samedi 26 janvier 2013

L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. Le Centre face au désarroi et à la défiance des Français

Les Français n’ont pas peur (seuls 10% d’entre eux l’affirment) mais ils sont inquiets affichant un état d’esprit où domine la méfiance (32%), la morosité (31%) et la lassitude (29%), bien avant un quelconque enthousiasme (12%).
Quant à leurs préoccupations principales, elles concernent, sans surprise, le chômage (56%), le pouvoir d’achat (44%), les retraites (27%), les impôts et les taxes (27%), la santé et la qualité des soins (24%).
Deux sondages d’envergure particulièrement intéressants font ainsi le point sur la vision des Français vis-à-vis de la société et leurs rapports avec celle-ci (*).
Les résultats, on l’imagine, ne sont guère brillants en cette période de crise économique plus ou moins larvée, de chômage élevé, de questionnements identitaires, de difficultés à redéfinir les bases d’un lien social qui prennent en compte les avancées de la modernité sans détruire les solidarités essentielles et où une définition universelle d’un vivre bien ensemble ne semble plus aller de soi.
C’est également une claque pour le monde politique avec des citoyens qui sont pour le moins critiques quant à son intégrité, son utilité et son intérêt.
85% des Français estiment que les politiques ne se préoccupent pas assez ou pas du tout de ce qu’ils pensent, 66% qu’il vaudrait mieux que ce soient les experts qui décident en lieu et place des politiques, 62% que la plupart des hommes et des femmes politiques sont corrompus, 82% que ceux-ci agissent d’abord pour leurs intérêts personnels avant ceux de leurs administrés, 72% que le système politique marche mal.
Pas étonnant dès lors que 54% pensent que la démocratie ne fonctionne pas très bien ou pas bien du tout.
Encore moins étonnant est que 0% (!) des Français soient enthousiastes vis-à-vis de la politique (38% méfiants, 26% dégoûtés) et que seuls 12% fassent confiance aux partis politiques.
Mais ce n’est pas tout.
Ainsi, s’ils font confiance à 56% au conseil municipal, à 45% au conseil régional et 44% au conseil général, ils ne sont que 33% à en faire de même pour l’Europe, 31% pour la présidence de la république, 28% pour l’Assemblée nationale (mais 40% pour le député de leur circonscription), 26% pour le gouvernement.
A noter que tous ces pourcentages sont en baisse par rapport aux précédentes enquêtes.
Cependant, il ne faudrait pas en conclure trop rapidement que cela vient de la politique elle-même car 59% des Français se déclarent assez ou beaucoup intéressés par celle-ci. C’est plutôt de la manière dont elle est faite.
De même, la démocratie demeure une valeur sûre puisque 65% des Français estiment que le vote est le moyen d’exercice le plus efficace pour influer sur les décisions politiques (9% pensent que c’est en militant dans les partis).
Ce qui est également très prégnant dans ces enquêtes est la sensation que le politique apporte souvent les mauvaises réponses à des questions essentielles et que, déconcertés et désorientés, les Français se réfugient dans une sorte de cocon protecteur afin de ne pas devoir affronter les réalités.
Dès lors, il est dans l’ordre des choses que les Français souhaitent que leur pays se protège encore plus du monde (46% contre 29% qu’il s’ouvre plus à celui-ci) et qu’ils ressentent la mondialisation comme une menace (61%) plutôt que comme une opportunité (39%).
Et s’ils sont très majoritairement pro-européen, 53% d’entre eux veulent renforcer le pouvoir de la France dans les décisions la concernant (23% voulant renforcer les pouvoirs de l’UE).
Néanmoins, il ne faudrait pas, non plus, analyser ces deux sondages comme un refus du réel. Les Français, dans le même temps, sont conscients que le capitalisme est le seul système économique efficace (51% pensent qu’il faut le réformer sur quelques points, 6% qu’il ne faut rien changer contre 41% qu’il fait le réformer en profondeur), que ce sont les entreprises privées qui sortiront le pays de la crise (53% veulent que l’Etat leur accorde plus de confiance) que l’euro est utile (72% sont pour son maintien).
Et, surprise, ils sont même 72% à estimer que c’est une bonne chose de gagner beaucoup d’argent (au diable, la fameuse «honte catho» d’être riche!).
Devant ce tableau contrasté mais néanmoins peu chatoyant, le Centre a-t-il une réponse?
Disons d’abord que la mission du politique est d’expliquer le plus pédagogiquement et le moins démagogiquement possibles les enjeux essentiels qui se présentent à la France, d’apporter une vision apaisée de la situation, de faire de réelles propositions constructives et consensuelles afin que des décisions soient prises dans l’action et non dans la réaction et que des mesures efficaces soient mises en place.
L’important est de parler à tout le monde et non à des clientèles particulières avec, comme résultat désastreux, de faire croire aux Français que les politiques n’agissent que pour leur propre camp et non pour le bien du pays tout entier.
Dans ce cadre, le Centre, grâce aux valeurs et aux principes du Centrisme, possède un net avantage sur la Gauche et la Droite pour refonder une foi dans le politique mais aussi pour offrir des réponses et des solutions adéquates à la situation actuelle.
Avec le principe de juste équilibre, il parle à tout le monde; avec sa valeur du respect, il n’oublie personne.
Juste équilibre et respect sont là, entre autres, pour établir cette confiance indispensable des citoyens en leurs dirigeants, dans l’idée que ces derniers agissent en faveur de tous et pour le bien de tous.
Mais le juste équilibre est également le principe de toute décision et le moteur de toute mesure politiques.
Rappelons qu’en politique, le juste équilibre vise à donner le plus de satisfaction possible à tous les citoyens tout en sachant que personne ne peut être contenté totalement. Il vise tous les intérêts particuliers sans promesses démagogiques.
Et c’est dans l’harmonie de tous les intérêts particuliers que se bâtit le juste équilibre de la communauté.
Il s’agit de marier individu et communauté, liberté et solidarité, esprit d’entreprendre et besoin de sécurité, etc. Ces couples paraît-il antinomiques et soi-disant ennemis irréconciliables doivent au contraire se réunir, se compléter, se succéder dans un mouvement circulaire.
Chacune de leurs composantes doit ainsi sortir ses meilleurs atours et apporter son équilibre dans son couple pour lui permettre de contribuer à l’équilibre général de la société.
Concrètement, le Centre prône une politique d’efforts où ceux-ci sont réellement partagés et grâce auxquels chacun sera, in fine, gagnant.
Ainsi, si les riches doivent participer au redressement du pays, il faut mettre en place des législations qui permettent aux entrepreneurs d’avoir une grande liberté pour créer de la richesse et être à leurs côtés quand ils ont besoin d’être accompagnés dans cette aventure à hauts risques.
De même, si les salariés doivent accepter une flexibilité plus grande dans leurs emplois, il faut mettre en place des législations qui, en cas de licenciement, les aident financièrement mais, surtout, logistiquement, à retrouver du travail le plus vite possible et à être plus strict avec les entreprises qui pourraient licencier à tout va sans réels motifs.
Il convient, en matière d’éducation et de formation, d’offrir la même chance pour tous mais également de permettre à ceux qui ont des talents de pouvoir les exprimer pour eux-mêmes, d’abord, pour la collectivité tout entière, ensuite et leur permettre de récolter le fruit de leur travail et de leurs capacités sans les montrer du doigt.
Sans oublier que si le politique demande, avec raison, aux citoyens d’être des individus responsables, il doit y avoir une contrepartie.
Celle-ci est, d’une part, que les politiques soient également responsables, sans échappatoire, et, d’autre part, qu’ils tiennent un discours honnête sur la réalité qui nous entoure et non des promesses sans lendemain qui minent la confiance des Français élections après élections ainsi que dans le gouvernement du pays.
La réaction horrifiée de la grande majorité des politiques au vu des résultats de ces deux sondages ne doit terminer encore une fois en eau de boudin et que rien ne bouge jusqu’au jour où il sera vraiment trop tard.
En désignant, jours après jours, comme boucs-émissaires les fonctionnaires européens bornés, les immigrés inassimilables, les chômeurs fainéants, les riches patrons profiteurs, les jeunes irrespectueux, les commerçants voleurs, les assurés sociaux assistés, etc. nous répétant qu’ils sont responsables de tous nos maux, les politiques – qui, eux, répètent-ils, tentent désespérément de changer les choses - sont les grands responsables du désarroi et de la défiance des Français envers la France et, par voie de conséquence, envers ceux qui la gouvernent.
Les discours populistes et démagogiques font gagner des élections, c’est sûr, mais, tout aussi sûr, ils font perdre la France.

(*) Baromètre sur la confiance politique, vague 4, réalisé par Opionway du 5 au 20 décembre 2012 sur un échantillon de 1509 personnes de 18 et plus interrogées en ligne / Sondage France 2013: les nouvelles fractures, réalisé par Ipsos du 9 au 15 janvier 2013 sur un échantillon de 1019 personnes de 18 ans et plus interrogées en ligne