samedi 23 juillet 2011

L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. Barack Obama face au dilemme du Centre


Assainir les finances publiques tout en assurant les principales solidarités, voilà un des dilemmes les plus importants, si ce n’est le plus important avec la résorption du chômage, de tous les gouvernements actuels mais, plus particulièrement de tous les hommes et les femmes politiques qui s’affirment du Centre car la combinaison de ces deux actions est au cœur même du projet centriste de ce début de millénaire.
Le tout, évidemment, dans une démarche de responsabilité et de recherche du consensus le plus large possible, tellement ces questions sont essentielles pour le présent et, surtout, pour le futur du développement harmonieux de la société grâce à une indispensable cohésion sociale solide et rénovée, dans cette perspective du renforcement du vivre bien ensemble par une politique du juste équilibre.
Ce qui se passe aux Etats-Unis et, quel qu’en soient les résultats, est, à ce titre, emblématique pour la solution proposée par le Centre et par les embûches auxquels il doit faire face pour la mettre en œuvre.
Car le positionnement de Barack Obama, président centriste, sur cette problématique se situe exactement au centre du Centre.
On le sait, le gouvernement des Etats-Unis doit lutter contre les déficits des finances publiques en trouvant des solutions afin de stopper l’hémorragie des déficits publics tout en continuant à assurer l’essentiel des missions de la puissance publique, notamment en matière de solidarité nationale.
Se surajoute, comme dans toutes les économies développées, le soutien à l’activité économique et une lutte très difficile contre le chômage.
Face à cette situation très difficile, le président des Etats-Unis – qui a perdu la majorité à la Chambre des représentants en novembre dernier – doit absolument trouver le moyen d’y remédier de mieux possible.
D’autant que, comme l’ont largement expliqué les médias, il y a ce fameux relèvement du plafond de la dette qui doit être approuvé par le Congrès (Chambre des représentants et Sénat) avant le 2 août prochain afin d’éviter un défaut de paiement de l’Etat fédéral vis-à-vis de ses créanciers, des retraités aux détenteurs étrangers de Bons du Trésor américain.
Généralement, ce relèvement du plafond de la dette est automatique ou donne lieu à quelques marchandages entre républicains et démocrates lorsque «le gouvernement est divisé» (c’est-à-dire lorsqu’il y a cohabitation) sans jamais le remettre en cause. Avec l’extrêmisme d’une grande partie des élus républicains élus fin 2010 qui se positionnent désormais à la droite, voire à l’extrême-droite de l’échiquier politique et dans une posture populiste et antiétatique, ce ne sera pas le cas cette fois-ci.
D’autant, que ces élus ont en ligne de mire l’élection présidentielle de 2012 (et leur propre réélection), où Barack Obama part, pour l’instant favori ce qui est inacceptable pour eux, un de leurs principaux slogans étant qu’Obama doit être un «one term président», le président d’un seul mandat.
Du coup, il est possible que le défaut de paiement soit effectif au début du mois prochain avec toutes les conséquences désastreuses pour l’économie américaine (dont la note serait dégradée par les agences de notations) mais aussi pour l’économie mondiale.
Barack Obama a donc décidé, devant l’incapacité des républicains à proposer des mesures réalistes, d’agir en organisant une grande négociation avec les républicains, ses adversaires, mais aussi avec ses amis démocrates afin de trouver une solution à moyen-terme sur la réduction des déficits publics tout en assurant les engagements de l’Etat, notamment en matière sociale.
Son plan est d’engager des économies de 3.000 à 4.000 milliards de dollars sur les dix ans à venir en sabrant dans de nombreuses dépenses (même en matière sociale) mais aussi en supprimant les nombreuses niches fiscales qui existent aux Etats-Unis pour les plus riches, voire en augmentant un peu les impôts (il faut rappeler que la pression fiscale pour les plus riches a constamment baissé cette dernière décennie suite aux décisions de George W Bush et que le pays est un de ceux qui a les rentrées fiscales les plus basses parmi les nations développées).
Dans le même temps, les programmes médicaux pour les plus pauvres (medicaid) et les personnes âgées (medicare) seraient sauvegardés ainsi qu’un certain nombre d’autres dépenses sociales auxquelles les Américains sont attachés.
Un plan d’inspiration centriste qui recherche ce fameux juste équilibre et qui a été proposé à la discussion à droite comme à gauche afin de dégager le consensus le plus large.
Cependant, les républicains, après avoir feint de négocier, ont décidé de jouer la politique du pire en refusant tout compromis. Ils savent bien que ces propositions sont les seules acceptables mais que les accepter serait faire un cadeau à Barack Obama à un peu plus d’un an de la présidentielle où ils sont, pour l’instant, distancés.
Ils sont donc partant pour bloquer le pays, voire le plonger dans la récession à des fins uniquement électoralistes et de manière totalement irresponsables.
De plus, la plupart d’entre eux ont signé un «serment», s’ils étaient élus, de ne jamais augmenter les impôts. Celui-ci est un texte imaginé par un activiste d’extrême-droite particulièrement puissant à Washington, Grove Nordquist, qui gère une organisation contre le relèvement de la fiscalité et qui a réussi à faire du Parti républicain, le «no-tax parti», la formation contre les impôts et les dépenses publiques quelles qu’elles soient ou presque.
Le challenge auquel doit faire face Barack Obama est de mettre tous les élus (car beaucoup de démocrates sont, de leur côté, mécontents des coupes budgétaires incluses dans le projet) devant leurs responsabilités pour qu’une démarche responsable, consensuelle, pragmatiste et efficace soit mise en œuvre face à la réalité et non face à des présupposés idéologiques.
Une démarche centriste qui, nous le savons, est certainement la meilleure mais a le défaut rédhibitoire d’être réaliste et, donc, d’avoir des ennemis, nombreux, de chaque côté de l’échiquier politique!
C’est pour cela que, je ne le redirai jamais assez, l’expérience de la présidence Obama est si précieuse pour le Centre et le Centrisme afin d’analyser, en grandeur nature, si une vraie politique centriste basée sur un réformisme responsable peut être mise en œuvre face aux clientélismes de tous bords dans une période critique et si elle donne des résultats positifs.
Bien sûr, jusqu’à présent, le président a eu de nombreux succès – il a été celui qui a le plus introduit de réformes en deux ans depuis que les Etats-Unis existent - dus souvent à sa démarche s’appuyant sur le réel, la responsabilité, la recherche du consensus et la volonté de trouver un juste équilibre. Mais les défis sont encore importants. Et celui qu’il affronte actuellement en est un particulièrement ardu.
De tout cela, il faudra en tirer des enseignements qui seront d’une utilité sans pareille pour tous les centristes du monde entier.

Une Semaine en Centrisme. Leaders centristes: profiter de l’été pour exister


Les leaders centristes prendront-ils des vacances? Rien n’est moins sûr car ils doivent, à la fois, exister en vue des présidentielles et marquer leur territoire.
Ainsi, François Bayrou et Jean-Louis Borloo multiplient les déclarations et les apparitions afin de se rappeler au bon souvenir des électeurs centristes mais également pour prouver qu’ils sont, chacun, le «vrai» leader du Centre et des modérés.
Il faut dire que les enjeux sont désormais clairement marqués.
D’une part, il y a une place à prendre comme représentant du Centre à la présidentielle et ils sont deux et demi à se battre pour l’avoir: François Bayrou, Jean-Louis Borloo et le pâle Hervé Morin absent de l’échappée actuelle, lâché par les deux premiers dès les premières difficultés.
D’autre part, cette place, si un de ceux-ci parvient à l’occuper, ne garantit actuellement pas grand-chose, un score au premier tour de la présidentielle entre 10% et 15%, voire un petit peu plus.
Ceci sera loin de suffire pour être présent au second tour. Il va donc falloir labourer le terrain central, des modérés de droite aux modérés de gauche en passant, évidemment, par les centristes.
Et si aucun d’eux n’est là au second tour, il leur faudra malgré tout un score assez substantiel, au-dessus de 10%, pour pouvoir négocier entre les deux tours en vue des législatives qui suivront et de la constitution du gouvernement qui sera issu des deux élections.
En règle générale, l’été n’est guère encombré de la parole politique, ce qui permet à ceux qui s’expriment de faire plus facilement l’actualité et d’avancer leurs pions.
Malheureusement, pour les cadors centristes, la primaire socialiste fait que les prétendants à la candidature socialiste vont également occuper le terrain.
Dès lors, François Bayrou et Jean-Louis Borloo vont devoir dire ou proposer des choses qui feront le buzz médiatique mais aussi s’afficher.
Et ils ont déjà commencé.
C’est comme cela qu’il faut comprendre les propos de Jean-Louis Borloo sur la nécessité de convoquer un congrès (députés + sénateurs) pour parler de la dette, de la "règle d'or et de la situation de l’euro. Ou des gesticulations de François Bayrou pour démontrer qu’il est bien le seul centriste en lice pour la présidentielle.
Pas sûr que tout cela soit suffisant alors que le Centre demeure morcelé.
Mais ont-ils seulement une autre solution?...

Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC