dimanche 28 juin 2020

Vues du Centre. La farce démocratique des municipales



Par Jean-François Borrou & Alexandre Vatimbella

Dans cette rubrique, nous publions les points de vue de personnalités centristes qui ne reflètent pas nécessairement ceux du CREC. Ces points de vue ont pour but d’ouvrir le débat et de faire progresser la pensée centriste.
Jean-François Borrou est le pseudonyme d’un journaliste proche des idées centristes.
Alexandre Vatimbella est le directeur du CREC.

Tout d’abord, félicitations à tous les élu(e)s des deux tours des élections municipales.
Aucun(e) d’entre eux et elles, jusqu’à preuve du contraire, n’a volé son élection obtenue au suffrage universel.
Ayant dit cela, ce scrutin a néanmoins été un scandale et une farce démocratique qui doit nous faire honte.
Avec un premier tour qui a été organisé en pleine épidémie où chaque citoyen qui allait remplir son devoir électoral pouvait attraper le coronavirus (d’où une abstention de plus de 55%) et une second tour organisé plus de trois mois après et qui ressemblait plus à un ovni politique qu’à une réelle consultation des Français (il suffit de voir le taux d’abstention record aux alentours de 60%!), nous avons élus nos maires et nos conseillers municipaux dans des conditions lamentables qui ne raviront que les ennemis de la démocratie.
Bien sûr, les rendez-vous électoraux sont d’une importance essentielle en démocratie et les Américains se targuent avec fierté et avec raison de ne jamais avoir reporté un scrutin national depuis la fondation des Etats-Unis.
Néanmoins, on ne peut se satisfaire que la procédure ait été respectée en ce qui concerne ces municipales parce qu’il était évident, bien avant le premier tour, qu’elles comporteraient des biais dont une participation très basse non pas par choix mais par peur, peur d’attraper la covid19, peur de transmettre le virus à ses proches, ses enfants et ses parents.
Tout cela a créé une démobilisation de la population qui n’est pas allée voter au second tour, tout à la fois par peur une nouvelle fois du coronavirus qui rôde encore que par désintérêt.
Et c’est bien une défaite de la démocratie parce qu’il n’est pas normal et sain que les électeurs ne se sentent pas concernés et aient peur de se rendre dans un bureau de vote.
Le problème n’est même pas de savoir si les résultats auraient pu être différents dans des conditions normales de vote mais bien de constater que celles-ci n’étaient pas remplies et qu’il fallait donc repousser le scrutin.
Ici – à part pour quelques uns dont les centristes François Bayrou et Jean-Christophe Lagarde qui ont plaidé pour un report du vote –, toute la classe politique est responsable collectivement de ce fiasco démocratique.
Espérons que la démocratie n’en paiera pas le prix à cause de l’inconséquence politicienne.

Jean-François Borrou & Alexandre Vatimbella


L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. Ne confondons pas identitaires et individualistes



La montée identitaire est une des conséquences de la montée de l’autonomisation irresponsable, égocentrique, assistée, insatisfaite, irrespectueuse et revendicative de l’individu – celle qui demande une sur-égalité, un sur-respect et une sur-dignité par rapport aux autres – tout autant qu’elle en est une des causes.
Mais elle n’est certainement pas, comme on entend certains le dire, une excroissance de l’individualisme, elle en est plutôt le dévoiement extrême ainsi que celui de son concept central, l’individualité.
Si les revendications identitaires veulent séparer et opposer, l’individualisme, lui, veut garantir à l’individu responsable la protection de son individualité dans un monde où nous vivons ensemble, donc où nous respectons l’autre autant que nous-mêmes, où nous sommes semblables dans nos différences ontologiques et non de communautés tout autant fantasmées que séparatistes dans leur essence et dont on ne peut trouver aucune légitimité dans la nature, n’étant que des constructions culturelles.
La notion de race est, par exemple, totalement liée au discours identitaire mais n’a pas sa place dans celui de l’individualisme.
De même, les cultures communautaires sont l’apanage des théories identitaires alors que seule la culture mondiale composée d’une myriade de cultures individuelles est celle de l’individualisme.
Et le respect de la personne trouve son point d’ancrage dans l’individualisme et certainement pas dans le communautarisme identitaire qui la réduit à n’être qu’un élément d’un tout qui doit allégeance à cette condition existentielle.
Quand les identitaires veulent séparer, les individualistes veulent associer.
Quant les identitaires veulent que certains groupes soient plus égaux que d’autres, les individualistes considèrent que tous sont également égaux dans leurs différences individuelles et non collectives.
Quand les identitaires instrumentalisent la liberté pour tenter de la bâillonner, les individualistes la réclament pour tous sans autre restriction que celle des autres.
L’individualisme parle à la personne quand le communautarisme la noie dans un groupe, pire l’emprisonne dans celui-ci, lui déniant sa réelle différence, son individualité qui n’est et ne peut jamais être réductible à l’identité d’une quelconque communauté.
C’est pourquoi l’individualisme est profondément humaniste en tant qu’il part de l’humain, de sa dignité, de son individualité irréductible, de son droit ontologique à la liberté alors que le communautarisme recèle en lui tous les interdits des idéologies totalitaires.
Les identitaires communautaristes, eux, se servent de revendications individualistes pour imposer leurs discours et leurs volontés alors même qu’ils tournent le dos à tout ce que l’individualisme défend.
C’est pourquoi, tout discours qui oppose est une attaque contre la dignité humaine alors que tout discours qui reconnait l’individualité de chacun et de tous porte haut les valeurs humanistes parce qu’à la base, il reconnait à chacun sa différence et le respect qui lui est du dans une égalité parfaite.
L’identité rattachée à un groupe quelconque n’est le plus souvent qu’une duperie alors que l’individualité est le fondement même de la substance ontologique de chacun, en définitive le lieu de sa vraie identité.