mardi 18 août 2020

Vues du Centre. Bayrou, commissaire au plan, un pacte perdant-perdant!?

Par Jean-François Borrou

François Bayrou et Emmanuel Macron
Dans cette rubrique, nous publions les points de vue de personnalités centristes qui ne reflètent pas nécessairement ceux du CREC. Ces points de vue ont pour but d’ouvrir le débat et de faire progresser la pensée centriste.
Jean-François Borrou est le pseudonyme d’un journaliste proche des idées centristes.

On ne comprend pas quel est l’intérêt politique de voir François Bayrou nommé à la tête du Commissariat au plan, décision qui serait dorénavant définitivement actée comme l’indique l’ensemble des médias.

J’ai dit intérêt politique.

Parce qu’à l’inverse, l’intérêt politicien, lui, est bien là d’un côté comme de l’autre.

Pour Emmanuel Macron, il s’agit de neutraliser un allié parfois encombrant et souvent critique en vue de 2022 en l’empêchant d’être un électron libre aux propos débridés.

Même s’il n’est pas directement rattaché au Premier ministre mais rendra compte uniquement au Président de la république sa parole devra désormais être contenue et plus dans le contrepoint voire dans la controverse comme cela a été trop souvent le cas jusqu’à présent.

Le chef du MoDem dans un cadre limité mais dans une fonction prestigieuse, voilà donc la solution trouvée pour qu’il demeure dans les clous si ce n’est dans la ligne.

Pour François Bayrou, on comprend bien que sa fonction de maire de Pau est beaucoup trop étriquée pour ses ambitions qui, rappelons-le, sont de diriger le pays.

On le savait depuis le jour où il est devenu le premier édile de la cité béarnaise.

Supplanté par Macron, dans l’impossibilité d’être premier ministre ou d’occuper un poste important dans le gouvernement (qui n’aurait jamais été assez important pour lui, selon lui) du fait de ses démêlées avec la justice, cette direction de la prospective du pays lui convient parce qu’il peut tenter de poser son image de sage qu’il tente par tous les moyens d’imposer dans les médias et l’opinion publique depuis trois ans.

Reste que si ce deal entre Emmanuel Macron et François Bayrou est un pari qui peut être payant pour les deux, il peut être également un pacte perdant-perdant qui pourrait rejaillir sur les chances du Centre en 2022 tant pour la présidentielle que pour les législatives.

Car si Bayrou veut outrepasser sa mission, il empiètera inévitablement sur les plates-bandes de Jean Castex voire sur celles d’Emmanuel Macron.

Et cette éventualité est loin d’être un cas de figure improbabble…

A l’inverse, si ce commissariat n’est qu’un gadget où il sera placardisé, nul doute qu’il ne le supportera pas et le fera savoir.

Caser Bayrou n’est pas une mince affaire.

Et pour le centriste trouver chaussure à son pied ne l’est guère plus.

D’où un danger latent pour la majorité présidentielle.

 

Jean-François Borrou

 

 

Présidentielle USA 2020. Ouverture de la convention démocrate qui va désigner le ticket centriste Biden-Harris pour l’élection du 3 novembre


Le 17 août, s’est ouverte la Convention démocrate qui va désigner le centriste Joe Biden comme candidat du parti à la présidentielle du 3 novembre prochain face à Donald Trump et avaliser son choix de Kamala Harris comme sa potentielle vice-présidente.

Une convention qui se terminera le 20 août et qui ne se tient pas lieu dans un lieu spécifique (la ville de Milwaukee devait l’accueillir) comme d’habitude – crise sanitaire de la covid19 oblige – mais sur internet.

Elle a débuté avec des interventions fortes de plusieurs personnalités et simples citoyens dont celle de Michelle Obama, l’ex-première dame du pays de 2009 à 2016.

Celle-ci a délivré un discours particulièrement remarqué où elle a d’abord expliqué que:

«Donald Trump n'est pas le bon président pour notre pays. Il a eu plus qu'assez de temps pour prouver qu'il peut faire le travail, mais il en est clairement incapable. Il ne peut tout simplement pas être celui dont nous avons besoin pour nous.»

Remarque qu’elle a conclu par la formule «c'est comme ça», celle-là même que Trump avait utilisé de manière totalement indécente quand on l’avait interrogé sur l’épidémie de la covid19, démontrant son inintérêt et son manque de compassion pour tous les Américains malades ou morts à cause du coronavirus.

Et elle a prévenu:

«Ce n'est pas le moment de refuser de voter en signe de protestation ou de jouer à voter pour des candidats qui n'ont aucune chance de gagner. (…) Si vous pensez que les choses ne peuvent pas empirer, croyez-moi, ils peuvent et ils le feront si nous ne changeons pas les choses lors de cette élection. »

Puis de lancer un appel à voter «comme si nos vies en dépendaient».

A noter que plusieurs républicains sont intervenus lors de cette première journée comme l’ancien gouverneur de l’Ohio John Kasich pour appeler à voter Biden afin d’empêcher, selon eux, Trump de détruire le pays et la démocratie.

Bernie Sanders, le socialiste (et non membre du Parti démocrate) opposé à Biden lors des primaires est également intervenu pour demander à ses soutiens de voter pour le candidat démocrate.

On se rappelle de son peu d’empressement dans son soutien à Hillary Clinton en 2016 ce qui a certainement joué dans la défaite de la centriste face à Trump.

Nombre d’orateurs sont attendus d’ici au 20 août où Joe Biden conclura la Convention après un discours d’acceptation de sa nomination.

 

 

L’Editorial du CREC. La principale menace sur la démocratie vient… des Etats-Unis!

Tous les jours, Donald Trump attaque la démocratie.

Tous les jours il bafoue les règles démocratiques.

Tous les jours il se moque des valeurs et des principes démocratiques.

Tous les jours il prétend que la prochaine élection présidentielle (qu’il devrait perdre) sera corrompue et malhonnête.

Tous les jours il prétend que l’on ne pourra pas connaitre qui a véritablement gagné.

Tous les jours il fait en sorte de prendre des décisions et de supprimer des budgets pour que les élections ne puissent se tenir correctement.

Et il vient d’affirmer à nouveau que s’il perd cette élection c’est parce qu’elle aura été «truquée».

Tous les jours il refuse de lutter efficacement contre la covid19 car cela lui donne la possibilité de faire pression pour annuler les élections – ce qu’il a déjà proposé – au motif qu’il est impossible de les organiser pendant une telle crise épidémique qu’il a lui-même permis d’être aussi paroxystique.

Rappelons que du fait de son inaction, il l’a transformée en catastrophe sanitaire.

Deux chiffres: les Etats-Unis représentent 3% de la population mondiale et recensent 25% du total des morts dans le monde dus à la covid19!

Et si l’on trouve le vaccin avant le scrutin du 3 novembre, il pourra prétendre que c’est grâce à lui et faire oublier les milliers de morts dont il est responsable et profiter de l’éventuelle dynamique électorale en sa faveur que cette découverte créera.

Donald Trump agit comme un ennemi de la démocratie et un voyou.

Donald Trump est le président des Etats-Unis.

C’est du jamais vu dans le berceau de la démocratie moderne.

Pour moins que cela, un tel personnage aurait été destitué et mis en prison.

Mais ce n’est pas le cas.

Oui, la principale menace sur la démocratie vient des Etats-Unis.

Une affirmation qui semble plus qu’improbable, une affabulation venue de cerveaux dérangés.

Non pas que Trump soit plus dangereux que le chinois Xi, le russe Poutine, le turc Erdogan, le vénézuélien Maduro et autres autocrates et dictateurs de la planète mais il est à la tête d’un des phares du monde libre, première puissance mondiale et sa victoire fragiliserait, plus qu’en 2016, la démocratie dans le monde entier, laissant une faille béante dans laquelle ne manqueront pas de s’engouffrer tous ses ennemis intérieurs et extérieurs.

Telle est donc la réalité du moment en espérant qu’elle ne sera pas celle de demain, celle du 4 novembre au matin.

Oui, nous sommes en présence d’un personnage d’une extrême dangerosité pour la démocratie et pour qui vont voter (ou vont soutenir toutes ses décisions même celle d’annuler les élections) des millions d’Américains qui, pour une grande partie d’entre eux, le suivent les yeux fermés et les oreilles bouchées.

Voilà qui fait froid dans le dos et rappelle des précédents dans l’Europe du XX° siècle que personne ne veut revivre.

Oui, en tant que centristes, humanistes et démocrates nous sommes plus qu’inquiets de ce qui se passe actuellement aux Etats-Unis et nous sommes étonnés qu’il y ait si peu de réactions et de prises de conscience en France.

Oui, ce serait un véritable séisme apocalyptique si Trump parvenait à ses fins en détruisant la démocratie américaine.

Et oui nous ne pensons pas être trop alarmistes ou fantasmagoriques mais justes lucides.

Comme le représentant de Californie, Adam Schiff, celui qui mena avec succès la procédure de destitution de Trump à la Chambre des représentants avant la parodie de procès au Sénat dominé par les radicaux républicains qui acquitta Trump:

«Y a-t-il jamais eu un président aussi dénué de scrupules, si nu dans son ambition de voler une élection? Trump est tellement terrifié de perdre qu'il va détruire tout le système avec lui. Notre service postal. Nos élections. Notre démocratie même. Sa dépravation est sans limite.»

C’est pourquoi la mobilisation doit être puissante et sans aucune faiblesse.

Parce que, comme le dit l’ancien président Bill Clinton, «s'il y a jamais eu un moment pour protéger cette belle expérience que nous appelons une démocratie, c'est maintenant.»

Et l’ancien candidat à la candidature démocrate lors des primaires, Pete Buttigieg, pose la question ultime en jeu lors du scrutin du 3 novembre prochain: «la démocratie est-elle sérieuse ou pas?»