jeudi 17 novembre 2016

L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. Fait pour empêcher un Trump, c’est le système qui l’a élu, pas le peuple

Les experts et autres journalistes du monde entier battent leur coulpe.
Non pas d’avoir permis l’élection de Donald Trump en le mettant constamment en scène, en propageant largement ses idées, en en faisant in fine un candidat acceptable et en tapant sans cesse sur Hillary Clinton.
Non, ce n’est pas cela qu’ils se reprochent mais de ne pas avoir compris le peuple américain, de ne pas avoir vu que ce peuple était en colère et qu’il avait décidé de choisir un populiste démagogue.
Et ils ont encore tout faux!
Car le peuple américain a choisi majoritairement Hillary Clinton.
En effet, celle-ci a gagné le vote populaire avec actuellement plus d’un million trois cent mille voix soit plus d’1% de différence en plus face à son adversaire (et ces chiffres devraient encore augmenter dans les jours qui viennent).
Dans aucun pays démocratique au monde sauf aux Etats-Unis, elle aurait perdu cette élection.
Et le pire, c’est que le système qui a été mis en place devait  éviter qu’un Donald Trump puisse un jour s’assoir dans le Bureau ovale de la Maison blanche…
Car les Pères fondateurs du pays, rédacteurs de la Constitution avaient une peur bleue que le peuple puisse élire un populiste démagogue.
Pour ce faire, ils ont imaginé un système électoral à deux étages et les fameux «checks and balances».
Ces derniers, en divisant le pouvoir entre le Président, le Congrès et le Cour suprême devaient empêcher qu’une faction puisse diriger le pays et n’en faire qu’à sa guise.
Sauf que, désormais, les républicains vont contrôler les trois institutions avec nombre d’élus de droite radicale voire d’extrême-droite…
Le premier, lui, avec son organisation à deux niveaux, le vote populaire qui désigne des grands électeurs qui, eux, élisent in fine le président, a été mis en place pour que des «sages» puissent empêcher qu’un personnage douteux et dangereux, excitant les bas instincts du peuple, dirige le pays.
Or, c’est grâce à lui que Donald Trump, qui ressemble comme deux gouttes d’eau au portrait-robot de ce personnage à éviter à tous prix, a gagné face à une centriste, Hillary Clinton.
Voilà une défaite cuisante pour ces Pères fondateurs, hommes modérés, voire centristes pour certains comme James Madison, qui voulaient une démocratie républicaine consensuelle et adepte du compromis.
Ajoutons que l’organisation du vote Etat par Etat avec la règle du «winner takes all», c’est-à-dire où le vainqueur gagne tous les grands électeurs même s’il l’emporte d’une voix, a également joué en faveur de Trump.
Dans l’histoire des Etats-Unis, le cas de figure où un président minoritaire a gouverné s’est réalisé trois fois.
La première a eu lieu en 1876 avec l’élection du républicain Rutheford Hayes qui fut battu de plus de 250.000 voix par le démocrate Tidlen (ce qui, à l’époque, équivalait à 51% contre 48% des voix pour le candidat démocrate) suite à fraudes massives.
La deuxième a eu lieu en 2000 avec George W Bush, un autre républicain, qui a battu Al Gore alors que ce dernier avait obtenu plus de 500.000 voix d’avance.
Résultat, on a eu un gouvernement très marqué à droite avec les attentats du 11 septembre – Bush a refusé de croire en la menace d’un attentat de grande envergure sur le sol du pays –, la guerre en Irak pour punir un Saddam Hussein – qui n’avait aucune responsabilité dans ces attentats – et la pire crise économique mondiale depuis 1929 à cause d’un refus de réguler les activités financières débridées de Wall Street et des grandes banques.
La troisième, c’est aujourd’hui avec Trump, toujours un républicain...
Et nous ne savons pas ce qui va se passer dans les quatre ans qui viennent.
Tout juste, nous savons qu’il a nommé comme numéro deux de son équipe à la Maison blanche un homme d’extrême-droite, raciste, sexiste et adepte des théories du complot, nomination qui a été célébrée par le parti néonazi et le Ku Klux Klan…
Une pétition qui a déjà recueilli des millions de signatures, réclame aujourd’hui que les grands électeurs – qui ont la liberté de vote – n’élisent pas Donald Trump.
Cela, malheureusement, semble impossible.
Non pas légalement mais politiquement.
En effet, depuis que le pays existe, les grands électeurs ont toujours validé les résultats des élections et l’on voit mal qu’ils ne le fassent pas aujourd’hui.
Il faudrait une menace réelle et concrète sur la démocratie américaine.
Et si l’on peut craindre que cela puisse survenir dans les quatre ans qui viennent, celle-ci demeure encore dans les propos plus que dans les actes.
Alors, journalistes et experts qui promettent d’être plus en phase avec la «colère» du peuple, soyez plutôt plus clairvoyants, regardez les faits et mobilisez-vous pour protéger la démocratie républicaine et cette majorité d’Américains qui ont dit qu’ils ne voulaient pas de Trump.
Ensuite, et seulement ensuite, occupez-vous de ces électeurs en désarroi qui ont choisi de voter pour un démagogue populiste.
Mais les faits sont les faits: ils sont minoritaires.
Et c’est Hillary Clinton qui est l’élue du peuple.
Une élue battue, tout comme le peuple.



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