jeudi 5 avril 2018

Actualités du Centre. Les centristes peu satisfaits du projet de réforme constitutionnelle

Emmanuel Macron a tranché en matière de réforme constitutionnelle et a préféré caresser dans le sens du poil le président du Sénat et membre de LR, Gérard Larcher, plutôt que de contenter les centristes, en particulier ses alliés du Mouvement démocrate en particulier à propos de la proportionnelle.
Le Président de la république a de fait rompu le pacte qu’il avait scellé avec François Bayrou lors de la campagne présidentielle de 2017 et qui devait garantir la mise en place d’une dose de proportionnelle conséquente.
Ainsi le projet annoncé officiellement par la Premier ministre, Edouard Philippe, est bien en-deçà de ce qu’espérait le président du MoDem mais également tous les centristes en matière de proportionnelle lors des élections législatives.
En effet, le taux retenu est de 15% de députés élus de cette manière alors que les centristes avaient fixé la barre à 25% avec une limite de 20% à ne pas franchir vers le bas pour l’UDI.

Voici les autres annonces faites lors de son discours.
Le projet:
- «Conforte l’indépendance de nos juridictions avec le renforcement des pouvoirs du Conseil supérieur de la magistrature pour la nomination et l’exercice du pouvoir disciplinaire des magistrats du parquet ; il organise également la fin de la présence de droit des anciens Présidents de la République au Conseil constitutionnel.»
- «Modernise la procédure de mise en cause de la responsabilité pénale des Ministres pour les faits commis dans l’exercice de leurs fonctions, procédure qui sera désormais du ressort de la Cour d’appel de Paris et non plus de la Cour de Justice de la République, qui sera supprimée. Sur la proposition du Gouvernement et avec l’approbation de l’ensemble des groupes parlementaires, un filtre sera toutefois conservé pour que la responsabilité des ministres ne soit engagée qu’à bon escient.»
- «Procède à une transformation profonde du Conseil économique social et environnemental, qui deviendra une chambre de la société civile, chargée, avec un nombre de membres réduit de moitié, d’organiser les consultations des citoyens et des experts sur les projets d’avenir pour notre pays.»
- «Renforce l’efficacité de la procédure législative et l’effectivité du contrôle parlementaire: le Gouvernement a pris en compte l’opposition du Parlement à l’idée d’un contingentement des amendements; cette disposition a donc été retirée, mais les présidents des assemblées ont convenu qu’il était nécessaire de limiter les amendements sans portée normative, sans lien direct avec le texte ou qui ne seraient pas du domaine de la loi.
Sans revenir sur la réforme de 2008, qui a défini un équilibre entre une semaine de contrôle, une semaine d’initiative législative parlementaire et deux semaines d’initiative législative gouvernementale, les projets de texte les plus importants ou urgents pourront bénéficier d’une inscription prioritaire à l’ordre du jour.
Par ailleurs, la procédure sera accélérée après la commission mixte paritaire, même si la nouvelle lecture au Sénat sera maintenue.
Enfin, sur le modèle de ce qui se pratique au Sénat, la discussion en séance pourra être focalisée sur les points principaux, grâce à un meilleur travail en commission.
L’évaluation des lois sera plus systématique, et, pendant les semaines de contrôle, les parlementaires pourront procéder aux corrections ou aux simplifications des lois faisant l’objet de l’évaluation ;
Le vote du budget sera plus rapide (50 jours au lieu de 70 jours) mais un temps plus long sera dédié chaque printemps à l’évaluation des politiques publiques et au contrôle de l’exécution du budget par les ministres.
- Donne «la capacité des collectivités locales de métropole et d’outre-mer d’adapter elles-mêmes les règles qui régissent leurs domaines de compétence à la réalité de leur territoire. C’est un pacte girondin que nous proposons aux territoires, en suivant les recommandations du Conseil d’Etat. C’est aussi un gage d’efficacité et une façon de réformer sans céder à l’esprit de système.»
- Donne à «la Corse (…) sa place dans notre Constitution, ce qui permettra d’adapter les lois de la République aux spécificités insulaires, mais sous le contrôle du Parlement.»
- Inscrit «l’impératif de lutte contre le changement climatique à l’article 34, qui définit le domaine de la loi. Le Parlement prendra ainsi sa part dans ce défi majeur du siècle.»
- Met en place un «Service national universel (…)pour valoriser l’engagement des jeunes au service de la nation».
- Met en place «une réduction de 30% du nombre de députés et de sénateurs dans des conditions qui garantissent la représentation de tous les départements et territoires».
- Introduit «une dose de représentation proportionnelle aux élections législatives pour 15% des sièges de députés à pourvoir.
- Interdit le «cumul des mandats dans le temps, au-delà de trois mandats identiques, complets et consécutifs, sauf pour les maires des communes de moins de 9000 habitants».

La réforme sera divisée en trois lois:
- une révision constitutionnelle (réforme du Conseil économique et social, du Conseil supérieur de la magistrature, suppression de la Cour de justice, réforme du travail parlementaire, notamment);
- un projet de loi organique (baisse du nombre de parlementaires, non-cumul dans le temps);
- un projet de loi ordinaire (introduction d’une dose de proportionnelle aux législatives, mise en place d’une nouvelle carte électorale).

Edouard Philippe estime que «ces textes contribueront à rénover profondément la vie politique et parlementaire dans un triple souci de responsabilité, de représentativité et d’efficacité».
Le délégué général de La république en marche, Christophe Castaner a emboîté le pas du Premier ministre en estimant que «cette réforme porte l’ambition d’une V° République renouvelée, moderne, répondant aux exigences de notre temps» et constitue «une première étape du retour de la confiance de nos concitoyens dans la vie politique».
C’est également le cas du Président de l’Assemblée nationale, François de Rugy mais avec quelques nuances puisqu’il «souhaite» que l’examen du projet «soit l'occasion d'enrichir le texte, notamment pour améliorer la procédure parlementaire et renforcer les moyens de contrôle et d'évaluation des politiques publiques par le Parlement».
De même, il affirme que «cette réforme offre une occasion, à ne pas manquer, de renforcer et de préciser le rôle du Parlement, sans remettre en cause l'équilibre institutionnel de la V° République. C'est en rendant le Parlement plus représentatif dans sa composition, plus efficace dans ses procédures de décision, et plus puissant dans son rôle d'évaluation qu'on apportera des réponses adaptées à la crise démocratique».
En revanche, les réactions au MoDem et à l’UDI ne sont pas de même tonalité conciliante.
Pour le président du Mouvement démocrate, François Bayrou, cette réforme n’est qu’«un point de départ et non pas un point d'arrivée» car Il y aura «des choses à améliorer» et «il faudra trouver le bon équilibre, celui qu'Emmanuel Macron a proposé aux Français lors de la campagne présidentielle».
On ne peut être plus clair pour exprimer un mécontentement lorsque l’on est dans la majorité présidentielle…
L’UDI s’est exprimée par deux communiques de presse, celui de son président, Jean-Christophe Lagarde et celui du président du groupe Union centriste au Sénat, Hervé Marseille.
Lagarde «prend acte des premières annonces du Premier Ministre concernant la réforme des institutions. Il réaffirme la position de l’UDI, demeurant inchangée depuis le début des consultations, sur la baisse du nombre de parlementaires, à savoir conserver, au moins, un député et un sénateur, par département.  Ce serait une bonne règle et reviendrait à une réduction de 25% du nombre de parlementaires. Concernant la dose de proportionnelle, le président de l’UDI considère que 20% est un minimum pour permettre de dégager une majorité capable de gouverner et à la fois pour représenter convenablement les différents courants de pensées au parlement. La nature de la proportionnelle mise en œuvre, additionnelle ou compensatoire, devra en outre être précisée rapidement afin de mesurer les intentions du Gouvernement.»
Marseille déclare, de son côté, qu’«aujourd’hui, le compte n’y est pas!»:
«La diminution du nombre de parlementaires n’était déjà pas une fin en soi. Elle s’avère excessive dès lors qu’elle ne pourra pas assurer une représentation satisfaisante des territoires. Une baisse de 25 % serait plus pertinente. A cet égard, le gouvernement devra garantir que chaque département devra être représenté par au moins un député et un sénateur. La part de proportionnelle retenue, à 15 %, est loin de répondre à nos attentes. Elle ne permettra pas une représentation conforme à la réalité des diverses sensibilités politiques de notre pays. La nature de la proportionnelle mise en œuvre devra être précisée rapidement afin de mesurer les intentions du Gouvernement».