samedi 21 septembre 2013

L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. Faut-il un Centre-pivot?

Pour certains, les centristes ne sont que des opportunistes qui penchent à droite et à gauche allant dans le sens du vent du succès comme des girouettes politiques, plus intéressés par les postes que par les idées.
Mais il y a une autre version de cette balance droite-gauche que vient de nous rappeler Nick Clegg, le leader des libéraux-démocrates britanniques.
Evoquant les prochaines législatives de 2015, celui-ci a dit, sans ambages, que son parti centriste était prêt à travailler avec les Travaillistes si ceux-ci remportaient les élections ou… de continuer à travailler avec les Conservateurs au cas où ces derniers seraient les vainqueurs du scrutin.
Pour justifier ce positionnement, il a déclaré que l’important pour les libéraux-démocrates était d’avoir une vraie capacité d’infléchissement des politiques des deux grands partis en les teintant fortement d’une coloration centriste.
Ainsi, il estime plus important de se trouver au gouvernement en agissant plutôt que dans l’opposition en critiquant, sachant, a-t-il ajouté, que les «lib-dems» n’étaient évidemment pas majoritaires actuellement dans le pays et qu’ils devaient s’adapter à cette réalité.
On peut extrapoler cette problématique en France, par exemple, où les centristes ne sont pas, non plus, dominants et qu’ils peuvent également jouer un rôle de balance et de modération mais aussi avancer une partie de leur programme en participant à un gouvernement qu’il soit de droite ou de gauche.
Ce pragmatisme se heurte évidemment à la réalité électorale où, par exemple, en France, le PS et l’UMP n’ont pas forcément besoin des centristes pour gouverner.
Mais c’est également le cas en Grande Bretagne où soit les Conservateurs, soit les Travaillistes sont souvent majoritaires à eux seuls.
Et l’on pourrait multiplier les exemples dans les pays dominés par la bipolarisation et où existe néanmoins une ou des formations centristes plus ou moins puissantes.
Néanmoins, sans même être un apport indispensable pour obtenir une majorité, ce jeu de pivot peut être une bonne chose pour un pays afin d’éviter un gouvernement monolithique très clivé idéologiquement surtout dans un monde où rien n’est totalement blanc ou noir.
Pour autant, il n’est pas sûr que cela soit une stratégie gagnante auprès des électeurs.
Nick Clegg a ainsi été beaucoup critiqué par sa base pour avoir fait une alliance avec les Conservateurs alors que celle-ci était, sur bien des points, plus proche des Travaillistes.
Et la présence dans un gouvernement qui a pris des mesures draconiennes face à la crise, parfois très à droite, a eu comme conséquence des Berezinas électorales pour les Libéraux-démocrates ces dernières années.
Sauf que, même affaiblis, ceux-ci pourraient être encore des faiseurs de roi en 2015.

En tout cas, ce Centre-pivot – et non opportuniste – est à considérer comme moyen de «centriser» des politiques bien trop clivées idéologiquement.

Refondation du Centre. Le forcing anti-UDI de la frange gauche du MoDem

Jean-Luc Bennahmias aurait-il enfin trouvé son combat emblématique? En tout cas, il donne de la voix constamment pour se faire le porte-parole de l’aile «gauche» du Mouvement démocrate en demandant que s’il y a rapprochement de son parti avec l’UDI (ce qu’il ne souhaite vraiment pas), l’identité, le positionnement et les alliances de celui-ci soient totalement respectés ce qui, évidemment, ne permettrait pas, in fine une réunion des centres.
Mais le député européen venu des Verts est loin d’être le seul à l’intérieur du Mouvement démocrate à critiquer ouvertement un rapprochement avec l’UDI.
Exemple de ces critiques avec l’interview dans le quotidien Sud Ouest d’un conseiller régional MoDem: «Mon engagement date de 2005, le jour où l’UDF rompt avec l’alliance automatique à droite. J’étais très loin du centre hémiplégique d’avant, qui ne regardait que d’un côté. Voir le retour de telles alliances ne m’intéresse pas. Je ne veux pas faire partie de ce rapprochement et je n’en ferai pas partie».
Ou encore cette tribune de militants de Le Monde: «Nous n'acceptons pas la danse nuptiale à laquelle se livrent, à huis clos et sans aucune consultation des militants, notre chef et M. Borloo en vue de listes communes aux élections européennes. Cette alliance nous inquiète, dans la perspective des élections municipales et à plus long terme, car elle brouille notre message et compromet notre indépendance chèrement acquise. Si ce mariage était effectivement consommé, c'est donc que Bayrou renouerait avec sa culture d'origine : obnubilé par un destin présidentiel, il espérerait ainsi à terme être le candidat de droite en tête devant l'UMP et le FN».
La révolte gronde donc dans les provinces avec cet argument essentiel que le marqueur principal de la création du Mouvement démocrate et l’adhésion de tous ceux qui sont aujourd’hui des opposants farouches à une réunion des partis centristes est que, justement, la formation de François Bayrou avait tourné au positionnement au centre-droit et à l’alliance automatique et forcée avec la Droite.
En fait, l’alliance MoDem-UDI détruirait ce qui fait la spécificité du premier nommé, c’est-à-dire le fameux «ni-ni» (ni droite, ni gauche) qui a séduit nombre de militants lors de sa création en 2007, ces derniers étant la seule richesse du parti depuis lors.
Du coup, le dilemme de François Bayrou est entre sacrifier cette force militante et des élus ainsi que, surtout, la possibilité de retrouver une voix (et une voie) qui porte(nt) politiquement.
En somme, le président du Mouvement démocrate rejoue le sempiternel dilemme politique entre les idéaux affichés et l’ambition personnelle.

Alexandre Vatimbella avec l’équipe du CREC