vendredi 7 février 2014

Refondation du Centre. L’histoire du verre à moitié vide ou à moitié plein

On peut voir le rassemblement de l’espace centriste en cours comme un succès ou un échec. De même, on peut la considérer comme une vraie démarche politique ou comme un spectacle politicien indigne où des adversaires de la seconde d’avant sont devenus des amis à la vie à la mort de la seconde d’après afin de récupérer quelques pourcentages et quelques sièges lors des prochaines élections.
C’est la sempiternelle histoire du verre à moitié vide ou à moitié plein.
Analyse rapide en ce mois de février alors que les élections municipales puis les européennes se profilent à l’horizon.
- Succès ou échec?
Après un succès d’estime dans les médias (mais pas dans les sondages), l’Alternative (UDI + MoDem) n’a pas réenchanté la politique ni bouleversé le paysage politique français.
Pire, il semble bien que l’«organisation coopérative» soit tombée dans les chicaneries politiciennes et les querelles de personnes.
Les propos de François Bayrou sur Rama Yade et la réponse de celle-ci (voir L’Humeur du Centriste) ne sont qu’une illustration parmi d’autres d’un climat, sinon délétère, du moins loin d’être amical.
Etait-ce prévisible?
A voir François Bayrou et ses fidèles lieutenants chanter les louanges du rassemblement des partis centristes comme les nouveaux convertis on avait ressenti un certain malaise en novembre dernier. Ceux-là même qui espéraient un strapontin dans un gouvernement socialiste tel Robert Rochefort étaient désormais les plus critiques de François Hollande, encore plus rentre dedans que les membres de l’UDI.
Mais de l’eau a passé sous les ponts et le Mouvement démocrate, comme l’ont bien noté quelques observateurs aiguisés, a montré sa vraie nature, celui d’un rassemblement de militants venus d’horizons divers, unis uniquement derrière un projet personnel, celui de François Bayrou de devenir président de la république.
Les alliances à géométrie variable (de l’UMP au Parti communiste!) du MoDem aux municipales en sont un exemple emblématique.
Du coup, il y a autant de positionnements politiques au Mouvement démocrate qu’il y a de militants (dont le nombre, de l’aveu même des dirigeants du parti, est en chute libre).
In fine, on ne sait pas très bien quelle part du Mouvement démocrate s’est alliée avec l’UDI: 20%, 50%, 60%?!
De son côté, l’UDI qui devait être le grand vainqueur du rassemblement centriste, a très mal géré la création de l’Alternative.
Car c’est bien du ralliement de François Bayrou dont il était question au départ alors qu’il semble bien, aujourd’hui, de savoir si Jean-Louis Borloo va pouvoir résister à la nouvelle OPA de Bayrou sur l’espace centriste.
Car l’UDI n’a, pour l’instant, strictement rien gagné dans l’affaire et les latitudes laissées au Mouvement démocrate font de ce dernier, étonnamment, le «gagnant» du rassemblement centriste.
En fait, cela démontre surtout que cette refondation du Centre s’est bâtie sur un double-échec – échec du Mouvement démocrate dans sa tentative de porter Bayrou à l’Elysée, échec de l’UDI a bâtir une formation centriste forte – plutôt que sur une double dynamique du succès.
Du coup, pouvait-on espérer mieux à court terme?
Cela ne veut pas dire qu’un double-échec ne peut pas se transformer en succès dans les années à venir, surtout en politique.
- Vraie retrouvailles ou rabibochage de façade?
Les militants de l’UDI et ceux du Mouvement démocrate ont de réelles convergences de vues et ils partagent souvent des valeurs identiques.
Mais ils ont également d’aussi réelles divergences.
De plus, ceux de l’UDI sont souvent d’anciens UDF déçus par Bayrou alors que ceux du Mouvement démocrate sont souvent des inconditionnels de ce même Bayrou.
En outre, les leaders de l’UDI sont pratiquement tous d’anciens lieutenants de Bayrou qui l’ont quitté à cause de divergences sur la ligne politique mais aussi à cause de sa personnalité et de son entourage.
Lors des retrouvailles de novembre 2013, on s’est congratulé et on est tombé dans les bras les uns des autres.
Mais cela n’a eu qu’un temps.
Depuis, les critiques et les distances ont réapparu, ce qui est normal puisque rien n’avait été purgé.
Pour autant, l’UDI et le Mouvement démocrate, pour avoir une chance de peser dans le débat politique, doivent faire vivre l’Alternative et y vivre.
Donc, derrière le rabibochage de façade, il y a de vrais enjeux politiques pour les deux formations qui seront peut-être un ciment plus puissant qu’une convergence de pensée et d’action.
Encore une fois, le juge de paix sera le double rendez-vous électoral de cette année, les municipales et les européennes.
Si les résultats sont mauvais, l’Alternative aura sans doute des lendemains d’élections plus que difficiles.

Alexandre Vatimbella avec l’équipe du CREC