mardi 6 octobre 2020

Actualités du Centre. Union européenne – Dacian Ciolos: «Demander de respecter les valeurs européennes, ce n’est pas faire preuve d’ingérence»


L’Union européenne pourra désormais réduire ou suspendre les versements de fonds dans les cas où un de ses membres viole les principes d’État de droit, une mesure qui vise des pays comme la Hongrie ou la Pologne.

Président du groupe centriste Renew (dont fait partie Renaissance composée de membres de laREM, du MoDem, d’Agir et du Mouvement radical), l’ancien commissaire européen à l’Agriculture, Dacian Ciolos a signé une tribune avec les présidents de trois autres groupes (gauche, droite et écologie) au Parlement européen en ce sens (lire ci-dessous)

Dans une récente interview au quotidien Ouest France, il avait affirmé qu’il était tout à fait normal de conditionner le versement des crédits de l’UE au respect des valeurs européennes:
«Il s’agit de l’argent du contribuable européen. Il faut veiller à ce qu’il ne tombe pas dans la poche des autocrates, de personnes corrompues ou d’institutions qui devraient fonctionner de façon transparente et démocratique. Demander de respecter les valeurs européennes, ce n’est pas faire preuve d’ingérence. Les mêmes règles doivent s’appliquer à tous. »

 

► Tribune de Dacian Ciolos, président du groupe Renew Europe ; Iratxe Garcia Perez, présidente du groupe Socialistes et democrates (S&D) ; Ska Keller et Philippe Lamberts, coprésidents du groupe des Verts/Alliance libre européenne ; Manfred Weber, président du groupe Parti populaire européen (PPE).

Budget européen: une véritable conditionnalité liée au respect de l’Etat de droit est indispensable

Nous, présidents des quatre plus grands groupes politiques du Parlement européen, nous unissons pour envoyer le message suivant au Conseil européen, au Conseil de l’Union européenne (UE) et à la Commission européenne : nos valeurs ne sont pas à vendre.
Ces dernières semaines, les négociateurs du Conseil européen se sont montrés totalement réticents au changement du moindre iota du compromis sur le budget de l’UE et sur le plan de relance « Next Generation EU », conclu cet été par les dirigeants européens. Cela n’est pas conforme aux engagements pris quant à l’introduction d’un mécanisme de conditionnalité au respect de l’Etat de droit.
Nous sommes unanimes pour saluer le plan de relance. Nos économies ont un besoin urgent de fonds pour sauver des emplois et créer des opportunités pour l’avenir. Le soutien du Parlement européen ne fait aucun doute. Nous l’avons d’ailleurs montré en votant le plan de relance dès le 16 septembre. Maintenant, c’est au tour des vingt-sept gouvernements et de leurs Parlements nationaux d’en faire autant. Les défis économiques auxquels nos citoyens doivent faire face deviennent de plus en plus importants. Il est inacceptable que ceux qui entendent saper l’Etat de droit soient prêts à prendre en otage le fonds de relance et, ce faisant, à servir leurs propres intérêts plutôt que ceux de leurs citoyens.
Notre système judiciaire est en crise ; l’ensemble de notre édifice juridique européen vacille lorsque l’un de nos gouvernements muselle ses juges et crée un climat de peur et de contrôle à tous les échelons de son système judiciaire national.
Nos libertés civiles, la liberté des médias et le pluralisme sont soumis à d’immenses pressions. Les attaques contre la liberté de la presse, la société civile, les agressions verbales et physiques contre les journalistes – voire les assassinats – et la prise de contrôle de groupes de médias par une oligarchie liée au pouvoir semblent devenir la norme dans certains Etats membres. La liberté de la presse n’est pas un luxe. C’est une condition préalable à l’existence de démocraties libres et fonctionnelles. Notre marché intérieur est menacé. Dans certains Etats membres, nous voyons une poignée de gens prendre le contrôle des fonds comme des marchés publics, et la corruption devenir la norme.
Nous sommes fondamentalement convaincus qu’une véritable conditionnalité liée au respect de l’Etat de droit dans le budget européen est indispensable pour s’attaquer à ces problèmes.
Le temps presse. Le Conseil a adopté sa position, ce qui permet aux négociations de commencer, enfin ! Mais certaines garanties fondamentales font malheureusement défaut. Le processus de conditionnalité doit être clair. Premièrement, la décision en matière d’éventuelles sanctions doit être déléguée à la Commission et ne doit pouvoir être annulée que par un vote à la majorité qualifiée au Conseil. Deuxièmement, le champ d’application de cette conditionnalité doit inclure au minimum la violation des principes de l’Etat de droit et de l’indépendance de la justice. De plus, la Commission doit fonder ses conclusions sur le nouveau rapport annuel sur l’Etat de droit en s’appuyant également sur un panel d’experts indépendants. Troisièmement, il ne doit pas y avoir d’échappatoire : l’idée d’offrir aux Etats membres la possibilité de reporter la mise à l’agenda de ces questions aux futures réunions du Conseil européen leur permettrait en réalité de reporter les décisions sine die. Cela ne sert que les intérêts de ceux qui ne souhaitent pas que des décisions soient prises.
Plus important encore, nous devons protéger les citoyens contre le comportement de certains gouvernements. Cela passe par un système permettant à ces derniers de continuer à recevoir directement des fonds. Pas un seul citoyen européen ne devrait être puni parce que son gouvernement ne respecte pas et ne défend pas les principes fondateurs de notre Union. De plus, nos trois institutions devraient être impliquées dans ce processus de décision, ce qui signifie un rôle important pour le Parlement européen, aux côtés de la Commission et du Conseil. Le Parlement européen est prêt à assumer pleinement ses responsabilités, c’est ce que nos citoyens nous demandent.
Nous invitons le Conseil à faire de même et à adopter une attitude constructive sur la question de l’Etat de droit. Nous devons faire tout notre possible pour protéger notre grande démocratie européenne, notre économie, nos valeurs et, surtout, nos citoyens. Pour ce faire, nous resterons fidèles à notre mission, qui est de veiller à ce que les valeurs européennes ne soient pas à vendre.

 

 

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