jeudi 28 avril 2022

Actualités du Centre. Slovénie – Le Centre gagne les législatives devant le premier ministre sortant populiste démagogue

Robert Golob vainqueur des législatives

Si la coalition mise sur pied en Hongrie et regroupant tous les opposants à l’extrémiste populiste Viktor Orban n’a pas réussi à l’évincer du pouvoir, en revanche, le Mouvement pour la liberté, une formation centriste libérale, écologique et pro-européenne, créée en 2021, a réussi à battre son alter égo slovène Janez Jansa lors des législatives qui se sont déroulées le 24 avril dernier.

Dirigée par Robert Golob, qui avait déclaré que ces élections étaient «un référendum sur la démocratie» et pour «une société libre et ouverte», elle a totalisé 34,47% des voix et remporte 41 sièges sur les 90 que compte la Chambre des députés.

Le Parti démocrate slovène de Jansa obtient de son côté 27 sièges soit une progression de deux députés et totalise 23,65% des voix.

Mais ses alliés qui lui avaient permis de diriger le pays ne sont pas en mesure de l’aider à former une coalition majoritaire.

C’est donc le Mouvement pour la liberté qui sera chargée de former un nouveau gouvernement.

Son programme est de concilier le développement industriel et économique avec la protection de l'environnement.

Ses priorités sont le respect de l’Etat de droit foulé aux pieds par Jansa, la santé et le respect entre les générations.

Pour son président Robert Golob le réchauffement climatique est le défi «le plus important pour le futur de la Slovénie et particulièrement pour nos enfants ».

A l’issu du scrutin il a déclaré:

«Maintenant, nous pouvons dire que notre objectif a été atteint: cette victoire va nous permettre de rendre la liberté à notre pays. Nous avons un mandat clair pour renouer avec la normalité et pour rétablir la liberté. (…) Vous n'entendrez plus jamais parler de démocratie illibérale. Il n'y a qu'une seule sorte de démocratie, et nous la rétablirons».

A noter que seuls cinq partis ont réussi à faire élire des députés alors qu’ils étaient neuf lors de la précédente législature.

 

 

La quotidienne centriste du 28 avril 2022. En prétendant défendre la liberté, Elon Musk va promouvoir la licence

Le fantasque et surtout libertarien radical patron de Tesla et de Space X, Elon Musk – homme le plus riche du monde actuellement –, va prendre le contrôle de Twitter avec l’ambition pour celui qui se définit comme un «absolutiste de la liberté d’expression» d’en faire un réseau social entièrement «libre», sous-entendu sans aucune restriction où chacun pourra dire ce qu’il veut sur le modèle poussé à l’extrême de la liberté d’opinion en cours aux Etats-Unis, pays le plus libéral, diront certains, le plus permissif, diront d’autres, de la planète.

Car, comme le rappelle le philosophe Raphaël Enthoven à propos de ce rachat, «la liberté absolue, ce n'est pas la liberté, la liberté absolue, c'est la loi du plus fort».

Et d’ajouter qu’«en matière d'opinion, considérer qu'on peut avoir le droit de tout dire, c'est la liberté du renard dans le poulailler».

Nous partageons ce point de vue même si nous préférons appeler la liberté sans frein, de la licence pour bien séparer la liberté de son dévoiement dans sa pratique.

Le projet de Musk est donc de permettre aux utilisateurs de Twitter de dire tout et n’importe quoi au motif que la liberté d’expression ne doit jamais être bridée.

Cette vision est celle de tous les élucubrationistes (complotistes) et propagateurs de fake news mais aussi de tous les haineux qui déversent sans cesse leur fiel sur le web ainsi que des appels au meurtre.

Et le milliardaire le sait pertinemment.

Et il sait que ce n’est plus de la liberté.

Et il sait que c'est de la licence qui est la prédatrice de la liberté.

C’est d’ailleurs la vision de Donald Trump dont on rappelle que Twitter a décidé de fermer son compte après sa tentative de coup d’Etat.

Pour autant, le réseau social est loin d’être aujourd’hui un modèle de modération et d’agir envers ces menaces pour la démocratie avec la célérité nécessaire, ce qui en dit long sur le projet de Musk qui le considère lui comme faisant trop de censure...

Mais rappelons une autre évidence: Twitter comme Facebook et tous les autres réseaux sociaux d’Instagram à Tik Tok en passant par Telegram, sont des sociétés privées créées par des entrepreneurs qui en ont eu l’idée.

Dès lors, nous avons tous le choix de participer à leur activité ou non.

En revanche, s’ils ont le droit d’édicter les règles qu’ils veulent pour leur utilisation, celles-ci ne doivent pas contrevenir aux lois des pays où ils sont installés et/ou ils ont une activité.

C’est ce que le Commissaire au marché intérieur de l’UE, Thierry Breton a rappelé: «en Europe, les choses sont claire, Twitter doit s’adapter à nos règles».

Et de préciser:

«La donne a changé en Europe. Nous sommes le premier continent au monde à imposer des obligations aux plateformes pour qu'elles aient le droit d'opérer chez nous. Ces obligations respectent la liberté d'expression, les valeurs européennes et nos règles de droit. Elles leur imposent de lutter contre les discours haineux, le harcèlement en ligne ou les appels aux actes terroristes. Et ce quelles que soient les velléités de leurs propriétaires et de leurs conseils d'administration.»

Sans doute que la solution à cette problématique sans fin sur le fonctionnement et le contenu de réseaux privés qui veulent s’affranchir des règles serait la création d’un réseau public fonctionnant comme un vrai service public universel confié à une autorité indépendante.

Un réseau qui serait mieux adapté à une liberté d’expression et non à une licence qui veut faire croire qu’elle en fait partie.

Reste qu’il ne semble pas que la communauté internationale – ni même d’ailleurs la communauté des pays démocratiques – soit demandeuse d’un tel projet…

 

[Retrouvez quotidiennement ce billet rédigé par l’équipe du CREC concernant l'actualité du jour]

 

 

Une Semaine en Centrisme. Extrême-centre: l’étonnante revendication d’Emmanuel Macron qui pose problème

Emmanuel Macron a qualifié son projet et la coalition de ceux qui le soutiennent, d’«extrême centre» qu’il a défini de la façon suivante:
«Les trois quarts des électeurs qui se sont exprimés [au premier tour], ce qui est quand même assez fort, se sont exprimés pour trois projets: un projet d’extrême droite, ce qui est une radicalité; un projet d’extrême gauche avec Jean-Luc Mélenchon, qui assume une radicalité politique dans les éléments, en particulier liés au capitalisme et au rapport même à l’économie de marché; et ce que je qualifierais comme un projet d’extrême centre, si on veut qualifier le mien dans le champ central»

Il a ajouté:
«L'extrême-centre, c'est le regroupement de plusieurs familles politiques, un ensemble de familles de pensée qui sont à mes côtés, et qui suivent le projet pour la France que je porte depuis cinq ans et que je veux renouveler».

Dans cette coalition il met les écologistes, les sociaux-démocrates, les centristes et les droitistes libéraux mais aussi «bonapartistes» soit globalement l’axe central tel que nous l’avons défini ici voici quelques années avec ce rajout «bonapartiste» qui fait référence au gaullisme dont la vision politique avait été définie comme telle notamment par René Rémond dans son ouvrage de référence sur les droites en France.

On notera que cette coalition existe bel et bien mais qu’elle ne recouvre pas totalement le champ de l’axe central puisque certains droitistes libéraux, sociaux-démocrates et écologistes démocrates n’en font pas partie.

C’est d’ailleurs son projet pour le quinquennat qui vient de débuter de l’élargir avec ceux-ci pour former, espère-t-il, la prochaine majorité présidentielle.

Mais ce qui est assez étonnant, voire incompréhensible, ce qui interpelle tout spécialiste du Centre, c’est le choix de cette appellation «extrême centre».

Voici l’analyse et le décryptage de celle-ci que nous avons réalisés et qui demeure toujours d’actualité:
«On pourrait qualifier l’extrême-centre de courant politique qui voudrait mettre en place une société régie par les valeurs et les principes centristes en mettant en œuvre un centrisme «pur, sans concession et sans compromission», notamment avec les idéologies de droite et de gauche.
Avant d’analyser ce que cela signifie, il faut d’abord parler de deux définitions marginales de l’extrême-centre.
Ainsi, pour l’historien américain Tom Paxton, l’extrême-centre définirait un courant individualiste, antiétatique qui serait la forme extrême du mouvement libertarien qui prône un chacun pour soi au nom d’une liberté totale.
Ce rapprochement, selon lui, viendrait de ce que le Centre est un libéralisme et que, donc, sa forme extrême serait une demande sans frein de liberté au-delà de toute solidarité.
Paxton cite comme représentant emblématique de cet extrême-centre, Donald Trump.
Mais, d’une part, ce dernier ne s’est jamais revendiqué d’un quelconque centrisme et, d’autre part, réduire le Centrisme à la seule dimension d’un individualisme débridé à l’unique recherche de la liberté (et son extrême, d’une liberté sans frein) est réducteur, ne correspondant pas au principe premier du Centre, le juste équilibre, ni même à sa volonté de promouvoir ce qu’Albert Camus appelle le «nouvel individualisme» du «nous sommes».
On doit donc écarter cette définition de l’extrême-centre.
La deuxième vient de l’historien Pierre Serna qui a défini l’extrême-centre comme le mode de gouvernement qui a existé en France lors du Consulat (1799-1804) et de la Restauration (notamment entre 1814 et 1820).
Il s’agirait d’une politique «modérée conduite par un exécutif autoritaire» et s’opposerait à la démocratie.
Il est évident que l’on ne peut appliquer les notions de Centre et de Centrisme à des définitions de régimes politiques antidémocratiques sachant que les centristes sont les premiers défenseurs de la démocratie républicaine, libérale et représentative.
On doit, comme pour la précédente, écarter cette définition de l’extrême-centre.

Analysons maintenant le concept d’extrême-centre en commençant par la notion d’«extrémisme».
Pour le dictionnaire Larousse, il s’agit d’un «Comportement politique consistant à défendre les positions les plus radicales d’une idéologie ou d’une tendance».

Pour le site Wikipedia, «L'extrémisme est un terme utilisé pour qualifier une doctrine ou attitude dont les adeptes refusent toute alternative à ce que leur dicte cette doctrine. Les actions extrémistes sont par conséquent des méthodes ayant pour but un changement radical de leur environnement».
La radicalité est donc l’essence même de l’extrémisme, sa recherche.
Or, l’essence même du Centrisme, c’est le refus de la radicalité, c’est-à-dire de la division et de l’opposition entre factions en recherchant ce qui unit plutôt que ce qui éloigne.
Pour autant, en accolant extrême à centre, cela signifierait qu’il y a un Centre qui veut aller plus loin que la démocratie, plus loin que la république, plus loin que la représentativité, plus loin que le libéralisme, plus loin que le solidarisme, plus loin qu’une économie sociale de marché.
Cependant, le dépassement de ces notions ne serait plus une politique centriste.
Mais cela signifierait aussi d’imposer ses vues alors même que le Centrisme est toujours dans la recherche du compromis et du consensus et que son principe de base est le juste équilibre.
De même sa médéité est le contraire de la radicalité.
Sa recherche constante de consensus et de compromis n’est évidemment pas là pour diluer ou dénaturer les réformes nécessaires mais pour les rendre toujours plus efficace car s’appuyant sur une base citoyenne le plus large possible.
En outre, l’extrémisme est, par essence, un diviseur puisqu’il s’oppose à un autre extrémisme qui partage des vues diamétralement opposées mais aussi qui nie le compromis qu’il associe à la compromission avec le camp adverse et le consensus qu’il raille pour n’être qu’un unanimisme mou et sans saveur.
Par ailleurs, l’extrémisme réfute l’existence de l’autre qui ne pense pas comme lui puisqu’il affirme détenir la vérité.
Il veut donc bâtir une société fermée, là où le Centrisme veut bâtir une société ouverte.
Dès lors, mélanger les termes «extrême» et «centre» introduit, au minimum, une grave confusion faisant accréditer une thèse selon laquelle il y aurait des centristes intolérants, qui lutteraient contre toutes les idées et les initiatives qui ne rentrent pas dans un corpus fermé et qui voudraient imposer leurs vues de manière autoritaire, voire violente.»

Ajoutons que la notion d’extrême-centre a été ces dernières années utilisée par les adversaires d’Emmanuel Macron pour définir sa présidence de manière négative et de prétendre que sa gouvernance serait «autoritaire»…

Certains propagandistes sont même allés jusqu’à expliquer que les vrais totalitaires ne venaient pas de l’extrême-gauche ou d’extrême-droite mais de ce supposé «extrême-centre» dont le représentant emblématique pour eux sont, en dehors d’Emmanuel Macron, Barack Obama!

Alors pourquoi soudainement, après cinq années où il n’a jamais utilisé les mot «centre» pour définir sa politique et «centriste» pour se définir lui-même, mais plutôt des mots comme «ailleurs», «central», «de gauche et de droite», a-t-il défini son projet d’«extrême-centre»?

Extrême parce qu’il serait radical dans ses valeurs et ses principes d’action?

C’est la seule manière de comprendre cet adjectif qui ne fait pas partie du vocabulaire centriste parce qu’il ne fait pas partie, ni de la vision centriste de la politique, ni de celle de la société et de son organisation comme nous venons de le rappeler.

Néanmoins, on peut regretter qu’Emmanuel Macron ait choisi cette appellation parce qu’au-delà d’un simple slogan de campagne mélangé à tant d’autres, il a donné du grain à moudre aux adversaires du Centre et du Centrisme, un courant politique qui est plus grand que lui-même et sa politique.

De ce point de vue, ses déclarations sont une erreur et même une faute parce qu’elles laissent à penser qu’il y a, comme à l’extrême-gauche et à l’extrême-droite, des fanatiques et des intolérants du Centre et du Centrisme alors même que ceux qui choisissent de faire partie de celui-ci et de défendre celui-là, le font en grande partie pour combattre le fanatisme et l’intolérance.

Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC

Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC

 

 

La quotidienne centriste du 27 avril 2022. La pudeur, ce n’est pas ce qui étouffe Lionel Jospin!

Responsable en grande partie de la présence pour la première fois en France au second tour d’une présidentielle d’un extrémiste de droite en 2002, en l’occurrence Jean-Marie Le Pen, le père de l’autre, Lionel Jospin s’est permis de critiquer Emmanuel Macron en l’accusant d’avoir tout fait pour avoir un duel avec Marine Le Pen, la fille de l’autre, cette année.

Ajoutons que monsieur Jospin faisait partie des proches de François Mitterrand quand celui-ci a décidé de donner la chance au Front national, la maison du clan Le Pen, d’être au chose qu’un groupuscule en 1984 puis en 1986, le tout pour gêner la Droite qui allait revenir au pouvoir après la gestion catastrophique du pays de 1981 à 1983.

Sans oublier qu’il est membre d’un parti dont la candidate vient se réaliser moins de 2% des voix…

Ce n’est donc pas la pudeur et le souvenir de son propre fiasco qui étouffent l’ancien premier ministre qui reproche à Emmanuel Macron de faire ce que lui et ses amis socialistes ont fait pendant des années, l’instrumentalisation de l’extrême-droite!

Ce qu’oublie monsieur Jospin, c’est que si le PS n’était pas un parti en train de disparaître depuis la fin de mandat chaotique d’un de ses amis, François Hollande, et si LR avait tenu son rang, et en 2017 et en 2022, on n’aurait pas eu la représentante de l’extrême-droite au second tour.

Ni un extrémiste de gauche aussi haut.

Rejeter ses propres erreurs sur le dos des autres est un comportement dont on n’aurait pas cru que l’ancien premier ministre serait capable.

On se trompait.

 

[Retrouvez quotidiennement ce billet rédigé par l’équipe du CREC concernant l'actualité du jour]