mercredi 8 février 2012

L’Humeur du Centriste. Civilisation, est-ce que j’ai une tête de civilisation?!

Les mots ont une signification et changer leurs sens est dangereux nous enseignent les Chinois. Donc, pour que les choses soient claires, monsieur Larousse nous dit:
- Civilisation: ensemble cohérent de sociétés ou de cultures; ensemble des caractères sociaux, culturels, etc. qu’elles partagent (civilisation chinoise, civilisation africaine, civilisation européenne)
-Culture: ensemble des usages, des coutumes, des manifestations artistiques, religieuses, intellectuelles qui définissent et distinguent un groupe, une société; ensemble de convictions partagées, de manières de voir et de faire qui orientent plus ou moins consciemment le comportement d’un individu, d’un groupe.
- Régime politique: mode de fonctionnement politique d’un Etat.
- Occidental: qui relève de la civilisation qui s’est développée à l’ouest de l’Europe et étendue à l’Amérique du nord, du mode de vie des pays correspondants, par opposition aux civilisations d’Afrique, d’Orient, d’Extrême-Orient et d’Amérique latine.
- Nazisme: idéologie politique reposant sur la dictature du Führer, l’embrigadement des masses, l’expansion du Grand Reich, le terrorisme d’Etat (dont les SS et la Gestapo furent les agents) et l’extermination des Juifs et des Tziganes.
- Colonialisme: doctrine qui vise à légitimer l’occupation d’un territoire ou d’un Etat, sa domination politique et son exploitation économique par un Etat étranger.
Evidemment, on aurait pu aller chercher des définitions plus savantes mais celles-ci sont tout à fait satisfaisantes.
Posons maintenant les bonnes questions.
1) Toutes les civilisations sont-elles identiques? Objectivement, bien sûr que non.
2) Toutes les civilisations sont-elles égales? Subjectivement, c’est le droit de chacun de trouver que telle ou telle civilisation est supérieure à une autre. Depuis toujours, par exemple, les Chinois estiment qu’ils sont le centre du monde (d’où le nom qu’ils donnent à leur pays, «Zhongguo», c’est-à-dire Empire du Milieu) et que leur civilisation est nettement supérieure à toutes les autres.
3) La civilisation occidentale est-elle supérieure aux autres? Cette appréciation est évidemment subjective mais il est tout à fait légitime que quelqu’un puisse affirmer librement qu’il préfère vivre dans un pays de cette civilisation dont tous, aujourd’hui, ont des régimes démocratiques et ont un développement économique avancé même si l’histoire de l’Occident n’est pas un long fleuve tranquille, loin de là...
4) Est-on nazi quand on parle de sa préférence pour la civilisation occidentale? Question idiote évidemment!
5) Fait du colonialisme quand on choisit un modèle de civilisation? Question tout aussi idiote car ce n’est pas parce que les théories colonialistes ont mis en avant la supériorité de telle ou telle civilisation pour mettre sous tutelle un territoire ou un pays, que cela fait de ceux qui ont une civilisation préférée, des colonialistes. Cela s’appelle un rapprochement plus que douteux et politicien.
6) Monsieur Guéant aurait-il mieux fait de se taire? Oui, car personne ne lui avait posé une question à propos de la supériorité des civilisations et son opinion en la matière ne se justifiait pas (sauf raisons électoralistes).
7) Les indignations étaient-elles justifiées? Non car dans une démocratie, toute personne, même un responsable politique et même un ministre, a le droit de donner son opinion en respectant la législation. Que Claude Guéant, par ailleurs ministre de l’Intérieur, se soit comporté en petit agent électoral de son chef, Nicolas Sarkozy, n’est en rien répréhensible. Ce qu’il a dit n’est pas non plus une insulte. Du coup, les censeurs auraient mieux fait d’être dans le retenue. Ajoutons immédiatement que cela vaut quand les rôles sont inversés et les politiques de Droite devraient y réfléchir avant de se parer de l’habit de victimes, eux qui ont baptisé de tous les noms d’oiseau François Hollande ces derniers temps, certains prédisant par ailleurs l’effondrement de la France s’il parvenait au pouvoir…
8) La tentative de changer le mot «civilisation» en expression «régime politique» est-elle appropriée? Non et ceux qui l’ont fait devraient relire au plus vite le Larousse (ou se reporter au début de cette chronique)!
Devant cette polémique digne de rien du tout et surtout pas d’une cours d’école, les enfants valant nettement mieux que ça, proposons à nos chers politiques de Droite et de Gauche, cette autre définition du mot «civilisation» toujours issue du Larousse et que les centristes ne désavoueraient pas: «ensemble des comportements, des valeurs supposés témoigner du progrès humain, de l’évolution positive des sociétés».
Et, on ne voudrait pas polémiquer, mais cela ressemble peu aux agissements de la classe politique dans cette histoire… Et pas seulement celle-là, malheureusement!

Le Centriste

USA élection 2012 vue du Centre. Les victoires de Santorum montrent un Parti républicain de moins en moins centriste et toujours aussi divisé

Ce ne sont pas les trois victoires de Rick Santorum dans le Minnesota (45% des voix contre 27% à Ron Paul), le Missouri (55% des voix contre 25% à Mitt Romney) et le Colorado (avec 40% des voix contre 35% à Mitt Romney) qui viennent de changer radicalement le Parti républicain. Mais elles montrent que celui-ci s’ancre de plus en plus dans le conservatisme, non pas progressiste comme au temps de Lincoln ou de Theodore Roosevelt, non pas social comme au temps d’Eisenhower ou même Nixon, mais réactionnaire Un parti où certains se demandent même si Ronald Reagan et les deux George Bush auraient actuellement leurs chances d’être élus candidats à la présidentielle!
Car Rick Santorum qui, désormais, fait la course en tête en nombre de victoires (quatre contre trois à Romney et une à Gingrich) mais pas en nombre de délégués (ceux qui voteront lors de la Convention républicaine de Floride pour désigner le candidat à la présidence), est bien un républicain ultraconservateur et totalement réactionnaire. Ses thèses les plus rétrogrades s’adressent à cette frange des Américains, agressifs et souvent haineux, totalement repliés sur leur pays (et même leurs Etats respectifs), contre toute modernité ou métissage quelconque, constamment angoissés de perdre leur statut social, qui ont vécu, pour certains, l’élection d’un noir à la Maison blanche comme une insulte, nationalistes extrêmes (et non patriotes) qui iraient faire la guerre à tous les ennemis supposés des Etats-Unis. Rappelons à cet effet que Rick Santorum s’est déclaré favorable à faire la guerre à l’Iran s’il était élu président.
C’est évidemment une mauvaise nouvelle pour la démocratie américaine car les républicains les plus à droite refusent ce fameux compromis démocratique qui, vaille que vaille et souvent écorné, a permis un gouvernement fédéral largement apaisé depuis l’indépendance du pays.
Petit à petit, le Parti républicain se vide de ses centristes, soit qu’ils soient marginalisés et incapables d’obtenir les investitures nécessaires pour se présenter aux élections, soit qu’ils s’en aillent ailleurs ou abandonnent la politique. Et ceux qui demeurent dans le parti comme Mitt Romney et quelques autres, sont obligés de droitiser leur message, de simplifier leur vision politique pour coller avec des idées dont certaines sont très proches de l’extrême-droite.
Quand on écoute et que l’on lit les propos de certains militants républicains, on est souvent très mal à l’aise devant la violence et le simplisme dégagés par ceux-ci et qui ne présagent rien de bon pour la démocratie. Heureusement, la majorité des électeurs républicains et, surtout, de la population américaine ne les partagent pas.
Et ces trois victoires consécutives en une soirée ne font pas du tout les affaires de Mitt Romney. Non pas que cela remette en cause réellement, pour l’instant, sa nomination comme candidat des républicains à la présidentielle de novembre prochain (McCain en 2008 avait perdu pas moins de treize primaires et caucus après sa victoire en Floride avant de gagner la compétition), mais cela montre qu’il n’est pas le candidat aussi inévitable que cela pour de nombreux militants et sympathisants, que son discours ne passe pas aussi bien qu’il le prétend et que son manque total de charisme est de plus en plus criant.
Et cela est d’autant plus préoccupant pour Romney qu’il avait gagné les Etats du Minnesota (dans lequel il n’arrive qu’en troisième position derrière Santorum et Paul) et du Colorado (alors qu’il y était donné gagnant) lors des primaires de 2008 face à McCain.
A noter que le principal concurrent de Romney, Newt Gingrich, n’était même pas sur les bulletins de vote du Missouri (il ne s’était pas enregistré à temps) et il n’obtenu que 13% des voix dans le Colorado. Mais, pendant ces primaires dont il avait décidé de faire l’impasse, on l’a surtout vu ailleurs, notamment dans l’Ohio où il est venu à la rencontre des militants pour tenter de remporter ce que l’on appelle les «early votes», les premiers votes qui ont fait la différence pour Romney en Floride.
Les prochaines primaires républicaines auront lieu dans le Michigan et l’Arizona.

Alexandre Vatimbella