lundi 18 mars 2013

L’Humeur du Centriste. François Bayrou, l’homme qui prétend dire la vérité

Or donc, François Bayrou dit la vérité. C’est ce qu’il prétend depuis longtemps et il vient d’ailleurs d’en faire un livre qui vient de paraître et qu’il n’a pas hésité à intitulé «De la vérité en politique».
La vérité, concept sensible et compliqué s’il en est, a été abondamment commentée et définie au cours de l’histoire de l’humanité.
Au-delà de son ancienne définition venue de sa filiation avec la réalité, celle de «dire la réalité» qui est un simple constat de ce qui est, elle a deux définitions principales, l’une absolue dans le cadre métaphysique et l’autre plus relative dans celui des sciences.
La première est évidemment inaccessible et seul Dieu, s’il existe, en est le détenteur unique.
La deuxième permet, dans certains domaines, à partir de preuves indiscutables de démontrer et d’expliquer des phénomènes.
Dans les sphères qui nous intéressent ici, celles de la politique, de l’économie et du social appliqués, on ne peut parler ni de métaphysique, ni de science, même si on parle souvent, à tort, de sciences politiques, de science économique et de sciences sociales.
Pour en revenir à François Bayrou, la vérité selon le président du Mouvement démocrate, c’est bien sûr celle qu’il s’enorgueillit de professer comme il le dit au Figaro «avoir dit la vérité le premier, c’est déjà pas mal…».
Porte-parole de la vérité, il veut même créer un «parti de la vérité» dont bien sûr il serait le leader et qui irait «au-delà des frontières politiques classiques», nous rappelant une fois de plus sa volonté d’être une sorte de De Gaulle du XXI° siècle et de former une grande coalition d’union nationale allant des sociaux-démocrates à la droite modérée.
Notons, en passant, que François Bayrou ne s’applique guère le sérum de vérité à ses multiples échecs politiques prétendant, à la fois, que l’on ne peut être un «homme politique de premier plan» sans avoir connu l’échec et qu’il ne ressent aucun manque à ne plus être à l’Assemblée nationale.
C’est à se demander pourquoi il s’est présenté à la députation.
Vérité, vérité, chacun à la sienne.
En plus, François Bayrou connaît, non seulement la vérité mais il affirme la dire, seul, depuis 2002.
Pourtant, si l’on se penche sur le contenu de son livre, on s’aperçoit que François Bayrou en est simplement revenu à la définition ancienne de la vérité dont nous parlions plus haut, celle de dire la réalité.
Ce qu’il appelle pompeusement «vérité» n’est, selon ses propres termes que «la vérité des faits», «l’indéniable massif de la réalité» «la juste vision du réel» qu’en plus, ajoute-t-il, tous les politiques connaissent mais ne veulent pas dire.
Dès lors, ce n’est pas la vérité que l’on va apprendre en lisant son livre mais sa vision de la réalité.
Nous voilà redescendu d’un cran.
Pourquoi ce tour de passe-passe? Gageons que s’il avait appelé son livre «De la réalité en politique», il n’aurait sans doute pas fait le buzz.
Du coup, le voilà pris à son propre piège de celui qui arrange la réalité afin de mieux vendre son fonds de commerce…
Disons-le, ce livre n’apporte pas grand-chose de nouveau au débat politique. Tout ce qu’y écrit François Bayrou, il l’a déjà maintes et maintes fois écrit et déclaré.
Nombre de ses propos sont ceux d’un vrai centriste, notamment la volonté de dire la réalité. Malheureusement, ils sont mis en retrait par cette prétention d’être cet homme providentiel qui viendra sauver la France, un concept dont se méfient les centristes et qui a été une des raisons de leur opposition frontale au général De Gaulle.
In fine, toutefois, l’ouvrage nous livre deux informations: la première, inédite, est que, n’ayant plus de mandats électoraux nationaux et étant à la tête d’un parti en peau de chagrin, il a du temps pour écrire; la deuxième, plus redondante, est qu’il croit encore dur comme fer à son avenir politique qui, selon lui, est de devenir le prochain président de la république.
Pour cela, il convoque, comme c’est devenu une habitude, De Gaulle et Churchill pour s’en faire des alter egos ainsi que deux petits nouveaux, Raymond Barre et Pierre Mendès-France.
Peut-être qu’un mix de ces quatre là ferait un homme d’Etat exceptionnel capable de sortir la France de ses difficultés. La réalité oblige à dire qu’on ne l’a pas encore trouvé.
Centristement vôtre.

Le Centriste