samedi 15 octobre 2011

Une Semaine en Centrisme. La question du troisième parti centriste aux Etats-Unis


Il existe plusieurs initiatives actuellement aux Etats-Unis en vue de la création d’un troisième «grand» parti situé au centre de l’échiquier politique (il existe plusieurs petits partis qui se réclament du centre, The Modern Whig Party ou The Centrist Party) et d’un «troisième homme» centriste pour aller défier lors de la présidentielle de 2012, les candidats des partis républicain et démocrate.
La question d’une troisième offre politique consistante est récurrente dans la vie politique américaine (on se rappelle notamment la candidature de Theodore Roosevelt en 1912 à la tête d’un parti progressiste) mais a pris de l’ampleur depuis les années 1980.
C’est la radicalisation du Parti républicain, devenu un vrai parti de droite (et parfois d’extrême-droite), laminant son centre, qui a déclenché la réflexion tout comme l’idée que le corps électoral américain se droitisait.
De son côté, le Parti démocrate a répondu de deux façons. Avec une frange qui se radicalisait à gauche mais aussi avec les tentatives de troisième voie dont celle, la plus connue, de Bill Clinton, «Third Way» qui influença le Parti travailliste en Grande Bretagne et permit à Tony Blair de diriger le pays pendant une décennie.
Pour autant, un «troisième candidat» (il faut rappeler que de nombreux candidats se présentent à chaque présidentielle, mais que ces «petits» candidats n’obtiennent que peu de voix même si, en 2000, la présence de l’activiste de gauche et ancien défenseur emblématique des consommateurs, Ralph Nader, a sans doute coûté son élection à Al Gore face à George W Bush), n’a jamais été élu, ni même n’est arrivé en deuxième position.
De même, il ne s’est pas toujours situé au centre. Ainsi, Ross Perot, le troisième larron des élections de 1992 (sa présence fut un des éléments qui permit l’élection de Bill Clinton face à George H.W. Bush) et 1996, et dont les scores furent plus qu’honorables, était situé à droite du Parti républicain et de son candidat de centre-droit (Bush père en 1992 et Bob Dole en 1996).
Par ailleurs, il faut se demander si une telle candidature se justifie actuellement alors que le président des Etats-Unis en place est un centriste, considéré comme tel par la majorité des politologues sérieux.
Comme le remarquent plusieurs observateurs, comme Michael Tomasky du Daily Beast et de Newsweek, un troisième homme ne ferait que prendre des voix au candidat centriste «officiel» (en l’occurrence Barack Obama) et favoriserait l’élection d’un Républicain qui risque d’être très à droite. Ce serait donc totalement contreproductif et aboutirait à polariser encore plus la vie politique américaine au lieu d’y apporter du consensus.
Sauf si, évidemment, il avait une grande chance de l’emporter.
Mais rien ne vient étayer cette éventualité, au contraire.
Cela n’empêche pourtant pas les initiatives de se poursuivre. Elles sont plus ou moins structurées, plus ou moins sérieuses.
Il y a de simples appels à une candidature centriste comme ceux de Thomas Friedman ou de David Brooks, deux éditorialistes vedettes du New York Times - le premier du centre-gauche, le deuxième du centre-droit - ou encore de Matt Miller, du Washington Post.
Il y a la création d’organisations comme «No Labels» qui veulent organiser un vote de la population pour désigner leur héraut. On trouve aussi des médias, comme le site Politico.com qui proposent plusieurs candidats aux internautes en leur demandant de voter pour leur préféré.
Pour autant, la grande question que devraient se poser tous les responsables de ces initiatives est: qu’est-ce qu’un troisième candidat centrisme ferait de mieux ou de différent que ce qu’a fait et ce que fait Barack Obama et, ceci, indépendamment des résultats mais dans le cadre économique et politique actuel?
La réponse est, sans doute, pas grand-chose. Car, dès qu’il parviendrait au pouvoir, il serait, comme Barack Obama l’a été (et alors qu’il bénéficiait d’un très large crédit dans l’opinion), l’objet d’attaques virulentes de la Droite et de la Gauche. Il serait également l’objet d’un blocage de la droite du Parti républicain sans avoir, lui, le soutien de l’aile gauche du Parti démocrate. Et ses idées, si elles sont centristes, ressembleraient beaucoup à celles de Barack Obama.
Du coup, il est sans doute légitime de se demander si des mesures et une pratique politique centristes sont capables de sortir les Etats-Unis des graves problèmes auxquels le pays a à faire face (il ne semble pas que celles de droite et de gauche soient beaucoup plus capables de faire mieux et seraient sans doute pires) mais pas de dénier à Barack Obama d’occuper fermement le centre de l’échiquier politique.

Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC

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