lundi 9 janvier 2012

Actualités du Centre – Bayrou: le défi des ralliements à droite face à un électorat plus proche de Hollande


François Bayrou risque de se retrouver à faire encore plus le grand écart dans les semaines à venir. Alors qu’il enregistre plusieurs ralliements à sa candidature de personnalités de droite, plus ou moins importants mais largement médiatisés, son électorat continue largement de préférer voter pour le candidat du Parti socialiste, François Hollande, au second tour.
Même si dans l’entourage du leader du Mouvement démocrate on scrute avec impatience des ralliements de personnalités de gauche, ce n’est pas encore le cas pour l’instant.
D’où une situation paradoxale – et qui pourrait devenir inconfortable - que François Bayrou a, jusqu’à présent, éludé en voulant se présenter comme un nouveau Général de Gaulle, un rassembleur prônant l’union nationale.
Reste à savoir si cette posture pourra tenir pendant encore trois mois et demi et, surtout, si elle est susceptible de le faire monter dans les sondages. La dernière enquête d’opinion en date, réalisée début janvier, le montre toujours au-dessus de 10% mais il ne fait pas (encore) de bond qui validerait définitivement son discours humanistico-nationaliste dont il est persuadé de la pertinence.

USA élection 2012 vue du Centre – Une fois désigné candidat du Parti républicain, Mitt Romney reviendra-t-il un centriste?! / Le Parti républicain centriste de Lincoln et de Theodore Roosevelt n’est plus qu’un souvenir très, très lointain / Un électorat plutôt à droite


Pour bien comprendre les candidatures, souvent étonnantes pour des Européens, lors des primaires des deux grands partis, républicain et démocrate, Politico explique qu’en «Amérique, ce n’est peut-être pas très vrai que n’importe qui peut grandir pour devenir président, mais c’est de plus en plus vrai que n’importe qui peut grandir pour se présenter pour la présidentielle». Du coup, ajoute le site internet américain spécialisé en politique, c’est la raison pour laquelle, «beaucoup de républicains dans les primaires de cette élection l’ont fait même s’ils ont en réalité peu de chance de gagner mais ont pensé, avec raison, que c’était une bonne façon de faire avancer leurs carrières».

Si Mitt Romney remporte ces primaires républicaines, redeviendra-t-il, comme l’espèrent beaucoup de modérés, le centriste qu’il était auparavant, c’est-à-dire quand il était gouverneur du Massachussetts? C’est une possibilité encore qu’il devra compter sur les voix des républicains extrémistes pour être élu à la Maison Blanche. D’un autre côté, il devra aussi convaincre les électeurs indépendants, qui se disent majoritairement modérés, de voter pour lui pour gagner. Ce sera un vrai dilemme…
Ce retour vers le centre de l’échiquier politique est évidemment la crainte et le cauchemar des républicains les plus à de droite qui phagocytent le débat à l’intérieur du parti (et largement à l’extérieur à coups de millions venus de généreux donateurs).
C’est d’ailleurs pour cela que ceux-ci sont les principaux investigateurs de l’opération «tout sauf Romney» consistant à trouver n’importe quel candidat de la droite de la droite afin de l’opposer à celui qui demeure, malgré tout, le favori des primaires.
Mitt Romney, quand il dirigeait le Massachussetts, un des Etats les plus à gauche des Etats-Unis était un gouverneur de centre/centre-gauche qui fut le premier a instauré une assurance maladie universelle et qui fut un grand libéral en matières de mœurs. Un épisode de sa vie publique qu’il occulte et renie tous les jours depuis le début de la campagne républicaine faisant de lui un des plus grands «flip-floppers» de l’histoire politique du pays, c’est-à-dire quelqu’un qui dit et fait tout et son contraire, sans réelle ligne directrice autre que l’opportunisme ou le manque de personnalité. Mais cela lui permet, pour l’instant, de repousser le plus possible le vrai débat sur ce qu’il pense et qu’il faudra bien qu’il accepte un jour, surtout s’il devient le candidat des républicains à la présidentielle de novembre prochain.

Quand on parle des extrémistes du Parti républicain, il fallait écouter la logorrhée verbale de Michelle Bachmann (lorsqu’elle prend la parole, elle est inarrêtable, répétant dix fois la même chose) au moment où elle a annoncé son retrait de la course à l’investiture républicaine pour la présidentielle pour s’apercevoir les fantasmes extravagants de ces républicains de la droite la plus dure et la plus idéologique, ceux qui n’hésitent pas à dire qu’il vaut mieux perdre une élection que d’avoir un élu qui ne soit pas exactement dans la ligne….
Selon elle, elle s’était présentée parce que la prochaine présidentielle est la «dernière chance» d’éviter la «mise en place du socialisme» aux Etats-Unis, notamment par l’instauration d’une assurance santé pour tous et par un contrôle plus effectif des marchés financiers. Citant Dieu à tout va pour s’en recommander, comme le font les intégristes américains continuellement, elle a dit continuer le combat pour que les Etats-Unis existent encore demain.
Un discours apocalyptique qui correspond bien à ces bretteurs populistes d’estrade qui ont fait de la peur leur unique fond de commerce.

C’est aussi en écoutant ces mêmes bretteurs que l’on voit bien que le Parti républicain centriste de Lincoln et de Theodore Roosevelt n’est plus qu’un souvenir très, très lointain.
Car, contrairement à ce que l’on pourrait croire, la création du Parti républicain par Abraham Lincoln et quelques autres était un acte progressiste. Sans parler, bien sûr, de la lutte de Lincoln contre la sécession des Etats du Sud et contre l’esclavage, surtout de son engagement à défendre, quoiqu’il arrive, l’existence du seul régime démocratique dans le monde de l’époque. Pour tout cela, il est aujourd’hui le président le plus admiré par les Américains, ce qui n’a pas été toujours le cas.
Nombre de ses successeurs, dont beaucoup furent des modérés jusqu’à l’élection de Richard Nixon (qui, néanmoins ne remis pas en cause le pacte social du New Deal de Franklin Roosevelt) puis celle de Reagan et, surtout, celle de George W Bush.
Parmi eux, on trouve Theodore Roosevelt, adulé lorsqu’il fut au pouvoir de 1900 à 1908, non seulement aux Etats-Unis mais aussi dans le monde entier. Il fut le pourfendeur des ententes du big business (contre lequel il n’avait rien en tant que tel mais dont il ne supportait pas les comportements en marge de la légalité), le promoteur sans succès d’une couverture maladie universelle et l’instaurateur de mesures pour contrôler les activités industrielles et financières au bénéfice de la protection des consommateurs. Grand chasseur, il fut aussi celui qui fut le premier grand défenseur de la nature et on lui doit la plupart des parcs nationaux américains.
Sans nul doute, Theodore Roosevelt serait aujourd’hui membre du Parti démocrate même s’il était un défenseur du système capitaliste et de la méritocratie. D’ailleurs, Barack Obama s’est inspiré de lui pour son dernier grand discours à Osawatomie dans le Kansas pour parler de la défense de la classe moyenne et pour défendre la mise en place de régulations pour faire fonctionner correctement le système.
Rappelons que les pires réactionnaires racistes que l’on trouve aujourd’hui du côté des républicains ont été très longtemps membres du Parti démocrate. Ces «dixie democrats» régnaient sur les Etats du Sud jusqu’aux mesures prises dans les années soixante, en particulier par le président originaire du Texas, Lyndon Johnson, contre la ségrégation et pour les droits civiques des noirs. Ils furent alors récupérés par le parti républicain grâce à la volonté explicite de Richard Nixon d’élargir la base du parti.

Si le Parti républicain penche de plus en plus à droite, c’est peut-être pace qu’aussi l’électorat est de plus en plus conservateur. Dans le sondage annuel qu’effectue le Pew Research Center pou savoir quelles sont les appréciations des Américains des grands termes politiques, le mot «progressiste» arrive en tête avec 67% d’opinions positives (contre 22% de négatives) mais est talonné par le mot «conservatisme» avec 62% d’opinions positives (contre 30%, négatives), loin devant le mot «liberal» (désignant une politique et des gens de gauche) 50% d’opinion positives (contre 39%, négatives). Quant au terme Capitalisme, il obtient seulement 50% d’opinions positives (contre 40%, négatives), loin devant, néanmoins, le terme «socialisme» avec 31% d’opinions positives (contre 60%, négatives). Entre eux deux, le terme «libertarien» obtient 38% d’opinions positives (contre 37%, négatives). Même si les différences ne sont guère importantes d’une année sur l’autre (le terme «capitalisme» a, quand même, baissé de plusieurs points par rapport à l’année dernière, crise économique et comportements controversés des financiers de Wall Street oblige), on voit bien que la balance penche plutôt à droite.

Alexandre Vatimbella