mardi 26 mai 2009

Une Semaine en Centrisme: Elections européennes: François Bayrou joue aussi son avenir élyséen le 7 juin prochain

A force de vouloir personnaliser le scrutin européen du 7 juin prochain, et d’en faire une sorte de référendum «pour ou contre Nicolas Sarkozy», François Bayrou a réussi à faire de celui-ci un test «pour ou contre François Bayrou» à l’Elysée en 2012. En effet, en s’investissant aussi massivement dans ce scrutin à la proportionnelle (sensé montrer la force réelle des différentes formations politiques et de leurs leaders) après ses piteuses défaites aux scrutins législatifs et municipaux, François Bayrou joue aussi une partie de son avenir lors des élections européennes. S’il fait moins bien que le score de l’UDF en 2004 (11,87%), son avenir élyséen sera largement entamé. Mais quid s’il fait moins que son score à la présidentielle (18,57%) alors que les sondages donnent, pour l’instant, aux listes du Mouvement démocrate entre 10% et 14%? François Bayrou prétendra bien sûr que l’on ne peut comparer un scrutin européen avec un scrutin présidentiel. Et il aura raison… en partie. Car c’est bien lui qui a fait en sorte d’utiliser ce scrutin contre Nicolas Sarkozy et pour lui ainsi que pour son image de possible Président de la république. C’est encore lui qui sautera avec délectation sur le score des listes de la Majorité présidentielle s’il est mauvais pour montrer que c’est un désaveu de Nicolas Sarkozy et de sa politique. Dès lors, l’on est en droit de faire la même chose pour les résultats de son parti. Ainsi, si le score du Mouvement démocrate est en-dessous de son score de la présidentielle, cela montrera qu’il n’est pas capable d’attirer sur son parti, sa création personnelle toute dévouée à son ambition et rien qu’à son ambition, les votes qui se sont portées sur lui en 2007. Cela montrera, également que ce score de 2007 est peut-être déjà daté ou que certains électeurs de droite et du centre ne le suivent plus alors que les électeurs de gauche ne sont pas convaincus de sa soudaine conversion social-démocrate. Sans oublier qu’il se retrouvera avec une formation largement derrière les deux grands partis, ce qui sera un handicap pour former une majorité présidentielle s’il venait à être élu en 2012. En revanche, si son score se rapproche de celui qu’il a atteint lors du premier tour de la présidentielle, alors l’avenir pourrait s’avérer radieux car cela démontrera que sa stratégie de s’éloigner de la droite et de sa rapprocher de la gauche dans une démarche d’opposant systématique à Nicolas Sarkozy tout en jouant de l’ambiguïté dans ses alliances avec la gauche (pas de signature d’accord de gouvernement en 2012 mais, déjà, de nombreuses municipalités cogérées avec le Parti socialiste) est une stratégie gagnante. Restera, tout de même, à François Bayrou à se dévoiler nettement plus sur ses intentions pour amener le gros des troupes de gauche à voter pour lui. Un exercice délicat car il perdra sûrement à ce moment là une grosse partie des électeurs du centre qui lui font encore confiance et, surtout, de droite. Un grand écart que François Mitterrand n’a été capable d’accomplir et il a du rejoindre le Parti socialiste pour l’emporter en 1981. Est-ce la dernière phase de la stratégie de François Bayrou? A moins que sa volonté soit d’absorber le Parti socialiste, en tout cas ses éléments sociaux-démocrates. Et le centre dans tout cela? Bonne question, très bonne question…

Alexandre Vatimbella & Jean-Louis Pommery

Directeur du CREC & Directeur des études du CREC

Actualités – France – La permanence du Centre selon Les Echos

Voici la chronique de Favilla parue dans le quotidien Les Echos et consacrée à la «Permanence d'un centre»

«A défaut de passionner les électeurs, les élections européennes intéressent les politologues. D'un sondage à l'autre, en effet, l'UMP semble calée sur un gros quart des suffrages (27-28%), le PS sur un gros cinquième (21-22 %). Comme dans les recettes approximatives des cocktails, les deux grands partis font ensemble environ une moitié des voix. Au sein de l'autre moitié s'inscrit le « Centre ». Ce terme imprécis a toujours désigné cette notable catégorie d'électeurs qui ont en commun d'être plus réformistes que la droite, plus modernes que la gauche, qui refusent de s'enrégimenter, pratiquent à un haut degré l'esprit d'examen, n'aiment pas les solutions simplistes ou extrêmes, font confiance à la méthode expérimentale, et attachent une importance primordiale au contenu. S'y ajoutent naturellement quelques indécis et quelques amoureux impénitents de l'improbable « troisième voie », mais qui ne font pas l'essence du centre français.

Tel qu'en lui-même, son noyau a toujours représenté environ 13 % des suffrages (score des « réformateurs » de Lecanuet-Servan-Schreiber en 1973), momentanément majoré par l'ancienne UDF. C'est, par coïncidence, celui qu'affectent les sondages au Modem aujourd'hui. Son leader affecte de voir une percée personnelle dans ce qui ne pourrait être qu'une permanence de la statistique. On peut lui reconnaître en revanche le mérite de l'avoir maintenu, malgré une UMP élargie au centre et un PS à peu près libéré de son socialisme doctrinaire. Flairant ce danger, il a décidé de suppléer à ces risques centrifuges par l'agressivité à l'égard de Nicolas Sarkozy. Mais il peine à répondre clairement à la demande de contenu, qui fait la principale vertu du centre. Martine Aubry l'a bien perçu qui se pose en « première proposante » face à ce « premier opposant » auto-désigné.

Mais des anciennes marges vertes de la gauche se lève aussi, aujourd'hui, une liste Europe Ecologie. L'indépendance d'esprit de Daniel Cohn-Bendit la libère des adhérences socialistes, son authentique dimension européenne la qualifie plus que d'autres pour cette consultation, son projet pour une autre croissance intéresse les réformateurs et séduit la jeunesse. Si sa percée pouvait survivre aux européennes, et avec un score du même ordre que celui du Modem, il pourrait inaugurer une politique française à deux centres, dont le nouveau serait plus chargé de contenu.»

© 2009 Les Echos