samedi 12 juin 2010

Actualités du Centre – France – Pour Hervé Morin, une candidature du Nouveau Centre à l’élection présidentielle est légitime


Dans une interview au quotidien régional La Nouvelle République, Hervé Morin, le président du Nouveau Centre, revient sur sa possible candidature à l’élection présidentielle et sur les manœuvres actuelles autour du Centre.

Valérie Létard, secrétaire d'État à l'Écologie, a défendu, hier, l'idée d'une candidature centriste en 2012, mais plutôt celle de Jean-Louis Borloo que la vôtre. Trahison ou manipulation?

C'est bien qu'un membre du gouvernement défende l'idée d'une candidature centriste. Valérie est Valenciennoise, comme Jean-Louis Borloo, c'est une solidarité naturelle!

Pourquoi n'annoncez-vous pas clairement votre candidature la présidentielle?

A deux ans de l'élection, ce ne serait pas décent, alors que la France est confrontée à de si lourds défis! Et puis, une candidature Nouveau Centre, ce doit être une ambition collective. J'ai trop vécu - avec François Bayrou - l'obsession personnelle, pour préférer aujourd'hui une démarche collective. Le Nouveau Centre, c'est une offre politique qui a sa place à côté de l'UMP. Si, pour nos parlementaires, ce n'est pas cette offre qui compte d'abord, mais plutôt leurs destins personnels... alors ils ne représenteront plus un électorat mais dépendront du fait du prince.

Sarkozy fait-il le bon calcul en renouant avec François Bayrou?

François Bayrou est au fond du trou, et il croit avoir là une occasion d'exister de nouveau. Moi, je pense que c'est plutôt le baiser qui tue: en renouant avec Nicolas Sarkozy, François Bayrou devient incompréhensible pour ses électeurs. Car qui comprendra qu'après avoir été d'une telle radicalité contre le président de la République, il revienne aujourd'hui vers lui? François Bayrou ne convaincra ni les centristes de gauche qui le voient revenir vers le Président, ni ceux de droite dont il s'est délibérément éloigné. Le Centre a un potentiel électoral de 15 %, mais il n'est pas de ce côté-là. François Bayrou, est une histoire qui se terminera dans la confusion en 2012.

Sarkozy a-t-il besoin des centristes pour gagner en 2012, et pouvez-vous vous présenter contre lui, alors que vous êtes dans son gouvernement?

De 1958 à 2002, c'est l'alliance des centristes avec un parti de droite qui a fait gagner les élections (sauf en 1981 et 1988, mais dans un autre contexte), même en 2007, où 70% des électeurs UDF ont voté Nicolas Sarkozy ! Quand la gauche est au pouvoir, tout le monde trouve normal que les Verts présentent un candidat à la présidentielle. Pourquoi cela ne serait-il pas normal aussi pour le Nouveau Centre? Une société moderne est une société complexe et diverse qui a besoin d'une offre politique plurielle. Quant à ma présence au gouvernement : la campagne électorale est encore très loin, il y a encore beaucoup à faire au gouvernement et, de toute façon, ce n'est pas moi qui en décide.

Propos recueillis par Bruno Besson

© La Nouvelle République 2010

Actualités du Centre – France – François Bayrou: «Le Centre ne peut être qu’indépendant»


Dans une interview au quotidien La Croix, François Bayrou revient sur ces dernières rencontres avec Nicolas Sarkozy et sa vision d’un Centre indépendant qu’il affirme incarner. Extraits.

Le centre droit et le centre gauche, est-ce pour vous le centre ou une partie de la droite et de la gauche?

Le centre ne peut être qu’indépendant. Chaque fois que quelqu’un éprouve le besoin d’ajouter l’adjectif (droit ou gauche) au nom (centre), c’est qu’il ne croit pas à la force du centre. Le centre, ce n’est pas un sous-produit de la droite et de la gauche, ce n’est pas «entre» la droite et la gauche, mais «autre» que la droite et la gauche. Le centre, c’est deux choses: d’abord le choix du pluralisme contre la bipolarisation; ensuite un projet et des valeurs différentes des deux partis actuellement dominants.

Un exemple: à droite comme à gauche, il y a un «fétichisme» de l’État: à droite, on rêve que l’État commande tout; à gauche, on rêve que l’État pourvoie à tout. Or, il s’agit dans les deux cas d’une conception jacobine. J’ai une conception différente, plus girondine: je crois que la société doit se prendre en main; la vie locale, l’entreprise, l’association, la famille, ce doit être aussi fort que l’État.

Et qu’est-ce qui vous distingue des centristes de la majorité (Nouveau Centre, radicaux, etc.)?

J’ai refusé d’avaliser les dérives du pouvoir actuel tandis qu’ils les ont approuvées. Je suis dans l’opposition, ils sont au gouvernement et dans la majorité. Comment peuvent-ils contester aujourd’hui ce qu’ils ont applaudi hier et ce qu’ils votent tous les jours? C’est cela la grande différence entre nous. Mais je n’ai pas oublié qu’ils ont été mes compagnons. Nous formons une famille politique. Elle se reconstituera. La période des recompositions politiques n’est pas terminée.

Le PS reste-t-il pour vous un interlocuteur possible?

Il y a beaucoup de personnes au PS avec qui je me sens en phase, sur le plan intellectuel : Dominique Strauss-Kahn, Manuel Valls, Gérard Collomb, et bien d’autres encore issus du courant Delors-Rocard. Ma liberté, c’est de parler avec tous les responsables du champ démocratique français.

Vous avez été très sévère avec Nicolas Sarkozy, vous paraissez l’être un peu moins ces derniers mois…

Je suis très sévère à juste titre. Je m’oppose à Nicolas Sarkozy sur toutes les orientations qui sont pour moi dangereuses et erronées pour le pays et son histoire: faire de l’argent et de la réussite financière une valeur de société, la marchandisation de la société, traiter l’école comme une variable d’ajustement, ne pas respecter la séparation des pouvoirs, se comporter plus en chef de parti qu’en chef de l’État, vouloir verrouiller les médias, publics ou privés. Toutes ces critiques, je les assume. Ce que j’ai dit depuis trois ans, ce que j’ai écrit dans mon livre ‘Abus de pouvoir’, je ne vais pas l’effacer ou l’estomper. Mais aujourd’hui, nous sommes devant une question majeure: celle des retraites. Toute ma vie, je me suis battu contre les déficits. Les Français savent que j’ai fait de ce sujet un avertissement central de ma campagne présidentielle de 2007. J’ai dit que si la réforme était raisonnable et juste, j’étais prêt à assumer le choix de la soutenir. (…)

Les responsables de la majorité laissent entendre qu’il y aurait un «réchauffement» entre vous et Nicolas Sarkozy. Qu’en est-il?

L’idée que je pourrais «dealer», entrer dans une manœuvre avec qui que ce soit, est une idée enfantine! Si j’avais voulu faire des manœuvres, il y a longtemps que j’aurais accepté les propositions diverses et variées, les dorures, les privilèges, les chapeaux à plumes. Or je me suis inscrit, volontairement, dans le dur et austère chemin de l’opposition, sur les principes!

Le terme de réchauffement» est donc inapproprié?

Il y a un terme qui est approprié: celui de responsabilité. Dans la tempête que nous traversons et que nous allons encore traverser – cette crise est la plus grave que la France ait jamais connue depuis la guerre –, je revendique le dialogue entre les hommes responsables. (…)

Propos recueillis par Laurent de Boissieur et Solenn Royer

© La Croix 2010