jeudi 1 mai 2014

L’Humeur du Centriste. Késako une «opposition constructive»?!

Donc les centristes n’ont pas rejoint Manuel Valls mais ils n’ont pas, non plus, disent-ils, fermé la porte à sa politique qui sera disséquée systématiquement et dont ils pourraient voter certaines mesures.
Les centristes de l’UDI appellent cela une «opposition constructive».
Fort bien.
Mais cela ne ressemble-t-il pas simplement à une opposition responsable que tout élu de la république, toute formation politique démocratique se doit d’avoir en s’opposant aux mesures qu’il ou elle estime mauvaise et en votant pour celles qu’il ou elle estime bonnes?
Ou bien ce terme ne renferme-t-il pas un rapprochement que l’on ne saurait nommer ouvertement, une sorte de «soutien sceptique»(!)?
En fait, les deux mon général!
Car les centristes déjà divisés sur beaucoup de choses, le sont également – mais est-ce une surprise – sur le pacte de responsabilité présenté par le premier ministre.
Dès lors, l’«opposition constructive» veut dire tout et son contraire et circulez, il n’y a rien à voir…
Quoique.
De quelle construction parle-t-on?
S’il s’agit de la France alors n’importe quel parti politique peut revendiquer qu’il fait de l’opposition constructive (quand il est dans l’opposition, bien sûr, même si on se demande si une partie du Parti socialiste ne vient pas d’inventer la posture d’une opposition constructive à l’intérieur même de la majorité gouvernementale, celle-ci rappelant toutefois furieusement un peu celle des chiraquiens face au septennat de Valéry Giscard d’Estaing après 1976).
On pourrait me dire que je chipote sur les mots.
Oui mais, conviendra-t-on, les mots, par convention acceptée, ont une signification et lorsqu’on les utilise de manière détournée cela s’appelle une contre-vérité, un mensonge voire une manipulation dont certaines ont conduit à des guerres dévastatrices.
Bien entendu on ne parle pas de ce dernier cas de figure ici.
Reste que l’on aimerait savoir ce qu’une «opposition constructive» au gouvernement socialiste signifie lorsque l’on est dans une «alliance naturelle» (dont on a déjà dit ici que l’expression était tout aussi ambigüe que celle dont je parle dans ce billet) avec l’UMP qui elle est dans une opposition frontale à Manuel Valls.
Car les centristes, en plus, se flattent d’avoir adopté un comportement responsable, d’être courageux et de refuser le manichéisme.
En s’auto-congratulant, ils mettent la charrue avant les bœufs.
Car cette opposition constructive ne pourra s’apprécier qu’en situation, à la longue, et non a priori.
Et ils suscitent des interrogations d’autant que leurs votes lors de la discussion sur le pacte de responsabilité sont loin d’avoir clarifié leur position en la matière.
Quatre voix pour (3 UDI + 1 MoDem dissident), 7 voix contre (tous UDI) et 18 abstentions (17 UDI + 1 MoDem).
Un résultat pas très évident comme preuve que leur opposition est constructive.
Cela ressemble plutôt à un gros refus de trancher avec, aux marges, quelques constructeurs et plusieurs destructeurs.
Pas de quoi pavoiser dans un sens, ni dans l’autre.
Allez, encore un effort messieurs et mesdames les centristes pour savoir ce que vous voulez, si tenté que vous souhaitiez le savoir, pire, nous le faire savoir.

Centristement votre

Le Centriste


Une Semaine en Centrisme. Manuel Valls ou la (fausse?) tentation des centristes

Avant même de penser à une recomposition politique qui n’est pas à exclure à terme, les centristes peuvent-ils faire un bout de chemin avec Manuel Valls?
Leurs prises de position et leurs votes lors du discours de politique générale du nouveau premier ministre puis lors de sa récente présentation du pacte de responsabilité à l’Assemblée nationale semblent assez alambiqués, de la position ouverte du député Meyer Habib qui a déclaré qu’il voterait toutes les bonnes mesures présentées par le gouvernement à celle sans concession de François Sauvadet qui s’est mis dans une opposition résolue en passant par celle hésitante d’Yves Jégo qui est dans un attentisme irrésolu.
On comprend que les repères politiques des centristes soient quelque peu chamboulés et qu’ils s’interrogent.
Voilà un gouvernement qui semble vouloir faire, plus ou moins, ce qu’ils défendent depuis des années avec le discours qui va avec.
Ce qui a séduit les sympathisants du Mouvement démocrate tout en laissant circonspects ceux de l’UDI.
Il est évident qu’il existe des ponts entre le discours social-libéral de Manuel Valls et le discours libéral-social des centristes.
Néanmoins, jusqu’à la prochaine présidentielle on ne voit pas comment un renversement d’alliance pourrait avoir lieu sauf si…
Sauf si la situation politique, économique et sociale évolue dangereusement, non pas pour le Parti socialiste, mais pour tout le pays et que les crispations des extrêmes et des radicaux imposent des rapprochements de tous ceux qui défendent la démocratie libérale et une économie sociale de marché.
Concrètement, la montée inexorable du Front national, l’alliance entre le Front de gauche et la gauche du PS, sur fond d’une économie ayant encore besoin d’être assainie sous peine de graves difficultés pour la France, alors les bases d’un large rassemblement central existeront avec les partis centristes en pivot, voire en pointe.
D’autant plus si Manuel Valls obtient des résultats encourageants.
Les prochains mois seront, à ce titre, importants pour tester grandeur nature l’exact positionnement du nouveau premier ministre sur des principes, ô combien chéris par les centristes, de consensus, de pragmatisme, de responsabilité, d’équilibre ainsi que sur sa capacité à libérer les énergies, notamment celle d’entreprendre, du carcan construit depuis des décennies par une vision pro-étatiste et centralisatrice partagée par le PS et l’UMP.
Et, dans un an, il sera temps de faire le bilan de l’expérience Valls, non pas que ce temps sera nécessaire pour redresser la France mais il permettra de savoir si ses recettes fonctionnent.
Si Manuel Valls réussit son coup, pas de doute que tous les idéologues et radicaux de tous bords auront du mouron à se faire. François Hollande aussi, d’ailleurs…
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery

Directeur des études du CREC