mercredi 4 novembre 2020

L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. Le XXI° siècle, siècle du populisme et des totalitarismes?


Cela devait être l’ère des démocraties.

Une sorte de splendide achèvement à cette démocratisation du monde qui avait pris son essor après la Première guerre mondiale puis qui avait presque été anéantie dans les années 1930 avant de redémarrer dans ce qui semblait une marche glorieuse et porteuse d’espérances infinies après 1945 qui s’était muée en parade triomphale dans les années 1980 avec la chute du communisme, le repli partout des dictatures et, corrélativement, la naissance de régimes démocratiques aux quatre coins de la planète.

D’ailleurs, en ce début de XXI° siècle, une majorité de pays ne se revendiquent-ils pas toujours comme des démocraties et il est certain que l’on compte plus de démocraties (réelles, celles-ci) qu’à la fin de la Deuxième guerre mondiale.

Néanmoins, ce que l’on constate surtout c’est la montée en puissance des «démocraties illibérales», terme totalement impropre pour désigner ce que certains appellent plus justement des démocratures (de démocratie et dictature, dans cet ordre) et que je préfère nommer des dictacraties (de dictature et démocratie, dans cet ordre) ainsi que la radicalisation des régimes déjà autoritaires dont certains sont devenus carrément des dictatures qui n’ont rien à envier à celles tristement célèbres du siècle précédent comme en Chine par exemple.

Une sorte de retour en 1930…

Certains estiment que cette situation est la preuve de la faillite du modèle de la démocratie libérale représentative au motif qu’elle n’aurait pas remplie ses promesses et que les peuples, par ailleurs, ne seraient pas capables de se servir de cet outil.

A la première affirmation, on pourrait rétorquer que les promesses des régimes autoritaires et totalitaires n’ont, non seulement, pas été tenues, mais que cela a engendré le chaos dans les pays qui ont été sous leur joug et dans le monde entier avec la multiplication des conflits armés dont l’épisode cataclysmique de la Deuxième guerre mondiale est le plus emblématique.

A la deuxième affirmation, il faut rappeler que la démocratie est un pari sur l’humain, celui de la liberté, sachant que si celle-ci est son bien le plus précieux, elle a aussi un prix et une exigence que certains ne veulent pas payer et rechignent à faire les efforts nécessaires sans même parler de l’incapacité de la vivre qui est un défi constant pour tous ceux qui estiment qu’elle demeure le meilleur système qui puisse exister.

De même, une démocratie exige un peuple formé et informé pour que chacun de ses membres soit un citoyen responsable et respectueux de l’autre, un challenge considérable, voire colossal, que beaucoup estiment démesuré et qui n’a pas été couronné d’un succès indiscutable jusqu’à présent, il faut bien l’avouer.

En revanche, cette incapacité à vivre la liberté de manière responsable, du fait d’une inaptitude à pouvoir en appréhender correctement les règles et même souvent à les dévoyer, abouti à l’inverse du pari démocratique.

Tout cela rappelle qu’il a suffi d’une crise économique pour que les Allemands s’offrent à Hitler (la défaite de 1918 n’étant pas une des raisons principales de son accession au pouvoir même si elle fut instrumentalisée par les nazis), un peuple que l’on considérait alors comme un des plus matures et des plus formés.

C’est dire que sans réelle protection, la démocratie, dans l’attente d’une maturation des populations qui la vivent, risque de disparaitre dans la durée d’autant qu’elle contient les germes même de sa destruction par la liberté qu’elle offre aux ennemis de la liberté, non pas ceux de l’extérieur mais bien ceux de l’intérieur même des pays qui vivent sous sa loi.

Si l’on est lucide, force est de constater que les événements récents confirment une appréhension pessimiste d’une disparition progressive de la démocratie dans les décennies qui viennent avec l’émergence de régiment plus ou moins autocratiques, voire même de totalitarismes là où elle est encore établie aujourd’hui.

Est-ce inéluctable?

On aimerait bien répondre par la négative mais les arguments manquent pour étayer une telle affirmation.