samedi 19 décembre 2020

L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. N’oublier ni la liberté, ni le réel au risque de tuer la démocratie

Certains nous abjurent à ne pas renoncer à nos principes et nos valeurs démocratiques quoi qu’il en coûte pendant que d’autres nous somment à ne pas nous cacher de la réalité présente et, tous, ils ont raison!

Oui, nous ne devons pas céder à la pression qui serait de supprimer des libertés au nom de réelles menaces sur la démocratie mais nous ne devons pas, non plus et en même temps, nous cacher ces réelles menaces au nom d’une liberté qui serait plus conceptuelle que concrète et amènerait à mettre en danger les individus, c’est-à-dire en les empêchant de vivre en liberté.

Oui aux valeurs et principes mais oui aussi au réel.

N’excluons ni les premiers, ni le second car faire fi des valeurs et des principes est tout aussi dangereux que faire fi du réel et vice versa.

Ici, nous nous retrouvons dans ce fameux juste équilibre qui est une constante recherche de la bonne voie à suivre.

Tenir ce cap n’est évidemment pas aisé – ce serait plutôt le contraire! – mais c’est l’honneur des démocrates de tenter de le faire inlassablement car il n’y a pas de fin, ni de pause, dans cette recherche de l’équilibre qui doit être une donnée intangible d’un régime de liberté, d’égalité et de fraternité, là où l’on respecte la dignité de la personne, c’est-à-dire là où l’on assure sa sécurité pour qu’il puisse vivre libre, égal et en fraternité parce que cela n’est possible que lorsque sa vie n’est pas menacée à cause de ce que l’on est, de ce que l’on pense, de ce que l’on dit et de ce que l’on fait dans le respect de ce qu’est l’autre.

Oui, la liberté n’est une expériences substantielle que lorsqu’elle est elle-même une matérialité concrète dans le quotidien et non brandie comme un étendard sans qu’elle soit véritablement protégée donc possible et donc utilisée.

Mais, non, sa protection ne peut passer par son étouffement au nom même de sa soi-disant préservation.

On ne peut réclamer la liberté en faisant fi du réel dans lequel on vit mais ce réel ne peut être un prétexte à la nier.

Actuellement nous sommes dans un monde d’oxymores, de contradictions, d’impasses où les mensonges, les mystifications, les tromperies et les impostures prennent le pas sur la réalité et les valeurs.

Revenir au réel c’est garantir la liberté parce qu’elle ne peut vivre dans une fantasmagorie, dans un faux-semblant et dans une illusion.

Mais il nous faut absolument façonner ce réel pour qu’il puisse accueillir du mieux possible cette liberté.

Oublier la liberté et le réel, ce serait sûrement tuer la démocratie.

 

 

Centriste de l’année – Edition 2020. Joe Biden

Joe Biden
«Mission accomplie»!

Le démocrate Joe Biden est le centriste de l’année après avoir remporté l’élection présidentielle américaine le 3 novembre, faisant de lui le 46ième président des Etats-Unis et empêchant par la même occasion Donald Trump de rempiler pour un second mandat qui aurait été encore pire – si cela était possible – que le premier.

C’était la principale tâche que nous assignions aux centristes dans le monde l’année dernière à la même époque et Joe Biden y est heureusement parvenu.

Il entrera officiellement à la Maison blanche le 21 janvier 2021 après la cérémonie de prestation de serment.

On aurait pu élire un duo en associant à Biden, la future vice-présidente, la centriste Kamala Harris, une métis à la fois noire et asiatique (indienne) qui sera la première femme à occuper la fonction (rappelons qu’il n’y a jamais eu de présidente jusqu’à présent).

Mais on nous aurait peut-être reproché de copier le magazine Time qui a désigné le couple vainqueur comme «Person of the year».

Surtout, et c’est ce qui est le plus important à nos yeux, cette victoire est, avant tout, celle de Joe Biden, de ce qu’il est et de la campagne qu’il a choisi de mener.

En effet, battre le populiste démagogue Donald Trump, président sortant, n’a pas du tout été la ballade de santé que d’aucuns prédisaient à n’importe quel candidat du Parti démocrate et que les sondages semblaient annoncer.

Non pas que l’élection ait été serrée puisque que Biden a battu Trump avec un écart de plus de 7,2 millions de voix.

Mais, à l’opposé de tout ce que l’on estimait, Trump a obtenu un nombre de voix considérable.

Il réussi à réunir plus de 74 millions d’électeurs, un nombre improbable tant sa présidence a été un fiasco et très souvent une honte.

Un nombre qui aurait pu tout à fait lui permettre de remporter le scrutin s’il n’avait eu en face de lui un centriste consensuel qui a attiré vers lui plus de 81 millions de personnes, un chiffre record pour une présidentielle américaine.

On peut ainsi penser que tout(e) candidat(e) plus clivant (comme le socialiste Bernie Sanders, le principal concurrent de Biden lors de la primaire démocrate) ou peu connu des Américains (comme Pete Buttigieg) voire une femme comme en 2016 (cette fois-ci Elizabeth Warren) aurait été battu parce qu’il ou elle n’aurait pas réussi à rassembler aussi largement que Biden.

Celui-ci a pu ainsi amener à lui l’électorat modéré, en plus du cœur de celui du Parti démocrate (fait de centristes et de «liberals» de centre-gauche), ces fameux «independents» qui se situent au centre de l’échiquier politique à défaut d’être centristes ainsi que les sociaux-démocrates et les socialistes qui n’ont pas réédités leur erreur historique de 2016 où ils n’avaient pas voté pour Hillary Clinton ouvrant la voie à la pire présidence de l’histoire des Etats-Unis.

Et ce n’était pas écrit d’avance qu’il réussirait même si la détestation de Trump par la majorité des Américains était une réalité.

De plus, il a su convaincre, dans les «swing states» (les Etats pivots de la fédération qui sont susceptibles de voter pour un camp ou l’autre et qui sont peu nombreux), les électeurs de lui donner majoritairement leurs voix ce que n’avait pas réussi à faire Hillary Clinton (la centriste avait tout de même remporté le vote populaire par trois millions de voix d’avance).

Dès lors la défaite de Trump est d’abord une victoire de Biden et c’est en cela qu’il mérite amplement d’être désigné comme le centriste de l’année 2020.

Un mérite encore plus grand quand on voit comment il gère la période de transition (le président en place même s’il perd ou ne peut se représenter demeure en place près de trois mois après l’élection, une survivance du passé aussi incongrue que le vote des grands électeurs).

Face à un Donald Trump qui ne reconnait pas sa défaite, parle de vote corrompu, de fraudes (alors qu’il s’agit selon les experts de l’élection présidentielle la plus honnête qui ait jamais eu lieu) tout en tentant d’inverser le résultat comme tout vulgaire dictateur et en en appelant à ses partisans fanatiques et aux membres du Parti républicain, Joe Biden a gardé son calme et son cap ainsi que ses propos rassembleurs.

Il est bien sûr trop tôt pour savoir comment se passera sa présidence mais l’on peut prédire en référence à son long parcours politique, tant au Sénat qu’en tant que vice-président de Barack Obama, qu’il sera un chef de l’Etat proche des gens, cherchant à convaincre et à travailler avec tous les bords politique et qu’il mènera une politique libérale (au sens européen) et sociale en essayant de réparer les dégâts immenses que Trump a fait à la démocratie américaine mais aussi au système de protection sociale.

Il lui faudra également effacer le plus possible cette tâche qui semble indélébile du passage de Trump à la tête de la plus grande puissance de la planète même s’il ne faudra jamais l’oublier pour ne pas rééditer cet errement démocratique.

Ici, il aura une responsabilité historique parce que l’on voit que le trumpisme, dernier avatar d’une radicalisation extrémiste et populiste du Parti républicain, ne semble pas vouloir disparaître avec l’échec de son chef et que toute la droite américaine semble gangréner par celui-ci pour un long moment encore, on l’a vu avec le soutien que nombre d’élus de cette formation (dont une majorité de ses membres de la Chambre des représentants) ont apporté à Trump après sa défaite électorale pour détruire les règles et les principes de la démocratie et la subvertir.

Alexandre Vatimbella avec l’équipe du CREC

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