vendredi 21 février 2020

L'Editorial d’Alexandre Vatimbella. Médias, maillon faible de la démocratie?

Sans médias libres pas de démocratie.
Mais sans médias responsables, pas de démocratie aussi.
D’où un problème récurrent pour la démocratie d’avoir des médias aussi libres que possible et aussi responsables que nécessaires, c'est-à-dire en les laissant libres de faire ce qu’ils veulent et en espérant qu’ils soient le plus responsable possible.
Ici, le lecteur ne doit pas faire une erreur d’interprétation.
Je ne parle pas de la responsabilité judiciaire des médias qui permet à tous ceux qui estiment avoir été diffamés ou accusés à tort par des organes de presse d’aller demander réparation et condamnation devant les tribunaux.
La responsabilité n’est même pas celle d’un code de déontologie dont on connait la propension des journalistes de s’abriter derrière ses règles pour justifier tout et n’importe quoi, celle dont je parle est la responsabilité face à la mission de la presse qui justifie sa liberté: informer l’individu pour qu’il soit un citoyen averti et capable d’agir en toute connaissance de cause.
Or, si l’on regarde ce qui se passe dans la plupart des démocraties de la planète, on en est loin.
Avant de développer, il est évident que les trois pouvoirs institutionnels, garants de l’exercice concret de la démocratie, l’exécutif, le législatif et le judiciaire connaissent eux aussi parfois des dérives dangereuses et inacceptables.
Mais, à la différence des médias, ils ont des règles strictes de fonctionnement, se contrôlent l’un l’autre et sont redevables devant les citoyens par l’élection.
On peut donc les censurer pour avoir failli vis-à-vis de la démocratie.
Les médias, eux, qui sont pourtant le «quatrième pouvoir», certes informel mais bien réel et même revendiqué, n’ont pas à rendre ce genre de compte quand ils faillissent à leur mission d’informer et c’est tant mieux pour la liberté d’opinion.
En revanche, c’est tant pis pour l’information citoyenne, celle qui permet à la démocratie de fonctionner correctement.
Car sans citoyen bien informé (et formé), la démocratie demeure formelle puisque celui-ci ne prend ses décisions que sur des informations qui sont souvent biaisées, instrumentalisées voire fausses.
Cette réalité vient en partie de ce que toutes les opinions peuvent s’exprimer ce qui permet à certaines idéologies populistes, autoritaires ou dictatoriales de faire de la simple propagande déguisée en information (ce que l’on appelle aujourd’hui fake news ou infox…).
L’autre partie est que les médias sont des entreprises commerciales ou vivent dans un environnement concurrentiel.
Dès lors pour faire des profits ou simplement pour survivre, elles doivent appâter le chaland en créant eux-mêmes l’événement ou en l’enrobant jusqu’à la nausée de couches de clinquant.
Une pratique aussi vieille que la presse mais qui a pris des proportions démesurées avec l’apparition des médias d’information continue 24 heures sur 24.
Deux mesures sont pourtant à même de réduire cette problématique que l’on ne pourra jamais régler définitivement, l’éradication de rumeurs, de mensonges, de «on-dit» et autres moyens de tromper le citoyen n’étant guère possible à 100%.
La première est l’existence d’un vrai service public de l’information qui n’existe aujourd’hui dans aucune démocratie.
La deuxième est la formation de l’individu aux médias afin qu’il puisse avoir un regard critique sur l’information qu’ils délivrent, qu’il puisse la décoder efficacement zet non qu’il en soit tributaire de manière mécanique et passive.
Ces deux mesures sont essentielle pour que le citoyen se fasse une opinion personnelle qui lui permette d’agir en toute connaissance de cause (ou en meilleure connaissance de cause qu’il puisse le faire) pour ses intérêts et ceux de la communauté dans laquelle il vit.
J’ai déjà évoqué plusieurs fois ce que devraient être un service public vraiment indépendant, à la fois, du pouvoir en place et des idéologies partisanes et de la structure indépendante qui devrait être à sa base avec un contrôle citoyen constant et strict.
Quant à la formation des citoyens aux médias, elle est beaucoup trop confidentielle et limitée actuellement pour leur permettre un décodage utile et nécessaire.
Enfin, il est bien clair que ce n’est pas en rabotant la liberté d’expression, donc la liberté d’opinion, donc la liberté de la presse que l’on règlera le problème.
C’est en offrant une alternative crédible, un complément nécessaire, une source honnête à un citoyen bien formé que l’on pourra faire en sorte que les médias soient ce qu’ils auraient du être depuis le début de la démocratie, son maillon fort.


Vues du Centre. Présidentielle USA 2020 – Haro sur le «méchant» Bloomberg!

Par Aris de Hesselin

Dans cette rubrique, nous publions les points de vue de personnalités centristes qui ne reflètent pas nécessairement ceux du CREC. Ces points de vue ont pour but d’ouvrir le débat et de faire progresser la pensée centriste.
Aris de Hesselin est un avocat international, centriste et un européen, défenseur d’une mondialisation humaniste.

Michael Bloomberg lors du débat au Nevada
Si Michael Bloomberg se demandait ce qu’est l’opposition à un candidat centriste assumé, il vient d’être mis au courant et de manière on ne peut plus claire!
Lors du débat d’il y a deux jours au Nevada des prétendants démocrates à la présidentielle, qui était le premier auquel il participait suite à ses très bons scores dans les sondages, il a été la tête de turc des cinq autres candidats avec les outrances de ceux de gauche, Bernie Sanders et Elizabeth Warren, qui l’ont érigé en «méchant» (tout politique a besoin de son méchant…), le critiquant quasiment plus que Donald Trump!
Ce qui, encore une fois, révèle bien cette alliance objective qui unit si souvent Gauche et Droite quand il faut s’attaquer à un centriste.
Plus étonnant mais pas moins compréhensible ont été les attaques des candidats qui veulent occuper l’espace centriste sans se dire formellement centristes comme Amy Klobuchar, Pete Buttigieg et même Joe Biden.
Il faut dire que, pour eux, la menace Bloomberg est encore plus directe sur leur candidature puisqu’il est en plein sur leur terrain d’élection aux sens vrai et figuré de l’expression.
A cela s’ajoute des médias tout aussi unanimes contre l’ancien maire de New York et qui n’ont pas manqué de se délecter du soi-disant «désastre» de sa prestation lors du débat et de l’«explosion» de son «mythe».
Et comme il est haï par Donald Trump, on peut dire qu’il a très peu d’amis si ce n’est aucun dans l’establishment politico-médiatique…
A-t-il alors une chance de devenir président des Etats-Unis?
Sa prestation peu charismatique au Nevada ne plaide pas en sa faveur.
En revanche, être détesté par tous les autres candidats et critiqué par l’ensemble des médias ne semble plus rédhibitoire depuis… l’élection de Trump!
Même s’il est aux antipodes des idées et des agissements de l’actuel occupant de la Maison blanche, cet ostracisme peut jouer en sa faveur si elle ne le détruit pas.
Mais ce qui reste sa principale force et sa montée dans les sondages, ce ne sont pas ses milliards ni même ses millions déjà dépensés pour lancer sa candidature comme le prétendent ses contempteurs, non, c’est son positionnement au centre, les grandes lignes de son programme, son bon bilan en tant que maire de New York et les bons résultats de son activisme contre les armes à feu, pour le droit à l’avortement ainsi que sa lutte contre Trump et l’extrême-droite du Parti républicain, notamment en finançant les campagnes de candidats centristes, surtout démocrates mais aussi républicains et «independents».
Sera-ce suffisant pour s’imposer lors des primaires démocrates puis pour battre Donald Trump, c’est difficile à dire alors qu’il va avoir un véritable mur d’hostilités devant lui.
En même temps, s’il parvient à passer au travers, il démontrera qu’il est bien capable de s’installer dans le bureau ovale en janvier 2021.

Aris de Hesselin