jeudi 7 avril 2016

Actualités du Centre. Morin invoque Giscard d’Estaing pour crédibiliser son improbable «grande force centrale»

VGE au temps de 2 Français sur 3
Hervé Morin n’en démord pas, il faudra, après les élections de 2017 mettre sur pied une «grande force centrale» qui aura l’originalité, selon lui, de réunir dans une même formation politique Nicolas Sarkozy et François Bayrou, François Hollande et François Fillon, Alain Juppé et Laurent Fabius, Jean-Christophe Lagarde et… lui-même, bonjour l’ambiance!
Car sa recomposition politique est assez simple, voire simpliste: tous les partis républicains dans un même parti et de chaque côté une extrême-droite et une extrême-gauche, comme il l’a expliqué lors dans une interview au JDD:
«Il y a l'émergence d'un tripartisme (extrême gauche, centre, extrême droite) que le carcan de la V° République ne peut plus empêcher».
Et pour appuyer ses dires, il a invoqué Valéry Giscard d’Estaing:
«On retrouve la grande idée de Valéry Giscard d'Estaing de rassembler deux Français sur trois».
Cependant, si la volonté de l’ancien président de la république, en créant l’UDF était bien de séduire ces deux Français sur trois, ce n’était pas en réunissant des courants beaucoup trop éloignés mais en convainquant les électeurs de la pertinence de son propre projet politique.
En outre, le président du Nouveau centre en a remis une couche pour estimer que l’UDI devrait sans doute s’abstenir de tout candidat à la présidentielle et même à la primaire de LR:
«Je dis aux centristes: attention à la candidature de témoignage. Seul Jean-Louis Borloo pourrait faire un score important dans ce type de scrutin et il est absent. En cas d'accord, il vaut mieux soutenir le candidat dont on se sent le plus proche à la primaire plutôt qu'une candidature centriste trop faible».
Une primaire où la présence de l’UDI est encore tout à fait possible car «Il n'y a pas de raison qu'un accord ne puisse aboutir avant les vacances. La porte reste ouverte et tous les leaders des Les républicains se disent toujours prêts à discuter».
Cette volonté d’union jusqu’au-boutiste, si elle n’était une pierre dans le jardin de son ennemi Jean-Christophe Lagarde, président de l’UDI, serait incompréhensible puisque, selon ses dires, «Pendant cinq ans, le Nouveau centre a été l'allié de l'UMP. Mais cela marchait à sens unique: la droite n'avait pas besoin de nous pour voter un texte et bien peu de nos propositions ont été entendues comme par exemple la TVA sociale qui n'a trouvé grâce que trop tard aux yeux du chef de l'Etat en janvier 2012».


L’Humeur du Centriste. Macron nous refait le coup de l’«ailleurs»!

Lors du lancement officiel de son mouvement «En marche» le 6 avril à Amiens, Emmanuel Macron a affirmé qu’il n’était pas de droite, ni de gauche.
Sans rire, il a déclaré, «J'ai pris du temps, j'ai réfléchi, j'ai consulté, j'ai associé et j'ai décidé qu'on allait créer un mouvement politique nouveau, c'est-à-dire qui ne sera pas à droite, pas à gauche».
Comme il n’a pas parlé du Centre, on peut supposer qu’il ne s’en réclame pas et qu’il ne se définit pas non plus comme «central» (sic) à l’instar d’Alain Juppé qui tente comme Macron de brouiller les cartes sur son réel positionnement politique.
Le voilà donc qui nous refait le fameux coup de l’«ailleurs» que tant de politiques nous ont fait par le passé, comme feu Michel Jobert et François Bayrou, le plus récemment.
Pour expliquer qu’il n’était pas un homme politique comme les autres, il a affirmé porter des «idées neuves» -- ce qui n’est pas un discours très «nouveau»  – et croire «à la liberté économique, sociale, politique et à notre capacité collective à l'articuler avec la justice».
Signalons juste à notre ministre de l’Economie qu’il a juste énoncé la définition du libéralisme selon le philosophe John Rawls, soit un positionnement au centre-gauche, ce qui d’ailleurs n’est pas très étonnant puisqu’il s’est défini plusieurs fois comme social-libéral…
Mais cette volonté d’être «ailleurs» qui titille tous ceux qui se veulent originaux est assez désolante.
Si l’on parle de gauche, de droite et de centre depuis la Révolution française, c’est uniquement pour définir les orientations politiques de chacun selon une convention de langage qui vaut ce qu’elle vaut mais qui permet de signifier une pensée, des idées, un projet ou un programme politiques et celui ou ceux qui les portent.
Vouloir s’extraire de cette grille de lecture qui permet à l’électeur de faire des choix n’a aucun sens et n’a aucune utilité pour des citoyens qui souvent n’y comprennent plus rien.
Mais y a-t-il quelque chose à comprendre?!
On se rappelle que les écologistes à leurs débuts affirmaient, comme monsieur Macron, qu’ils n’étaient ni de gauche, ni de droite, ce qui les a mis dans des contradictions incessantes et sans fin et n’a guère tenu très longtemps.
Dans un registre assez parallèle, on voit fleurir partout ces fameuses «organisations citoyennes» qui soutiennent ne pas faire de politique tout en en faisant à moins que ce ne soit le contraire.
Se prétendant «ailleurs» elles aussi, elles veulent désigner des candidats non-politiques à la présidentielle, élection hautement politique, ce qui est soit une idiotie, soit une escroquerie intellectuelle.
Et même si c’était vrai, dès leurs candidatures avalisées, ces «non-politiques» deviendraient évidemment et immédiatement des politiques…
Pour en revenir à Emmanuel Macron, on attendait mieux de lui qu’un mouvement pseudo-original et des propos comme «les clivages sont devenus obsolètes à beaucoup d'égards».
De même que cette autre tarte à la crème qu’il nous ressort celui du «Mal français» qu’il semble nous faire découvrir alors qu’il est paru des monceaux d’ouvrages sur le sujet ces cent dernières années…
Par ailleurs, il devrait se méfier car beaucoup de ceux qui se sont voulus ailleurs ont en fait été nulle part sauf peut-être dans les oubliettes de la politique beaucoup plus vite qu’ils ne l’avaient craint.
Mais cet «ailleurs» est peut-être une manière de cacher son véritable positionnement, celui d’un centriste qui ne s’assume pas encore totalement.

Centristement votre.

Le Centriste