mercredi 9 mars 2016

Présidentielle USA 2016. La presse aura-t-elle une nouvelle fois la peau d’Hillary?

La courte défaite d’Hillary Clinton – mais emblématique de ses difficultés avec les ouvriers et les employés blancs – dans la primaire du Michigan face à Bernie Sanders qui partait avec 30 points de retard il y a quelques semaines pose à nouveau la question de savoir si la couverture médiatique de la candidate démocrate est honnête.
Ses électeurs doivent avoir en effet les oreilles qui sifflent à chaque fois qu’ils écoutent la radio et les yeux qui brûlent quand ils regardent la télévision, consultent internet ou lisent la presse.
Et ce n’est pas qu’une impression partisane.
Il est bien difficile en effet de trouver des journalistes qui disent du bien de leur chère Hillary ou, tout simplement, qui n’en disent pas du mal!
On le sait, Clinton est détestée par la presse depuis son passage à la Maison blanche, lorsqu’elle était la première dame entre 1992 et 2000.
Cela s’est confirmé en 2007-2008 où les médias ont joué un rôle de premier plan dans sa défaite face à Barack Obama lors des primaires démocrates alors qu’elle était la grandissime favorite dans les sondages.
Bien évidemment, elle n’est pas exempte de reproches dans la conduite de ses campagnes, dans ses relations avec les journalistes et dans ses difficultés d’image avec le grand public.
Néanmoins, elle est l’objet depuis plus de vingt ans de constantes insinuations, d’attaques sans fondement et d’enquêtes uniquement à charge de la part du monde médiatique où on a souvent l’impression qu’une sorte de concours oppose les journalistes sur celui ou celle qui la fera enfin tomber définitivement.
Et la campagne des primaires démocrates met cette attitude en lumière une nouvelle fois sans conteste.
Ainsi, si la plupart des journalistes politiques américains demeurent des anti-clintoniens purs et durs, les voilà qui sont devenus soudainement des socialistes, présentant Bernie Sanders de manière outrageusement favorable afin de la présenter en alternative crédible à Hillary Clinton.
Après avoir été Obamistes en 2008 sans même connaître le futur président des Etats-Unis quelques mois auparavant, les voilà tout aussi Sandériens sans plus de logique que d’être contre Clinton.
Le plus problématique déontologiquement parlant est que ses opposants ne reçoivent pas le même traitement.
Cet «Hillary bashing» fort connu est tellement caricatural que des hommes comme Donald Trump ou Ted Cruz obtiennent des couvertures médiatiques bien plus positives que l’ancienne secrétaire d’Etat de Barack Obama.
Et ce malgré leurs mensonges et leurs casseroles multiples (comme les faillites à répétition de Trump) qui sont certes évoqués mais sans l’outrance qui frappe Clinton et ses «affaires» qui sont souvent d’un degré infime par rapport aux leurs comme, par exemple, le problème des e-mails lorsqu’elle était au gouvernement ou ses discours auprès des banques.
Un des cas les plus emblématiques du comportement malhonnête des médias américains à l’encontre d’Hillary Clinton est l’utilisation du comportement de Bill Clinton vis-à-vis de la gente féminine qui lui est directement reproché comme si elle avait été sa complice…
C’est en premier lieu l’infidélité de Bill Clinton et, évidemment, l’affaire Monica Lewinsky, cette stagiaire de la Maison blanche avec qui il avait eu des relations sexuelles et qui avait failli lui coûter sa présidence (non pas pour ces frasques mais parce qu’il avait alors menti au peuple américain sur cette relation).
Ainsi, de victime, elle est devenue accusée, soi-disant selon certains journalistes ou certains de ses adversaires complaisamment interviewés, parce qu’elle n’aurait pas assez condamné le comportement de son mari!
Les attaques très en-dessous de la ceinture à ce propos sont venues de Donald Trump, l’homme qui insulte les femmes en direct à la télévision, qui a été marié trois fois et dont une de ses épouses l’a accusé de viol avant de se rétracter.
Alors qu’elles auraient du être mises en comparaison de ses comportements pour le moins machistes, elles ont été reprises abondamment par les journalistes, toujours friands de tout ce qui peut abaisser la centriste.
Ce fut par exemple, le cas du chef du service politique de NBC, Chuck Todd, qui s’est fait une spécialité de chercher tout ce qui peut compromettre Hillary Clinton, et qui monta en épingle cette histoire en affirmant sans aucune preuve que cette affaire faisait trembler toute l’équipe de la candidate à la candidature démocrate, sous-entendu cela pourrait détruire sa candidature.
On pourrait en rire s’il ne s’agissait pas de professionnels des médias et du choix du prochain président de la première puissance mondiale.
Que Donald Trump tombe dans ces attaques nauséabondes, quoi de plus normal, c’est ce qu’il fait depuis qu’il a annoncé sa candidature.
Que les médias commencent à le suivre tout en le critiquant – comportement bien connu de ceux qui propagent des ragots tout en s’en désolidarisant pour se réclamer irresponsable de leurs dénonciations! –, voilà bien qui prouve la recherche constante de sensationnalisme d’une partie des journalistes et, d’une certaine manière, une victoire pour Trump et sa stratégie de salir tout le monde, de ses concurrents républicains au camp démocrate.
Le populisme et la démagogie, ça fait vendre depuis toujours avec un public qui se bouche le nez mais qui regarde et écoute avec délectation.
A noter que la presse française suit l’exemple des médias américains du «tout sauf Hillary».
Même si cela se passe à plusieurs milliers de kilomètres, la présidentielle américaine passionne la France et permet à ses médias de jouer la présidentielle de 2017 avant l’heure.
A gauche, de Libération au Monde en passant par Le Nouvel Obs, on défend Sanders, le socialiste.
A droite, du Figaro à Valeurs actuelles, déstabilisés par Trump, les médias commencent à lui trouver des qualités même s’ils sont encore hésitants et qu’ils auraient bien vu Rubio qui devient de moins en moins une alternative sérieuse au promoteur newyorkais après ses nouvelles défaites du deuxième «super Tuesday» (reste Ted Cruz, l’homme de l’extrême-droite).
Mais, que ce soit la presse de gauche ou celle de droite, il y a un ennemi à abattre, la centriste Hillary Clinton.
Elle est de droite pour la presse de gauche et de gauche, voire d’«extrême-gauche» (sic) selon un récent article du Figaro, pour la presse de droite.
Pour conclure, ce n’est pas tant de parler des problèmes d’Hillary Clinton, réels ou supposés, qui est répréhensible, que d’en parler à tout bout de champ et de le faire uniquement à charge.
Mais il est vrai qu’en se présentant en centriste, la candidate Clinton attise les haines – et ici ce n’est pas un mot trop fort – aussi bien à droite qu’à gauche.
Une situation que connaissent souvent les candidats centristes à travers le monde.

Alexandre Vatimbella avec l’équipe du CREC


Présidentielle USA 2016

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Présidentielle 2017. Lagarde ne veut pas que l’UDI participe à la primaire de LR mais le peut-il?!

Le clash entre l’UDI et LR a-t-il réellement éclaté?
En tout cas, le président de l’UDI, Jean-Christophe Lagarde, vient de déclarer dans une interview à Paris Match que sa formation ne participera pas à la primaire de LR.
Il faut dire qu’il a été humilié par le parti de droite et son président, Nicolas Sarkozy.
Alors qu’il avait toujours affirmé qu’il voulait que l’UDI ait un candidat indépendant à la présidentielle, il avait procédé à un rétropédalage progressif ces dernières semaines, tout d’abord en refusant de dire s’il était ou non contre cette candidature indépendante puis en faisant de multiples appels du pied à LR pour ouvrir des négociations afin d’échanger participation à la primaire contre circonscriptions pour les législatives et postes dans un futur gouvernement.
Cette nouvelle stratégie était en grande partie dictée par les divisions et la cacophonie qui règnent à propos des présidentielles à l’intérieur de la formation centriste, la menaçant d’une implosion et réduisant le pouvoir de Lagarde à celui d’un chef paralysé qui regarde son parti se déliter et ses troupes s’affronter.
Mais la non-réponse de Sarkozy et de LR a infligé un camouflet à Lagarde qui se devait de réagir, tout d’abord dans Le Monde où il quémandait un rendez-vous au président du parti de droite puis maintenant dans Paris Match où il prend acte du silence radio de ce dernier pour affirmer que l’UDI ne participera pas à la primaire qui, pour lui, ne sera donc pas celle «de la Droite et du Centre».
Sauf qu’il n’a sans doute même plus le pouvoir de le décider!
Car, à l’UDI, une grande partie des dirigeants derrière le contestataire le plus virulent, Hervé Morin, ont déjà annoncé qu’il n’y aurait pas de candidat indépendant et qu’ils participeraient à la primaire quoi qu’il arrive envoyant même un ultimatum aux militants du parti.
Et certains, comme Jean Arthuis, ont déjà annoncé leur candidature à cette primaire.
Dès lors, les propos de Lagarde risquent bien de tomber dans un vide sidéral même s’il peut compter sur le soutien de Laurent Hénart, le président du Parti radical, et encore puisque celui-ci milite pour une candidature indépendante de l’UDI.
Voici l’interview que Jean-Christophe Lagarde a donnée à Paris Match:
- Paris Match. Le Congrès que vous tiendrez le 20 mars à Versailles statuera sur la participation de l’UDI à la primaire. Comment se sont déroulées vos discussions avec Nicolas Sarkozy?
Jean-Christophe Lagarde. Il n’y a eu ni négociations ni même rencontre. Mandaté par la direction de l’UDI, j’ai adressé en janvier à Nicolas Sarkozy une lettre officielle dans laquelle je fixais les conditions d’un accord préalable à notre participation à la primaire. Je n’ai jamais eu de réponse. Ni de lui ni de personne.
- Comment expliquez-vous cette fin de non-recevoir?
Les divisions internes chez Les Républicains sont trop fortes. Que ce soit Sarkozy ou les candidats à ce jour déclarés (Juppé, Fillon, Le Maire…), aucun ne semble en mesure d’avoir une ligne claire avec le centre. Ils sont trop préoccupés par leurs ambitions, leurs aigreurs et leurs rancunes pour se mettre d’accord. Tous disent qu’ils veulent travailler avec nous, mais ce ne sont que des mots. Ou alors ils veulent attendre le résultat de la primaire, ce qui est trop tard. Dans ces conditions, la primaire de la droite aura lieu sans nous. Ce sera la primaire de la droite, pas du centre.
- Vous êtes surpris? Déçu?
Ce n’était pas mon souhait initial. Mais pour une coalition, il faut être deux. Aujourd’hui chez Les Républicains, ou hier à l’UMP ou au RPR, ils ont tous toujours le même logiciel caporaliste. En clair, c’est : «Nous décidons, vous exécutez.» Mais l’union entre deux familles politiques, ça ne marche pas comme ça. J’ai adhéré à l’UDF lorsque j’avais 20 ans. Pendant quinze ans, j’ai assisté à des guerres intestines de petits chefs centristes toujours prêts à servir l’UMP par ambition. Cela a trop longtemps réduit le centre au silence. L’UDI, née il y a trois ans et demi de la volonté de Jean-Louis Borloo de refaire l’unité, ne sera la subordonnée de personne.
- Que réclamiez-vous pour participer à ce scrutin?
Un socle programmatique commun, une totale indépendance avec le FN et des circonscriptions réservées aux législatives de juin 2017.
- Combien de circonscriptions demandiez-vous?
Il y a actuellement 577 circonscriptions. Nous en demandions entre un quart et un tiers.
- Est-ce ce point précis qui a bloqué?
Comment le saurais-je ? Je n’ai eu aucun «retour». Silence radio. Y compris des candidats qui affichent une ligne centriste ou disons plus centriste que d’autres… Je ne suis pas dans l’obsession de me présenter à la primaire, mais je fais remarquer que lorsque la droite et le centre sont unis, nous gagnons. Dans quatre régions, la droite n’a pas de majorité sans nous. A l’inverse, lorsque nous sommes divisés, nous perdons. Si l’opposition veut devenir, demain, majorité, Les Républicains doivent adopter la culture de la coalition, et certains centristes sortir de la soumission.
- Irez-vous à la présidentielle?
Ne sautons pas les étapes. Si l’UDI le souhaite, nous verrons. Nous avons une valeur ajoutée dans le débat. A l’heure où tout le monde parle de défaire l’Europe, nous disons qu’il faut la parfaire, la fédérer davantage. Nous disons également qu’il faut libérer l’énergie française de son carcan d’impôts, de taxes et de règlements. Nous allons écrire un nouveau modèle français.
(Propos recueillis par Virginie LeGuay)

Alexandre Vatimbella
  


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