lundi 12 mars 2007

Actualités du Centre. Présidentielles 2007 Sondage TNS SOFRES : Bayrou à 23 %

Les trois principaux candidats à l'élection présidentielle dans un mouchoir de poche au premier tour: Nicolas Sarkozy est crédité de 27% d'intentions de vote (en baisse de quatre points), Ségolène Royal de 25,5% (inchangé) et François Bayrou de 23% (plus 4,5 points), selon un sondage TNS-SOFRES pour "Le Figaro", RTL et LCI rendu public dimanche soir. Le candidat du Front national Jean-Marie Le Pen arriverait en quatrième position avec 12% des intentions de vote (inchangé), alors que tous les autres candidats seraient sous la barre des 5%.L'institut de sondage a interrogé son échantillon sur un deuxième cas de figure: un premier tour de la présidentielle sans Jean-Marie Le Pen. Dans cette hypothèse, le candidat de l'UMP obtient 30% d'intentions de vote, la candidate socialiste 26,5% et le candidat de l'UDF 25%. Tous les autres candidats seraient sous la barre des 5%.
Au deuxième tour, le candidat de l'UMP remporterait l'élection avec 52% d'intentions de vote (moins deux points), contre 48% à la candidate socialiste (plus deux points).
Interrogés sur le report de leur vote, les électeurs de François Bayrou du premier tour voteraient au second tour à 43% pour Nicolas Sarkozy et à 37% pour Ségolène Royal, mais 20% d'entre eux choisiraient l'abstention, le vote blanc ou le vote nul ou ne se prononcent pas.
Quant aux choix des électeurs, 79 % des électeurs de Jean-Marie Le Pen déclarent qu’ils ne changeront pas d’avis devant ceux de Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal à plus de 60 %. En revanche, ceux de François Bayrou ne sont que 39 % dans ce cas là.
(Sondage réalisé par téléphone les 7 et 8 mars auprès d'un échantillon national de 1.000 personnes représentatif de l'ensemble de la population âgée de 18 ans et plus / méthode des quotas / ± 3 points de marge d’erreur)

Une Semaine en Centrisme. Présidentielles 2007 - La "mue radicale" de François Bayrou

Démocrate-chrétien dans l’âme et dans ses prises de positions passées, François Bayrou, après un recentrage « laïc » est devenu, le temps de l’élection présidentielle un radical dans l’acceptation politique du terme, c’est-à-dire un centriste de gauche héraut de la république laïque et égalitaire avec une forte volonté  de donner la priorité à « l’instruction publique » et à faire triompher l’émancipation du peuple par cette fameuse « raison radicale ». Son hommage appuyé à Jacques Chirac et à son discours d’adieu, rappelant qu’il était en phase avec les « valeurs » défendues par le Président de la république dont tous les observateurs connaissent son penchant radical, en est une énième preuve…
Cette conversion radicale ressort de la plupart de ses prises de parole mais aussi de son nouveau livre « Projet d’espoir ». Tout dans le discours du candidat et dans son « projet-programme » respire le radicalisme. Pourquoi ? Sans doute parce que François Bayrou sait que des positions démocrates-chrétiennes n’ont que peu de chances de trouver une majorité en France. De même, le Centrisme est une idéologie de la réconciliation et François Bayrou a senti qu’il fallait prendre le parti des « sans grades » dans une « démocratie de la victimisation » où les victimes sont devenus les nouveaux héros et où tout le monde craint de se retrouver en bas de l’échelle à cause de « forces obscures » mal identifiées mais qui viennent, selon les démagogues, d’une « mondialisation » défendue par les « élites » et notamment les « médias », ceux qui ont soutenus le « oui » au référendum, ceux qui fricotent avec la gauche caviar, les people et les « ultra-riches du CAC 40 ». Sans s’engager jusqu’à ces extrêmes, François Bayrou a déjà stigmatisé les patrons et les médias, par exemple.
Si les idées centristes n’ont que peu à voir avec l’union nationale, ce n’est pas le cas du radicalisme qui s’est positionné, depuis sa création au XIX° siècle dans la foulée du radicalisme britannique, dans la défense de la démocratie mais surtout de la République en prônant l’union de tous les républicains contre les extrêmes de gauche et de droite. Un radicalisme rejeté au fil des ans et, rappelons-le, malgré lui au centre mais qui n’est pas du Centre et qui garde sa connotation de gauche sauf pour les opportunistes qui l’ont rejoint des années 1970 à nos jours. Le Radicalisme n’est pas le Centrisme car il s’est toujours situé à gauche (à part les radicaux valoisiens d’aujourd’hui qui semblent un ovni politique) et que si les radicaux se sont retrouvés au centre c’est par hasard et par l’évolution des forces politiques et non par un positionnement pensé sauf, peut-être, à l’époque où Jean-Jacques Servan-Schreiber en était le président au début des années 70 et la tentative du Mouvement Réformateur avec les amis de Jean Lecanuet.
D’où la question subsidiaire que cette conversion radicale entraîne : François Bayrou est-il un homme de Droite avec un projet de Gauche ou un Centriste avec un projet centriste ? Nous concevons bien que cette question est quelque peu politiquement incorrect au beau milieu d’une élection présidentielle de la part d’un centre de recherche sur le Centre et le Centrisme. Mais, justement, nous sommes un centre de recherche et non un parti politique ou des militants de ce parti. Notre volonté est d’étudier, de faire connaître et de populariser les idées centristes. Et si nous parlons de François Bayrou, c’est qu’il est le président d’un parti qui se proclame centriste depuis sa création en 1978 et qui a toujours réaffirmé son ancrage dans cette famille politique. D’autant que l’homogénéité de l’UDF autour des idées centristes s’est, a priori, renforcée depuis que seul un  noyau dur est demeuré dans le parti et que d’autres, dont des formations comme le Parti Radical Valoisien, l’ont quitté.
Depuis 1998 et plus encore 2002 voire 2005 avec le Congrès de Paris à la Mutualité, l’UDF s’est repositionnée comme un parti de plus en plus indépendant de la droite pour se positionner au centre de l’échiquier politique. Ce repositionnement recelait une véritable chance pour les idées centristes galvaudées et souvent caricaturées comme un simple opportunisme qui permettait d’attendre de quel côté le vent tournait.
Or, la démarche de François Bayrou a, malheureusement, un drôle de goût de « revenez-y » en la matière. Après avoir courageusement mis l’UDF vers une autonomie et une liberté, il a décidé d’utiliser ce nouveau positionnement pour une unique ambition personnelle. Bien sûr, nous ne sommes pas nés de la dernière pluie et nous savons que l’élection présidentielle en France se joue sur une image et quelques prises de position difficilement compatibles avec une pensée politique cohérente. Ni Charles de Gaulle, ni François Mitterrand, ni Valéry Giscard d’Estaing n’ont évité ce grand écart. Néanmoins, le « tournant à gauche » dénoncé en public par la plupart des centristes sinon historiques mais de longue date, d’André Santini à Simone Veil (de nombreux autres le faisant en privé) et un vide programmatique assourdissant dont la seule mesure vraiment forte, l’exonération des charges pour deux emplois créés par les entreprises, a été fortement critiquée par les économistes de tous bords qui n’y voient qu’une mesure dépensière qui ne devrait créer aucun emploi nouveau et risque, au contraire, de créer du chômage en plus puisqu’elle remplace des aides aux emplois aux bas salaires. Un tournant à gauche qui vient après une campagne bien pâle lors du référendum sur le Traité constitutionnel européen, ce qui permet de rappeler qu’à l’UDF, François Bayrou a toujours été très loin d’être le plus pro-européen face à des Simone Veil ou des Valéry Giscard d’Estaing et même des Jean-Louis Bourlanges ou des Marielle de Sarnez pour parler de ses amis d’aujourd’hui dans la « nouvelle UDF », le « parti libre ».
Un positionnement bien compris par les futurs électeurs de François Bayrou. Lorsqu’on  les écoute dans les réunions de section de l’UDF et les meetings de campagne ou qu’on les lit notamment sur les blogs et les forums internet, on s’aperçoit qu’ils ont un discours très dur et peu « rassembleur ». Ils sont là pour « bouffer du Sarkozy et du Royal » sans aucune nuance (ce qui augure mal d’une union nationale !). Et rien n’est fait par le leader de l’UDF pour les en dissuader, lui qui ne manque pas une occasion de parler de « manœuvres », de « complots », de « coups tordus » de ses opposants contre sa personne. Une mise en scène d’une soi-disant persécution que reprennent en cœur les militants de l’UDF et les sympathisants de leur leader sans nuance, campagne électorale oblige, évidemment.
On est loin d’une posture centriste… De ce point de vue, il est important de rappeler que l’idée force du Centrisme est le juste équilibre (ou, pour d’autres, des notions proches comme le « juste milieu », par exemple). Ce juste équilibre comme nous le disons souvent ici a pour règle fondamentale d’impliquer tous les citoyens en menant une politique équilibrée visant à satisfaire l’ensemble de la population, non pas avec des demi-mesures mais en faisant en sorte que, globalement, tout le monde s’y retrouve. Le Centrisme n’est pas une idéologie de l’exclusion, de la stigmatisation, de la victimisation et de la fustigation. Au contraire, elle veut réconcilier les Français entre eux. Au CREC, il ne nous semble pas que le discours de François Bayrou soit sur cette ligne politique.
Bien sûr, nous savons et nous l’avons dit plus haut, ce qu’est une élection présidentielle, qu’il faut pour un candidat qui veut avoir ses chances de « rassembler au-delà de son camp » et qu’un discours en phase avec le désirs de la catégorie d’électeurs que l’on veut convaincre tout en essayant de faisant plaisir à tout le monde est de mise. Mais nous pensons, peut-être naïvement, que le Centrisme c’est un discours consensuel qui n’a pas besoin de compromissions mais de compromis.
Nous ne portons aucune critique sur la stratégie de monsieur Bayrou en tant que telle, c’est un homme libre de ses choix et de ses convictions ainsi que de ses évolutions politiques. C’est son droit. Mais nous, nous avons le droit de penser que tout cela a de moins en moins à voir avec le centrisme. Est-ce pour cette raison qu’il veut créer un nouveau parti pour diluer les centristes qui s’y trouveront encore ?