jeudi 26 juillet 2018

Une Semaine en Centrisme. La chasse aux centristes va de pair avec celle de la démocratie

Il suffit de lire un journal, de regarder la télévision ou de consulter internet pour s’apercevoir que, partout, dans le monde, on fait, à la fois, la chasse à la démocratie libérale et aux centristes.
Ce n’est pas un hasard, ni une coïncidence.
A l’époque du populisme démagogique de plus en plus triomphant et du retour des vieilles idéologies clientélistes et intolérantes de gauche et de droite avec, lancées en avant-garde, leurs extrémismes, la critique, voire la répugnance, vis-à-vis de la démocratie libérale va de pair avec l’hostilité, voire la haine, des centristes.
Car ceux-ci sont devenus, de fait, les principaux et derniers défenseurs de cette démocratie républicaine issue des doctrines libérales qui ont façonné l’univers politique des pays occidentaux, notamment, depuis l’indépendance des Etats-Unis et la Révolution française, depuis Jefferson et Sieyès.
C’est autour de ces mêmes centristes que se sont constitués dans certains pays, comme la France, un axe central plus ou moins structuré, plus ou moins coalisé (allant des libéraux de droite aux réformistes de gauche en passant par les libéraux sociaux du Centre) qui est le dernier rempart contre les régimes autocratiques, autoritaires voire dictatoriaux et l’installation au pouvoir des populistes dans les démocraties alors même qu’ils l’occupent déjà des Etats-Unis à la Grèce, de la Pologne à la Hongrie, de l’Italie aux Philippines.
Alors que les échéances électorales approchent aux Etats-Unis, il y a un déferlement de libelles et de déclarations contre le Centre et les centristes avec cette idée, du côté de la droite avec Donald Trump, que ce sont de dangereux activistes qui prônent des valeurs humanistes qu’ils vomissent et, du côté de la gauche avec Bernie Sanders et Elizabeth Warren, que le moment est venu pour réveiller les guerres idéologiques afin d’imposer le socialisme version étasunienne et de se débarrasser définitivement des Clinton (Bill et Hillary) et du legs d’Obama.
En France, l’«affaire Benalla» a, de nouveau, rappelé que les clientélismes de gauche et de droite ainsi que la presse d’opinion, sans oublier nos intellectuels médiatiques, n’ont toujours pas accepté la victoire du Centre en 2017 et qu’ils souhaitent ardemment qu’elle ne soit qu’une parenthèse à refermer au plus tôt en s’emparant de tout ce qui pourrait permettre de se débarrasser d’Emmanuel Macron, de son gouvernement et de sa majorité, des ragots les plus puants aux faits divers les plus anodins.
Et l’on voit fleurir dans certains quotidiens des articles sur la destitution d’un président de la république pendant que nombre de politiciens jouent de l’emphase au risque d’emporter la démocratie avec leurs bons (mauvais) mots.
Tout ceci rejoint la chasse acharnée contre l’Américain George Soros faite par le pouvoir hongrois et son chef, Viktor Orban, tout simplement parce que celui-ci, à travers le financement d’organisations et d’universités, défend, en tant que centriste, les valeurs libérales et humanistes de la démocratie républicaine dans son pays natal.
En Russie, le pouvoir de Poutine laisse en paix le Parti communiste mais s’attaque systématiquement, parfois jusqu’à l’assassinat, à des personnalités politiques centristes qui défendent au prix de leur vie la démocratie libérale.
En Italie, cette «concordance des luttes» des extrêmes contre les centristes est allée jusqu’au bout avec l’ubuesque alliance gouvernementale entre les populistes d’extrême-droite (la Ligue), ceux de droite (avec Silvio Berlusconi) et ceux de gauche (avec le Mouvement 5 étoiles de Beppe Grillo), celle-ci n’ayant qu’un seul point commun, la détestation du Centre et de ses valeurs.
En Grande Bretagne, l’alliance objective à propos du Brexit, entre l’extrême-gauche du Parti travailliste (et son leader, Jeremy Corbin) avec l’extrême-droite du Parti conservateur (avec Boris Johnson) ainsi qu’avec ce qu’il reste l’Ukip (et de son triste sire, Nigel Farage), s’est faite contre les centristes et une de leurs plus grandes réalisations, l’Union européenne.

Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC