mardi 3 mai 2016

Une Semaine en Centrisme. Axe central: Macron, l’homme qui énerve les gardiens des temples

Emmanuel Macron en marche...
Tant à droite qu’à gauche et au centre, Emmanuel Macron a d’abord été accueilli avec bienveillance.
Puis il a été considéré avec un petit sourire moqueur aux lèvres avant de commencer à agacer.
Aujourd’hui, le sentiment qui domine l’entière classe politique est plutôt l’inquiétude d’où une montée de l’agressivité qui va souvent de pair à son encontre.
Car si certains prédisent un flop de son initiative En-marche – c’est-à-dire qu’il le souhaite ardemment! – c’est plutôt à un barrage anti-Macron que l’on assiste ces dernières semaines afin de contrer son ascension dans les sondages et la réalité même de l’espace politique qu’il veut incarner.
C’est le cas, d’abord, chez les gardiens des temples que sont les partis politiques où le «Macron bashing» est désormais la règle.
Ainsi, au Parti socialiste, les critiques, voire les anathèmes qui venaient jusque là essentiellement de la gauche radicale et de l’extrême-gauche, envers le ministre de l’Economie sont nettement plus nombreux que les éloges qui sont désormais du passé.
Même chose au gouvernement où Manuel Valls ne se cache même plus pour lui envoyer des piques et des rappels à l’ordre pendant que nombre de ses collègues ne sont guère avares de petites phrases pour se désolidariser de ses dires et de ses initiatives.
A droite, après avoir tenté d’abord la stratégie des compliments afin de semer la zizanie à gauche puis avoir essayé de le débaucher, on en est désormais à la phase où sa personne et son action sont constamment et systématiquement blâmées.
Il faut dire que le nombre de sympathisants de droite qui ont une bonne opinion de Macron, qui estiment que son bilan est positif et qu’il serait un bon président de la république ne cesse de progresser ce qui a de quoi inquiéter les dirigeants de LR.
Ce qui est nouveau, c’est que le Centre s’y est mis également avec un François Bayrou qui est devenu un de ses plus grands contempteurs alors que l’UDI continue à jouer sur les deux tableaux en lui faisant des appels du pied tout en attaquant son bilan.
Là aussi, la grande popularité de Macron auprès des sympathisants des partis centristes sonnent comme une alarme auprès des dirigeants du MoDem et de l’UDI qui voient arriver sur leurs plates-bandes un nouveau venu qui les ringardise et menace leurs prés carrés.
Mais les attaques contre Macron proviennent également des gardiens des temples de la sphère médiatico-intellectuelle par le biais d’attaques contre l’axe central et donc également le Centre et le Centrisme.
Tout ce que le pays compte de conservateurs, de réactionnaires et d’idéologues bornés de gauche et de droite montent au créneau pour critiquer l’initiative controversée du ministre de l’Economie qui leur apparaît un progressisme libéral, un courant très largement honni dans notre pays par les intellectuels.
Car ce qui est en jeu c’est la mise en cause de leur représentation surannée et poussiéreuse d’une vie politique limitée à l’affrontement entre la Gauche et la Droite.
Macron, bien sûr, n’est pas le premier à parler d’une scission bien plus profonde entre progressistes et conservateurs.
Mais, comme ses prédécesseurs, cela suffit à faire sortir de leurs gongs journalistes, politologues et intellectuels des deux bords qui, depuis la fondation de la V° République, défendent la réalité de cet unique affrontement qui les arrange dans cette obsession binaire de la politique d’une pauvreté souvent abyssale, basée sur des idées d’un autre âge et une résistance au progrès et à la modernité qu’ils jugent dangereux.
Une obsession qui fait fi de l’histoire comme on peut le lire dans les colonnes des quotidiens comme Le Figaro ou Le Monde, des journalistes et autres experts qui ont la mémoire courte ou la science historique limitée.
Pour eux, la réalité d’un axe central ne serait rien d’autre que la revitalisation de l’idée molle de l’union nationale ou, pire, de la volonté de brouiller les pistes pour des raisons bassement électoralistes et d’ambitions personnelles sur fond de pauvreté des idées et du personnel politiques.
Or si le «ni gauche, ni droite» est sans doute une faute de langage de la part d’Emmanuel Macron, en revanche, la proximité de plus en plus évidente d’un axe central, défenseur de la démocratie républicaine libérale et représentative et d’une société ouverte face au raidissement d’une gauche et d’une droite radicales qui lorgnent plus vers les extrêmes que vers les modérés légitime sans l’ombre d’une ambiguïté le combat du ministre de l’Economie.
Au fond, l’ensemble des gardiens des temples espère secrètement que Macron ne sera qu’un phénomène politico-médiatique qui s’autodétruira comme ce fut le cas pour d’autres phénomènes.
Ce sera peut-être le cas mais cela ne fera pas disparaître la justesse de nombre de ses diagnostics ainsi que de sa volonté de refonder le débat politique sur des oppositions véritables.

Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC