mardi 26 mai 2020

Vues du Centre. Le «modeste» monsieur Bayrou



Par Jean-François Borrou

François Bayrou
Dans cette rubrique, nous publions les points de vue de personnalités centristes qui ne reflètent pas nécessairement ceux du CREC. Ces points de vue ont pour but d’ouvrir le débat et de faire progresser la pensée centriste.
Jean-François Borrou est le pseudonyme d’un journaliste proche des idées centristes.

Quizz.
Qui a dit:
«Je n'ai jamais regardé l'avenir en pensant à moi-même, en pensant à ma personne ou à ma carrière. Il y a – si vous me le permettez de le dire – un bail que je ne pense plus en termes de carrière.»
Bon, j’avoue que le titre de cet article rend la réponse assez facile.
Mais cela n’en reste pas moins une des déclarations les plus étonnantes – pour ne pas dire mensongères – de François Bayrou.
Les humoristes ne s’y sont d’ailleurs pas trompés, eux qui se sont faits immédiatement les gorges chaudes de ces propos que l’on pourrait qualifier de surréalistes tellement celui qui les a prononcés est à l’opposé de cette protestation d’humilité.
D’où, bien sûr, ce doute évident qui vous prend naturellement quand le président du MoDem se présente comme un homme modeste qui ne pense qu’au bien du pays.
Surtout à une période où sa cause se renforce grandement.
Ou, peut-être, joue-t-il à la modestie pour cette raison…
La perte de la majorité absolue à l’Assemblée nationale de LaREM où se sont produites deux vagues de départ de députés ces derniers jours, donne un nouveau pouvoir, un nouveau statut à François Bayrou et la capacité de demander, voire d’exiger, et d’obtenir plus de place pour lui et son parti dans la majorité présidentielle.
Sauf qu’en homme politique qui a une longue expérience, il sait qu’il ne faut pas utiliser ses atouts n’importe quand et n’importe comment.
Aujourd’hui, il n’a pas besoin de mettre la pression sur le Président de la République et le Gouvernement, outre mesure.
D’autant que ce serait sans doute mal vu par beaucoup de Français qui les soutiennent.
Or donc, jouer la modestie et la retenue, à celui qui pense que rien ne va changer dans les rapports de force à l’intérieur de la majorité et prétendre qu’il n’attend rien de cette nouvelle donne est un moyen de rassurer ses alliés – même ci ceux-ci n’en croient pas un mot en réalité – et de ne pas s’exposer en attendant de meilleurs moments pour avancer ses pions et sa «carrière» comme il dit.
Cela pourrait survenir dans le cours de 2020 ou en 2021, un an avant la présidentielle, mais tout politologue ou journaliste politique qui se respecte sait que cela surviendra parce que le chef du MoDem n’est pas homme à ne pas vouloir saisir les opportunités, tout dans son parcours en est la preuve, dont ses trois tentatives et demie de devenir président de la république…
Reste que rien ne dit qu’il aura les cartes en main pour ses desseins qu’il poursuit depuis des décennies puisque si LaREM n’a plus la majorité absolue, il peut toujours l’avoir sans le MoDem grâce au parti Agir  qui vient d’ailleurs de constituer un groupe de 17 députés qui se veut un soutien au président et à son gouvernement.
Du coup, la modestie actuelle de François Bayrou pourrait également être la simple constatation que la nouvelle donne ressemble beaucoup à l’ancienne.

Jean-François Borrou

Actualités du Centre. La création d’un dixième groupe à l’Assemblée nationale fragilise LaREM et l’UDI


Un dixième groupe vient de se fonder à l’Assemblée nationale.
Il est composé de 17 membres et se classe à droite et au centre-droit avec une nette sensibilité libérale.
Ceux-ci viennent majoritairement du parti Agir (neuf), puis de LaREM (quatre), du Mouvement radical (deux dont un ex-LaREM)), de deux «sans étiquette» qui étaient jusque là apparentés au groupe LaREM.
Ce nouveau groupe est évidemment un nouvel affaiblissement pour celui de LaREM qui ne compte plus désormais que 281 membres même si seulement quatre de ses députés encartés le quittent.
En revanche, cela ne modifie en rien le rapport de force entre la majorité présidentielle et l’opposition puisque ce groupe baptisé «Agir ensemble» se revendique d’un soutien au pouvoir en place.
Son président Olivier Becht membre du parti Agir est très clair à ce sujet puisqu’il a déclaré que «nous souhaitons soutenir l'action du président de la République et être un pilier de la majorité».
Et dans un communiqué de presse, le groupe Agir ensemble explique qu’il «vient incarner et donner une voix à une sensibilité politique libérale, humaniste, sociale et européenne qui doit pouvoir s’exprimer pleinement au sein de la majorité actuelle».
Ce grouper permet également une clarification bienvenue avec la séparation des députés venant d’Agir, la formation présidée par le ministre de la Culture et de la Communication, Franck Riester, qui fait pleinement partie de la majorité présidentielle et ceux appartenant à l’UDI présidée par Jean-Christophe Lagarde et qui prétend toujours être dans une opposition constructive.
Si l’UDI peut créer un groupe à elle toute seule puisqu’elle a tout juste les 15 députés requis, ce dixième groupe la fragilise un peu plus néanmoins car elle se retrouve dans une sorte de no man’s land politique où elle ni dedans, ni dehors de la majorité ou de l’opposition avec un nombre très réduit d’élus pour pouvoir peser d’un quelconque poids à l’Assemblée nationale.