samedi 14 mai 2011

L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. De l’importance du bénévolat civique dans la démocratie


Occuper à des travaux d’intérêt général les chômeurs indemnisés et/ou les bénéficiaires des minimas sociaux a toujours été une idée populaire. Et, ceci, dans une vision, à la fois, pragmatique(pourquoi ne pas faire travailler ceux qui ne font «rien»), moralisatrice (les chômeurs et les pauvres sont souvent des gens qui ne font rien pour s’en sortir donc payons-les mais qu’ils fassent quelque chose pour mériter leurs indemnités) et utilitariste (il y a tant de choses à faire ou qui sont mal faites, avec des gens libres et capables on va améliorer le fonctionnement des services publics et des associations qui œuvrent pour le bien public).
La récente polémique déclenchée par la proposition d’un ministre sur un travail de cinq heures par semaine obligatoire pour toucher le RSA (le revenu de solidarité active) a déclenché un tollé tout autant à gauche qu’à droite (même si de nombreux députés UMP la soutiennent). Mais selon un sondage publié par Le Figaro, une majorité de Français, tant à gauche qu’à droite, y sont favorables.
Cependant, il faut recadrer le débat pour ne pas qu’il tombe dans la caricature et qu’il évite de stigmatiser une catégorie de la population, notamment celle qui est le plus en difficulté et qui, le plus souvent, n’a pas choisi d’en arriver à cette situation extrême qu’est l’assistanat pour cause de pauvreté.
Il ne faut pas tromper les Français en leur faisant croire que ceux qui sont aidés par la solidarité nationale ne sont que des profiteurs fainéants dont on devrait faire en sorte de les faire travailler sans leur demander leur avis.
Le bénévolat civique dans le fonctionnement de la démocratie est un sujet éminemment important et ne doit surtout pas être une sanction ou une obligation, ce qui serait catastrophique. Au contraire, il doit être promu positivement comme un juste devoir et un juste retour des choses pour tous ceux qui ont la chance de vivre dans une démocratie, bien sûre imparfaite, mais qui vaut cent mille fois mieux que vivre dans un régime autoritaire.
Cependant le concept même de bénévolat civique est devenu de plus en plus erratique du fait d’une montée de l’individualisation mais aussi d’une incapacité des pouvoirs publics à proposer une formule incitatrice et attirante sans passer pour des ringards d’un autre âge.
Il existe bien le service civique, qui a remplacé le service militaire, mais il peine à trouver des postes intéressants pour tous les jeunes qui sont candidats. Un comble alors que tant de dysfonctionnements existent un peu partout faute de personnel en nombre suffisant!
Entendons-nous. Il ne s’agit évidemment pas de réduire la qualité en remplaçant subrepticement des professionnels qualifiés avec des non-professionnels incompétents afin de dégraisser le «mammouth de la fonction publique». Ce serait stupide et vain.
Il s’agit d’impliquer les citoyens dans le fonctionnement de la démocratie et ce, dans une démarche civique où, encadrés par des professionnels, ils pourraient rendre des services utiles à la communauté tout en développant leur sens de la responsabilité ainsi qu’en permettant d’augmenter l’efficacité dédits services pour un coût contrôlé.
Ce bénévolat, dont il faut évidemment dresser les contours de manière très précise, est, de surcroît, un moyen privilégié dans les années à venir pour pouvoir pérenniser, voire développer, les services rendus par la collectivité dans un environnement où il faut maîtriser la dépense publique, maîtriser les déficits publics et rendre sa compétitivité à la France tout en impliquant la population dans l’avenir commun de tous.
Car, ce qui est important de dire, c’est que la démocratie n’est pas un cadeau gratuit qui fonctionne quoiqu’il arrive. En période de vaches grasses, nos impôts suffisent à garantir un fonctionnement relativement efficace des services publics. En période de vaches maigres, il serait normal que les citoyens qui bénéficient de tous les bienfaits de la démocratie (si, si, ils existent, demandez à ceux qui en sont privés et qui la réclame au péril de leur vie, de la Lybie à la Chine en passant par la Syrie ou la Corée du Nord ce qu’ils en pensent) se mettent à son service pour quelques heures par mois.
Pour les jeunes, cela pourrait toujours passer par le service civique nettement amélioré. Pour les plus âgés, il s’agirait d’un engagement volontaire. Que ce soit dans la sécurité ou dans l’assistanat, dans la transmission des savoirs ou dans l’aide à domicile, dans l’écoute des autres ou dans l’organisation de la cité, pour prendre quelques exemples, les possibilités sont immenses et les besoins encore plus.
Ce bénévolat donnerait de la fierté à ceux qui l’assureraient et rendrait la démocratie plus humaine, plus proche du citoyen. Un citoyen qui comprendrait ainsi qu’il est en un rouage essentiel.
Il faut sortir des seules logiques monétaire et commerciale dans ce domaine même s’il n’est pas question de prétendre que les gens n’ont pas besoin de gagner leur vie pour vivre... L’important est que ce bénévolat civique permettrait une meilleure intégration de ceux qui sont laissés sur le bord de la route et donc une société plus dynamique et plus capable de relever les défis du XXI° siècle auxquels elle doit faire face.
De même, cela permettrait de refonder, resolidifier et relégitimer le lien social incontournable pour bâtir le bien vivre ensemble.
Mais, demeurant du bénévolat, cela n’affecterait pas la liberté de choix des individus qui demeureraient les seuls décisionnaires de leur investissement collectif. En revanche, il offrirait de vraies opportunités à tous ceux qui veulent s’investir et sont souvent dans le désarroi de ne pouvoir le faire ou de ne faire que des tâches tellement inintéressantes qu’ils jurent qu’on ne les y reprendra pas une seconde fois!