lundi 30 mars 2020

Actualités du Centre. Covid19: Bayrou veut l’union nationale maintenant, un «nouveau modèle» après et craint pour la démocratie

François Bayrou
On l’avait peu entendu depuis sa mise en examen dans le cadre de l’affaire des attachés parlementaires européens et pratiquement pas depuis le début de l’épidémie de covid19.
Dans une interview au Figaro, François Bayrou détaille sa vision de la situation actuelle et ce qu’il pense de l’après-crise ainsi que de ses craintes vis-à-vis de la démocratie en regard de la capacité des gouvernements des pays où elle existe à gérer au mieux l’épidémie.
Face à cette dernière, il demande que sa fameuse union nationale – qui est devenue une de ses priorités depuis des années – «s’impose» comme l’ont réclamé plusieurs responsables du Mouvement démocrate qu’il préside ainsi que ceux de LaREM, mais il semble bien que les oppositions n’en veulent pas.
Il critique les polémiques venues de droite et de gauche, les estimant «malvenues» au moment où le pays doit se réunir mais estime que le débat sur la gestion de la crise devra avoir lieu une fois celle-ci derrière nous.
Par ailleurs, il estime qu’il faudra inventer un «nouveau modèle» après la crise tant au niveau national qu’international où «on devra lire à nouveau les principes qui nous font vivre ensemble, un certain idéal de justice et d’humanité».
Enfin, il craint que ce moment difficile puisse susciter des troubles et de la violence en parlant d’un «risque d’explosion» «réel»

► Voici les principaux passages de ses propos:
- Après une semaine de cacophonie, le premier ministre a tenté samedi de reprendre la main. Comment maintenir, dans cette période de grande tourmente, une unité de la parole publique?
La première mission des dirigeants démocratiques est de hiérarchiser les urgences. L’urgence absolue est à ralentir la propagation du virus et donc à toutes les mesures de confinement. C’est le seul moyen de préserver les capacités de nos hôpitaux, notamment en réanimation, et espérer l’arrivée à temps des autres armes, des dépistages en nombre, un traitement ou un vaccin. Cela, c’est l’urgence. Mais le confinement, à lui seul, ne vaincra pas le virus. Il y aura un jour d’après. Ce jour-là, et les semaines et les mois suivants, il nous faudra une stratégie de maîtrise sanitaire. Des tests en nombre suffisant pour distinguer ceux qui ont rencontré le virus, avec ou sans symptômes, et dont on peut penser qu’ils sont immunisés, ceux qui ne l’ont pas (encore) rencontré, et ceux qui sont contagieux. Pour chacun de ces groupes, il faudra une stratégie. Et de nouvelles conduites sociales pour que le pays puisse redémarrer. Et une stratégie internationale pour éviter de nouvelles explosions, je pense par exemple à l’Afrique!
- Avez-vous pris des dispositions particulières, à Pau, pour faire face à l’épidémie?
Le Sud-Ouest n’est pas encore atteint de plein fouet. Mais tout le monde se prépare à la vague. À Pau, nous avons travaillé en amont, fait beaucoup d’efforts pour trouver des masques, pour mettre en place un centre médical avancé, des services nouveaux pour la population en temps de confinement. Nous avons porté nos efforts sur les tests, car sans tests, on se bat en aveugles. Nous allons enfin pouvoir conduire plusieurs centaines de tests par jour.
- Vous évoquez les tests et les masques. Quel regard portez-vous sur la communication du gouvernement sur ces deux sujets majeurs?
Devant tout événement imprévu et qui prend le visage d’une catastrophe, l’action publique, comme chacun d’entre nous, peut tâtonner. La communauté médicale et scientifique elle aussi a hésité. Au début de l’épidémie, tous les spécialistes, ou presque, indiquaient que ce n’était pas si grave. C’est pourquoi les polémiques dans des périodes comme celles-ci sont nuisibles et malvenues.
- Le manque d’équipements ne vous a-t-il pas interrogé?
À Pau, nos équipes ont passé des journées à chercher, et à trouver des masques. L’incroyable est que nombre de masques étaient là, distribués en 2008, mais tout le monde, y compris l’État, les avait oubliés. Dans nos différentes institutions, nous en avons trouvé au moins 150.000. Ceci pose aussi la question de l’organisation de l’État, de son efficacité, de sa mémoire.
- Pourquoi n’y a-t-il pas d’union nationale du côté de la classe politique?
L’union nationale doit s’imposer! Elle implique de remettre les polémiques à plus tard et de joindre nos forces dans le moment pour ralentir la contagion. Il sera temps ensuite de poser les questions sur la préparation, les précautions qui auraient dû être prises.
- Pourquoi vous étiez-vous opposé à la tenue du premier tour des élections municipales?
En voyant la situation bouleversante de l’Italie, je voyais monter la marée de l’épidémie. Dès lors qu’on devait fermer les écoles, puis les bars et les restaurants, il était évident pour moi que la conclusion logique et immédiate ne pouvait être que le report des élections. C’était précisément l’avis du président de la République. Mais les oppositions ont poussé de hauts cris en criant au déni de démocratie. Le consensus nécessaire est devenu impossible et la décision n’a pas été prise.
- Le président doit-il rapidement s’exprimer pour esquisser la sortie de crise?
Lorsque les éléments de la sortie de crise seront définis, cette expression sera un moment important pour rassurer le pays.
- Quel regard portez-vous sur la parole de l’exécutif? Ne trouvez-vous pas qu’il y a eu des expressions désordonnées et parfois légères?
Nous sortons de décennies qui avaient de graves problèmes économiques et sociaux, mais n’avaient pas à affronter au sens propre les questions de vie ou de mort. Dans ces moments, les choses changent de nature. Les questions de vie ou de mort nécessitent une capacité de gravité personnelle. Les Romains disaient «gravitas». C’est cela qu’il nous faut réapprendre.
- Craignez-vous que cette crise n’élargisse un peu plus ces fractures, redoutez-vous une explosion du corps social?
Le risque d’explosion est réel. Je ne connais pas de crise sans secousses ni violences. Mais ce drame va changer notre perception du monde. On apprend que les frontières n’existent pas. Que nous sommes une seule humanité, menacée par une seule épidémie, et que notre mode d’organisation nous a rendus plus fragiles. Nous ne produisons pas nous-même les éléments de notre protection. Notre indépendance et notre sécurité collective sont mises en cause. Nous devons retrouver cette maîtrise, ce que je traduisais il y a des années par le «produire en France, produire en Europe».
- Comment imaginez-vous la France d’après?
La crise que nous vivons ébranle en profondeur les piliers de notre vie en commun. Beaucoup pensent que très vite, on recommencera comme avant. Je n’en crois rien. L’après sera très long. Cette crise sera d’une gravité et d’une ampleur jamais rencontrées: crise sans précédent, économique, sociale, peut-être démocratique. L’axe de l’accélération constante des échanges internationaux va être évidemment remis en cause. La question du nouveau modèle se posera nécessairement. De cet énorme bouleversement doit sortir un nouveau monde. Dans ce monde, on devra lire à nouveau les principes qui nous font vivre ensemble, un certain idéal de justice et d’humanité.
- Vous aviez fait campagne sur la dette, celle-ci va s’alourdir de façon considérable. Comment va-t-on payer le «quoi qu’il en coûte»?
Il y a quelque chose qui a profondément changé. La dette était auparavant une dette nationale. Devant une telle catastrophe, elle va devenir inéluctablement une dette partagée. La Banque centrale européenne a pris la juste décision de racheter cette «dette de guerre». Et rien n’est plus juste que ce choix! Car aucun pays n’est responsable de ce qui est arrivé sur son sol! La solidarité s’impose, quoi qu’en pensent aujourd’hui les gouvernements allemand et néerlandais. Si cette solidarité ne jouait pas devant une telle catastrophe, l’Europe n’y survivrait pas.
- Une personnalité du champ médical s’est imposée, le docteur Raoult. Quelle est votre position sur le recours à la chloroquine?
Comment écarter une piste thérapeutique qui apporte de l’espoir dès lors que la balance risques/chances est maîtrisée? L’administration de ces molécules, seules ou en association, entraîne-t-elle des risques supplémentaires? Il semble bien que non, puisque nous avons des décennies de recul sur l’usage quotidien et les effets de ce médicament. L’expérimentation doit donc continuer et les résultats trancheront.
- L’exécutif peut-il s’éloigner des recommandations scientifiques?
Je ne suis pas de ceux qui croient que «les scientifiques» doivent en tout point commander la décision politique. Leurs connaissances sont très utiles, mais la décision politique est d’un autre ordre. Ce qu’elle doit prendre en compte est plus large, plus subtil, l’histoire aussi bien que les ressorts symboliques des peuples.
- Vous identifiez un risque de crise démocratique. À quel niveau?
Si les démocraties ne savent pas entraîner les peuples, les convaincre que tout ce qui doit être fait est fait, et obtenir des résultats, alors les peuples peuvent se retourner contre la démocratie.
- Faut-il une vigilance particulière pour la sortie de crise? En 2008, on avait dit qu’il fallait tout changer et tout a repris comme avant…
La crise de 2008 avait pour cadre les banques et les journaux. En rien elle ne concernait la vie quotidienne, familiale. La crise de 2020, c’est le contraire. Les conséquences sont si lourdes que le statu quo sera impossible.


L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. Les profiteurs (politiques) de la crise


Dans toute crise, il y a des profiteurs.
Depuis le début de celle que nous connaissons actuellement avec l’épidémie de covid19, nombre de faits et gestes désolants, indignes er scélérats ont été commis come le rappellent les autorités et avec ce fatalisme exprimé par le Premier ministre sur ce que révèlent des moments comme celui-là avec le meilleur mais aussi le pire de l’humain et de l’Humanité.
Ce fut le cas dans d’autres moments comme, en France, lors de l’Occupation après la défaite de 1940 ou dans le monde, lors de famines, d’épidémies ou de catastrophes naturelles qui se sont succédé au cours des millénaires.
Ici, je voudrais évoquer une certaine catégorie de profiteurs qui sévissent systématiquement en ces occasions, les profiteurs politiques, ceux qui veulent tier avantage d’une crise pour faire prospérer leur personne ou leur idéologie.
Comme d’habitude, dans de telles moments, ils sont nombreux de par le monde et dans notre pays.
Le premier exemple qui vient à l’esprit est cette décision catastrophique d’avoir organisé le premier tour des élections municipales.
On sait qu’Emmanuel Macron était favorable à le reporter mais qu’il a dû céder face à la pression des oppositions qui menaçaient d’en faire un argument politicien sur l’absence de démocratie en France et l’autoritarisme du pouvoir en place qui, ne l’oublions pas, était, avant le début de l’épidémie, un des thèmes majeurs de tous les partis de gauche et de droite pour attaquer la majorité et tenter de la discréditer.
Et comment ne pas oublier que ce jeu opportuniste et irresponsable surfait allègrement sur le mouvement de foule des gilets jaunes dont la principale caractéristique avait été de dénier toute légitimité à cette même majorité malgré ses victoires aux élections et sur les tentatives subversives de certains syndicats (CGT, Sud, FO) qui instrumentalisaient sans vergogne aucune la grogne d’une partie de la population contre la réforme des retraites pour tenter de faire tomber le pouvoir.
Ce terreau fertile ne demandait qu’à être labouré pour produire une explosion politico-sociale dont la semence aurait été ce report des municipales…
Résultat: une parodie d’élection, des personnes contaminées dans les bureaux de vote et… la critique de ceux-là même qui avaient déjà chargé leurs fusils au cas où les municipales auraient été reportées!
Voilà ce que j’appelle les profiteurs de la crise qui ne se sont évidemment pas limité à cette opération indigne d’élus de la république.
Ainsi, on a vu les mêmes critiquer le confinement comme attentatoire aux libertés et demander des actions plus efficaces pour éviter la propagation du virus alors même que tous les spécialistes sans exception ont expliqué que ce confinement était nécessaire.
Mais en attaquant une mesure lourde et difficile pour la population tout en se posant en gardiens de leur santé, ces profiteurs entendaient bien capitaliser sur un nouveau mécontentement.
Quant aux propos indignés sur le manque de masque, faut-il rappeler à ceux qui s’en émeuvent de manière si ostentatoire que c’est par les décisions qu’ils ont prise eux et leurs majorités d’alors qu’on se retrouve dans cette situation.
Mais il est tellement tentant de montrer du doigt l’autre tout en s’absolvant de toute responsabilité tout en espérant en récupérer quelque chose…
Un autre exemple emblématique vient de la controverse sur la chloroquine et le personnage du professeur Raoult qui affirme que celle-ci doit être utilisée pour soigner les malades atteints du covid19.
Cette molécule, connue et utilisée pour d’autres pathologies depuis près de 80 ans n’est qu’une piste intéressante dont l’efficacité face à ce virus n’est absolument pas démontrée scientifiquement, non seulement en France, à part les travaux de Raoult, mais dans le monde, à part une enquête sujette à caution venue de Chine.
Personne ne dit, et le gouvernement avec, que peut-être, si l’on fait des travaux solides sur son action, elle ne soit efficace mais personne ne peut l’affirmer actuellement, en tout cas, aucun scientifique ou médecin, à part monsieur Raoult.
Mais, au lieu que cette discussion soit menée dans le milieu médicale et en particulier de la recherche, et qu’elle débouche le plus rapidement possible sur une décision uniquement prise sur des bases scientifiques, elle s’est invitée sur le terrain politique par les prises de positions inconséquentes de nombre de politiciens dont on ne sait s’ils connaissent un tant soi peu comment s’effectue une mise sur le marché d’un médicament pour une pathologie précise, notamment afin d’éviter que le remède soit pire que le mal, mais dont on sait plus sûrement qu’ils sont tous des opposants à la majorité en place…
Oui, les profiteurs politiques de la crise sont de sortie et ne croyez pas qu’ils rentreront sagement chez eux avant la sortie de l’épidémie ni qu’ils ne tenteront pas par la suite d’instrumentaliser cette dernière pour continuer leur travail de sape (et non dans un débat démocratique nécessaire et indispensable qui devra avoir lieu pour en tirer toutes les conséquences, à la fois sur les décisions prises et sur les circonstances de sa survenance).
Je finirai pas une autre catégorie tout aussi médiocre mais qui occupe la scène politico-médiatique en tant de crise: les donneurs de leçon.
Accueillis avec une complaisance plus que coupable par les médias, en particulier ceux qui sont des opposants au Président de la république et à son gouvernement, ils viennent nous dire ce qu’il aurait fallu faire, ce qui n’a pas été fait, qui est coupable, qui est innocent, ce qu’il faut faire, ce qu’il faudra faire, etc.
Des véritables encyclopédies du «yaka», «yavéka» et «yoraka»!
Souvent sans aucune légitimité de connaissance, ces «experts» médiatiques font penser à ces faux prophètes qui sévissent dans ces moments d’angoisse et qui viennent nous faire la leçon et nous dire comment faire pour nous sauver des foudres célestes ou de la fureur des éléments.
S’agrègent à ceux-ci, les corporatistes qui trouvent là un moyen assez minable de faire avancer leurs revendications professionnelles qui n’ont rien à voir avec la crise du moment dans une impudeur qui frise parfois la bêtise ou qui viennent régler leurs comptes sur les plateaux de télévision et les studios de radio.
Oui, les crises sont un terrain de jeu pour tous ceux qui pensent d’abord à eux-mêmes plutôt qu’aux autres, plutôt à leur carrière qu’au bien être des autres.
A nous de les laisser déblatérer et être ce qu’ils sont vraiment: de ridicules clowns mais aussi et malheureusement parfois dangereux… pour les autres.