vendredi 27 septembre 2019

Une Semaine en Centrisme. Pourquoi Trump veut détruire Biden ?

Joe Biden & Donald Trump

Voici donc le scandale qui va peut-être conduire à l’«impeachment» (destitution) ou à la démission de Donald Trump.
Il s’agit de cette tentative de Donald Trump d’obtenir de la part du président ukrainien, Volodymyr Zelenski, un «qui pro quo», c’est-à-dire, pour la loi américaine, de l’obtention de quelque chose pour quelque chose (concept de contrepartie contractuelle).
Celui-ci, en l’espèce, était de promettre de débloquer l’aide militaire américaine à l’Ukraine (que la Maison blanche venait de geler quelques jours auparavant de manière totalement illégale puisqu’il ne peut s’agir que d’une décision du Congrès) contre l’obtention d’une enquête à charge de la justice ukrainienne contre le fils du favori démocrate pour la prochain présidentielle, Joe Biden, afin de discréditer ce dernier et de l’éliminer la course que Donald Trump veut remporter en 2020.
C’est évidemment un crime extrêmement grave de la part d’un président américain puisqu’il s’agit d’un chantage envers une puissance étrangère pour une question personnelle et afin de fausser une élection tout en utilisant les moyens et les agents de l’Etat et en mêlant son avocat personnel (en l’occurrence Rudy Giuliani).
Cette affaire est en train de prendre une ampleur sans précédent alors même que Trump a déjà commis des actes répréhensibles à foison.
Mais il semble qu’enfin ce soit la goutte qui fait déborder le vase.
Qu’est-ce qui a pu bien passer par la tête du populiste démagogue de la Maison blanche ?
La croyance qu’il est intouchable ? l’idée que cette conversation téléphonique ne serait jamais dévoilée (le président ukrainien, ancien comique professionnel, semblant être un admirateur inconditionnel de Trump) ? la volonté de créer un scandale pour mobiliser ses troupes en se faisant passer, comme il ne cesse de la répéter, pour la victime d’une chasse aux sorcières des démocrates et des médias ? voire tout cela à la fois ?
Ou touche-t-on une nouvelle fois aux limites intellectuelles du personnage que n’ont eu de cesse de pointer ceux qui ont travaillé avec lui.
Toujours est-il que cette tentative de qui pro quo qui devait salir définitivement Joe Biden avait trois raisons principales.
La première est que Biden est le grand favori de l’élection avec une avance très conséquente sur Trump (globalement entre 8 et 14 points) qui ne s’est jamais vue dans les sondages à cette époque pré-électorale lointaine (la présidentielle aura lieu en novembre 2020) et qui est, selon les spécialistes, quasiment irrattrapable.
La deuxième est que le positionnement au centre de Biden allié à sa popularité chez les cols bleus (qui avaient voté en masse pour Trump en 2016) est une force électorale du démocrate que le président sortant aura énormément de difficulté à mettre à mal sauf à trouver des «boules puantes» contre lui.
Dès lors, en l’éliminant dès à présent ou le plus tôt possible de la course à la présidence, il permet la victoire d’un représentant de la gauche du Parti démocrate (comme Elizabeth Warren), voire d’un socialiste (comme Bernie Sanders) qu’il estime plus facile à battre parce qu’ils rebuteront l’électorat modéré républicain et, surtout, les «independents» (les électeurs non-affiliés à un parti) centristes et même, peut-être, des démocrates modérés.
La troisième est que Biden a été le vice-président d’une des personnes que déteste le plus Trump au monde: Barack Obama.
Ce dernier élément n’est pas à prendre à la légère dans les agissements du populiste parce que la victoire de Biden serait, en quelque sorte, une victoire d’Obama alors que depuis trois ans Trump tente systématiquement de supprimer toutes les législations adoptées et mises en œuvre entre 2009 et 2O16, faisant une véritable fixation sur son prédécesseur dont on se rappelle qu’il l’a attaqué pendant des années en prétendant faussement que celui-ci n’était pas américain.
Sans oublier que Barack Obama est la personnalité politique préférée des Américains et que donc son «héritier» bénéficiera de cette popularité lors de l’élection, surtout s’il a été son vice-président.
Si l’on n’a pas en tête ces trois raisons qui font du centriste Biden la bête noire total de Trump, on ne peut comprendre qu’il ait pris ce risque énorme de demander à une puissance étrangère de déconsidérer un candidat à la présidentielle de la plus vieille et la plus grande démocratie de la planète.
Un risque qui peut enfin réhabiliter cette démocratie si elle permet de le chasser du pouvoir.

Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC