jeudi 10 décembre 2015

L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. Monsieur Sarkozy, le vote FN n’est pas immoral, il est irresponsable

Quand Nicolas Sarkozy affirme qu’il n’est pas immoral de voter pour le Front national et que cela lui permet, à la fois, de faire un clin d’œil aux électeurs qui mettent un bulletin d’extrême-droite dans l’urne et de poser une équation scélérate FN = PS (donc PS = FN), il se trompe, une nouvelle fois, de débat.
Non pas que la question morale soit absente de la politique, bien au contraire, elle a été au cœur du débat philosophique depuis l’antiquité.
En schématisant, elle est au fondement des réflexions en la matière de Platon et d'Aristote qui estiment qu’il faut une pratique et un but moraux dans le gouvernement de la cité alors que Machiavel sera un de ceux qui affirmeront que bien gouverner c’est tout sacrifier à l’objectif, donc, entre autres, la morale qui nuirait à l’efficacité recherchée.
Mais, en l’occurrence, voter pour le FN n’est pas une question de moralité ou d’immoralité, ni même se savoir si ce parti devrait être interdit parce que non républicain ou démocratique (il ne prône pas ouvertement la violence pour détruire la république et ne commet pas d’actes terroristes), mais c’est une question de responsabilité et, en l’espèce, d’irresponsabilité, qui n’est pas moins essentielle, notamment pour le Centre et le Centrisme.
On comprend bien que Nicolas Sarkozy ne veuille pas parler d’irresponsabilité à propos du vote du Front national, lui qui courtise les électeurs du clan Le Pen et de ses affidés.
Tout comme d’ailleurs la plupart du personnel politique qui préfère rejeter la faute (politique) du vote FN sur le parti d’extrême-droite et l’immoralité de ses positions permettant ainsi cet extraordinaire mystification de dédouaner les électeurs de leur choix.
Car, soyons clairs, sans électeurs le FN n’existerait pas ou serait un petit groupuscule sans importance.
En démocratie, c’est bien le bulletin de vote qui légitime l’existence d’un parti politique.
Dès lors, celui qui en choisit un FN lors d’un scrutin porte la responsabilité de faire exister ce parti et – avec tous les autres qui font pareil et qui sont de plus en plus nombreux – de le faire progresser.
En cela leur vote est irresponsable parce qu’il est une attaque directe contre les valeurs de la démocratie républicaine.
Mais il est aussi irresponsable, comme l’est le vote pour l’extrême-gauche, parce que les propositions du FN en matière économique, sociale, de politique étrangère (notamment européenne), culturelle, sécuritaire, etc. sont globalement dangereuses, non seulement, pour la démocratie républicaine mais pour la France, sa puissance et son développement.
Quant à savoir s’il est moral, il faudrait demander à chaque électeur du Front national, quelles ont été ses raisons personnelles vis-à-vis de la moralité, sachant qu’un acte immoral, comme l’explique le philosophe Eric Blondel, est celui qui est réalisé contrairement à la morale établie ou à la morale de celui qui l’accomplit et qui fait que ce dernier se conduit mal, fait le mal ou fait du mal.
Alors oui, monsieur Sarkozy, voter FN n’est pas immoral dans son principe, c’est irresponsable.
Mais c’est une faute de votre part d’avoir fait entrer la question morale dans la qualification de ce vote en dédouanant ainsi ceux qui font la force du parti d’extrême-droite, ses électeurs.
En leur envoyant un signe irresponsable.
Car, si leur vote n’est pas immoral, vous lui donnez donc l’appellation de «moral» (je ne pense pas que vous voudriez le qualifier d’amoral!), vous faites en sorte de lui donner une fausse légitimité en ayant évité d’appeler un chat un chat.
Voilà de la politique politicienne que les centristes ont raison de dénoncer.


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