jeudi 22 juin 2017

Vues du Centre. Bayrou a vécu (politiquement) grâce aux médias, périra-t-il à cause d’eux?

Par Jean-François Borrou

Dans cette rubrique, nous publions les points de vue de personnalités centristes qui ne reflètent pas nécessairement ceux du CREC. Ces points de vue ont pour but d’ouvrir le débat et de faire progresser la pensée centriste.

Jean-François Borrou est le pseudonyme d’un journaliste proche des idées centristes.


François Bayrou
On croyait qu’il était l’ami des médias, on se rend compte qu’ils se servaient autant de lui que lui se servait d’eux.

L’affaire des attachés parlementaires européens du MoDem a montré avec éclat tout le ras-le-bol que François Bayrou avait accumulé dans le monde médiatico-politique.

Et c’est maintenant la curée, tout aussi injuste qu’avait été une mise en avant démesurée que rien ne justifiait depuis la campagne présidentielle de 2007 (Bien avant les résultats du premier tour).

On a vu pratiquement aucune personnalité politique prendre la défense du centriste pendant que les journalistes désormais se lâchent en public ou par des confidences distillées sur son comportement, ses abus divers et variés, sa personnalité pour le moins difficile.

Vrai ou faux, tout ce déballage montre qu’il n’était pas aimé, voire, plus grave, peu respecté par ce monde médiatique dont il avait tant besoin pour exister.

Alors, pourquoi le retrouvait-on constamment sur les plateaux de télévision, au micro des radios et dans les colonnes de la presse écrite?

Pourquoi avait-il antenne ouverte dans la plupart des médias?

Parce qu’il était un «bon client» et qu’il critiquait tout le monde.

Un média de droite pouvait l’utiliser pour critiquer la gauche et inversement.

Un média populiste pouvait l’utiliser pour critiquer toute la «classe politique».

De plus, il pouvait être un trublion dans ce jeu de bipartisme entre la Droite et la Gauche qu’avait, parait-il, installé pour l’éternité la Constitution de la V° République, trublion peu dangereux puisque justement la porte du pouvoir lui semblait fermée ad vitam aeternam.

Et puis, à la grande surprise de tous, il a connu son «revival».

Une résurrection politique qui s’est faite, encore une fois, grâce aux médias.

Mais ces derniers n’avaient absolument pas prévu qu’il s’installerait au pouvoir.

Oh! pas comme président de la république à son grand dam mais tout de même comme ministre de la Justice.

Cependant, il n’a pas compris que le jeu médiatique à son encontre avait changé.

Il était dorénavant un représentant du pouvoir institué.

Au lieu de choisir une certaine réserve qui l’aurait peut-être préservé, il n’a pu s’empêché de continuer à en faire trop, à se croire le faiseur de roi, à se comporter comme un vice-président et à se présenter comme l’autorité morale de la politique.

Là, c’en était trop pour des journalistes qui en l’utilisant avaient du, en même temps, être constamment sous le feu de ses critiques, de ses appels téléphoniques, de sa volonté d’être au centre du jeu politique.

Alors, dès que l’affaire des attachés parlementaires européens à éclater, les médias n’ont eu aucune retenue, balayant Bayrou en quelques jours et le contraignant à quitter les feux de la rampe médiatico-politique.

Est-ce la fin pour lui?

Bien malin qui pourrait le dire au vu de son parcours mais aussi de cette faculté qu’à la politique de mettre sous terre un de ses représentants avant de le mettre au pinacle.

Ce qui est certain, c’est qu’il n’a rien vu venir, pensant que ses «amis» journalistes ne l’assassineraient pas.

Mais son hubris l’a trahi.

Et François Bayrou boira le calice jusqu’à la lie.

Lui, le chouchou des sondages et des baromètres de popularité pendant des années, ne voilà-t-il pas que, selon une enquête Odoxa pour Franceinfo et Le Figaro, 81% des Français (79% des sympathisants d’En marche!) sont contents qu’il ait quitté le gouvernement…

Huit Français sur dix, ce n’est pas rien.

Sans doute trouve-t-on dans ces Français, les sympathisants de Sarkozy, les sympathisants de Fillon, les sympathisants de Juppé, les sympathisants de Hollande, les sympathisants de Borloo, les sympathisants de Chirac, les sympathisants de Veil, les sympathisants de tous les hommes et les femmes politiques qu’un jour Bayrou a soit critiqués, soit trahis, soit s’est servi d’eux pour son ambition politique.



Jean-François Borrou

L’Humeur du Centriste. Le «nouveau» Centrisme doit balayer l’«ancien»

L’UDI en déshérence politique et le MoDem en instances judiciaires, La République en marche va-t-elle reléguer aux oubliettes les «anciens» centristes, ceux qui n’ont jamais été capables de porter le Centre au pouvoir et qui tentent aujourd’hui de s’y accrocher d’une manière ou d’une autre.
J’ai évoqué récemment la nécessité d’un «dégagisme» de la «vieille» vision du Centre et du Centrisme propagé par les politistes englués dans leurs références dépassées et les politologues submergés par leurs esprits partisans.
Ici, c’est bien l’«ancienne» manière d’être centriste qu’il convient de dégager, celle qui a fait tellement de mal au Centre et au Centrisme depuis des années où l’opportunisme, l’électoralisme, le carriérisme ont supplanté allègrement les idées et les valeurs, les convictions et l’action.
Le moment est peut-être historique pour réaliser ce bouleversement, certains l’appelleront peut-être «révolution»…
Toujours est-il que la présence à l’Elysée d’un président de la république ad minima totalement centro-compatible mais que l’on voit plutôt comme un centriste, surtout un centriste du XXI° siècle, rend celui-ci ou celle-là possibles.
D’autant que, désormais, à l’Assemblée nationale, la majorité absolue appartient à La République en marche dont les députés ont tous comme mission de mettre en place l’agenda de Macron, c’est-à-dire un agenda du «nouveau» Centrisme et en étant eux-mêmes des «nouveaux» centristes.
Tout cela peut paraître à la fois idyllique et assez injuste pour certains «anciens» centristes.
Sans doute mais faire en sorte, comme tout centriste l’espère depuis longtemps, que le Centre et le Centrisme deviennent, en France mais aussi en Europe, les moteurs du changement humaniste par le progrès et la réforme pour mettre en place une société libre, égale, respectueuse, tolérante et solidaire par le juste équilibre vaut toutes les espérances et les quelques soldats mis d’office à la retraite même si beaucoup n’ont pas démérité.
Il ne s’agit pas de jeunisme ni même de penser qu’en changeant les personnes, on change forcément les mauvais comportements, les réflexes condamnables ou les procédés dépassés.
Non, il s’agit plutôt de créer une dynamique qui ne s’embarrasse, ni de régler des comptes, ni de croire au Père Noël.
Cela passe aussi par une image forte où les anciens visages disparaissent au profit de nouveaux, tout simplement parce qu’ils n’ont pas su porter efficacement le message centriste.
Reste que l’essentiel c’est de ne pas laisser passer ce moment où le Centre et le Centrisme peuvent enfin ressembler dans l’action à leurs définitions théoriques.

Centristement votre.

Le Centriste


Actualités du Centre. Comment l’UDI recrée l’UMP, son épouvantail d’antan!

Thierry Solère
L’Histoire fait toujours de ces drôles de tours dont elle a le secret.
En créant le groupe «Les républicains constructifs, UDI et indépendants», les leaders de la confédération centriste recréent l’UMP qui était pourtant l’épouvantail qu’ils agitaient constamment pour justifier leur existence!
Explications.
En 2002, lors de la création de l’UMP suite à la victoire de Jacques Chirac sur Jean-Marie Le Pen, Alain Juppé est chargé de mettre sur pied une formation politique qui va réunir toute la droite républicaine et centriste.
Beaucoup de membres de l’UDF alors dirigée par François Bayrou se laissent charmer par les sirènes chiraquiennes et entrent à l’UMP avec, en point d’orgue, la nomination à Matignon de l’un d’entre eux, Jean-Pierre Raffarin.
François Bayrou dénonce cette volonté d’un parti unique et garde la voie d’une indépendance du Centre avec une petite partie de ses troupes dont notamment 30 députés.
A l’issue du deuxième tour de la présidentielle de 2007 où Bayrou est arrivé en troisième position au premier, celui-ci refuse de soutenir Nicolas Sarkozy et crée, dans le foulée, un Mouvement démocrate à sa botte (mais l’UDF l’était déjà) qui se veut de centre-gauche, un peu à l’image du Parti démocrate américain, mais aussi un mouvement de citoyens, un peu à l’image de ce qu’est La République en marche actuellement.
Du coup, la grande majorité de ses députés et une partie de ses adhérents quittent l’UDF pour créer le Nouveau Centre qui se définit comme un parti centriste faisant partie de la majorité présidentielle sarkoziste tout en gardant son indépendance, c’est-à-dire en ne rejoignant pas l’UMP.
En 2012, après la défaite de Nicolas Sarkozy à la présidentielle, les centristes du Nouveau Centre en déshérence et en danger de disparition se divisent puis, tous, rejoignent l’UDI – au départ un simple groupe à l’Assemblée nationale – formée par Jean-Louis Borloo qui, avec son Parti radical, avait quitté l’UMP quelques mois auparavant parce que s’y trouvant trop à l’étroit (suite aussi à sa non-nomination comme Premier ministre…).
L’UDI reprend le positionnement de l’UDF en 2002 et du Nouveau Centre en 2007, c’est-à-dire un parti dont l’allié «naturel» est la Droite mais qui veut garder son indépendance «centriste».
Affaiblie par le départ de Borloo et minée de l’intérieur par les querelles picrocholines de personnalités mégalo-narcissiques, l’UDI est devenue, au fil du temps, un simple cartel électoral.
Cependant, la déroute de LR à la présidentielle et la perte de près de la moitié de ses députés ainsi que les haines internes encore plus exacerbées posaient la question même de l’existence de l’UDI.
Si cette interrogation demeure encore, elle a trouvé une réponse pour l’instant dans la création de ce groupe à l’Assemblée nationale sous la houlette de Thierry Solère réunissant une partie de LR et l’UDI, c’est-à-dire des gens de droite et du Centre, exactement la configuration de l’UMP en 2002!
On ne sait pas très bien encore comment va fonctionner et combien de temps va exister ce groupe qui pourrait n’être qu’une structure d’accueil provisoire pour des élus qui ne savent pas encore très bien comment se positionner face à Emmanuel Macron, d’une part, et à une Droite sonnée et sans aucune ligne directrice actuellement, d’autre part.
Mais, une chose est sûre, le rapprochement évident de l’UDI avec LR depuis des mois, a trouvé un aboutissement dans cette alliance qui, rappelons-le, était la raison même de l’existence d’une confédération centriste indépendante du parti de droite.
On a bien compris que Jean-Christophe Lagarde, très fragilisé, tente de faire d’une défaite cuisante, une victoire mais personne n’est dupe qu’il a conduit l’UDI dans le mur.
Cela ne signifie pas forcément que celle-ci va disparaitre.
Etonnamment, elle pourrait même se régénérer dans cette nouvelle configuration si elle sait jouer intelligemment, ce qui a été loin d’être le cas jusqu’à présent.
Il est encore trop tôt pour pouvoir faire une prédiction en ce sens d’autant que ce nouveau positionnement politique pourrait n’être qu’un leurre qui ne durera que le temps du passage (plus ou moins long) au pouvoir de Macron ou celui (plus ou moins long) pour la Droite de retrouver des couleurs et des forces.