samedi 11 janvier 2014

L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. L’Alternative et les fractures ouvertes du Centre

Il y a peut-être des gens qui pensaient ou qui faisaient semblant de penser que la refondation du Centre serait une simple formalité, puisqu’il s’agissait, selon eux, de réunir une même famille politique dispersée contre son gré.
Ils avaient sans doute oublié ce qu’est le Centre et l’espace centriste.
D’abord, l’espace centriste n’est pas un lieu unifié à l’instar des espaces de la Gauche et de la Droite.
Même s’il y a moins de différences entre l’extrême-gauche et la Gauche ainsi qu’entre l’extrême-droite et la Droite, le spectre qui va du centre-gauche au centre-droit ne consiste pas en de simples postures politiciennes et opportunistes mais dans un débat d’idées.
Dès lors, il n’était pas évident de décréter une union entre un Mouvement démocrate qui penchait de plus en plus vers le centre-gauche (et qui recrutait des militants sur ce positionnement) et une UDI qui se définissait comme une confédération de centre-droit, recherchant ses racines dans l’UDF de 1978.
C’est le contraire qui eut été étonnant.
Ensuite, le Centre.
Si le Centrisme est une pensée politique que l’on peut assez bien définir avec ses métavaleurs et ses métaprincipes, même si elle demeure en éternelle construction comme toute autre pensée politique, le Centre, lui, fédère avant tout des hommes et des femmes indépendants qui se méfient des appareils et des organisations qui limitent leur liberté.
Ayant fait ces rappels nécessaires, on peut dès lors comprendre, en mélangeant cela avec les arrière-pensées bassement politiciennes et les ambitions personnelles légitimes, que l’«organisation coopérative» inventée par Jean-Louis Borloo et François Bayrou n’allait pas, d’un coup de baguette magique, fédérer sans accros des centristes divers et variés, jaloux de leurs indépendances.
Se greffent évidemment à tout cela les fractures ouvertes entre centristes qui ne se refermeront pas aussi vite que certains l’espèrent et qui resteront encore bien présentent comme d’autres le redoutent.
Si l’on prend la nébuleuse centriste depuis 1998, on y voit beaucoup trop de confrontations, de scissions, de batailles d’égo et de fâcheries puériles, en tout cas, bien plus que des rapprochements et des réunions.
Qui peut oublier, par exemple, que le fondateur de l’UDF, Valéry Giscard d’Estaing est membre aujourd’hui de l’UMP de par ses inimitiés avec François Bayrou?
Qui peut oublier que l’UDF, avant de devenir le Mouvement démocrate, s’est vidé, en vagues successives, de nombre de ses leaders et militants, certains allant à l’UMP, d’autres créant le Nouveau centre, d’autres encore se retrouvant dans d’autres partis ou en créant de nouveaux.
Qui peut oublier que le Nouveau centre a été, dès sa fondation aussi peu uni que l’est un parti socialiste, ce dernier ayant malgré tout une discipline qui n’existe même pas dans la formation centriste?
Qui peut oublier que la plupart des leaders de l’UDI d’aujourd’hui sont les anciens bras droits de François Bayrou et que beaucoup demeurent et demeureront encore longtemps incapables de lui pardonner ce qu’ils considèrent comme une trahison (lui-même estimant que ce sont eux les traitres)?
Et ce ne sont que quelques unes des questions qui risquent d’empoisonner l’Alternative pour longtemps…
Bien évidemment, il faut faire avec et avancer pour bâtir un Centre où les différences idéologiques ne sont pas aussi profondes que cela et permettent tout de même de mettre sur pied une confédération qui ait un sens politique réel, à la fois sur la forme et sur le fond.
Néanmoins, être amnésique sur toutes ces fractures encore ouvertes n’est pas un comportement responsable qui permettra de résoudre les défis qui se posent à cette refondation centriste.
Jean-Louis Borloo et François Bayrou avaient espéré que leur baguette magique du 5 novembre dernier ferait table rase d’un passé qui demeure encore un présent.

Leur croyance est sans doute la plus dangereuse qui soit pour une vraie refondation entre partis centristes.