vendredi 24 octobre 2014

Une Semaine en Centrisme. Centre courtisé par Valls et Juppé: jeu de dupes ou recomposition politique?

C’est peu dire que les centristes sont actuellement courtisés à droite et à gauche alors que, paradoxe, c’est un des moments de leur histoire où ils sont les plus faibles en termes de force politique.
Dès lors, il faut se demander si dans les déclarations venues tant de la droite que de la gauche il n’y a pas une volonté de les instrumentaliser ou s’ils sont vraiment considérés comme de possibles partenaires égaux afin de bâtir une majorité nouvelle pour 2017.
Quand Alain Juppé estime que la Droite ne peut gagner sans le Centre la prochaine présidentielle, cela signifie, selon lui, que l’UMP doit absolument s’allier avec l’UDI et le Mouvement démocrate pour remporter l’élection.
Mais cela ne signifie par forcément qu’il souhaite en faire des associés à égalité.
De même lorsque de Manuel Valls déclare qu’il veut ouvrir sa majorité au centre, cela signifie, selon lui, que le PS a besoin de l’UDI et du Mouvement démocrate pour effectuer sa mue afin de pouvoir poursuivre la politique entreprise depuis le début de l’année et d’avoir une chance de rester au pouvoir en 2017.
Mais cela ne signifie pas forcément qu’il veut mettre en place les réformes proposées par les centristes.
Il est certain que le tropisme centriste d’Alain Juppé et Manuel Valls est réel.
Mais il n’est pas certain qu’ils veuillent d’un projet et d’un programme centristes, ni même qu’ils soient prêts à s’inspirer d’un tel projet et d’un tel programme.
En revanche, travailler avec les centristes auraient pour eux de nombreux avantages.
D’abord, cela leur permettrait d’apparaître aux Français comme des hommes d’ouverture face aux caciques de leurs partis arcboutés sur leurs idéologies clientélistes.
Ensuite, cela leur permettrait de se libérer du carcan de leurs partis respectifs qui ne leur assure pas, loin de là, d’être les candidats de la Droite (Juppé) et de la Gauche (Valls) pour 2017 (voire 2022 pour Valls).
De plus, cela leur permettrait de récupérer un électorat, même réduit ces derniers temps, qui ferait la différence au premier ainsi qu’au second tour de la présidentielle ainsi que de renvoyer les extrêmes dans les cordes.
Enfin, cela leur permettrait de réformer la France de manière plus profonde, comme ils prétendent vouloir le faire, les centristes ayant exprimé leurs vœux depuis longtemps de mettre en route des réformes de grande ampleur alors que ni l’UMP avant 2012, ni le PS depuis 2012 n’en ont été capables jusqu’à présent.
Mais qu’auraient à gagner les centristes en s’alliant soit à Juppé (le plus probable des scénarios), soit à Valls?
Aujourd’hui, on parle beaucoup des centristes parce qu’ils sont courtisés de toute part.
Il suffirait qu’ils concluent une alliance dès à présent pour qu’ils retournent dans une sorte d’anonymat peu propice à leur renouveau.
Avant donc de se lancer éventuellement d’un côté ou de l’autre, leur tâche est de reconstruire un Centre crédible et sûr de lui qui sera capable de négocier une alliance gagnante-gagnante dans deux ans.
Et là, cette alliance pourrait être un tournant pour un Centre en reconquête, ses valeurs, ses principes et son projet politique (qu’il n’a pas encore).
A plus long terme, les partis centristes pourraient devenir ce cœur du nouvel axe central dont l’émergence semble de plus en plus possible par les déclarations de Juppé et de Valls.
Néanmoins, les centristes ne doivent pas oublier qu’ils ont souvent été instrumentalisés par le passé et que, ni Alain Juppé, ni Manuel Valls ne sont des centristes.
Qu’ont-ils gagné en 2012 en soutenant Sarkozy (Nouveau centre) ou Hollande (Mouvement démocrate)? Rien.
Et que la meilleure façon de faire gagner le Centre et ses idées, c’est d’avoir un candidat centriste en capacité de remporter la prochaine présidentielle.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC