jeudi 9 juin 2016

Présidentielle 2017. Bayrou brûle d’y aller, Lagarde menace de se présenter

Les partis centristes français ont souvent le syndrome du petit parti adossé à un grand qui n’arrête pas de menacer, à chaque contrariété, «retenez-moi, sinon…».
On voit bien en ce moment un tel comportement de la part de l’UDI qui tente sans grand succès d’être un «partenaire» et non un faire-valoir de LR pour les prochaines élections présidentielle et législatives ainsi que pour les places dans un futur gouvernement si la Droite l’emporte en 2017.
Or, aucun des candidats à la primaire de LR n’a l’intention, pour l’instant, d’obtempérer aux injonctions de l’UDI de s’assoir autour d’une table, d’écrire un programme et de se partager les circonscriptions, le tout à l’avantage de ce dernier parti qui voudrait bien rééditer le coup des régionales lorsque Nicolas Sarkozy leur avait donné largement plus que ce qu’ils représentent afin de les mettre dans sa poche, une opération qui a coûté cher en termes politiques au président du parti de droite.
On connait bien en politique et, plus particulièrement en matière électorale, le pouvoir de nuisance du petit face au gros qui, par des menaces de ne pas être l’appoint nécessaire pour gouverner obtient de avantages parfois totalement exorbitants.
Mais c’est de bonne guerre, le petit étant alors capable de faire une place à ses intérêts – et parfois à ses idées! – alors même que sa seule force électorale s’il décidait d’aller en solo à la bataille ne lui permettrait par de réaliser.
Si le procédé peut ressembler à un chantage, la politique dans une démocratie républicaine est bien de conquérir le pouvoir avec une majorité et, pour cela, de réunir celle-ci autour d’un consensus qui oblige aux compromis si un parti n’est pas lui-même hégémonique et majoritaire à la fois.
Mais, même alors, le consensus et les compromis se font à l’intérieur du parti.
Or donc, l’UDI tente par tous les moyens de peser sur la séquence électorale de l’année prochaine.
D’autant que cette petite confédération de partis encore plus petits et dont moins de 4% des Français se revendiquent dans les sondages, est minée de l’intérieur par des haines et d’incessants combats de petits coqs qui font que chaque leader réel ou autoproclamé prend des «initiatives» pour s’entendre avec LR.
Une telle cacophonie sur fond de fragilité et de friabilité – personne ne sait combien de temps peut encore exister l’UDI – n’encourage pas évidemment LR à négocier et à faire des concessions alors que cette formation est déjà des plus réticentes à le faire.
Du côté de l’UDI, on sent bien que l’on commence à être marginalisé et, pire, que l’on a très peu de munitions pour l’éviter.
Car, si l’on prend les sondages, on s’aperçoit, par exemple, qu’Alain Juppé peut gagner la primaire LR sans les voix UDI (avec plus de difficultés néanmoins) mais surtout qu’il peut être en tête du premier tour sans celles-ci et devenir président de la république de même sans avoir ces votes.
Et cela semble le cas de tous les candidats potentiels de LR.
En revanche, l’UDI ne pourra exister après 2017 que grâce à LR et à un accord pour les législatives puis à un accord de gouvernement si victoire de la Droite il y a.
Dans la situation où elle est, la confédération centriste est donc obligée d’attendre le bon vouloir de son «partenaire» alors qu’elle pensait pouvoir lui mettre la pression.
D’où les déclarations agressives pour tenter de montrer que l’on existe et qu’il faudra compter avec soi.
C’est dans ce cadre que l’on peut analyser les derniers propos de Jean-Christophe Lagarde.
Le président de l’UDI a, non seulement, confirmé que son parti ne participerait pas à la primaire de LR (où il a tout à perdre) mais que si les leaders du parti de droite ne voulaient pas d’un accord, alors il pourrait bien y avoir une candidature de la formation centriste en 2017.
Et que ce candidat pourrait être Lagarde.
Evidemment, personne ne croit à cette menace chez LR et ce scénario, pour l’instant, n’a aucune crédibilité puisque le président de l’UDI plafonne à 1% des intentions de vote.
Une des raisons de la faiblesse de l’UDI est d’avoir mis la charrue avant les bœufs.
Ainsi, du fait de son incapacité à s’unir, les différentes composantes n’ont pas été capables de définir un programme et uns stratégie commune pour la présidentielle qui auraient permis de développer l’originalité du parti et de ses idées afin d’acquérir crédibilité et de bons sondages.
Dès lors, la seule chose dont il est capable c’est de «vendre» son pouvoir de nuisance contre des circonscriptions et des strapontins ministériels…
Tout autre est la position de François Bayrou.
Lui, il est seul mais ses intentions de vote à la présidentielle représentent trois à quatre fois le pourcentage de Français qui se disent sympathisants de l’UDI.
Voilà qui donne une certaine crédibilité acquise également lors des deux dernières présidentielles.
Pour autant, afin de remercier Alain Juppé de lui avoir permis de devenir maire de Pau alors qu’il était quasiment un politique en déshérence, proche de la sortie, il le soutient pour 2017.
Cependant, le président du Mouvement démocrate sait que c’est sa dernière chance de pouvoir occuper l’Elysée.
Alors, son soutien inconditionnel est devenu, petit à petit, de plus en plus conditionnel et s’est transformé en un «intérêt» qui pourrait bien se transformer en attentisme avant de finir par une candidature autonome.
Il s’agit du scénario possible si c’est Juppé qui est le candidat de LR.
Car, sinon, François Bayrou sera sans nul doute candidat face à son pire ennemi, Nicolas Sarkozy, et son second pire ennemi, François Hollande (sans oublier son repoussoir ultime, le candidat du clan Le Pen).
Même si les sondages ne lui donnent jamais la possibilité d’être qualifié pour le second tour jusqu’à présent, il croit en son étoile et brûle d’y aller.
D’où tout un discours sur les risques qu’Alain Juppé soit battu lors des primaires LR par Nicolas Sarkozy.
Alors, le rejet de Sarkozy couplé à celui de Hollande ouvrirait une opportunité à Bayrou.
Cette éventualité n’est pas du tout un fantasme inventé par le président du MoDem.
Actuellement, il n’est pas celui qui a le plus de chances de se réaliser mais il peut le devenir et les raisons qu’il en soit ainsi existent.
Si c’était le cas et si l’UDI ne parvenait pas à s’entendre avec LR, on pourrait avoir deux candidats centristes, François Bayrou et Jean-Christophe Lagarde.
Mais là on est beaucoup dans la politique fiction…

Alexandre Vatimbella


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Une Semaine en Centrisme. Critiqué par Bayrou les sympathisants MoDem se détournent de Macron

La chasse au Macron continue de faire rage avec quelques succès qui ravissent tout autant la Droite et la Gauche et, dans une moindre mesure, une partie du Centre.
Sous le feu continuel des critiques avec, en plus, une agressivité inqualifiable venue de l’extrême-gauche – un maire communiste s’est même permis de justifier la violence de la CGT à l’égard du ministre de l’Economie ainsi que son refus de le recevoir –, il est en baisse dans les sondages.
C’est évidemment dans l’ordre des choses puisqu’il était monté très haut, très rapidement et qu’à, l’inverse de stars de la sphère médiatique comme Nicolas Hulot ou de leaders de l’opposition comme Alain Juppé ou François Bayrou, il met les mains actuellement dans le cambouis, ce qui, mécaniquement, pour toute personnalité politique, lui attire des reproches, des critiques et, évidemment, nombre d’opinions négatives comme on le constate désormais pour tous les gouvernants en activité sauf exceptions que demeure encore largement Macron malgré tout.
C’est par un sondage de l’IFOP commandé par Le Figaro – qui est devenu un des principaux médias à faire une chasse systématique au Macron, c’est dire l’inquiétude qu’il suscite à droite – que l’on constate une détérioration toute relative de l’image du ministre de l’Economie auprès des Français que le quotidien, néanmoins, n’a pas hésité à qualifier de «forte chute»… «auprès des militants socialistes», on a les alliés objectifs que l’on peut!
Car les résultats de ce sondage ne sont pas aussi catastrophiques que le titre de la Une du quotidien le laisserait penser.
Ainsi, s’il perd six points sur sa compétence entre avril et juin 2016 passant de 63% à 57%, il en gagne deux par rapport à août 2015 (57% contre 55%).
De même qu’à la question de savoir s’il est proche des Français, il perd sept points entre avril et juin mais gagne trois points par rapport à août 2015.
Quant à son courage, testé uniquement en août 2015 et juin 2016, il demeure stable (59% et 58% respectivement).
Quant à savoir s’il est capable de sortir le pays de la crise, il passe de 45% à 37% entre avril et juin, une baisse de cinq points.
Comme l’affirme Le Figaro, c’est vrai que la baisse est beaucoup plus sensible chez les sympathisants socialistes.
En revanche, il est toujours adoubé par les sympathisants du Centre, en particulier ceux de l’UDI.
Car ceux du Mouvement démocrate commencent à devenir plus critiques depuis que François Bayrou s’est fait une spécialité dans la critique du ministre de l’Economie.
Il faut dire qu’il est un concurrent direct pour devenir le leader et le représentant de l’axe central (allant des réformistes de droite aux sociaux-libéraux de gauche en passant par les libéraux sociaux du Centre) à la prochaine présidentielle.
Ainsi, si 93% des sympathisants de l’UDI l’estiment compétent, ils sont 77% des sympathisants MoDem dans ce cas.
Par rapport à avril, il gagne trois points chez les sympathisants de l’UDI mais en perd dix-sept chez les sympathisants du MoDem.
En outre, 83% des sympathisants de l’UDI estiment qu’il est différent des autres personnalités politiques alors qu’ils ne sont que 67% chez ceux du MoDem.
Par rapport à avril, il perd six points tant chez les sympathisants de l’UDI que ceux du MoDem.
Si 63% des sympathisants UDI pensent qu’il est capable de sortir le pays de la crise (moins un point par rapport à avril), 54% des sympathisants MoDem partagent cette opinion (moins sept points par rapport à avril).
En matière de capacité à réunir les Français, 56% des sympathisants de l’UDI estiment qu’il l’a alors que seulement 46% des sympathisants du MoDem l’affirment.
Ce qui fait une perte de huit points chez les sympathisants de l’UDI et de quinze points chez les sympathisants du MoDem.
A noter que par rapport au sondage d’avril, l’IFOP n’a pas demandé aux sondés s’ils voulaient de Macron comme premier ministre de Juppé.
A l’époque, 75% des sympathisants de l’UDI et 73% des sympathisants du Mouvement démocrate étaient en faveur d’une telle nomination.
(Sondage IFOP réalisé du 3 au 6 juin 2016 par internet auprès d’un échantillon de 1005 personnes de plus de 18 ans représentatif de la population française / méthode des quotas / marge d’erreur de 3 points)
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC