lundi 14 septembre 2015

Vues du Centre – Jean-François Borrou. Jégo l’opportuniste tend la main à Le Maire

Dans cette rubrique, nous publions les points de vue de personnalités centristes qui ne reflètent pas nécessairement ceux du CREC. Ces points de vue ont pour but d’ouvrir le débat et de faire progresser la pensée centriste.
Jean-François Borrou est le pseudonyme d’un journaliste proche des idées centristes et qui collabore épisodiquement à cette rubrique. Ses propos sont les siens et non ceux du CREC.

Yves Jégo sera toujours Yves Jégo.
L’homme politique à l’opportunisme consternant et pathétique ainsi qu’en mal de médiatisation a encore frappé, à la recherche désespérée d’exister par tous les moyens
Celui qui se retrouve aujourd’hui au centre par accident au grand dam des véritables centristes et qui prônait il y a encore peu une indépendance sans restriction de l’UDI et la présence indispensable du parti de centre-droit à la présidentielle, le voilà qui soutien désormais le droitiste Bruno Le Maire pour la primaire LR.
Et cela juste au moment où le président de son parti, Jean-Christophe Lagarde, vient de déclarer, «Je ne reconnais plus Bruno Le Maire (...) qui ne tient plus du tout ni le même positionnement ni le même discours politique», l’accusant d’avoir entamé un virage très à droite préoccupant...
Petit retour sur un parcours politicien qui est un cas d’école en la matière.
Yves Jégo a été un groupie de Nicolas Sarkozy, après avoir été un proche de Nicolas Dupont-Aignan, le souverainiste proche de l’extrême-droite, ne tarissant pas d’éloges sur ce leader exceptionnel… qui l’avait nommé secrétaire d’Etat à l’Outre-mer en 2008.
Une fois remercié sans ménagement par le même Sarkozy un peu plus d’un an après sa nomination, il en devint immédiatement un des contempteurs les plus virulents, quittant du même coup l’UMP pour devenir membre du Parti radical (un mois après son éviction!) puis partir avec son nouveau mentor, Jean-Louis Borloo – pour lequel il voue la même admiration que celle qu’il avait pour Sarkozy –, créer en 2011, l’Alliance républicaine écologiste et sociale.
Puis il le suit à l’UDI dont il devint, en 2014, par hasard et pour quelques mois le «président par intérim» lorsque Borloo quitta le parti.
Il crut alors que le destin avait enfin frappé à sa porte.
Malheureusement pour lui, il n’avait hérité du poste que parce qu’il était le moins dangereux de tous les dirigeants de l’UDI aux yeux de ceux qui fourbissaient leurs armes pour en prendre réellement la tête.
Retour sur terre d’autant plus brutal qu’il fut laminé au premier tour du scrutin pour la présidence de l’UDI.
Il se rallia au bon cheval, Jean-Christophe Lagarde qui, une fois élu, le nomma pour le récompenser premier vice-président, une fonction qui est un placard pas vraiment doré.
Dès lors, il devait se chercher une autre façon d’exister.
Il tenta nombre d’initiatives qui tombèrent dans les limbes des fausses bonnes idées politiques comme celle d’accorder l’asile politique à Edward Snowden tout en le nommant citoyen d’honneur de la République française…
Il fit parler de lui dernièrement avec sa proposition de menus végétariens pour les cantines scolaires puis par la tenue des «Assises du produire en France» organisées en compagnie d’un autre grand opportuniste de la politique française, Arnaud Montebourg.
Mais il lui fallait aussi trouver un nouveau maître.
C’est fait avec son soutien à Bruno Le Maire.
Mais pourquoi diable Le Maire?
On pense évidemment qu’il était assez difficile à Jégo de revenir chez Sarkozy (encore qu’il en est tout à fait capable).
Sans doute a-t-il pensé avec raison qu’il ne serait pas accueilli comme le retour du fils prodigue et qu’il n’obtiendrait aucun strapontin, ceux-ci étant préemptés depuis longtemps par des politiques d’une autre trempe.
Aller voir Juppé n’était guère plus intéressant dans cette optique.
Restaient des seconds couteaux.
Dans ce cadre, celui qui a le plus de chance de «faire un coup» est Bruno Le Maire.
Cela tombait bien, il est en mal de soutiens venus de l’UDI.
Il y avait donc une place à prendre et Yves Jégo l’a prise.
En tout cas, il l’espère.
Pour justifier son ralliement au député LR de l’Eure, il a expliqué, sans rire, au JDD qu’il est «le seul qui peut créer la surprise et représenter le saut générationnel qui changera la donne», capable d’apporter une «bouffée d’air frais» que, selon lui, les Français attendent.
Un peu court évidemment mais c’est le cadet des soucis de monsieur Jégo.
Avec Le Maire, il pourra peut-être exister et ça, pour lui, ça n’a pas de prix.
Une dernière chose, notre homme a rebaptisé son micro-parti Mieux vivre ensemble et sa nouvelle devise politique est de «faire de la politique autrement».
Non, ça ne s’invente pas…

Jean-François Borrou