dimanche 1 novembre 2015

Une Semaine en Centrisme. Axe central – L’effet Macron-Juppé peut-il durer?

Les deux vedettes actuelles des sondages, l’un pour les remporter systématiquement haut la main (Alain Juppé), l’autre pour avoir des progressions impressionnantes (Emmanuel Macron), sont deux hommes politiques qui ont décidé de se positionner au centre de l’échiquier politique (mais qui ne sont pas du Centre) tout en demeurant fidèle à leurs familles politiques d’origine, la Droite pour le premier, la Gauche pour le second, tout en espérant les faire évoluer vers une vision plus consensuelle, plus apaisée et plus réformiste, tout en esquissant une possible refondation de l’espace politique avec un courant central qui défierait le paysage partisan actuel.
Le dernier baromètre BVA pour Orange et iTélé publié le 31 octobre confirme cet réalité en plaçant en première position des personnalités dont les Français veulent qu’elles jouent un plus grand rôle, Alain Juppé avec 52% de réponses positives et en deuxième position Emmanuel Macron avec 42%, les deux hommes étant en hausse d’un point par rapport aux résultats du mois dernier.
Alain Juppé, l’ancien premier ministre de Jacques Chirac et actuel maire de Bordeaux, est non seulement en tête de tous les baromètres de popularité ainsi que des souhaits des Français quant aux possibles candidats pour la présidentielle  de 2017 mais il est le seul à avoir plus d’opinions positives que négatives dans tous ces sondages.
Par exemple, si 52% des sondés selon une étude Elabe pour BFM-TV souhaitent sa candidature, seuls 47% sont d’un avis contraire alors que la seconde de la liste, Marine Le Pen obtient une balance nettement négative de 37%-62%.
De son côté, Manuel Macron, le ministre de l’économie, est vu positivement à gauche et à droite, plusieurs de ses initiatives et de ses positionnements faisant consensus dans l’ensemble de la population.
Et cette approbation montre que beaucoup de Français sont en attente de réelles réformes, tant à gauche qu’à droite.
Pourquoi ces deux personnalités ont actuellement une telle popularité?
Plusieurs raisons peuvent l’expliquer.
- Ils sont rassembleurs et consensuels avec un discours et des propositions qu’une majorité de Français attendent et que les corporatismes de tous bords bloquent depuis des années à leur grand dam.
- Ils proposent une politique au centre pragmatique qui séduit et permet aux Français de désirer un changement profond dans la pratique traditionnelle de la politique sans pour autant vouloir tomber dans une démarche négative en se tournant vers les extrêmes populistes irresponsables.
- Ils portent une vision d’avenir apaisée et surtout qui fait encore espérer que le pire n’est pas inévitable, que la déliquescence peut être évitée et que le recours aux aventuriers démagogues n’est pas une fatalité.
- Ils donnent l’impression d’être rassurants et compétents, ce qui est deux grandes qualités actuellement.
Cela va-t-il (peut-il) durer?
C’est la grande interrogation.
La question, à droite, est de savoir si l’effet Juppé va aller jusqu’à la primaire LR puis à la présidentielle ou va-t-il s’abîmer dans la rude bataille de chiffonnier qui se prépare entre le maire de Bordeaux et Nicolas Sarkozy que ce dernier souhaite ardemment pour détruire l’image de l’homme au-dessus de la mêlée que Juppé est en train de se forger et d’imposer?
La question, à gauche, est de savoir si l’effet Macron va permettre une évolution majeure et en profondeur de la politique socialiste vers un réel social-libéralisme ou si la présidentielle et un discours gauchisant de circonstance qu’Hollande et Valls ont déjà commencé à pratiquer en vue de réunir la gauche va-t-il sonner le glas de sa démarche moderniste contre les archaïsmes?
Si c’est les deux hommes ont les reins assez solides pour sortir vainqueurs de leur bras de fer avec leurs propres camps, alors la recomposition du paysage politique sera possible et les conditions effectives de la naissance d’un axe central autrement que par la proximité des propos, c’est-à-dire dans les faits, seront réunies.
Mais rien n’est gagné et les forces conservatrices en présence sont redoutables d’autant qu’elles s’appuient sur un clientélisme de longue date et un pré carré partisan qui ne s’abandonne pas aussi facilement.
Néanmoins, le défi en vaut la chandelle car il permettrait enfin de clarifier les positionnements politiques et mettrait fin à des cohabitations contre-nature où des éléments radicalisés, tant à droite qu’à gauche, partagent les mêmes formations politiques qu’avec les éléments modérés et réformistes.
Alors on assistera à une vraie modernisation de la politique en France.

Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC