samedi 12 octobre 2013

Une Semaine en Centrisme. UDI: tensions et possibles scissions sur fond d’accord avec le MoDem

Après le CNI (Centre national des indépendants) de Bourdouleix, l’UDI va-t-elle se séparer des libéraux démocrates d’Aurélien Véron puis de Territoires en Mouvements du maire de Neuilly-sur-Seine, Jean-Christophe Fromantin?
Va-t-on assister à une énième recomposition au centre de l’échiquier politique plutôt que réunion des centres?!
Telle sont les questions que l’on est en droit de se poser quand on regarde de plus près ce qui est en train de se produire dans l’espace centriste français.
Petit rappel: l’UDI a été créée pour rassembler les partis centristes et les partis de la droite modérée.
Dans le premier groupe on trouvait le Nouveau centre, Force européenne démocrate, et l’Alliance centriste.
Dans le deuxième, on trouvait le Parti radical, le CNI, Territoires en Mouvements et le PLD (Parti libéral démocrate).
Sans oublier quelques groupuscules indéfinissables tels la Gauche moderne, France écologie, Nouvelle écologie démocrate sensée donner une couleur progressiste et écologiste à la confédération.
Après le dérapage du président du Centre national des indépendants sur les gens du voyage et leur élimination par les nazis, ce parti a été exclu de l’UDI à la rentrée.
Entre temps est venu le temps du rapprochement Borloo-Bayrou qui devrait donner lieu à un «contrat» entre leurs deux partis, l’UDI et le Mouvement démocrate, selon la terminologie de Borloo, une «joint-venture» selon celle de Bayrou.
Dans le même temps, le PLD qui avait rejoint récemment l’UDI a pris de nombreuses positions iconoclastes avec la ligne politique officielle.
Du coup, beaucoup à l’UDI comme Yves Jégo et Hervé Morin, mais pas tous comme Jean-Christophe Lagarde, comme nous l’apprend un écho du Figaro songent à une séparation qui serait peu douloureuse tant il s’agit d’un micro-parti qui tente depuis quelques années de s’adosser désespérément à une formation plus importante pour exister (il avait fait des offres au Nouveau centre dont il était devenu un parti associé après avoir tenté de se rapprocher de l’Alliance centriste).
L’opposition de Morin au PLD, si elle est confirmée, serait d’ailleurs assez étonnante, lui qui était un libéral bon teint dans l’UDF, proche de Léotard (dont il fut le chef de cabinet) et de Madelin, d’autant qu’il entretenait avec celui-ci de très bonnes relations il n’y a pas si longtemps que cela, participant même à ses tables rondes.
En revanche, l’eau dans le gaz entre Jean-Louis Borloo et Jean-Christophe Fromantin représente un défi d’une importance bien plus grande pour l’UDI.
Le maire de Neuilly-sur-Seine, étoile montante de la droite indépendante, avait été une belle prise pour Jean-Louis Borloo, lui qui avait réussi contre toute attente à enlever de haute main la mairie de Neuilly-sur-Seine aux sarkozystes puis, dans la foulée, à devenir député de la ville.
Mais, indépendant avant tout, il ne s’est jamais vraiment fondu dans la formation de centre-droit et il s’était déjà distingué en étant un des chantres des opposants au mariage pour tous, montant même à la tribune du Champs de Mars aux côtés de Frigide Barjot lors de la manifestation parisienne pendant que le président de l’UDI, lui, approuvait l’union entre personnes du même sexe.
Ses relations avec Borloo, alors même qu’il est en charge du projet politique de l’UDI ne sont donc pas au beau fixe, si elles ne l’ont jamais été.
Et le voici, dans une interview au Figaro, qui tire à boulets rouges sur le rapprochement UDI-Mouvement démocrate, pièce essentielle de la stratégie Borloo.
«Je suis extrêmement réservé, déclare-t-il sans ambages, sur tous les rapprochements qui procèdent davantage d'un schéma tactique que d'une perspective de projet. Le niveau de défiance des Français vis-à-vis des partis politiques est très important car ils nous reprochent de nous préoccuper davantage de la prospérité des systèmes politiques que des solutions pour la France. Je m'inquiète par ailleurs du risque de quiproquos autour de la notion de ‘centre’. Le MoDem me semble être davantage dans une recherche de compromis entre la droite et la gauche - d'où les virages imprévisibles aux présidentielles. Je ne suis pas du tout sur cette ligne. Le centre, tel que je le conçois, correspond à une ligne politique claire, ancrée à droite, orientée vers quelques principes fondamentaux comme le principe de subsidiarité, la confiance en l'initiative privée, le rôle structurant des entreprises dans les politiques sociales et l'attachement à un projet européen. L'UDI ne doit pas brouiller son message. Elle doit mettre son énergie au service de son projet et de ses valeurs.»
On ne saurait être plus clair, Fromantin ne veut pas, mais vraiment pas d’une alliance avec Bayrou.
Ce qui est exactement le contraire d’Hervé Morin.
Celui qui a quitté son chef en 2007 pour créer le Nouveau centre avec d’autres dissidents de l’UDF parce que Bayrou avait refusé de voter pour Sarkozy (mais il avait aussi refusé de le faire pour Royal alors qu’en 2012 il a voté pour Hollande…), voit dans l’union avec le Mouvement démocrate, un moyen d’affaiblir la position de Jean-Louis Borloo.
On peut donc penser que si la réunion MoDem-UDI se réalise, le maire de Neuilly-sur-Seine quittera l’UDI.
On pourrait donc avoir une UDI amputée de trois partis (CNI, PLD, Territoire en Mouvement) au nom d’une refondation au centre-droit avec un Mouvement démocrate qui clame partout qu’il demeurera au centre du Centre et indépendant...
Sans oublier qu’à l’intérieur du Parti radical, du Nouveau centre ou de Force européenne démocrate, certains sont toujours opposés à s’acoquiner avec Bayrou.
La question qui devrait se poser tôt ou tard aux dirigeants de l’UDI est de savoir si la prise Bayrou vaut la peine de ce remue-ménage qui pourrait aboutir, in fine, à une scission plus prononcée de la formation au nom d’une réunion qui est, à l’heure actuelle, plus tactique que justifiée sur le fond.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery

Directeur des études du CREC