lundi 14 octobre 2013

Humeur du Centriste. Le vote Front national est explicable, pas excusable

Depuis des années, face à la montée du Front national, les partis politiques républicains ont développé toute une distinction entre ceux qui votent pour les extrêmes et les formations extrémistes.
Ils nous expliquent ainsi qu’il y aurait des gentils Français, troublés et désorientés par notre monde actuel et ses difficultés quotidiennes, qui votent pour un parti infréquentable qui pose les bonnes questions et donnent les mauvaises réponses.
D’un côté, le «bon» électeur, pauvre brebis égarée du troupeau, de l’autre le «méchant» parti extrémiste, prédateur prêt à engloutir sa proie.
Cette dualité permet de ne pas offenser ce «bon» électeur qui pourrait, un jour après s’être rendu compte d’avoir pris le mauvais chemin, revenir voter pour les «bons» partis.
En revanche, évidemment, rien de bon à attendre des ces partis extrémistes.
Que voilà une distinction des plus invraisemblables.
Comme si le vote pour les extrémismes de droite et de gauche n’avait en fait aucune raison détestable, pire, aucune conséquence dommageable alors que ces partis ne peuvent espérer prendre le pouvoir que s’ils bénéficient d’un soutien populaire comme ce fut le cas en Italie, en Allemagne et en Espagne pendant l’entre-deux guerres (seuls les coups d’Etat militaires s’affranchissent de tout soutien populaire, et encore).
Dès lors, voter pour un parti extrémiste est un phénomène explicable, il n’est pas excusable et ceux qui mettent un bulletin dans l’urne pour un tel parti doivent être mis dans le même sac que ceux pour qui ils votent.
Cela ne veut pas dire que l’on soit marqué à vie du sceau d’une quelconque infamie mais que l’on est responsable de son choix au moment où l’on vote (sinon on n’est pas en démocratie ou que la démocratie n’est pas un système acceptable) et que l’on doit l’assumer dans toutes ses dimensions.
Bien entendu, on peut changer, comprendre la gravité de son erreur, se rendre compte de son erreur et ne plus voter pour des partis extrémistes.
Mais tant que l’on perdure dans cette attitude, celle-ci n’est pas excusable.
Banaliser le vote pour les partis extrémistes est une erreur que nous avons failli payer cher lorsqu’il s’est agi du Parti communiste au moment où celui-ci était puissant, de la Libération au début des années 1970.
L’addition risque un jour d’être particulièrement salée en ce qui concerne le Front national.
Mais ce n’est sans doute pas le «bon» «électeur qui en paiera la part la plus élevée.
D’autant que, comme d’habitude, il se déclarera irresponsable tout comme ceux qui l’auront excusé pendant toutes ces années.
Centristement vôtre,


Le Centriste

Editorial d’Alexandre Vatimbella. Quand les agissements du Parti républicain démontrent l’utilité des centristes

Qu’ils soient dans des partis indépendants où à l’intérieur de grands partis, les centristes sont une force d’équilibre et de responsabilité qui, si elle n’existe pas ou ne peut peser sur le débat politique, ouvre la porte à toutes les dérives comme le démontre la mainmise actuelle sur Parti républicain américain des extrémistes du Tea Party.
D’ailleurs, on peut penser qu’une grande partie de la droite française aurait depuis longtemps fricotée ouvertement avec le Front national sans la pression des élus et des électeurs centristes qui ont permis de garder relativement étanche la frontière droite-extrême-droite.
Néanmoins, s’inspirant de ces extrémistes du Parti républicain, certains, à l’UMP comme Jean-François Copé, commencent malheureusement à jouer la politique du pire et de l’intransigeance ce qui pourrait aboutir, à terme, à une implosion de la formation de droite et donner naissance, à l’instar du PS et du Front de gauche, à deux partis, l’un modéré, l’autre radical.
Toujours est-il que la survie de la démocratie républicaine ne peut se permettre cette politique du pire et de l’intransigeance car son existence même est assise sur un certains nombre de principes dont la responsabilité et le consensus.
Le consensus dont on parle n’est pas de trouver à chaque fois une voie médiane à des opinions opposées mais de s’accorder sur le fonctionnement d’un système qui donne le pouvoir à une majorité, qui respecter les droits de la minorité et qui s’appuie sur quelques piliers incontournables comme le recours à l’impôt, l’égalité politique, la transparence ou la solidarité.
Or, aux Etats-Unis, le Tea Party a décidé de s’opposer à tout cela.
Pas d’impôt (sauf pour l’armée et la police), pas d’égalité politique (avec les lois qui restreignent la possibilité de voter pour les minorités ou avec le charcutage électoral indécent qui permet à un parti minoritaire en voix au niveau national de gagner les élections législatives), pas de transparence (avec l’afflux d’argent pour ces extrémistes venus de quelques milliardaires et entreprises qui peuvent verser ce qu’ils veulent sans le dire, faussant in fine le jeu électoral), pas de solidarité (en supprimant tous les programmes sociaux qui permettent aux plus pauvres de vivre dignement et en s’opposant par tous les moyens à la mise en œuvre de la loi sur l’assurance santé décidée par le président – réélu entretemps –, votée par le Congrès et déclarée légale par la Cour suprême).
Grâce à un activisme et un entrisme que l’on croyait réserver jusque là aux extrémistes de gauche, les militants du Tea Party ont réussi, non seulement à phagocyter le Parti républicain mais à le vider quasi-totalement de tous ses centristes qui se comptent désormais par quelques dizaines d’élus seulement au niveau national dont une au Sénat, Olympia Snowe mais aussi de sa culture du compromis démocratique.
Pire, les élus modérés sont désormais terrorisés par les primaires de leur parti où ils risquent de se faire battre par des extrémistes jusqu’au-boutistes.
Du coup, pour garder leurs sièges, ils adoptent une position frileuse en se taisant.
Cela, d’ailleurs ne suffit plus puisque le Tea Party demande l’allégeance à ses thèses, ce qui fait que nombre de centristes se parjurent constamment.
Résultat, le blocage du gouvernement américain qui risque de plonger le pays et le monde dans le chaos, si ce n’est aujourd’hui avec les crises du budget et de la dette, mais demain ou après-demain car les militants du Tea Party ont tout leur temps pour réussir leur entreprise: détruire l’Etat fédéral.
Quand on voit les quelques illuminés du Tea Party et donc du Parti républicain, heureusement fortement minoritaires actuellement, demander que l’on mette dehors Obama de Washington à coup de pied dans le derrière tout en brandissant le drapeau confédéré lors de manifestations ces derniers jours aux relents nauséabonds de racisme, on comprend la haine qui anime de nombreux élus, dictant leurs comportements et rendant illusoire tout compromis qu’ils associent immédiatement à une compromission.
Une des conséquences les plus dommageables pour le système démocratique américain est que l’alternance politique n’est plus le but d’une partie du Parti républicain.
Les extrémistes sont en effet plus intéressés à abattre le système démocratique honni parce que n’allant pas dans leur sens qu’à prendre le pouvoir. Dès lors, ils ne luttent plus pour la victoire dans les urnes mais pour une victoire quasi-insurrectionnelle.
Les Etats-Unis ont besoin d’un Parti républicain conservateur et non d’une formation politique dont le seul but est de s’opposer et de détruire.
S’il semble que l’on en soit loin au jour d’aujourd’hui, on peut tout de même espérer que cela surviendra à moyen terme.
Car, ce qui est hautement réconfortant, c’est que la démocratie américaine, à l’opposé d’autres, a toujours su trouver le moyen de se revitaliser et de retrouver ses valeurs dans les crises, aussi dures furent-elles.
Ainsi, lors de la Grande dépression, pendant qu’Hitler prenait le pouvoir en Allemagne, les Américains confiaient leur destinée en Franklin Roosevelt…