mardi 5 juin 2018

Vues du Centre. Trump choisit l’affrontement avec Macron

Par Aris de Hesselin

Dans cette rubrique, nous publions les points de vue de personnalités centristes qui ne reflètent pas nécessairement ceux du CREC. Ces points de vue ont pour but d’ouvrir le débat et de faire progresser la pensée centriste.
Aris de Hesselin est un avocat international, centriste et un européen, défenseur d’une mondialisation humaniste. Ses propos sont les siens et non ceux du CREC.

Macron-Trump: une image désormais du passé?
Comme d’habitude face à ses interlocuteurs et sur le moyen terme, Donald Trump choisit l’affrontement.
C’est ce qui vient de se passer avec Emmanuel Macron.
Ainsi, lors d’un entretien téléphonique entre les deux hommes, il aurait eu des propos et un ton très agressif vis-à-vis du président français concernant la guerre commerciale qu’il vient de lancer contre l’Europe et que ce dernier lui reprochait.
L’Elysée n’a pas confirmé ou infirmé ces informations qui viennent d’une source unique, la Maison blanche elle-même, et dévoilée par la chaîne CNN.
Car, c’e n’est que de là que provient l’information selon laquelle l’entretien aurait dégénéré.
Et, vrai ou faux, dans le cas présent, c’est la source qui est essentielle plus que le contenu de l’information afin de comprendre sa mécanique et son but.
On sait que le populiste américain prend l’essentiel de ses informations des médias et en particulier de la chaîne d’extrême-droite américaine Fox news.
Or, il n’a pu lui échapper ce que disent les journalistes: que les deux présidents, contre toute attente, ont noué une relation amicale mais que derrière celle-ci il y a une forte envie d’Emmanuel Macron de convaincre Donald Trump des moult erreurs qu’il est en train de commettre vis-à-vis du réchauffement climatique, des risques de guerre, des relations commerciales, de l’immigration, etc.
Et Trump a certainement été échaudé par le discours tenu par Macron devant le Congrès des Etats-Unis, lors de sa visite officielle à Washington, aux intonations très «obamienne» et peu «trumpienne».
Quand on sait la détestation de Donald Trump pour Barack Obama…
Dès lors, en prenant en compte l’instabilité, l’égocentrisme et le narcissisme de ce personnage qui n’accepte aucune critique, il parait évident que la «fuite» de la Maison blanche n’est pas fortuite, loin de là.
Sans oublier que le positionnement centriste d’Emmanuel Macron n’est pas du tout la tasse thé du milliardaire newyorkais.
Est-ce une péripétie de l’imprévisible et incompétent président américain, comme dans le cas de sa rencontre avec le dictateur sanguinaire de la Corée du Nord, Kim, où après l’annonce d’une rencontre, son annulation puis sa reprogrammation sur fond d’insultes et de menaces récirpoques, ou est-ce un tournant entre la relation entre les deux hommes?
Une première réponse sera donnée à la fin de la semaine lors de la réunion du G7 au Canada où les deux hommes vont se côtoyer et certainement se rencontrer en tête à tête.
Quoi qu’il en soit, Emmanuel Macron devrait enfin comprendre qu’on ne peut jamais être ami avec Donald Trump sans perdre son âme.

Aris de Hesselin


L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. Pour un service public médiatique

On parle de service public de l’audiovisuel.
Mais, au moment où celui-ci va connaître sa énième réforme, n’aurait-on pas du aller plus loin et définir plus largement ce que devrait être un service public médiatique de l’information, de la culture et du divertissement ainsi que ses missions prioritaires.
Et celui-ci ne devrait-il pas être intégré, sous une même autorité ministérielle dans un grand service public de la transmission du savoir (c’est-à-dire ce que sont actuellement les départements ministériels de l’Education et de la Culture) et de l’information citoyenne?
Explications.
Un vrai citoyen, c’est-à-dire une personne qui peut réellement exercer ses droits de citoyen doit être bien formé et informé.
Sans ce savoir et sans cette information, il n’y a aucune possibilité pour un individu de pouvoir choisir ce qui est bien pour lui et la communauté dans laquelle il vit.
Et ce savoir et cette information doivent d’abord servir l’intérêt de l’individu pour son existence, son projet de vie, la réalisation de lui-même.
Libre au secteur privé de donner un savoir et une information partisane et/ou délivrée sans les standards de la qualité à la fois dans le fond et la forme.
Mais le service public a une toute autre vocation sinon il n’a aucune légitimité à exister.
Vous pouvez tourner la question dans tous les sens, il n’y a pas d’autre alternative.
Dès lors, un service public médiatique chargé de délivrer, de manière la plus objective, la plus complète et avec la meilleur qualité possible, de l’information, de la culture et du divertissement est une nécessité à côté de toutes les initiatives privées qui font que la liberté d’expression et donc la liberté tout court peut exister et garantir l’existence d’une démocratie républicaine.
Ainsi, ce service public médiatique doit absolument s’inscrire dans un dessein beaucoup plus large, doit avoir une tout autre ambition pour être vraiment efficace et utile, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui avec le service public de l’audiovisuel, ceci étant la résultante tout autant d’une résistance de ceux qui y travaillent (pour des motifs variés mais jamais légitimes en regard de la mission qu’ils doivent remplir), de ceux qui gèrent (notamment l’Etat) mais aussi de l’histoire de cet audiovisuel public français qui – à l’opposé de la BBC au Royaume Uni – a été conçu dès l’origine d’abord comme un outil au service du pouvoir en place et une manière de verrouiller les nouveaux moyens de communication d’alors (télévision et radio) à son profit.
S’y est ajouté, depuis la libération des ondes dans les années 1980, la multiplication des chaînes et des stations privées puis l’arrivée du numérique, l’entrée dans la concurrence (notamment pour pouvoir le financer avec de la publicité et faire faire des économies pour le budget de l’Etat ce qui nécessite des taux d’audience importants souvent au détriment de tous les autres critères dont ceux de l’utilité et de la qualité) qui ne pouvait que pervertir un modèle déjà largement incapable de répondre aux missions qui justifient son existence.
On peut regretter que, comme toutes les autres réformes de l’audiovisuel public précédentes, on n’ait pas posé les termes du débat de cette manière pour celle qui vient d’être dévoilée.
On est plus dans des ajustements, des rationalités et des économies que dans une vaste réflexion sur ce que doit être un citoyen informé et cultivé dans la démocratie républicaine du XXI° siècle.
Même si Françoise Nyssen en dévoilant un des volets de la réforme voulue par Emmanuel Macron a parlé justement de la mission éducative du service public qui doit être renforcé ainsi que de la reconquête du public jeune et une information de proximité pour les médias locaux et régionaux.
Sans oublier cet objectif fort pour des programmes de qualité, rappelé par la ministre de la Culture, le renoncement à la course effrénée à l’audience dans une compétition avec les chaînes privées qui n’ont d’autres objectifs que de faire des profits et non de rechercher la qualité (mais cette annonce est récurrente à chaque réforme et jamais suivie d’effet).
Non pas, évidemment, qu’il ne faille pas produire des émissions, des documentaires, des fictions et des divertissements qui plaisent à ceux à qui ils sont destinés mais cela ne passe pas par une information spectacle et une sorte de moins-disant culturel car ce n’est pas la mission d’un service public de l’audiovisuel.
Ici, aussi, on ne peut être que satisfait de l’annonce de la mise en place d’une «plateforme éducative» et d’un média social cutlurel ainsi que celle concernant l’entité franceinfo qui devra mettra l’accent sur la lutte contre les fausses informations (les désormais fameuses «fake news») ainsi que sur l’éducation aux médias.
Encore faut-il que la philosophie qui traverse tout le travail du secteur public soit vraiment sous-tendue par cette mission citoyenne qui n’est malheureusement que trop souvent un alibi voire un paravent pour agir comme le privé ou pour développer une ligne politique partisane.
Mais il faudra bien avoir, et le plus tôt possible, cette réflexion globale sur un service public médiatique et une ambition d’une toute autre nature si l’on veut que cette démocratie républicaine fonctionne réellement et pour tous.
Comme le veulent les centristes.