dimanche 13 mars 2016

Actualités du Centre. Le Mouvement démocrate n’a plus aucun député

François Bayrou & Jean Lassalle
La démission du député des Pyrénées-Atlantiques, Jean Lassalle du Mouvement démocrate est un coup dur pour François Bayrou.
Au-delà de la perte d’un ami de longue date et d’un élu de son département, il voit partir un de ses vice-présidents et, surtout, le seul réel député de son parti.
Désormais, le Mouvement démocrate ne compte plus aucun représentant à l’Assemblée nationale.
On ne compte pas ici Thierry Robert, député de la Réunion.
Elu en tant que MoDem en 2012, ce dernier a rejoint aussitôt le groupe des Radicaux de gauche à l’Assemblée nationale et fondé un parti «La politique autrement».
Et même s’il était la tête de liste du Mouvement démocrate aux régionales de 2015 à la Réunion, ses liens avec le parti centriste sont très lâches.
Alors que François Bayrou demeure dans le peloton de tête dans les baromètres des personnalités politiques et qu’il obtient autour de 10% des intentions de vote pour la présidentielle de 2017, sa gestion des élus, que ce soit à l’UDF puis au Mouvement démocrate, a rencontré d’énormes problèmes.
Ainsi, quand il prend la tête de l’UDF en 1998, le parti compte 114 députés et, quand il le saborde, en 2007, il n’en compte plus que 3 (dont lui-même) qui deviennent membres du Mouvement démocrate.
En 2012, seuls deux députés se feront élire avec l’étiquette MoDem (Bayrou étant battu), le premier quittant dès son élection (Thierry Robert) et le deuxième et plus emblématique (Jean Lassalle) maintenant.
En outre, le nombre d’élus qui ont quitté François Bayrou au fil du temps est très important.
Sans remonter jusqu’à l’UDF, à la tête du Mouvement démocrate, il a vu partir nombre de proches qui ont jeté l’éponge (Jean-Christophe Lagarde, Jean Arthuis, Jean-Luc Bennahmias, Corinne Lepage, etc.) ou de personnalités qui l’avaient rejoint pour une élection, pour des promesses de postes ou pour partager une aventure commune qui s’est toujours fracassée sur son incapacité à partager le pouvoir, comme Jean-François Kahn, Christian Blanc ou Jean-Marie Cavada.
Quant à Jean Lassalle, il quitte le Mouvement démocrate sur nombre de désaccords avec François Bayrou, certains issus directement de son éviction en tant que tête de liste de son département aux dernières régionales, décision d’Alain Juppé qu’aujourd’hui Bayrou soutient, ceci expliquant grandement cela.
Mais Lassalle veut aussi se présenter à l’élection présidentielle en candidat indépendant, avec une posture gaullienne et aucune troupe.
Une situation qui en rappelle étrangement une autre.


Une Semaine en Centrisme. Le social-réformiste Valls débordé par le social-libéral Macron?

Manuel Valls & Emmanuel Macron
Et si Emmanuel Macron bénéficiait de tout le travail de Manuel Valls et que cette perspective soit celle qui énerve de manière assez compréhensible le premier ministre.
Au niveau médiatique, la question n’est même plus à poser quand on voit le visage de Macron à la Une de tous les hebdomadaires et des quotidiens et le buzz sur sa personne de la télé à internet.
Au niveau politique, les choses sont moins linéaires (et superficielles?), le ministre de l’Economie rencontrant, et c’est normal, de nombreuses résistances, tant à droite qu’à gauche, son positionnement social-libéral allié à sa popularité en faisant une cible de choix des deux côtés comme le montre les articles récurrents très critiques, par exemple, que lui consacrent Le Monde et Le Figaro.
Au moment où le Premier ministre est quelque peu fragilisé par tous les coups reçus depuis 2012 et, surtout, depuis son accession au poste de Premier ministre en 2014, Emmanuel Macron devient, donc, une star médiatico-politique en s’attribuant le rôle de leader de la transgression socialiste que Valls revendique et dont il est certainement légitime à le faire.
La grande peur de Valls est sans doute que l’on passe directement de la case «Hollande» à la case «Macron» sans passer par la sienne.
Et c’est une possibilité qui est accrue par le fait de tous les bruits indiquant que Macron s’organise politiquement parlant, que ses ambitions dans ce domaine s’aiguisent de jour en jour, qu’il y a de plus en plus de personnalités politiques ou intellectuelles qui sont séduites par l’homme et que le nombre de sympathisants qui se rangent derrière lui augmente sans cesse.
D’autant que le ministre de l’Economie ne pense pas devoir grand-chose à Valls mais plutôt à Hollande.
Non pas au niveau des idées mais de son ascension, même s’il commence à agacer de plus en plus des proches du chef de l’Etat qui le voyaient autrefois avec bienveillance quand il n’était un danger que pour le seul Valls…
Dès lors, griller la politesse au Premier ministre ne lui occasionnerait que peu de scrupules.
Mais il est vrai que Macron ne peut exister aujourd’hui que parce que Valls est premier ministre et qu’il a commencé à déblayer le terrain pour les idées de son ministre de l’Economie qui ressemblent comme deux gouttes d’eau aux siennes.
Bien sûr, il a dû en catastrophe inventer un terme, «social-réformisme» pour se différencier du «social-libéralisme» revendiqué haut et fort par Macron.
Mais si l’on regarde de plus près, les différences sont très minimes et viennent sans douter de ce que Valls est un vieux militant du PS avec un certain attachement à son parcours de militant, alors que Macron est plutôt un électron libre qui veut casser les cadres établis.
Il suffit de lire l’interview fleuve que ce dernier vient d’accorder à l’Expresse pour s’en convaincre.
A la question sur quelle est son «offre politique» et qu’il répond «faire réussir la France dans un monde ouvert. Mon combat, c’est celui pour le progrès et la mobilité», on croirait lire du Valls.
Quant à la rivalité entre les deux hommes, elle existe évidemment mais elle est mise en scène par tous ceux qui veulent détruire l’émergence de cette gauche moderne capable de travailler avec le Centre et avec la Droite modérée, dans ce fameux axe central pas encore politiquement organisé mais qui pourrait bien émerger en .2017.
Les opposer continuellement permet de créer une atmosphère d’agressivité en espérant un clash qui porterait un rude coup à ce social-libéralisme-réformisme.
Alors, c’est vrai que Manuel Valls peut trouver un peu injuste qu’Emmanuel Macron bénéficie de toute sa transgression, lui qui prend des coups très durs depuis des années pour tenter de sortir la gauche de son archaïsme qu’avait pointé en son temps son mentor, Michel Rocard et qui n’a pratiquement pas disparu.
Mais de leur capacité à s’entendre et à travailler ensemble aujourd’hui mais surtout dans l’avenir et à bâtir cette nouvelle majorité qu’appelle de ses vœux Valls et que veut construire Macron, émergera ou non une gauche en phase avec les défis du XXI° siècle.
Une gauche qui sera alors une alliée aussi «naturelle» pour le Centre que cette droite réformiste qui s’agrège autour de Juppé.

Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC