Voici une sélection,
ce 15 octobre 2025, des propos tenus par des centristes dans les médias ou sur
les réseaux sociaux en France à propos de la nomination du gouvernement puis de
la démission du premier ministre.
► Sébastien Lecornu (Premier ministre)
[Nota: Nous faisons figurer
Sébastien Lecornu dans cette liste alors qu’il n’est pas centriste mais
appartient à l’aile droite de Renaissance, parti centriste/central et qu’il
s’est toujours défini comme un homme de droite; c’est à ce titre que ses propos
sont retranscris ici et du fait qu’il a composé un gouvernement d’axe central
puis qu’il vient de démissionner]
> [Discours à l’Assemblée] J’ai accepté la mission que m’a confiée le
président de la République, parce que la France doit avoir un budget, parce
qu’il y a des mesures d’urgence à prendre, sans attendre. C’est un devoir. Je
l’accomplirai, sous certaines conditions, qui découlent, d’évidence, de la
composition de cette Assemblée. Certains aimeraient voir cette crise
parlementaire virer à la crise de régime. Cela n’aura pas lieu, grâce aux
institutions de la Ve République et à ses soutiens. Mais cette crise a des
racines. D’autres crises sont palpables, profondes, entremêlées : crises
sociale, économique, financière, écologique, climatique, culturelle,
internationale… Aux crises habituelles s’ajoutent les crises imprévisibles,
comme celles du Covid ou de l’énergie, sans oublier les guerres. En s’ajoutant
à certaines dépenses qui augmentent de manière automatique, elles expliquent
pour l’essentiel la situation financière dans laquelle nous sommes. Là non
plus, il ne faut rien oublier. En vérité, plus qu’une crise, je crois que nous
changeons de monde, créant des fractures tout aussi locales que mondiales, et
des bouleversements géopolitiques majeurs. Une révolution de même ampleur que
la révolution industrielle remet tout en cause. Cette révolution digitale,
sociétale, bouleverse notre façon de vivre : elle choque, effraie. Il y a le
monde d’avant, il y a ce monde de demain. L’irruption de ce nouveau monde
provoque mille conflits, mille raidissements. Nous vivons et nous vivrons dans
une époque de crises. Soit on les subit, soit on les utilise. Soit on change,
soit on sera changé. Le dégagisme c’est ça. Ceux qui ne changent pas, ceux qui
s’agrippent aux vieux réflexes, aux postures, disparaîtront. En politique,
comme en tout. En France, comme ailleurs. Le basculement du monde ne s’arrêtera
pas. Au fond, c’est la place de la France et des Français dans ce nouvel
environnement qui est en jeu. Restera-t-elle parmi les pays dont la voix compte
? Restera-t-elle « indépendante » ? Le déclin n’est pas certain, le progrès non
plus. Tout dépend de notre capacité à innover, en matière politique comme en
matière sociale, économique ou scientifique. Innover, c’est vrai pour le
Gouvernement. J’ai pris acte de cet impératif. Innover, c’est assumer des
ruptures. Le monde n’attend pas. Dans la vraie vie, nos concitoyens – pas les
statistiques – travaillent, s’inquiètent, attendent des solutions. J’ai proposé
un gouvernement de mission, d’objectifs. Il n’agira qu’avec l’Assemblée
nationale et le Sénat. À nous, au-delà des divergences, des écoles de pensée, des
confrontations, de valoriser ce qu’il est possible de faire ensemble. La
défiance de nos concitoyens n’épargne personne. Ou bien la politique sert à
quelque chose, et les politiques trouvent des terrains d’entente ; ou bien ils
ne les trouvent pas, et la déception se répand autant que l’impuissance. Je
vous propose d’avancer. L’Assemblée, dans sa diversité et ses divisions,
ressemble aux Français. Elle est le fruit du choix des Français. Elle traduit
les doutes, peurs et espérances de millions de nos compatriotes. En un mot,
cette Assemblée n’a jamais été aussi représentative des Français. Il faut en
tirer toutes les conséquences : jusqu’ici on en a tiré essentiellement des
conséquences négatives. On peut aussi en tirer des conséquences positives. Il
serait temps.Pour avancer, la première condition, élémentaire, est de pouvoir
compter sur le soutien des députés qui portent le besoin de stabilité. Je
remercie toutes celles et ceux qui ont annoncé leur soutien. J’ai proposé au
président de la République un gouvernement, pour donner un budget sérieux et
fiable pour la France, utile et bon pour les Français, dans les trois mois. Ce
Gouvernement incarne le renouvellement, avec l’entrée d’experts parmi les plus
compétents de notre pays. Chacun apporte une expérience incontestable. Je les
en remercie : ils quittent des fonctions stables pour se frotter à une vie
politique qui n’a pas toujours montré sa meilleure face ces derniers jours. Ils
serviront le pays avec une nouvelle génération de parlementaires qui partagent
l’envie d’avancer. Toutes et tous ont une feuille de route, tous ont conscience
des difficultés. Pour réussir à faire avancer notre pays, avec une Assemblée
nationale divisée, la seconde condition - que j'avais sans doute insuffisamment
mesurée, je le reconnais - est de tenir le Gouvernement le plus éloigné
possible des divergences légitimes, qui s’expriment à travers les partis
politiques. Il est logique que chacun affirme ses convictions. Chacun pose ses
lignes rouges, avec d’autant plus de force que des élections se profilent.
C’est naturel. Le gouvernement de la République assure la continuité de
l’action de l’État, porte ses propres convictions dans le respect de la
diversité de ses membres, mais il doit incarner l’ouverture au débat et aux
compromis. Qui recherche les points d’accord, d’action, plutôt que de cultiver
les différences ? Parce que dans la situation du monde, marquée par une
instabilité financière, militaire, économique, commerciale, migratoire,
climatique, mieux vaut montrer une France unie qu’une France divisée. C’est une
évidence, qui est tellement évidente qu’elle disparaît tant on se complaît dans
les querelles intérieures. Ce que je vous propose, c’est de trouver un chemin
commun, malgré les divergences. Le Gouvernement proposera, nous débattrons,
vous voterez. Là encore, c’est une rupture. La troisième condition, pour
réussir cette mission, est de redonner du sens à la politique. Pas par des
mots, mais par des actes. Par une nouvelle pratique du pouvoir, qui doit amener
plus de progrès pour nos concitoyens.
Partager le pouvoir avec le Parlement, voici, incontestablement, une rupture.
Dans une assemblée divisée, un gouvernement, même en s’appuyant sur la majorité
la plus relative, ne peut, dans la durée, agir sans tenir compte des
oppositions. Ce n’est pas possible, ce n’est plus possible. Et, surtout : ce
n’est pas souhaitable. J’avais renoncé à utiliser l’article 49 alinéa 3 de la
Constitution. C’est la garantie pour l’Assemblée nationale, que le débat,
notamment budgétaire - mais pas seulement -, dans tous les domaines, vivra, ira
jusqu’au bout. Jusqu’au vote. Cette décision est forte de changements radicaux.
« La légitimité démocratique, c’est une démocratie où le Parlement a un rôle
politique. » expliquait Michel Debré. Le Parlement et le Gouvernement ayant, je
le cite : « chacun une semblable importance dans la marche de l'État et
assurant les moyens de résoudre les conflits qui sont, dans tout système
démocratique, la rançon de la liberté. » Et la rançon de la liberté, pour
reprendre ce terme, c’est la responsabilité. Le Gouvernement présente le budget
qu’il estime souhaitable. Le Parlement l’examine, le discute, le modifie. C’est
sa liberté. Et, sans 49.3, sans majorité absolue, le Parlement aura le dernier
mot. C’est sa responsabilité et nous devons lui faire confiance. Cela paraît de
bon sens, c’est pourtant presque une révolution. À vous de saisir ce pouvoir
qui est une chance, un bel exercice de responsabilité pour montrer à toutes
celles et ceux qui en doutent que la démocratie représentative n’est pas morte
et que l’Assemblée nationale et le Sénat restent l’endroit du pouvoir de
décision, du pouvoir d’agir. Quel parlementaire dira à ses concitoyens qu’il ne
veut pas discuter le budget de l’État, le budget social de la Nation ? N'est-
ce pas le cœur même de la fonction parlementaire ? En renonçant au 49.3, il n'y
a plus de prétexte pour une censure préalable. N’est-ce pas, d’ailleurs, ce que
réclamait une grande partie de cette assemblée ? Je ne reprendrai pas ici les
déclarations des uns et des autres. Vous le demandiez : c’est fait. J’avais
promis une rupture, cela en est une. Les débats sur la fiscalité, sur le niveau
des dépenses publiques, sur le déficit public : chaque parlementaire se
prononcera. Les débats sur les moyens à allouer pour l’écologie, la sécurité,
l'éducation, le logement, les collectivités locales, la culture, l’agriculture,
nos services publics : chaque parlementaire s’en saisira. Cette fois, son vote
dictera la copie finale. On verra la position de chacun sur la dette et les impôts,
sur les dépenses et les économies. Chaque vote sera un acte. Le budget sera
donc au cœur du débat. Alors, que contient ce budget initial ? Une maîtrise des
comptes publics qui réduira le déficit : dans la copie proposée par le
Gouvernement, il est réduit à 4,7% du PIB, contre 4,6% suite au retrait de la
suppression des deux jours fériés. Comme je l’ai déjà annoncé, dans tous les
cas de figure à la fin de la discussion budgétaire, ce déficit devra être à
moins de 5% du PIB, car cet impératif de souveraineté s’impose à nous tous.
Nous ne pouvons pas placer notre pays en dépendance durable de prêteurs
étrangers et je ne serai pas le Premier ministre d’un dérapage des comptes
publics. Aussi, dès 2025, nous aurons respecté les 5,4% de déficit. Le
Gouvernement proposera un projet, qui, par essence, est perfectible. Il est
urgent de continuer à dépenser moins. L’État a engagé une revue de ses
dépenses. Des économies seront faites et il faudra désormais qu’elles
s’inscrivent dans un cadre pluriannuel en s’appuyant sur une véritable réforme
de l’État, j’y reviendrai dès demain devant le Sénat et devant vous dans les
jours qui viennent. Sur les dépenses de l’État, on peut faire beaucoup, à la
condition de repenser son action en profondeur, de réussir sa transformation
numérique, de moderniser ses interventions, et d’alléger considérablement
certaines procédures qui ne sont plus explicables. Tout le monde prône la
simplification, nombre d’acteurs dans le pays la réclame : une majorité dans
les deux chambres est possible sur ce sujet. D’autres économies seront engagées
en luttant plus rigoureusement contre les fraudes, qu'elles soient sociales ou
fiscales. Là encore, c’est une question de justice. Trop d’argent public est
gaspillé parce qu’on ne contrôle pas assez à quoi il sert. Un projet de loi
contre les fraudes a été déposé ce matin, en même temps que le budget de l’État
et de la sécurité sociale. C’est la première fois. Il y aura par ailleurs des
baisses d’impôts pour les petites et moyennes entreprises, il y aura des hausses
d’impôts ciblées et exceptionnelles pour certaines très grandes entreprises.
Baisse d’impôts d’un côté, hausse de l’autre, pour mieux répartir les efforts
au sein des contribuables, et garder une maîtrise de nos prélèvements
obligatoires qui sont déjà très élevés, pour financer notre modèle de
redistribution au profit des plus modestes. La fiscalité des très grandes
fortunes, parmi nos compatriotes, a pu interpeller un certain nombre d’entre
vous. Là aussi, il faut reconnaître qu’il peut y avoir des anomalies. Nous
croyons que réussir par son travail est une bonne chose, nous voulons une
société où il est bon de travailler, de réussir et d’innover. Nous voulons
aussi être vigilant au consentement à l’impôt. Encadrer l’optimisation fiscale
– en particulier celle qui passe par les holdings - est une première réponse.
Nous demanderons à créer une contribution exceptionnelle des grandes fortunes
que nous proposons d’affecter au financement des investissements du futur qui
touchent à notre souveraineté, pour les infrastructures, la transition
écologique ou la défense. Là encore le débat parlementaire aura lieu. Il
permettra à chacun de faire valoir ses arguments. En ne perdant jamais de vue
que derrière la fiscalité se pose la question du consentement à l’impôt, de la
confiance et de la justice. Le débat fiscal doit être aussi un débat sur
l’emploi et la croissance, raison pour laquelle je ne suis pas favorable à ce
que le patrimoine professionnel soit touché. Je ne détaillerai pas les mesures
fiscales maintenant. J'ai ouvert le débat. Sans tabou. Je vous exposerai
moi-même, avec les ministres, les propositions que j’ai faites, les
modifications que je soutiendrai, celles que je combattrai. Le Gouvernement
proposera, nous débattrons, vous voterez. Sans utilisation du 49-3, le
Gouvernement devra changer de méthode : il faudra des discussions préalables,
des compromis, le souci du détail et ne jamais refuser la technicité et
l’âpreté du débat. La loi se fera ici, pas à Bercy. Je montrerai moi-même
l’exemple en portant la discussion générale du budget de l’État et du budget de
la sécurité sociale ici même. Une fois de plus : le Gouvernement proposera,
nous débattrons, vous voterez.
Mesdames et Messieurs les parlementaires, Je veux maintenant
vous parler d’un sujet majeur qui a traversé notre pays, qui l’a parfois
fracturé : le mérite, la dignité et le courage des travailleurs, la légitimité
d’une bonne retraite. La fierté d’être travailleur, c’est la fierté de nos
entreprises, qui ne sont pas l’affaire que des patrons mais aussi de tous les
salariés. C’est celle de notre industrie, de toutes nos industries et de leurs
filières : électronique, automobile, nucléaire, chimie, métallurgie,
aéronautique, militaire, etc. Cette fierté, c’est celle du goût de l’effort
partout et pour tous. L’effort mérite reconnaissance et récompense. Le
Gouvernement sera du côté des travailleurs et de celles et ceux qui veulent
travailler. Le travail est la condition indispensable à la croissance et au
financement de notre modèle social. Il nous faut nous attaquer à deux problèmes
majeurs. Les Français, quand ils travaillent, sont productifs. Par contre, ils
accèdent trop tard au travail et en sortent trop tôt. Le deuxième problème est
qualitatif. Nous avons en proportion trop d’emplois de service moins rémunérés
et pas assez d’emplois industriels qualifiés. C’est la raison pour laquelle il
est urgent d’accélérer la réindustrialisation de notre pays par l’investissement
et l’innovation mais aussi par notre politique énergétique. Nous croyons à la
promotion interne, à l’ascenseur social. Je demanderai au ministre du Travail
et des Solidarités d’engager dès cet automne des négociations par branche pour
développer des parcours permettant aux salariés en bas de l’échelle de devenir
agents de maîtrise et cadre. Le travail, le mérite, la volonté de progresser
doivent être encouragés et récompensés. On ne peut pas rester au SMIC des
années sans perspective de progression. Des nouveaux ministres sont arrivés
avec de nouvelles idées. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’ils sont là. Le
Gouvernement présente un budget pour l’emploi, pour produire, pour que le
travail paye. Nous soutiendrons la rémunération, le logement, la santé des
travailleurs. Ce sera aussi un budget pour préserver l’outil de production,
avec la reprise de la baisse de la CVAE, impôt qui pèse sur la production de
nos petites et moyennes entreprises. Des propositions ont émergé de plusieurs
groupes parlementaires pour le pouvoir d’achat des travailleurs, là aussi,
toutes seront examinées. Toutes seront débattues et font actuellement l’objet
d’un travail technique par les ministres en charge. Le Gouvernement proposera,
nous débattrons, vous voterez. Être du côté des travailleurs, c’est être aussi
auprès de celles et ceux qui ont travaillé toute leur vie et qui sont à la
retraite. Nous respectons les travailleurs, donc, nous respectons les
retraités.
Je vis donc avec quelques convictions simples : celle qu’il faut garantir
l’équilibre de notre système. Qu’il faut le financer pour les générations
futures. Qu’il faut pour chacun une retraite digne et pérenne. Il y a moins de
cotisants qu’avant et plus de retraités. Cela s’impose à nous, comme dans
plusieurs pays européens, plus personne ne peut le nier. Mais je ressens aussi
ce que la dernière réforme pourtant nécessaire a provoqué : des tensions, des
inquiétudes, de la lassitude, parfois un sentiment d’injustice ou
d’incompréhension, y compris - à tort ou à raison - dans sa dimension
démocratique. Alors est-ce que le Gouvernement est prêt à un nouveau débat sur
l’avenir de notre système de retraite ? La réponse est oui. Une réforme
sociale, aussi nécessaire soit-elle, ne peut tenir que si elle est comprise et
équitable. Cet enjeu reste un enjeu d’avenir. J’ai toujours indiqué que
l’avenir de nos retraites serait au cœur de la prochaine campagne
présidentielle. Mais nous devons entendre que ce débat est demandé dès
maintenant par des forces politiques et syndicales légitimes. Paradoxalement,
cette période de quelques mois d’ici à l’élection présidentielle peut être une
opportunité pour avancer, y compris sur ce sujet difficile des retraites.
J’ajoute que la plus grande richesse pour notre pays c’est la stabilité et la
capacité à recréer la confiance entre les acteurs, notamment les partenaires
sociaux. La maîtrise des comptes publics, la croissance, l’emploi, le
renforcement de notre défense, la perspective de réformes utiles votées d’ici à
2027 reposent sur notre capacité à acter la stabilité politique. La plus grande
richesse du pays, c’est sa capacité collective à aller de l’avant. C’est
pourquoi, je proposerai au Parlement dès cet automne que nous suspendions la
réforme de 2023 sur les retraites jusqu’à l’élection présidentielle. Aucun
relèvement de l’âge n’interviendra à partir de maintenant jusqu’à janvier 2028,
comme l’avait précisément demandé la CFDT. En complément, la durée d’assurance
sera elle aussi suspendue et restera à 170 trimestres jusqu’à janvier 2028.
Mais je le dis très directement : suspendre pour suspendre n’a aucun sens. La
suspension en préalable de rien serait irresponsable. Cette suspension doit
installer la confiance nécessaire pour bâtir de nouvelles solutions. La
suspension pour faire mieux est la solution, si chaque acteur sait en tirer
quelque chose.
Résumons : L’Assemblée voulait que je n’utilise pas le 49-3 : je m’y suis
engagé. L’Assemblée voulait débattre à nouveau des retraites : elle en
débattra, et chaque parlementaire défendra ses opinions. L’Assemblée voulait
que le Gouvernement suspende la réforme en attendant un débat, une solution, un
vote. Je le fais. Ce qui permettra d’éclairer le débat pour la future élection
présidentielle. Mais je veux être très clair : je n’endosserai pas n’importe
quoi. Le coût de la suspension pour notre système de retraite est de 400
millions d’euros en 2026 et 1,8 milliards d’euros en 2027. Cette suspension
bénéficiera à terme à 3,5 millions de Français. Elle devra donc être compensée
par des économies. Elle ne pourra pas se faire au prix d’un déficit accru. J’ai
pris des engagements, ceux que les oppositions demandaient. J’en prends un
supplémentaire et il doit être entendu par chacun, y compris par nos prêteurs :
je n’endosserai pas un résultat qui mettrait en danger la crédibilité de notre
pays. Et encore moins notre système de retraite tout entier. Je fais des pas en
avant, à chacun, aussi, d’en faire.
Suspendre doit être une opportunité. Débattre de la question des retraites
n’est pas seulement une équation financière. Elle est partie intégrante de
notre contrat social. Et ce contrat a besoin, lui aussi, d’une refondation,
d'innovations, de ruptures. Ce gouvernement est prêt à renforcer le
paritarisme, à faire confiance à la démocratie sociale. Une fois encore,
suspendre la réforme n’a de sens que si c’est pour aller plus loin. Je propose,
dans les prochaines semaines, d’organiser une Conférence sur les retraites et
le travail, en accord avec les partenaires sociaux. Grâce à la suspension,
cette Conférence aura le temps de se prononcer avant l’élection présidentielle.
Elle se posera la question de l'ensemble de la gestion de notre système de
retraite. Certains veulent les systèmes par points, d’autres par
capitalisation, d’autres veulent abandonner toute référence d’âge. Mais ces
propositions ne valent que si l’on sait qui est responsable. Aux partenaires
sociaux de s’emparer ou non de cette responsabilité de gérer le régime. Ce
serait revenir aux sources historiques de notre modèle de retraite, c’est
d’ailleurs ce que font toujours nos voisins européens. Le Gouvernement y est
prêt. J’ai confiance dans la démocratie sociale, confiance dans la démocratie parlementaire.
Si la conférence conclut, le Gouvernement transposera l’accord dans la loi.
Sinon, il appartiendra aux candidats à l’élection présidentielle de faire leurs
propositions, et aux Français de les trancher. Elle pourra rendre ses premières
conclusions au printemps prochain. Mais il y a aussi des urgences : j’ai
inscrit, comme s’y était engagé mon prédécesseur, dans le budget de la sécurité
sociale une amélioration concernant les retraites des femmes. Inutile
d’attendre. La Conférence devra aborder d’autres sujets cruciaux comme
l’attractivité de certains métiers indispensable, le travail pénible, l’usure
au travail et les carrières longues. Voilà une discussion qui était bloquée
depuis 23 ans. Paradoxalement, la rupture, c’est de conclure. Là encore, le
Gouvernement proposera, nous débattrons, vous voterez. Je le dis sans détour :
suspendre, ce n’est pas renoncer, ce n’est pas reculer, si nous savons utiliser
ce temps avec intelligence et volonté d’avancer. La cohésion sociale, l’unité
du pays et donc sa stabilité, sont une force. La division, elle, a un coût.
Partage du pouvoir entre le Gouvernement et l’Assemblée, partage du pouvoir
entre le Gouvernement et les partenaires sociaux, partage du pouvoir aussi avec
les collectivités locales. Pas pour faire plaisir aux élus locaux - j’en suis
un -, mais pour être efficace au service des Français. On le dit souvent, on le
fait rarement. Déjà, avec une urgence : la réforme institutionnelle en
Nouvelle-Calédonie. La fin des accords de Nouméa a laissé un vide
institutionnel qu’il faut combler pour permettre la paix sur le Caillou.
L’accord de Bougival permet une réconciliation. Il doit être transcrit dans la
Constitution. Le Gouvernement proposera d’adopter ce texte avant la fin de
l’année, afin que les Calédoniens puissent être consultés au printemps 2026.
C’est une urgence. Mais ce serait une erreur de croire que la Nouvelle
Calédonie est un cas à part. La question des Outre-mer se pose aussi avec la
même urgence. Un projet de loi, concernant la « vie chère », est prêt. Il ne
faut pas attendre. Un projet de loi constitutionnelle concernant la Corse,
fruit de deux années de discussion, lui aussi est prêt. Rien ne serait pire,
pour l’État, que de renier sa parole. Là aussi, l’Assemblée nationale et le
Sénat débattront et trancheront. Nos concitoyens veulent que le pouvoir soit
proche d’eux, adapté aux réalités de terrain. Je proposerai donc en décembre un
projet de loi pour renforcer le pouvoir local : un nouvel acte de
décentralisation. Lui seul permettra de réformer l’État de manière globale et
d’améliorer le fonctionnement de tous nos services publics. Qu’est-ce que l’on
attend de l’État ? C’est la question centrale. La police, la justice, la
sécurité, la défense, les relations internationales, dans ces domaines, les
budgets ont augmenté depuis 2017 et continueront d’augmenter. L’État s’est
renforcé, parce que ce sont des missions que lui seul peut exercer. Pour le
reste, quel doit être le niveau de décision local ? Qui est responsable de quoi
? Je proposerai un principe simple, celui de l’identification d’un seul responsable
par politique publique. Il s’agira soit d’un ministre, soit d’un préfet, soit
d’un élu. Il ne faut pas décentraliser des compétences. Il faut décentraliser
des responsabilités, avec des moyens budgétaires et fiscaux et des libertés, y
compris normatives. Le Gouvernement peut-il engager cette réforme dans les
trois mois ? Vous vous dites que cela prendra du temps ? C’est précisément
parce que cela prendra du temps qu’il faut engager cette réforme tout de suite.
Sinon, elle sera reportée une fois de plus, et jusqu’à quand ? Au plus tôt dans
deux ans, après l’élection présidentielle. Nous n’attendrons pas. Des majorités
sur ce texte sont possibles dans les deux chambres. Le Gouvernement proposera,
nous débattrons, vous voterez.
Ne pas attendre. Il y a urgence. Urgence pour tenir le calendrier d’adoption du
budget et de voter le meilleur budget. Urgence pour renforcer le dialogue
social. Urgence, avant les élections municipales, de mieux répartir les
compétences et réformer l’État. Si les débats de cette assemblée débutent cette
semaine, cela permettra via les discussions budgétaires de répondre aux
urgences pour la santé, l’accès au soin avec France Santé, pour défendre
l’environnement, la sécurité, pour la loi de programmation militaire. Il y a
des urgences, il y a des projets de loi qui sont prêts : pour les polices
municipales et la lutte contre les incivilités du quotidien, pour le statut de
l’élu. Des discussions, sensibles, doivent se poursuivre notamment sur la fin
de vie. Des combats doivent sans cesse être menés, contre le racisme,
l’homophobie, l’antisémitisme, pour l’égalité entre les femmes et les hommes.
La soif absolue de nos compatriotes pour leur sécurité, pour la justice et le
respect de la loi doit être entendue par les élites et sur chaque banc de cette
Assemblée. Les enjeux migratoires à venir, tant liés à la démographie, au
réchauffement climatique et au terrorisme posent un défi imminent qui ne peut
être nié. J’y reviendrai. Les ministres y reviendront. A condition d’oser
discuter. Agir. Avancer. Tout cela, nous pouvons le faire ensemble dans les
mois qui viennent, si nous mettons fin à cette crise. Désormais, cela dépend de
vous. Je sais, je n’ai pas obéi à l’exercice de style habituel d’une
déclaration de politique générale, collectant chaque domaine d’intervention de
l’État, citant chacune des préoccupations de nos concitoyens, dans leur
travail, leur famille, leur village ou leur ville. Que personne ne se sente
oublié. Je pense, sinon à tout, - je n’en ai pas la prétention- en tout cas, à
toutes et à tous. Cela est facile, il me suffit de me sentir utile à mon pays.
Et je vous le dis avec toute ma conviction ; avec, aussi, tout ce que j’ai
appris au ministère des Armées : les seuls qui se réjouiraient d’une crise,
d’une panne budgétaire en France, ne sont pas les amis de la France. Qui, parmi
les Français, se sentira mieux, si la France se divise plus encore, si elle est
plus faible, si elle repousse les questions de fond et les questions d’urgence
à plus tard ? Je ne vous ai pas fait un discours de politique général convenu.
Je reviendrai ici pour expliquer la politique que le Gouvernement entend mener
sur les sujets fondamentaux. Je me suis engagé à revenir pour expliquer le
budget, parce qu’il traduit une politique pour la France. Mais je reviendrai
aussi sur les questions de sécurité, d’immigration, d’énergie, de transition
écologique, d'éducation, du numérique : sur tout cela, je ferai des
propositions, nous débattrons, et à la fin, vous voterez. Je ne vous ai pas
présenté un programme à long terme. C’est un gouvernement de mission. L’urgence
est de redonner son sens à la politique, de redonner confiance en la politique,
de respecter les engagements de chacun, y compris ceux des oppositions. La
vraie démocratie permet à celles et ceux qui ne sont pas d’accord de travailler
ensemble. Sans rien renier de leurs convictions. C’est ce qui se passe dans
toutes les démocraties du monde et même dans la majorité des conseils
municipaux de France. Osons : Il suffit de faire un pas. C’est comme cela que
l’on avance. Pour la France et les Français.
> [Discours au Sénat] Il y a le temps des crises. Et il y a aussi celui du rebond.
De la division naît le débat, du débat naît le compromis. Ce
temps est indispensable, car la France a besoin de stabilité. Et il n'y a pas
de compromis sans bicamérisme. Le Sénat représente les collectivités
territoriales, au sein desquelles il faut s'entendre avec ses oppositions,
parfois au sein de sa majorité, avec les maires des communes voisines. Tous ne
pensent pas comme vous, mais tous veulent servir. De cette contrainte apparente
naît une intelligence locale, qui doit nous inspirer nationalement.
Le Gouvernement souhaite porter cette ambition. Il faut sortir de cette crise
par le haut, dans le respect des convictions de tous et de la parole de chacun,
y compris des oppositions ; nous ne l'avons pas suffisamment fait par le
passé, il faut le reconnaître.
Il faut doter la France d'un budget utile pour les Français, pour la fin de
l'année. Pour cela, il faut redonner du sens à la vie politique et
parlementaire, grâce à une nouvelle pratique du pouvoir.
Huit dossiers sont urgents.
Priorité absolue du Gouvernement : le budget de l'État et celui de la
sécurité sociale. Les Français n'attendent pas moins de leurs représentants. Au
Gouvernement de le proposer, à nous d'en débattre, à vous de le voter.
Le projet de budget est plus que perfectible vu les circonstances. À l'instar
de Michel Barnier, voilà un an, j'ai déposé le texte en respectant les délais
constitutionnels, en faisant évoluer la copie à l'aune de mes nombreuses
consultations. Mais il reste des points à améliorer. Je sais que le Sénat y
prendra toute sa part, en responsabilité.
Le Budget repose sur un principe simple : la maîtrise des comptes publics,
qui réduira le déficit à 4,7 % du PIB. À la fin de la discussion
budgétaire, celui-ci ne devra pas dépasser 5 %, quoi qu'il arrive.
Dès 2025, nous respecterons les 5,4 % de déficit prévus. C'est une
priorité pour maintenir le consentement à l'impôt. Le Président de la
République a choisi de ne pas transiger avec notre souveraineté et notre
sécurité. D'où l'augmentation inédite des crédits en faveur des armées.
De même, les moyens des ministères de l'intérieur et de la justice seront en
progression.
En revanche, les moyens des autres ministères baisseront en euros constants,
tout comme ceux des administrations. L'effort ne sera toutefois pas suffisant.
C'est pourquoi j'ai installé la mission « État efficace », chargée de
formuler des propositions de rationalisation des dépenses publiques, en
s'appuyant notamment sur vos travaux.
Il faut un mouvement continu d'amélioration de l'efficacité de l'État, et
revoir le format de l'État central, malgré les mouvements de déconcentration et
de décentralisation. L'État déconcentré s'est trop paupérisé ces vingt
dernières années.
Deuxième priorité : lutter contre la fraude fiscale et
sociale.
Nous présenterons le projet de loi le plus ambitieux contre les fraudes depuis
plusieurs décennies.
Les interventions et soutiens de l'État ne peuvent donner lieu à des situations
de rente. Ainsi du secteur des énergies renouvelables : s'il est hors de
question de baisser nos ambitions environnementales, il est tout autant hors de
question que cela pèse anormalement sur le contribuable. Ces secteurs doivent
supporter la concurrence. Nous ne devons pas avoir de tabou pour lutter contre
les effets de rente, y compris en matière de police des prix.
Le Sénat a voté plusieurs mesures d'économies, certaines consensuelles,
d'autres non. Toutes seront examinées et débattues. Seul le résultat compte,
dès lors que ces mesures sont sincères, documentées et justes.
En matière fiscale, les partis politiques ont des propositions divergentes. Je
l'ai déjà dit à plusieurs reprises : il ne faut pas augmenter la masse
globale des prélèvements obligatoires.
Mes prédécesseurs qui ont eu la lourde tâche de faire voter le budget
pour 2025 ont déjà eu recours à la fiscalité pour augmenter les
prélèvements obligatoires. L'effort fiscal doit, par principe, être le plus
limité possible. Il sera moins important que l'année dernière. La pression
fiscale représentera 36 milliards d'euros de moins qu'en 2017.
Le budget pour 2025 ne prévoyait aucune diminution d'impôt ; nous
proposons une baisse de la CVAE au profit des PME. Vous trancherez.
Ce budget demandera un effort aux collectivités territoriales, comme à tous les
autres acteurs de la République. J'ai conscience que cet effort est difficile,
et parfois incompris. Aussi ai-je souhaité que les moyens alloués aux
collectivités maintiennent une trajectoire de hausse en 2026, car c'est la
base de la confiance pour réussir l'acte de décentralisation.
Comment ne pas voir la situation préoccupante des conseils
départementaux ? L'État sera au rendez-vous avec un fonds de sauvegarde
en 2026.
Autre conviction animant le Gouvernement : il faut décentraliser, en
repartant de l'État. C'est une conviction que partage le Sénat, notamment son
président. Un projet de loi sera soumis au Parlement avant les élections
municipales. Il réformera l'action publique de manière globale, non pour faire
plaisir aux élus locaux, comme on peut le lire parfois, mais pour agir dans une
logique de responsabilisation, et de proximité.
Qu'attend-on de l'État ? Police, sécurité, justice, relations
internationales, défense, sont au cœur de son action. D'abord parce qu'il ne
peut s'y soustraire, ensuite parce que nos compatriotes attendent plus de lui
dans ces domaines.
Les budgets des missions régaliennes de l'État ont augmenté depuis 2017 et
continueront à le faire. Il ne faut pour rien au monde renoncer à ce
renforcement. Pour le reste, il faudra se réorganiser.
> [Intervention à l’Assemblée – Gaza et antisémitisme] Nous
avons enfin abouti à un accord de paix, fruit de plusieurs mois de mobilisation
de la communauté internationale et des pays de la région avec lesquels la
France n’a jamais perdu le fil ni le contact. Nous sommes ainsi parvenus,
progressivement, à entrer dans le jour d’après, avec bien sûr la part d’aléas
que cela comporte et auxquels nous devrons faire face dans un contexte
d’urgences.
La première d’entre elles demeure l’urgence humanitaire, aussi bien s’agissant
de l’alimentation que de l’accès aux soins. Je l’ai rappelé hier soir à un
autre député : le fil conducteur de l’action de la France depuis de
nombreux mois, y compris lorsque vous étiez le chef du gouvernement, est la
possibilité donnée au ministère des affaires étrangères et au ministère des
armées de procéder à un acheminement très important de denrées, de vivres et de
médicaments. Nous poursuivrons dans ce sens, notamment avec le partenaire
égyptien et dans le cadre des conférences évoquées à l’instant par Jean-Noël
Barrot.
La deuxième urgence est la gouvernance du territoire palestinien. Cette
question a déjà été abordée, je n’y reviens pas.
La troisième urgence est bien sûr la sécurité : désarmement du Hamas et
capacité à faire monter en puissance des forces de sécurité palestiniennes.
C’est indispensable pour la sécurité des civils mais aussi pour celle d’Israël.
La France dispose des compétences nécessaires – forces armées
et de sécurité intérieure –
pour accompagner une telle formation et pour trouver un cadre avec nos
partenaires britannique et américain,
notamment au sein des Nations unies. J’ai
crû comprendre, monsieur le
ministre de l’Europe et des affaires étrangères, que des réflexions étaient en
cours, en tout cas qu’un brouillon de résolution était actuellement élaboré,
débattu et étudié au Conseil de sécurité des Nations unies.
La deuxième question que vous avez posée – même si
ceux qui suivent nos débats ne
l’ont peut-être pas entendue – porte sur la lutte contre l’antisémitisme à l’intérieur de notre pays.
La triste réalité, c’est que les actes antisémites ont augmenté. Ils ont été
multipliés par quatre depuis le 7 octobre 2023. La triste, et
inacceptable, réalité, c’est que nos compatriotes de confession juive
représentent 1 % de la population mais concentrent plus de la moitié des
agressions à caractère religieux enregistrées par les forces de police et de
gendarmerie et par l’autorité judiciaire.
Face à un tel constat, vous nous appelez à redire – comme vous-même l’aviez fait en tant que premier ministre – la détermination
totale du gouvernement de la République
à ne rien accepter, à ne rien laisser passer, à lutter par tous les moyens contre l’antisémitisme, aussi bien à
l’école qu’en matière de politique pénale
ou de sécurisation des lieux de
culte.
> [Intervention à l’Assemblée / Changement climatique] Plusieurs
défis sont devant nous.
La première priorité est de continuer la décarbonation d’une partie de notre
économie et de notre vie quotidienne. C’est une évidence en matière d’émissions
et de souveraineté. Vous le savez, c’est aussi une évidence en matière
économique car des filières économiques ont été créées sur le territoire, qui
sont désormais porteuses d’emplois, et il n’y aurait rien de pire que de faire
du stop and go – pour parler en mauvais français –, ce qui
fragiliserait l’élan donné. Cela va peut-être trop lentement et le débat à ce
sujet aura lieu si vous laissez la discussion budgétaire se tenir ici même. Il
est en tout cas clair que freiner définitivement nos efforts de sobriété
énergétique nous exposerait aux pires difficultés.
J’en viens à la production d’énergie, au sujet de laquelle vous avez posé une
question très précise. C’est la même urgence : la décarbonation est
essentielle pour des raisons non seulement climatiques mais aussi – pardon ! – géopolitiques. Dépendre du Moyen ou du Proche-Orient,
de la Russie, d’un certain
nombre de grands compétiteurs
est évidemment inacceptable. On
ne pourra pas parler de réindustrialisation
si notre politique énergétique n’est pas au niveau. Si vous nous demandez si nous souhaitons ou
allons dégrader, dans les documents à venir, nos objectifs en matière
d’énergies renouvelables, la réponse est non.
En revanche, nous devons davantage interroger la manière dont l’argent public
est employé pour financer les énergies renouvelables et faire en sorte qu’il
n’y ait pas de rente de situation. Je sais de quoi je parle car j’étais
secrétaire d’État chargé de ces sujets il y a huit ans et on voit bien
qu’aujourd’hui, la situation du marché de l’électricité, la structure des coûts
afférents aux énergies renouvelables, les filières économiques, s’agissant par
exemple de l’éolien en mer, tout comme la manière d’équilibrer notre système
électrique et de stocker cette énergie ne sont pas les mêmes qu’alors. Le vrai
débat relatif à la programmation pluriannuelle de l’énergie portera sur le
nucléaire – je
sais que nous ne sommes pas d’accord
à cet égard et je l’assume –, les énergies renouvelables et les bons moyens d’éviter que des effets de rente, des
effets de bord ne découlent du
financement de ces énergies. Ce
sujet est essentiel.
Troisième thème, qui chevauche le national et le local : la biodiversité,
un terme que je n’ai pas prononcé hier à l’occasion de mon discours de
politique générale, pas plus que vous dans votre question. Ce thème pose la
question des déchets, celle de l’eau et celle de la lutte contre les
pollutions, sur laquelle la ministre chargée de l’écologie reviendra très
prochainement. La dynamique et les enjeux afférents sont aussi globaux,
nationaux que locaux. Nous ne ferons pas l’impasse sur un réexamen de la planification
écologique à l’échelon local : les compétences en question sont
fondamentalement décentralisées et les élus locaux doivent s’en emparer
davantage. Nous en débattrons peut-être. Étant donné l’endroit d’où je viens,
en tant qu’ancien maire et ancien président de département, je reste convaincu
que c’est absolument essentiel.
La dernière étape est bien sûr internationale et européenne : il s’agit de
faire en sorte que la France continue de mener le combat politique que vous
avez décrit à un moment où le climatoscepticisme est plus puissant qu’il y a
cinq ou dix ans. Ce qui, ces dernières années, était évident ou du moins à peu
près consensuel a cessé de l’être, y compris au regard des politiques menées
par un certain nombre de grandes puissances. Je crois pouvoir dire que la
nomination, que vous n’avez ni citée ni saluée, de la ministre Monique Barbut
témoigne, eu égard à son engagement et à son bilan de femme dirigeante d’ONG,
de ce que le gouvernement de la République est capable de faire pour la
France !
► Gouvernement nommé puis démissionnaire
[Nota: Ce gouvernement nommé
et démissionnaire comportait un certain nombre de centristes et de membres de
Renaissance qui sont situés au centre-droit voire à droite; étant donné sa
courte existence nous reproduisons leurs propos concernant la nomination de ce
gouvernement et la démission du premier ministre]
● Ministres
centristes/centraux
Laurent Nunez (ministre de l’Intérieur)
> [Édouard Philippe appelle à la démission d’Emmanuel Macron] Ce n’est
pas souhaitable, c’est l’assurance d’une fragilisation de nos institutions pour
l’avenir. Il y a un rejet de la classe politique de manière générale. Il faut
qu’on réhabilite le politique.
> Le pouvoir de dissolution appartient au président de la
République, mais oui la question politique se posera. Le ministère de
l'Intérieur a toujours su démontrer qu’il est capable de se préparer très vite
et d’organiser des élections.
> [Réforme des retraites] Il y a aussi un objectif de
maintenir notre déficit pour 2026 à 5% du PIB. Il faudra donc compenser le coût
de cette réforme par des économies dont il faudra débattre, et ne pas utiliser
l’article 49.3 de notre Constitution.
> [Suspension de la réforme des retraites] C’est un geste
fort et d’apaisement du Premier ministre. Il fallait sortir de cette crise et
surtout responsabiliser le Parlement. Maintenant, on est dans un régime presque
parlementaire.
Catherine Vautrin (ministre
des Armées et des Anciens combattants)
> Dès ma prise de fonctions, j’ai souhaité me rendre, avec la ministre
déléguée Alice Rufo, aux côtés de nos soldats blessés et du personnel mobilisé
à leur service, à l’Hôpital d’instruction des armées Percy à Clamart. Ce
premier déplacement, au sein du Service de santé des armées, m’a permis de
rencontrer nos soldats blessés et de saluer leur courage et leur engagement
exemplaire, ainsi que l’immense professionnalisme de celles et ceux qui les
soignent. J’ai ensuite présidé la cérémonie de ravivage de la flamme, aux côtés
des cadres de nos armées et de nos anciens combattants.
Jean-Noël Barrot (ministre
de l’Europe et des Affaires étrangères)
> [Intervention à l’Assemblée / Gaza] La journée de lundi a été marquée
par la libération tant attendue des vingt otages qui étaient encore retenus par
le Hamas à Gaza. Immense soulagement et immense émotion. C’était la première
étape du plan de paix présenté par les États-Unis le 29 septembre.
Il n’aurait pas été possible d’y parvenir sans les efforts déployés depuis un
an par la France et par l’Arabie saoudite car, tout simplement, il aurait été
illusoire d’espérer obtenir un cessez-le-feu et la libération des otages sans
la formation d’un consensus concernant l’immédiat après-guerre et l’horizon
politique. Or c’est précisément cette carence que l’initiative
franco-saoudienne a permis de pallier.
Si cette étape est considérable, la situation reste fragile. Nous parlons d’un
cessez-le-feu, ce n’est donc pas encore la paix. Si le sommet de Charm
el-Cheikh, auquel le président de la République a participé, était si
important, c’est parce qu’il nous a permis de nous coordonner avec les autres
pays européens et avec les pays arabes qui veulent prendre toute leur part dans
la construction d’une paix durable dans la région.
S’agissant de ces efforts, auxquels la France contribuera pleinement, trois
axes se dégagent. Le premier, c’est évidemment l’aide humanitaire et la
reconstruction. Il faut inonder la bande de Gaza d’aide humanitaire et
commencer d’ores et déjà le travail de reconstruction. C’est la raison pour
laquelle la France coorganisera, avec l’Égypte, une conférence dédiée à cette
question.
Deuxièmement, il faut assurer la sécurité, notamment des Gazaouis. C’est
pourquoi la France présentera au Conseil de sécurité des Nations unies, avec le
Royaume-Uni et en lien avec les États-Unis, une résolution visant à
donner mandat à une force internationale de stabilisation en mesure d’opérer
très prochainement à Gaza.
Le troisième enjeu est la gouvernance de Gaza. Nous voulons que les
Palestiniens y trouvent toute leur place, notamment une autorité palestinienne
réformée, profondément transformée, comme le prévoit la déclaration de New York
que nous avons défendue avec l’Arabie saoudite et qui a été adoptée à l’immense
majorité des États membres des Nations unies le 12 septembre.
> [Intervention à l’Assemblée / Attentat du Hamas du 7
octobre] Souvenons-nous des 1 200 innocents sauvagement assassinés le 7 octobre
2023, lors du pire massacre antisémite de notre histoire depuis la Shoah.
Souvenons-nous que ce matin-là, 48 de nos compatriotes ont
été assassinés par les terroristes du Hamas, que huit autres ont été kidnappés
pour être plongés dans l’enfer des tunnels du Hamas à Gaza, que cinq d’entre
eux ont été libérés, dans la joie et dans les larmes, quand trois d'entre eux y
ont laissé la vie.
Souvenons-nous aussi de certains de nos compatriotes qui se
sont distingués ce matin-là : je pense à Liel Itach, citoyen français de 22
ans, qui a donné sa vie pour que d’autres puissent sauver la leur. Mort en
héros, nous ne l’oublions pas.
Parce que la France n’oublie aucun de ses enfants, mais la
France ne se contente pas de dénoncer ni de condamner : la France agit.
Le mois dernier, la France a rassemblé la communauté
internationale à New York, pour qu’à travers une déclaration endossée par
l’ensemble de la communauté internationale, à terme la sécurité d’Israël puisse
être garantie et les droits légitimes du peuple palestinien puissent être
reconnus — de manière à ce que toutes les souffrances des deux dernières années
ne se reproduisent jamais.
La semaine dernière, c’est à Paris que se sont réunis, au
Quai d’Orsay, les ministres des pays arabes et européens qui veulent donner
toute sa chance à ce plan de paix et contribuer à sa réussite.
Et lundi , à Charm el-Cheikh, le 13 octobre dernier, c’est
le Président de la République qui a réuni à son tour ses homologues pour que,
sur la reconstruction de Gaza, sur sa gouvernance à venir, sur la sécurité des
Gazaouis et celle d’Israël, toutes les forces soient mobilisées pour que tout
ce que nous avons vécu ne se reproduise jamais.
Amélie de Montchalin (ministre
de l’Action et des Comptes publics)
> Ce Budget propose un chemin pour ne rien avoir à sacrifier de la
souveraineté de la France à nos créanciers. (…) Ce que nous proposons, c'est
bien un projet de loi de finances. Le budget que la France connaîtra en 2026,
c'est votre budget, par vos votes.
> L'objectif c'est qu'on réduise les déficits.
> Il y aura moins d'impôts dans le budget de l'année
prochaine qu'en 2019.
> Censurer, c'est repousser les débats, censurer, c'est
repousser les choix.
> Ceux qui vous brandissent des économies à coup de
milliards en pensant que c'est des choses qu'on va faire d'un trait de plume ne
respectent pas les agents publics et les politiques publiques.
> [Réforme des retraites] On suspend pour se donner le
temps de trouver des solutions.
> [Suspension de la réforme des retraites] Le pire pour
notre pays c'est que nous constations un blocage et que nous ne cherchions
aucune solution (...) La seule tutelle sous laquelle nous sommes, c'est celle
de la démocratie.
> [Taxe sur les holdings] Quand au sein des holdings,
vous avez des chalets, des jets privés, des actions, de la trésorerie qui ne
sont pas des investissements productifs, qui sont là pour générer du patrimoine
personnel, nous voulons y mettre fin.
> [Niches fiscales et sociales] Nous avons ciblé vingt
niches considérées comme inefficaces, obsolètes, mal calibrées.
> La seule démographie nous amènera à dépenser 6
milliards de plus l'année prochaine pour les retraites.
● Autres
ministres
Gérald Darmanin (garde des sceaux, ministre
de la Justice)
> Dans un courrier à l’ensemble des agents du ministère de la Justice,
j’ai annoncé les grandes priorités qui guideront la poursuite de notre action
collective au service des Français et du rétablissement de l’autorité de
l’État. Mettre les victimes au cœur de notre action et de notre écoute,
accélérer notre politique pénitentiaire ambitieuse avec le développement des
prisons de haute sécurité et la construction de 3000 places de prison
modulaires en quelques mois, réformer la justice pénale pour plus de rapidité
et de fermeté, simplifier la justice civile, repenser la protection des
mineurs, réformer les écoles du ministère… c’est ensemble que nous y
parviendrons.
> Nous devons remettre les victimes au cœur des
préoccupations de la justice. C’est le sens de l’instruction que j’ai envoyée
aujourd’hui aux magistrats.
> Nous allons changer de paradigme et mettre les
victimes, singulièrement les enfants, au centre de toutes les politiques
publiques du ministère de la Justice.
> Dès le début de l’année 2026, 4 nouveaux quartiers de
haute sécurité ouvriront, afin de stopper net l’influence des narcocriminels
les plus dangereux de notre pays.
> Réforme des retraites suspendue : "C'est un
compromis difficile à faire pour nous mais nous n'avons plus la majorité à
l'Assemblée nationale.
> La démission du gouvernement Lecornu a coûté plus cher
à la France que l'annonce aujourd'hui de la suspension de la réforme des
retraites.
> Je n'adhère plus aujourd'hui à un parti politique parce
que je crois qu'ils ont failli, et je prends ma part de responsabilité, à
montrer qu'ils avaient comme conscience l'intérêt général.
> [Prisons de haute sécurité] Quatre nouvelles prisons au
1er semestre 2026 (...) C'est un succès incroyable pour l'administration
pénitentiaire.
> Je suis venu au centre pénitentiaire de Réau, en
Seine-et-Marne, pour saluer, écouter et remercier les agents pénitentiaires.
Cette prison deviendra d’ailleurs, début 2026, l’un des trois nouveaux
établissements qui accueillera un quartier de haute sécurité pour
narcocriminels, comme nous l’avons fait à Vendin-le-Vieil et à
Condé-sur-Sarthe.
Maud Bregeon (porte-parole
du Gouvernement)
> [Renoncement au 49.3] C'est une rupture totale.
> Les forces politiques ne doivent pas avoir peur de
s'engager dans le débat budgétaire.
> [Budget 2026] Tous les sujets seront ouverts au débat.
> [Intervention à l’Assemblée suite à une question d’une
députée LFI] Vous parlez d’illégitimité. Or s’il y a bien une chose qui est
légitime, c’est l’Assemblée élue il y a plus de douze mois par des Français qui
étaient allés voter à plus de 75 %.
Le premier ministre a mis sur la table l’abandon du 49.3, une mesure que vous
réclamiez. Il a aussi mis sur la table la possibilité de débattre de la
fiscalité et de la réforme des retraites – ce que vous aviez demandé. Nous proposons le débat, vous voulez le désordre.
Il n’y a aucun coup de force, seulement le respect de la Constitution.
Faire de la politique, c’est défendre des positions. Le gouvernement s’y
emploiera, sur ces bancs, lors du débat budgétaire. Chacun des groupes pourra
agir de même. En revanche, faire de la politique, ce n’est pas se comporter en
éditorialistes mais bien être en mesure de faire le pas, le chemin nécessaires
pour éviter le blocage et permettre à la France de disposer d’un budget au
31 décembre.
J’en viens à la question du véhicule législatif. Vous me demandez si un
amendement au projet de loi de finances sera déposé. Nous aurons l’occasion de
le préciser.
De mon côté, je vous pose une question : acceptez-vous d’entrer dans
le débat budgétaire pour lequel les Français vous ont élus ?
Benjamin Haddad (ministre délégué auprès du ministre
de l’Europe et des Affaires étrangères chargé de l’Europe)
> Le discours de Sébastien Lecornu
peut être fondateur d’une autre façon de faire de la politique. Nous sommes
toujours dans la 5eme République mais personne n’a la majorité absolue. Ça
demande de changer de méthode. Sachons faire comme nos voisins européens faire
des compromis et travailler ensemble. C'est courageux.
> Les Français
n’en peuvent plus des querelles de partis. Ils ont zappé ce spectacle
consternant. Mettons nous au travail, trouvons des compromis et laissons
l’assemblée débattre. C’est ce que propose Sébastien Lecornu sans 49,3.
> Oui, nous avons
besoin de travailler plus pour financer nos retraites. Mais il est vrai aussi
que cette réforme avait laissé des cicatrices. Et le coût de l’instabilité est
supérieur à celui de la suspension. Depuis hier, les taux de la France ont
baissé.
> [Gaza] Les
seuls qui ne parviennent pas à se réjouir de la libération des otages et du
plan de paix, c'est la LFI.
> [Gouvernement Lecornu]
Ceux qui se prêteront à une course à la présidentielle ou à des jeux de posture
seront sanctionnés.
> Je continue à
penser que la réforme des retraites était nécessaire. Mais elle a laissé une
cicatrice dans le pays, (...) et le coût de l'instabilité dépasse celui de sa
suspension.
► Assemblée
nationale
Yaël Braun-Pivet (présidente)
> Réformer le Règlement de l’Assemblée nationale, c’est renforcer le
travail parlementaire au service des Français. J’ai lancé ce matin, avec
l’ensemble des groupes politiques, le groupe de travail chargé d’engager cette
réflexion collective, avec un objectif : une Assemblée plus efficace, plus
ouverte et plus responsable.
> Je souhaite des débats qui ne s’enlisent pas, un
Parlement responsable qui avance et qui vote. Il faut passer du commentaire au
faire.
> Voilà des années que je plaide pour que l’Assemblée
nationale retrouve pleinement sa place, que les députés puissent s’exprimer,
participer à de vrais débats et voter. Je ne peux donc que me réjouir qu’enfin
l’Assemblée nationale redevienne le centre de notre vie démocratique et
politique, le cœur du débat.
> Je plaide depuis longtemps pour moins de verticalité
dans le fonctionnement de nos institutions, cette verticalité que je dénonce
depuis 2017, mais qui, soyons honnêtes, existe depuis toujours dans l’essence
même de la Ve République, avec un pouvoir exécutif très dominant. Aujourd’hui,
en 2025, les Français attendent davantage de délibération et d’horizontalité.
Ils souhaitent que le pouvoir soit partagé : avec les représentants du peuple
que nous sommes à l’Assemblée nationale, avec les collectivités territoriales,
et aussi avec les citoyens eux-mêmes. C’est pourquoi je milite depuis des
années pour des référendums et des consultations populaires.
> [Suspension de la réforme des retraites] Je ne regrette
pas la décision en elle-même. Ce que je regrette, c’est que nous n’ayons pas
réussi à établir un accord global. Mon souhait, que je suppose être aussi celui
du Premier ministre, était de garantir la stabilité de notre pays jusqu’à
l’élection présidentielle de 2027, notamment pour le budget et les mois à
venir. Les Français en ont assez des conflits et des tensions ; ils aspirent à
l’apaisement et au calme. J’espérais qu’un accord global nous permette
d’assurer cette stabilité. Ce n’est pas le cas, et je le déplore. Cependant, il
fallait faire ce geste, car nous avons besoin d’avancer et de garantir le
budget. Par ailleurs, il est clair qu’une réforme qui n’est pas correctement
délibérée ou votée ne peut pas passer, et nous devons en tirer les leçons pour
l’avenir.
> [Budget] La balle est désormais dans le camp de
l’Assemblée nationale. Le Premier ministre a indiqué qu’il ne contraindra pas
le vote par l’usage du 49.3 ; nous devons donc en tirer les conséquences et
être responsables, en assurant un débat correct. Je me suis replongée dans les
chiffres : l’année dernière, il y a eu 7 468 amendements, un nombre qui a
doublé depuis 2018. Je n’ai pas le sentiment que les débats étaient moins
riches en 2017. (…)
Il ne s’agit pas de restreindre le droit d’amendement, qui reste fondamental
pour tout parlementaire. Mais il est crucial de cadrer correctement les débats
afin d’aller jusqu’au vote. Il serait assez surprenant que nous ne puissions
pas voter à cause de nous-mêmes. (…)
Les amendements peuvent toujours être retirés. La gestion des débats va être
essentielle. Nous disposons de près de deux mois et demi pour en débattre.
Certains sujets sont fondamentaux et nécessitent du temps, comme les taxes sur
le patrimoine ou la fiscalité. Il s’agira de hiérarchiser les discussions :
prendre le temps pour les grands sujets et aller plus vite sur les questions
accessoires. (…)
Nous travaillons déjà en lien avec le président de la Commission des Finances
et le rapporteur général, qui réunira son bureau aujourd’hui. Mon souhait est
que les débats ne s’enlisent pas et que le Parlement se montre responsable,
afin que toutes les discussions aient lieu et que nous puissions passer à
l’action concrètement à l’Assemblée nationale.
> En ouverture de cette séance, je tiens à saluer la
conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza, au terme d’importants efforts
de médiation internationaux, dont ceux de notre pays. Cet accord a d’ores et
déjà permis la libération tant espérée de vingt otages détenus par le Hamas à
Gaza. Il doit désormais permettre l’intensification massive des opérations
humanitaires au profit de la population palestinienne cruellement éprouvée par
deux ans de guerre. Ces derniers développements positifs ravivent, sans aucun
doute, une lueur d’espoir dans la région, l’espoir que cessent les souffrances,
qu’advienne enfin une paix juste et durable à travers une solution à deux États
garantissant la sécurité et la dignité de tous.
► Partis
politiques
● Renaissance
[Nota: dans ce parti, les propos de ses membres qui ne sont pas centristes
et se considèrent à droite ou à gauche ne sont plus retranscrits]
Gabriel Attal (député, secrétaire
général de Renaissance, président du groupe Ensemble pour la république à
l’Assemblée nationale)
> [Intervention à l’Assemblée après le discours du Premier ministre]] En
un an, c’est la quatrième fois que nous nous retrouvons pour prendre position
sur une déclaration de politique générale, et neuf motions de censure ont été
examinées dans cet hémicycle. C’est donc la treizième fois en un an que nous
avons l’occasion de débattre et de faire connaître la position de chacun de nos
groupes. Celles-ci sont par conséquent connues ; nous aurions tous pu
imaginer à l’avance les différentes interventions.
Il y a ceux qui affirment clairement qu’ils censureront tout, quoi qu’il
advienne, jusqu’à une dissolution, une destitution ou une démission. Il
y a ceux, comme nous, qui cherchent la stabilité, sans menacer d’une censure,
sans imposer de lignes rouges. La stabilité ici envisagée n’est pas un
immobilisme ; elle est un mouvement par le compromis, par la volonté de
discuter d’abord des idées avant de parler des personnes. La position de mon
groupe, celle de mon parti, est connue ; elle n’a pas varié d’un iota
depuis plus d’un an.
Je ne consacrerai pas mon intervention à vous rappeler ce que vous savez déjà – cela tient en trois phrases : premièrement, nous voulons que le gouvernement réussisse ; deuxièmement,
nous voulons qu’un budget soit
voté d’ici à la fin de
l’année ; troisièmement, nous sommes prêts à faire des compromis pour y arriver.
Monsieur le premier ministre, vous avez annoncé que vous proposerez la
suspension de la réforme des retraites. Sur ce point, il faut être clair :
la messe est dite, puisque les groupes favorables à revenir sur cette réforme,
à gauche et au Rassemblement national ont la majorité absolue dans l’hémicycle.
Quel que soit le sens de notre vote, à nous qui avons défendu cette réforme,
elle sera donc suspendue.
En ce qui concerne les députés Renaissance, notre idéal en 2017 n’était pas
d’entrer dans la valse des réformes paramétriques, comme des pansements que
l’on met – et
désormais que l’on enlève – tous
les deux ans. Notre idéal est
un changement de système, parce
que notre système est en train
de mourir étant donné les bascules démographiques et technologiques.
Ces derniers mois, nous avons travaillé. J’avais confié à Stéphanie Rist, que
je félicite pour sa nomination au gouvernement, le soin de préparer une réforme
systémique au nom de notre parti, Renaissance. Cette réforme, pour un système
de retraite universel, par points, débarrassé du totem de l’âge légal, mais
fondé sur la seule durée de cotisation et comportant de la capitalisation
ouverte à tous, elle est prête, disponible, et nous la défendrons.
Mes chers collègues, notre position est connue. C’est pourquoi, à cette
tribune, je veux consacrer le temps dont je dispose à parler de ce qui s’est
passé en France ces derniers jours, mais qui a, hélas, été invisibilisé par le
spectacle politique qui a occupé tant d’heures sur les plateaux télé, sur les
ondes radios, tant de lignes dans les pages des journaux. Je veux parler de ces
jours où, loin du vacarme parisien, la France a bougé, changé, vécu au rythme
de tous les défis qui l’animent, car si la politique ne parle plus des
Français, alors elle ne parle plus de rien.
Ces derniers jours, nous avons commémoré des dates, notamment une, hier,
douloureuse, effroyable : celle des deux ans de l’assassinat de Dominique
Bernard, victime du terrorisme islamiste, pour avoir défendu son lycée, pour
avoir défendu ses élèves, pour avoir défendu le savoir. J’étais à Arras hier,
auprès de sa veuve, auprès de ses élèves, auprès de ses collègues. Les larmes
ne sont pas encore sèches à Arras. La douleur est encore vive. Et je n’ai vu
là-bas que des femmes et des hommes qui attendaient des actes. Alors, oui, nous
défendrons des actes pour notre école, pour qu’elle reste le sanctuaire du
savoir ; des actes contre le terrorisme, contre l’islamisme, qui menace
toutes nos valeurs !
Ces derniers jours – vous l’avez
rappelé, madame la présidente –, la France a remporté deux prix Nobel :
celui de Michel Devoret, en physique, pour la découverte de l’effet
tunnel quantique et celui de Philippe Aghion, en économie, pour ses travaux sur l’innovation. Ces deux distinctions nous rendent fiers et
nous rappellent que la France a des talents, qu’elle a tous les atouts pour
réussir. Elles nous rappellent aussi que ces talents peuvent préférer s’exiler
pour rechercher, pour enseigner. Alors, oui, nous défendrons des actes pour les
garder et pour continuer à soutenir l’innovation et la recherche !
Ces derniers jours ont aussi été ceux de la liberté, marqués par la libération
des otages israéliens, bien sûr, retenus, depuis deux ans maintenant, dans des
conditions inhumaines.
Cette libération intervient comme une délivrance après le massacre du
7 octobre et comme un espoir pour la paix au Proche-Orient.
La liberté, c’est celle qu’incarne la récipiendaire du prix Nobel de la paix,
Maria Corina Machado, héroïne face à l’oppression du pouvoir au Vénézuela. La
liberté, elle est parfois entravée, bafouée, comme il y a quelques heures, lors
de la condamnation au terme d’une parodie de justice de nos compatriotes Cécile
Kohler et Jacques Paris – avec vous, je veux appeler une nouvelle fois à leur
libération immédiate et à celle de Boualem Sansal, toujours retenu par le
pouvoir algérien. La liberté, c’est bien sûr le regard de Robert
Badinter, entrant au Panthéon pour veiller à jamais sur la République, lui qui
avait la justice pour unique combat et le droit pour seule arme.
Ces derniers jours ont aussi été ceux de drames qui ont marqué les Français,
qui les inquiètent et qui les touchent vraiment et fortement. C’est hier, à
Grasse, le féminicide terrible d’une femme tuée de seize coups de couteau.
C’est, dimanche, un octogénaire roué de coups en pleine rue, victime de la
violence gratuite. Ce sont quatre policiers blessés, dans des violences
insupportables, en plein centre de Paris, après l’annulation d’un concert.
Autant de drames qui nous rappellent que la sécurité n’attend pas, que l’ordre
public ne connaît pas d’affaires courantes et qu’il faut agir encore et encore,
pour protéger les Français.
Et si je parle de drames, je veux en évoquer un qui m’a serré le cœur : je
parle du suicide de cette petite fille de 9 ans, à Sarreguemines, en Moselle,
victime du harcèlement scolaire. Neuf ans ! J’ai honte en pensant au
martyr de cette petite fille et à la souffrance de sa famille, honte de me dire
qu’au lieu de discuter de la façon d’agir pour que chaque élève se sente bien à
l’école, nous puissions perdre encore du temps en nous empêchant nous-mêmes
d’agir pour l’école.
Ces derniers jours, un nouvel espoir a été donné aux salariés d’ArcelorMittal,
après que le vice-président exécutif de la Commission européenne a annoncé une
baisse des importations d’acier et la hausse des droits de douane de l’Union
européenne (UE), ouvrant ainsi la voie à de nouveaux investissements
industriels à Dunkerque, tout en continuant le combat pour la souveraineté
économique et industrielle de notre continent – un combat dans lequel nous devons jeter toutes nos forces,
si nous voulons continuer à
peser, et sur lequel l’instabilité pèse comme une épée de Damoclès.
Ces derniers jours, le plus grand cargo à voile du monde a accosté à
Saint-Nazaire. Il s’agit d’un bateau français, ce qui montre que l’innovation
rime avec décarbonation, que des solutions existent pour réussir la transition
écologique et qu’elles peuvent être françaises.
Et puisque nous parlons transport, l’A320 est devenu, depuis quelques jours,
l’avion le plus commandé au monde, et Airbus a annoncé agrandir son site de
Toulouse et accélérer les recrutements. C’est la preuve que nous pouvons encore
être des pionniers et que nous ne devons rien lâcher ; la preuve que la
transition écologique est possible, qu’elle avance, mais qu’elle ne pourra
jamais se faire si nous misons encore sur les blocages.
Ces derniers jours, un homme, Charlie Dalin, a confié son histoire, celle du
courage : il a gagné le Vendée Globe malgré un cancer. Dimanche dernier,
dans des milliers de communes en France, dans toutes nos circonscriptions, des
concerts et des marches ont eu lieu pour Octobre rose, pour s’engager contre le
cancer du sein.
Hier, à Évreux, une ville en liesse a célébré le ballon d’or d’Ousmane Dembélé.
Certains trouvent peut-être cela dérisoire : c’est pourtant la France.
C’est cela la France, celle qui, malgré les soubresauts politiques, travaille,
crée, recherche ; la France qui s’engage, qui partage ; la France qui
a peur, parfois qui s’insurge et se désole, c’est vrai, mais qui ne baisse
jamais la tête.
La France n’attend pas ses politiques pour vivre. Mais les Français attendent
de nous des réponses, des solutions, des actions. Ils attendent de nous des
actes !
Monsieur le premier ministre, vous tracez un chemin – il est étroit, nous le savons tous. Vous appelez à partager le pouvoir, à
écouter, à agir avec les Français, avec les collectivités, avec les partenaires sociaux,
avec les parlementaires. Partager le pouvoir, c’est ce pourquoi nous plaidons. Vous vous êtes donné une
mission : donner un budget
à la France, c’est aussi la nôtre. Assurer l’ordre, la stabilité dont le pays a besoin, c’est aussi notre volonté. Nous serons donc à vos côtés et aux côtés du gouvernement pour réussir.
Avec mon groupe parlementaire, avec mon parti, nous n’avons jamais rien
réclamé. Nous n’avons jamais tracé de ligne rouge, jamais exigé le
moindre poste, jamais jeté l’anathème sur quelque nom. Pourquoi ? Parce
que la seule chose que nous voulons, c’est que ça marche, même si parfois cela
doit nous coûter ; parce que ce qui compte à la fin, ce sont les Français,
les femmes et les hommes de notre pays, qui vivent aujourd’hui sans la
politique et qui n’attendent plus qu’une chose: qu’elle s’intéresse à nouveau à
eux.
Nous serons au rendez-vous. Alors, je n’ai qu’une chose à dire :
mettons-nous au travail ! Au travail pour un budget ! Au travail pour
réformer ! Au travail pour les Français !
Pierre Cazeneuve (député)
> Le RN et LFI, qui devraient se réjouir de la suspension de la réforme
des retraites qu'ils ont tant conspuée, porteront ensemble une motion de
censure jeudi. Car leur véritable projet, c'est le chaos. Et une victoire n’en
est jamais une tant qu’il reste quelque chose à brûler.
Prisca Thevenot (députée)
> Nous serons au rendez-vous du débat parlementaire. Alors, je n’ai
qu’une chose à dire : mettons-nous au travail ! Au travail pour un
budget. Au travail pour réformer. Au travail pour les Français.
Pieyre-Alexandre Anglade (député)
> Les batailles partisanes sont dérisoires face aux défis du pays. Quand
l’Europe et le monde avancent notre pays ne peut se payer le luxe de la
paralysie. Place à l’action et à la responsabilité à l’Assemblée.
Paul Midy (député)
> La clé de la croissance est
l'innovation. Plus de croissance c'est plus de ressources publiques et des
meilleurs salaires pour tous les Français. Nous serons attentifs dans les
débats budgétaires pour que l'innovation soit une priorité.
● MoDem
Marc Fesneau (député, président du groupe MoDem à l’Assemblée nationale)
> [Intervention à l’Assemblée suite au discours du Premier mnistre] Nous sommes ici par la seule volonté des
Français.
Ils ont voté, il y a seulement un an, et cette Assemblée nationale est
issue de leur vote, souverain. Ils ne l'ont pas fait contre leur gré ou à la
légère. Ils l'ont fait en pleine conscience, comme en témoigne le taux de
participation inégalé depuis des décennies lors de ces élections.
Ils l'ont fait pour envoyer deux messages, que cela plaise ou non à
certains ici :
Ils ont d'abord dit : nous ne voulons pas de l'extrême droite au
pouvoir.
Et ils ont dit aussi : vous avez tous échoué à nous convaincre - ceux
qui sont en place depuis 2017 comme ceux qui aspirent à gouverner. Ils ont donc
dit : entendez-vous pour faire mieux.
Cela ne satisfait personne mais cela s'impose à nous tous.
Et j'entends ceux qui réclament à longueur de tribune de faire revoter
les Français, espérant à chaque fois que ce vote leur soit favorable et, s'il
leur déplaît, continueront de le remettre en cause.
Et voici qu'à son tour, le Rassemblement national joint ses voix à
celles de la France insoumise, dans une forme de réflexe pavlovien, sautant sur
leurs fauteuils tels des cabris : « Censure, censure, censure », comme seule
réponse aux maux du pays. Abandonnant la stratégie de la cravate, pour celle de
la cravache, ils dévoilent ainsi leur vrai visage et deviennent les mêmes
agents d'instabilité que leurs collègues insoumis.
Mais le vote n'est pas une loterie et on ne continue pas à jouer jusqu'à
espérer gagner. Parce que ça n'est pas un jeu !
Respecter le vote, cela porte un nom et je sais que nous sommes nombreux
et majoritaires encore à chérir ce nom, ce mot, c'est celui de « démocratie
».
C'est le mot de démocratie…
Si l'on veut que notre assemblée soit respectée des Français, il faut
les respecter dans leur vote.
Car nous sommes condamnés à nous entendre plutôt qu'à nous opposer. Il y a pire
condamnation tout de même que celle d'avoir à chercher des compromis.
N'en déplaisent à ceux qui veulent le chaos et le conflit, c'est la
manière dont fonctionnent toutes les grandes démocraties. Et j'ai été heureux
déjà d'entendre des voix, à gauche et à droite, plaidant désormais pour le
compromis et abandonnant leurs lignes rouges comme nous le demandions depuis
des années. On a donc jamais tort d'avoir raison trop tôt.
Et ce n'est pas parce que les Français ont constitué cette assemblée
fragmentée qu'ils nous invitent par nos attitudes et nos décisions à nous
fracturer plus encore. Je crois au contraire qu'ils nous demandent de trouver
un point d'équilibre et une forme de stabilité.
Une assemblée qui se respecte et qui est respectée, c'est aussi une
assemblée qui respecte le pluralisme. Nous l'avons toujours défendu : il n'y a
pas de député de seconde zone, de seconde classe.
C'est donc égalité des droits mais c'est égalité aussi des devoirs -
c'est-à-dire que quand on est dans l'opposition, on n'est pas condamnés à
l'irresponsabilité pathologique.
Dans la série des devoirs, il y a aussi, quand on fait la loi, celui de
respecter la Constitution.
Et singulièrement, au moment où nous ouvrons le débat budgétaire, de
respecter l'article 40, sauf à s'exposer à une censure quasi automatique puis
venir se répandre sur la prétendue « République des juges ».
On ne teste pas la Constitution. On la respecte. On ne la choisit pas à
la découpe. On l'accepte. Sur les lois qui traitent de la sécurité ou des
libertés publiques comme sur les lois de finances.
Et c'est dans ce cadre, celui du budget, que le Premier ministre a
indiqué faire le choix de ne pas recourir à l'article 49, alinéa 3, de notre
Constitution.
C'était une demande d'un certain nombre de groupes, notamment à gauche.
Nous n'y étions pour notre part pas favorables sur la question du budget. Mais,
par esprit de compromis, monsieur le Premier ministre, nous n'en n'avons pas
fait une ligne rouge.
Et donc, sans 49.3, la liberté des parlementaires, vous l'avez rappelé,
est immense sur le budget. Mais leur responsabilité doit l'être tout autant. Et
je mets en garde sur l'exercice d'une liberté qui ne s'accompagnerait pas de
cet esprit de responsabilité.
Jusqu'alors, on s'accommodait, reconnaissons-le, assez facilement du
49.3 tant il permettait de :
- dire n'importe quoi ;
- de faire n'importe quoi ;
- de ne rien assumer ;
- de pouvoir se parer de la vertu de certaines victoires avec
amendements démagogues, en sachant que le Gouvernement assumerait, lui, de ne
pas les garder.
Sans 49.3, personne ne pourra se défausser. Tout le monde devra assumer.
Les démagogues et populistes de cette assemblée vont s'en donner à cœur joie,
je vous le promets, et nous, démocrates, vous nous trouverez, et j'espère que
nous y serons nombreux, sur le chemin de la responsabilité.
Et vous monsieur le Premier ministre, vous aurez aussi une
responsabilité car vous aurez pour mission avec le Gouvernement de permettre
l'émergence de compromis et de les faire respecter dans la navette
parlementaire.
Il faudra une majorité de députés, de gauche, de droite et du centre
dans cet hémicycle, pour ne pas laisser libre cours à une folie budgétaire qui
rendrait in fine le budget invotable et nous livrerait pieds et poings liés aux
marchés. Souvenez-vous de Liz Truss, ce sont les marchés, au final qui lui ont
dicté sa politique et je ne souhaite pas cette humiliation pour notre pays.
Sans sursaut de notre part pour adopter un budget avant le 31 décembre,
c'est l'impuissance généralisée qui nous guette.
Cette Assemblée veut défendre les services publics ? Nous aussi.
Alors nous avons la responsabilité de nous entendre et de leur trouver
un financement et un budget pour éviter de les paralyser comme l'an dernier.
Cette Assemblée considère que les entreprises sont vitales pour l'emploi
et que les associations sont vitales pour la cohésion sociale ?
Alors nous avons la responsabilité de leur donner de la visibilité sur
le cadre dans lequel elles vont évoluer.
Cette Assemblée veut défendre les collectivités locales ? Alors nous
avons la responsabilité là aussi de nous entendre et leur donner des
assurances, pour qu'elles puissent voter leur budget et investir dans les
prochaines semaines.
Cette Assemblée veut améliorer le pouvoir d'achat des Français ?
Alors nous avons la responsabilité de nous entendre pour réduire les
incertitudes, faire baisser les taux d'intérêt, et réduire le poids des
contributions sociales sur le seul travail.
Car depuis plus d'un an, l'instabilité a une conséquence directe. Sur
les Français d'abord : des familles ne peuvent pas concrétiser l'achat d'une
maison, des entrepreneurs ne peuvent pas investir et donc créer des emplois.
Sans parler des doutes dans les esprits de nos partenaires européens et
mondiaux et des appétits prédateurs de ceux qui pensent pouvoir en tirer profit
et qui jouent la déstabilisation et l'ingérence, vous l'avez rappelé monsieur
le Premier ministre. Cette instabilité sert les ennemis de la France. Et ils
ont des complices manifestement jusque dans cet hémicycle.
Cette instabilité et incapacité à nous entendre a un cout. La seule
hausse du taux d'intérêt depuis un an, c'est une facture de 8 milliards d'euros
au bout de 2 ans, 20 milliards d'euros la cinquième année. Rendez-vous compte,
les budgets des ministères de la justice et de l'agriculture réunis !
En aggravant à chaque fois la situation budgétaire, chacun de ces
épisodes nous contraint à devoir faire des choix encore plus difficiles,
nourrissant à leur tour le populisme et l'instabilité politique.
Des élections anticipées, qu'elles soient législatives ou
présidentielles, loin de mettre un terme à ce cercle vicieux, ne feraient que
le renforcer.
Nous devons, dès maintenant — pas dans six mois, pas dans dix-huit —,
donner une perspective à la France. Et je crois que nous en avons les moyens.
C'est pourquoi, dans mon groupe, nous croyons que c'est le moment du
ressaisissement.
Il fut un temps il y avait une expression : « à l'ouest, rien de nouveau
». « A l'est et à l'ouest tout est nouveau ». Le monde avance, nos compétiteurs
ne nous attendent pas. Eux, ils se réforment. Eux, ils cherchent du consensus.
Et eux, ils se préparent, y compris au pire.
C'est donc le moment de démontrer les vertus d'un Parlement fort et
libre.
Oui, c'est le moment de dire aux Français que le compromis, c'est aussi
— et, au vu du contexte, j'ai envie de dire « surtout » — reconnaître ses
désaccords et savoir les dépasser. Personne n'a à renier ses convictions mais
tout le monde doit faire un pas.
Notre enjeu est donc de trouver, avec méthode, les plus grands
dénominateurs communs.
Et puisque, après la taxe Zucman, la remise en cause de la réforme des
retraites semble être un élément central du devenir du pays et de votre
Gouvernement monsieur le Premier ministre, j'en dirai ici un mot.
Au groupe Les démocrates, nous ne refusons pas, par principe, de rouvrir
ce débat. Il l'avait d'ailleurs été par François Bayrou au printemps dernier et
nous avions proposé et voté une clause de revoyure. Et nous avions demandé de
mieux associer les partenaires sociaux.
Un compromis est possible pour retrouver de la stabilité dans le pays,
mais sans travestir la réalité.
Suspendre cette réforme, c'est un pari ou un risque pour nos finances
publiques, c'est un risque pour la pérennité de notre modèle social. Et nous
devons aux jeunes, aux générations futures, de ne pas fermer les yeux sur ces
risques et d'accompagner toute décision, comme vous l'avez dit monsieur le
Premier ministre, d'un esprit de responsabilité.
Nous devons aux jeunes et aux Français dans leur ensemble des réponses
et nous n'assumerons pas les mensonges et la facilité, parce que ces
mensonges-là, un jour ou l'autre, ils nous rattraperaient.
Comptez sur nous pour continuer de dire la vérité et nous baser sur le
réel, notre seule véritable ligne rouge.
Nous voulons aussi que ce budget puisse être celui de la justice fiscale
que notre groupe défend avec une forme de continuité depuis 2017. Peut-être,
monsieur le Premier ministre, l'année 2025 marquera enfin le couronnement de
nos efforts, en tout cas, je le souhaite. Parce qu'il n'est pas juste de
considérer le capital utile à notre économie comme la rente, qui bénéfice trop
souvent des effets d'optimisation ou d'aubaine fiscale.
On ne règle jamais, ceci étant, un problème en désignant un bouc
émissaire que ce soient les riches, les immigrés, les chômeurs, les
fonctionnaires ou les retraités, même si c'est parfois attendu par ses propres
électeurs.
Sachons distinguer les choses, et trouvons les moyens de cibler la rente
sans mérite et sans effort qui échappe encore trop souvent à l'impôt. Les plus
fortunés doivent prendre leur part de l'effort. C'est une question de civisme.
La justice, c'est aussi défendre la France du travail. Et c'est pourquoi
nous pensons effectivement qu'il est urgent de rapprocher sur la feuille de
paie le salaire net du salaire brut.
C'est nécessaire si nous voulons redonner du pouvoir d'achat aux
Français. C'est essentiel si nous voulons effectivement relancer la production
nationale.
Sans évoquer tous les sujets, il est en est un, vous l'avez évoqué, qui
est essentiel : c'est celui de la simplification. Il faut absolument accélérer
l'effort.
Car l'empilement des normes coûte cher, très cher et tous les rapports
en conviennent. C'est de la dépense publique supplémentaire, sans effet sur la
qualité de vie. C'est de la dépense privée aussi, pour les ménages et les
entreprises et, à la fin, des emplois qui disparaissent ou ne sont pas créés.
Les démocrates seront force de proposition pour le budget que vous
annoncez.
Et nous le ferons pour d'autres sujets : la santé, dont les Français
parlent tous les jours, réindustrialisation, l'agriculture, la transition
énergétique, les services publics, le logement, l'éducation. Je crois qu'il
existe dans cet hémicycle une majorité pour avancer, pas à pas.
Personne ne sort parfaitement satisfait ni victorieux d'un compromis.
Mais, si nous y mettons de la bonne volonté, si nous acceptons majoritairement
le réel, je suis certain que la France et les Français en sortiront grandi. Et
pour nous, c'est bien cela l'essentiel.
Erwan Balanant (député)
> [Proportionnelle] Nous estimons que le moment est opportun avec la
mise en place d'un nouveau gouvernement. Au-delà des enjeux économiques et
budgétaires, qui sont certes importants, la France traverse avant tout une
crise politique profonde.
Pour éviter que le fossé ne se creuse davantage entre les citoyens et les
responsables politiques, il faut changer nos pratiques. Or, un changement de
pratique est impossible sans un changement de mode de scrutin.
Le système majoritaire actuel, où celui qui gagne prend tout et celui qui perd
s'oppose à tout, mène au blocage. Il faut en sortir. Cette proposition de loi
est le fruit d'un travail mené depuis septembre, réunissant chaque semaine des
députés de groupes très différents : EPR, Écologiste, GDR, PS et MoDem. Le fait
que nous soyons parvenus à un texte commun par le dialogue et le compromis,
loin de toute pression électorale, prouve que c'est possible. (…)
Nous proposons un système mixte, inspiré de ce qui fonctionne chez nos voisins
allemands ou danois. Concrètement, 60 % des députés resteraient élus au scrutin
majoritaire dans des circonscriptions, dont le nombre serait réduit. 40 % des
députés seraient issus de listes nationales.
Le jour du vote, l'électeur aurait deux bulletins : un pour le candidat de sa
circonscription et un pour une liste nationale. Ce système a le double avantage
de conserver un ancrage territorial fort pour les élus tout en assurant une
représentation juste des grands courants politiques nationaux grâce à la
compensation par la liste nationale.
C'est une solution de compromis. Personnellement, j'étais plutôt favorable au
modèle de 1986, les écologistes penchaient pour des listes régionales... Mais
les simulations et le travail en commun nous ont convaincus que ce modèle mixte
est la meilleure solution. (...)
Le but est que chaque force politique défende ses idées clairement devant les
électeurs. Ensuite, comme personne ne pourrait gagner seul, le compromis
deviendrait une obligation pour gouverner. Cela mettrait fin aux alliances
électorales forcées ou contre-nature que le scrutin majoritaire impose.
Un parti pourrait alors s'allier avec un autre sur un sujet précis où leurs
idées convergent, même s'ils sont dans l'opposition sur d'autres thèmes.
Il s'agit de redonner sa légitimité à chaque courant politique. (…)
Je pense sincèrement que c'est une des clés pour sortir de la crise politique. Il
faut rappeler un fait simple : la France est la seule démocratie européenne à
conserver un scrutin purement majoritaire. Tous nos voisins ont une forme de
proportionnelle et parviennent à mener les grandes réformes nécessaires.
On ne peut pas rester le pays où tout est bloqué. Nous espérons un signe du
Premier ministre lors de sa déclaration de politique générale.
Le théorème est simple : les pratiques politiques sont directement liées au
mode de scrutin. Pour changer les pratiques, il faut changer le scrutin.
Louise Morel (députée)
> [Intervention à l’Assemblée] Lundi dernier, cela faisait 737 jours
depuis le 7 octobre 2023. 737 jours depuis ce jour d’horreur où plus de 1 500
personnes ont été tuées, dont 51 Français, et où plus de 250 otages israéliens
ont été enlevés. 737 jours d’angoisse et d’attente pour leurs familles, et pour
tous ceux qui refusent d’oublier. Mais aussi tant d’attente pour les proches
des prisonniers palestiniens, suspendus eux aussi à l’espoir de nouvelles des
leurs.
Le lundi 13 octobre dernier, une lueur d’espoir s’est enfin
concrétisée : les visages, les retrouvailles, les étreintes des vingt derniers
otages libérés ont ému le monde entier.
Je veux rendre hommage à toutes celles et ceux qui ont rendu
cela possible : à votre action diplomatique, Monsieur le ministre, à celle du
Président de la République, à nos armées, à nos associations humanitaires qui
œuvrent chaque jour pour la paix et pour la vie.
Je veux aussi saluer le plan de paix proposé par les
États-Unis d’Amérique, soutenu par l’Égypte, le Qatar, la Turquie, les Émirats
arabes unis et plusieurs pays européens — dont la France —, et qui a permis
d’accélérer la libération des otages.
Mais nous ne devons rien oublier : rien des mois d’horreur à
Gaza, rien des familles brisées, des enfants tués, de la famine orchestrée,
rien de ce que le droit international devra juger.
Face à ces tragédies, le multilatéralisme et la force du
droit demeurent nos meilleurs remparts contre la barbarie.
Si nos institutions internationales doivent être plus
rapides, plus fermes, nous ne devons pas renoncer à cet idéal : faire primer le
droit sur la loi du plus fort.
► Autres
● Organisations centristes
♦ Renew Europe
(Députés français du groupe centriste au Parlement européen)
Valérie Hayer (députée, présidente)
> « Le Gouvernement proposera, nous débattrons, vous
voterez. » Sébastien Lecornu donne une nouvelle responsabilité aux
parlementaires nationaux. Ils ont désormais l’avenir du pays entre leurs mains.
De cette terrible crise politique peut sortir le meilleur. J’y crois.
Nathalie Loiseau (députée)
> Ouvrons les yeux : avec les MAGA et les trumpistes de
bazar que nous avons en Europe, la liberté de la presse est en danger.
● Personnalités
centristes
Sarah El Hairy (haut-commissaire à
l’Enfance)
> Dans les temps de vie de l’enfant, la mobilité est un enjeu
important. Pourtant, l’enfant est l’angle mort des politiques de mobilité. Mon
objectif est de remettre tous les acteurs concernés, professionnels de la
mobilité, parents, urbanistes, au cœur de la question : comment on bâtit
des mobilités à hauteur d’enfants, de la maternelle au lycée. Et ça va bien
plus loin que le transport scolaire, celui que l’on connait et maîtrise le
mieux. Il y a plein d’autres nouveaux usages. Or, dans la manière de concevoir
les services de transport, on s’est concentré sur les besoins des adultes, et
des actifs en particulier avec le fameux trajets domicile-travail.
Les enfants sont rarement considérés comme des usagers à part entière, alors
qu’ils représentent chaque jour des millions de déplacements : les trajets
scolaires et extrascolaires, mais il n’y a pas que ça. Se posent de plus en
plus la question des déplacements des enfants en garde alternée lorsque les
parents sont séparés. L’offre et l’accessibilité est insuffisante, la
signalétique pensée pour les adultes, les cheminements vélos aussi.