jeudi 5 octobre 2017

Une Semaine en Centrisme. Faux-semblants et hypocrisie autour d’une éventuelle réunion des centristes

Il a fallu que François Bayrou propose lors des «universités de rentrée» de son parti, une énième réunion des centristes pour que les médias s’en emparent alors même qu’il n’y a aucune discussion en cours à ce sujet et, surtout, que cette proposition est une tarte à la crème de tous les discours du président du MoDem depuis 2007, depuis le temps où il ses députés l’ont quitté pour allés fonder le Nouveau centre…
De même, les propos redondants de Jean-Christophe Lagarde sur l’indépendance de l’UDI datent de son arrivée à la présidence du parti en 2013 (et il n’a jamais évoqué un retour dans le giron de Bayrou)…
Rapprocher les deux points de vue est une sorte d’escroquerie intellectuelle.
Mais, dans l’histoire, Il ne faudrait pas oublier le troisième larron, Hervé Morin, l’ennemi intime du président de l’UDI, qui, après avoir répété maintes fois qu’il fallait discuter avec Bayrou, vient dire le contraire de peur que Lagarde le fasse vraiment cette fois-ci!
Mais qu’il se rassure, la réunion des centristes n’est pour l’instant qu’un buzz médiatique.
D’autant que, comme le dit fort bien (pour une fois) Morin, le parti centriste dominant aujourd’hui c’est La République en marche.
Donc, si réunion il y a, elle devrait se faire sous l’égide de cette dernière et dans l’intégration de tous les centristes à celle-ci.
Mais même si l’UDI et le MoDem se prenaient l’envie de se fondre dans un même parti, ils auraient un peu plus de soixante députés contre plus de trois cents du côté de LREM.
Du coup, on ne voit pas très bien l’intérêt pour chacun des deux partis de brader leur identité et leur indépendance pour continuer à être des seconds couteaux.
La réalité est évidemment bien différente pour ceux qui connaissent l’espace centriste.
Depuis que ses lieutenants sont partis, François Bayrou savait que sa dernière légitimité était d’incarner le Centre en France.
Peu importe qu’après l’ivresse de son score à la présidentielle de 2007 il ait déclaré qu’il n’était pas centriste, il est vite revenu sur cette affirmation en se focalisant sur ce qui était, selon lui, son patrimoine politique.
Dès lors, il lance à périodes répétées des appels à l’union de tous les centristes, manière de rappeler qu’il est le seul légitime à la mener.
C’est ce à quoi nous assistons aujourd’hui.
Pourquoi, dès lors, Jean-Christophe Lagarde y répondrait-il favorablement alors même que depuis quatre ans, c’est la première fois ou presque que Bayrou prononce son nom dans une interview?!
Plus sérieusement, le président de l’UDI n’a pas l’intention de devenir le numéro trois, quatre, cinq ou dix de la galaxie bayrouiste (Marielle de Sarnez étant la numéro deux à vie, Lagarde comme les anciens UDF ne l’a d’ailleurs jamais oublié…).
Comme le dit Bayrou quand il accepte de parler de Lagarde, il fut son responsable de la jeunesse!
Non, le patron de l’UDI a de l’ambition pour lui-même et ses troupes (ou ce qu’il en reste) en formant un grand parti de centre-droit avec les membres les plus modérés de LR, c’est-à-dire une grande partie des juppéistes mais aussi les derniers centristes encore englués dans ce qui fut d’abord l’UMP.
Pour cela, il ne ménage pas ses efforts et il attend avec impatience que le très droitiste radical Laurent Wauquiez soit élu à la tête du parti de droite.
Or donc, ce n’est pas en partenaires que Bayrou et Lagarde se voient mais en concurrents.
Il s’agit pour chacun d’eux de devenir l’élément principal du «vieux» Centre en espérant dans le même temps, comme ils le disent, de récupérer un certain nombre de centristes – vieux et nouveaux – déçus par Emmanuel Macron et LREM.
A ce propos et pour bien comprendre que le rapprochement MoDem-UDI est plus un fantasme ou une chimère, les membres de cette dernière quand la direction de la confédération s’est ralliée sans condition à François Fillon et même avant dès la candidature de Macron à la présidentielle, ne l’ont pas quittée pour rejoindre le MoDem mais En marche.
Mais, in fine, tout ce que l’on vient de dire est balayé par l’argument massue qui démontre l’inanité des discours sur une réunion des centristes de feue l’UDF.
François Bayrou affirme partout qu’il est un partenaire fidèle et même un coresponsable de la majorité présidentielle et qu’il soutiendra sans faille Emmanuel Macron.
Jean-Christophe Lagarde, lui, affirme qu’il est dans l’opposition au pouvoir en place même s’il se veut constructif.
Ce serait donc la première fois qu’un nouveau parti se fonderait – puisqu’il est question de cela – avec une partie dans la majorité et l’autre dans l’opposition…
Les responsables centristes ont souvent pas peur du ridicule, mais là ce serait vraiment au-delà de toute espérance en la matière.

Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC