«excité» chiraco-sarkozien. Cette fragilisation peut permettre à François Bayrou de devenir le candidat anti-Sarkozy le plus crédible et l’imposer comme le rival le plus sérieux de l’hôte actuel de l’Elysée.
Le troisième scénario est une détérioration plus ou moins importante de la situation économique et sociale mais sans menace internationale. Ici François Bayrou mais aussi Marine Le Pen ont une chance de monter dans les sondages et de venir titiller les deux favoris actuels et, peut-être même, de les dépasser si la situation empire. Evidemment, dans le cas d’un affrontement Bayrou-Le Pen au second tour, le leader du Mouvement démocrate part largement favori. Et il peut tirer son épingle du jeu s’il se retrouve face à Nicolas Sarkozy ou François Hollande.
Le quatrième scénario est une très forte détérioration de la situation mondiale. Nicolas Sarkozy redevient évidemment le favori et son challenger sera François Hollande, deux hommes politiques connus avec deux grands partis de gouvernement qui possèdent dans leurs rangs des hommes et des femmes compétents, ce qui aura tendance à rassurer les Français. Les chances d’un candidat du Centre, dans ce scénario ne sont pas nulles mais sans véritable expérience, avec un parti largement néophyte et obligé de trouver des soutiens un peu partout, il aura un lourd handicap.
Le cinquième scénario est celui du vote utile, tant à Droite qu’à Gauche. Les séquelles du 21 avril 2002 sont encore présentes dans le monde politique. S’il devait y avoir un risque de voir Marine Le Pen (ou même un autre candidat) prendre la place soit du candidat de la Droite, Nicolas Sarkozy, soit du candidat de la Gauche, François Hollande, alors les électorats de chacun de ces deux camps mais aussi ceux qui en sont à la frange et, notamment, ceux du centre-droit et du centre-gauche, pourraient se mobiliser fortement et voter utile dès le premier tour. Ce serait, bien évidemment, un handicap rédhibitoire pour un candidat du Centre.
Un sixième scénario, espoir notamment de François Bayrou, peut se produire, en dehors de toute détérioration ou amélioration de la situation de la France, c’est l’effondrement d’un candidat ou de plusieurs qui devancent le candidat centriste le mieux placé. Pour prendre deux exemples, l’«affaire Karachi» pourrait plus qu’éclabousser Nicolas Sarkozy et le faire plonger dans les sondages. La «mollesse» de François Hollande, si elle s’impose comme la principale caractéristique du candidat socialiste pourrait être un handicap insurmontable, surtout en période de crise économique.
Il y a bien sûr une possibilité qu’aucun de ces scénarios ne soient le bon. Mais, ça, c’est une évidence des prédictions qui n’a même pas besoin qu’on la rappelle… Les surprises font partie intégrante des élections, d’autant que l’instabilité actuelle est propice à ce qu’il y en ait une au soir du 22 avril 2012…

Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC

lundi 26 décembre 2011

L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. La démocratie doit proposer un vrai «service public de l’information» indépendant du pouvoir


Savoir et être capable d’utiliser le savoir acquis pour être un citoyen responsable et une personne capable de se prendre en charge et de bâtir sa vie en toute connaissance de cause, voilà une des bases essentielles de notre existence. Voilà une des missions que s’assigne la démocratie républicaine représentative, délibérative et participative. Voilà une tâche au cœur même du projet politique que propose le Centrisme.
Le savoir, qui est constitué d’informations que nous acquérons tout au long de notre vie, est, depuis toujours, un pouvoir. C’est pourquoi, dans les régimes dictatoriaux ou autoritaires, celui-ci est contrôlé, filtré, détourné, utilisé, voire inaccessible, pour permettre la construction d’une réalité tronquée qui sert les dirigeants et une idéologie. Dans les siècles passés, il était réservé à l’élite qui s’était approprié le pouvoir.
Afin d’être capable de vivre libre et de prendre en main sa vie ainsi que de participer aux affaires de la cité, il faut donc savoir et être au courant de ce qui se passe autour de soi. Et ceci vient, entre autres, par les informations relatant les événements qui se déroulent dans le monde, chez nous et ailleurs, que nous recevons grâce à de multiples médiateurs.
Nous devons être informés et nous devons l’être correctement.
Or, ces capacités et cette participation deviennent de plus en plus difficile à exercer dans un monde où nous sommes abreuvés d’informations (au sens basique du terme) venues de partout et de nulle part, de médias, de propagandistes, de communicateurs, de contacts sur les réseaux sociaux du net, etc.
Comme on le dit désormais, trop d’information tue l’information. Et c’est loin d’être une formule creuse.
Ainsi, avoir plusieurs sources d’information pour comprendre et avoir une opinion sur un fait ou une idée est, évidemment, un plus que de n’avoir qu’une source qui pourrait nous manipuler.
C’est même la base de la liberté de la presse qui assure, concrètement, la diffusion de la pensée et de la parole libres, sans quoi la démocratie n’existerait pas.
Cependant, à un certain moment, la multiplication sans fin des sources commence à créer une confusion qui nous éloigne du but recherché, être capable d’utiliser concrètement et rationnellement les informations.
Beaucoup plus grave encore, de plus en plus, ces flux d’informations, dont beaucoup sont aux mains de communicants et de propagandistes et non de journalistes, désinforment et, au lieu d’éclairer le citoyen, le système informationnel et communicationnel brouille les informations et met chacun de nous dans une confusion qui permet à tout démagogue, à toute personne voulant faire passer un message et un peu maligne de prétendre tout et n’importe quoi en étant cru car étant crédible, face à nous, crédules...
Dès lors, au lieu d’être des citoyens responsables, nous ne sommes plus que des consommateurs d’informations incapables d’en tirer une consistance utile et une aide dans notre citoyenneté.
A l’ère de la communication de masse, du «village global», de l’infinité de réseaux informationnels, il semblerait que nous sommes condamnés à vivre dans un monde manipulé de plus en plus virtuel.
Heureusement, cela n’est une fatalité.
Il est bien évidemment hors de question de revenir sous une quelconque forme que ce soit sur la liberté d’expression (d’autant que si c’était le cas, je ne pourrai écrire ce que j’écris en ce moment!). Car le problème de fond n’est pas qu’il y ait une infinité de médiateurs et que chacun raconte son histoire à sa façon (sauf s’il s’agit de mentir ou de diffamer volontairement) mais que ceux qui reçoivent l’information soient capables de la comprendre, de la décortiquer et de faire la différence entre transmission des faits et diffusion de propagande.
Pour cela, le système éducatif doit jouer un rôle de premier plan. Nous ne développerons pas plus cet aspect fondamental qui n’est pas notre propos ici.
Nous devons, d’abord, comprendre qu’il y a des informations essentielles pour que chacun de nous soit un «citoyen éclairé» capable d’agir et de décider en toute connaissance de cause, avec responsabilité et au mieux de ses intérêts, afin que la démocratie ne soit pas seulement un mot sans contenu.
Nous appelleront ces informations, des «informations citoyennes». Celles-ci nécessitent une déontologie renforcée de la part des médiateurs qui les diffusent.
A côté, on trouve des informations qui vont, soit cultiver, soit divertir. Nous les appelleront des «informations loisirs» sans que cela soit péjoratif pour celles-ci. Elles ont une importance évidente dans nos existences mais elles ne sont pas prioritaires et «utiles» pour pouvoir nous déterminer en tant que citoyens.
Les «informations citoyennes» sont celles qui concernent les domaines politique, économique, social, international et scientifique.
Elles doivent faire l’objet d’un traitement éthique. Non pas pour être monolithiques, bien évidemment, mais pour que le citoyen qui recherche une telle information puisse la trouver au moins dans un média sérieux et indépendant.
Il faut qu’elles y soient présentées de la manière la plus factuelle et la plus neutre possibles, diffusées avec le plus d’«objectivité» et le plus de responsabilité possibles de la part du médiateur en question.
Certains estimeront que les propos tenus ci-dessus vont à l’encontre d’une vision libérale de la société.
On peut ainsi arguer quatre objections à la création d’un service public de l’information.
Première objection: Il existe déjà un service public de la radio et de la télévision en France, Radio France et France Télévisions. C’est vrai. Mais ce service public n’a aucune obligation de délivrer uniquement l’information «citoyenne» dont je parlais. Ensuite, il n’a aucune obligation de se cantonner à l’information, qu’elle soit «citoyenne» ou de «loisirs» mais fait également et surtout dans le divertissement, étant en concurrence frontale avec les médias privés. Au fil du temps, il est d’ailleurs plus devenu un service public du divertissement que de l’information. Enfin, il est chapeauté par une autorité de contrôle totalement inféodée au politique.
Deuxième objection: C’est quoi le concept d’«information citoyenne la plus objective possible»? Qui détermine la «vérité journalistique»? Il est vrai que tout médiateur met de la subjectivité, qu’il le veuille ou non, qu’il soit le plus honnête ou le plus malhonnête, dans la transmission de l’information.
Pour autant, les professionnels de l’information ne sont pas dénués, loin s’en faut, d’une conscience et d’une volonté de réellement transmettre le plus honnêtement possible les informations qu’ils ont collecté.
Evidemment, il n’y a pas de «vérité journalistique». Il n’y a qu’une réalité. C’est de celle-ci qu’il faut le plus se rapprocher.
Reste que les manquements de ce service public de l’information seraient plus facilement sur la place publique puisqu’il serait constamment sous le contrôle de tous les autres médias ainsi que des institutions démocratiques et, in fine, des citoyens.
Et il aurait à rendre des comptes sur ces mêmes manquements.
Dès lors, son statut différent des autres médias exercerait une pression plus grande sur ceux qui y travailleraient que le statut des médias privés.
Troisième objection: Comment contrôler l’information et ce service public de manière indépendante et objective?
A cette objection je répondrai qu’un cahier des charges détaillé établira comment exercer un contrôle qui s’attachera essentiellement à ce que les faits soient à la disposition des citoyens, c’est-à-dire qu’il n’y ait pas de rétention d’informations ou de travestissement des faits.
Quatrième objection: C’est la liberté de la presse. La démocratie ne peut être une démocratie que si toutes les opinions peuvent s’exprimer. Ceci est constitutif de la démocratie même si cela recèle de grands dangers. Mais, comme le disait déjà Tocqueville à son époque, il faut savoir accepter les désagréments de la liberté de la presse pour bénéficier de tous ses bienfaits.
A cette objection, je répondrai qu’un service public, géré de manière autonome et se focalisant sur certaines informations ne sera qu’un média parmi d’autres. Il n’a donc aucune prétention à se substituer aux autres médias. Il est là, «en plus» des autres et non pas «à la place» des autres. En outre, il ne sera pas leur concurrent. On le voit bien déjà avec les différentes structures qui existent dans les démocraties. La télévision et la radio publiques américaines n’ont pas vraiment bridé la diversité et la multiplication des médias… Idem en France.
Une cinquième objection peut être faite à l’auteur de cet article qui se prétend centriste et qui est un professionnel de l’information. Le Centrisme c’est avant tout la liberté dans la responsabilité. Un service public de l’information semble aller à l’encontre de cette vision.
D’abord, dans toutes les démocraties, il y a un service public, plus ou moins puissant, plus ou moins indépendant. La Grande Bretagne, loué pour sa démocratie et la liberté de parole, qui possède, en outre, une des presses écrites les plus puissantes du monde, possède un très fort service public audiovisuel avec la BBC.
Il ne s’agit pas de contrôler l’information par l’Etat. Bien au contraire. Il s’agit, simplement, par l’existence d’un service public indépendant de l’Etat, de donner aux citoyens la possibilité de trouver, à côté de la sphère des médias libres, fondement incontournable d’une démocratie, un lieu où est diffusé une information indépendante et neutre, idéologiquement, politiquement, économiquement et financièrement.
Ensuite, un vrai service public est, non seulement, indépendant des puissances financières mais également des puissances politiques et administratives. Il permet donc réellement aux journalistes qui en font partie de travailler avec une seule pression: dire ce qui est sans craindre une censure autre que celle qui s’applique aux mensonges et à la diffamation et une condamnation autre que celle prononcée par les tribunaux pour les mêmes motifs.
On comprend que cette tâche ne sera pas facile à réaliser. Elle ne l’a jamais été et elle le sera de plus en plus dans l’ère de communication globale dans laquelle nous sommes entrés depuis la fin du dernier millénaire. Mais elle doit être entreprise et vite. Plus nous avançons dans cette ère de communication globale, plus nous perdons ce que nous avons gagné lors de l’apparition d’une presse libre.
Ainsi, après avoir été dans l’obscurité et la désinformation, les peuples des démocraties ont conquis le droit d’être dans la clarté et l’information. Ils risquent de retourner dans cette obscurité et voir leurs capacités de discernement détruite par cette masse d’informations qui sème la confusion. Une confusion souhaitée par biens des médiateurs actuels…
Quoiqu’il en soit, ce débat doit être porté sur la place publique et faire l’objet d’une véritable discussion citoyenne afin de prendre les bonnes décisions. Il en va de la démocratie et de la république. Et les centristes devraient en être les principaux initiateurs.