dimanche 5 juillet 2020

Présidentielle USA 2020. Parti républicain: de Nixon à Trump, l’inexorable montée de la droite dure ou la lente disparition des centristes


Nixon a préparé Reagan qui a préparé Bush qui a préparé Trump, une descente en enfer extrémiste et populiste dont une des conséquences majeures et catastrophiques pour la politique américaine a été la disparition presque totale des centristes républicains.
De la droite dure à la droite réactionnaire puis à la droite radicale et enfin l’extrême droite populiste en attendant le prochain épisode, voici comment quatre présidents américains, dans l’ordre, Richard Nixon (1969-1974), Ronald Reagan (1981-1988), George W Bush (2001-2008), Donald Trump (2016-2020) – tout juste y eu-t-il une sorte de pause avec le «modéré» George HW Bush (1989-1992) – ont conduit le Parti républicain aux confins extrêmes de la droite et de la réaction ce qui, au passage, a éliminé quasiment tous les centristes de la formation d’Abraham Lincoln, de Theodore Roosevelt et d’Ike Eisenhower.
Bien sûr, il serait caricatural de faire commencer la dérive droitière des républicains à l’ère Nixon.
Barry Goldwater, le candidat malheureux du parti face à Lyndon Johnson en 1964 où il fut littéralement balayé par le président démocrate sortant est sans doute un des républicains les plus radicaux de l’histoire, charriant avec lui tous les côtés les plus sombres qui se sont lentement agrégés à une formation créée à l’orée de la Guerre de sécession et qui se voulait avant tout libérale (au sens premier du terme et non de celui qui est aujourd’hui utilisé au Etats-Unis et qui caractérise quelqu’un de gauche plus ou moins modéré) et, bien sûr, contre l’esclavage.
Cependant, la ligne politique du Parti républicain a toujours oscillé entre une droite conservatrice (comme pour des présidents comme Taft ou Hoover) une droite modérée voire un centre-droit (comme pour des présidents comme Théodore Roosevelt ou Eisenhower).
Jusqu’à la fin des années 1970, il y avait même une forte implantation de républicains centristes et/ou modérés sur la côte Est du pays, le plus représentatif d’entre eux étant alors Nelson Rockefeller qui fut gouverneur de New York et même vice-président du pays sous l’Administration de Gérald Ford après la démission de Richard Nixon suite à l’affaire du Watergate.
Aujourd’hui, si l’on cherche un représentant du courant centriste dans le parti, la tâche est bien compliquée et le nom de Mitt Romney, le sénateur de l’Utah et candidat malheureux face à Barack Obama en 2012, est souvent cité alors qu’il serait plutôt un homme de droite au conservatisme modéré comme le fut également le sénateur de l’Arizona, John McCain, candidat lui aussi face à Obama en 2008 et depuis décédé.
En tous cas, les deux hommes représentent les quelques républicains qui se sont opposés le plus vivement mais en vain à la montée en puissance de la droite réactionnaire dans le parti, que ce soit sous George W Bush (notamment le courant représenté par le vice-président Dick Cheney) ou sous Donald Trump.
S’il convient d’utiliser le terme «globalement» à propos de leur positionnement contre les deux présidents, c’est parce que plus d’une fois ils ont validé leurs lignes politiques radicales voire extrémistes.
Toujours est-il que le Parti républicain est désormais un parti de droite radicale parce qu’il l’a voulu et parce qu’il a mis en place une stratégie pour y parvenir, étant le réceptacle de toutes les frustrations et les récriminations de cette frange importante de la population blanche qui se sent à tort ou à raison déclassée (souvent par des décisions prises par… les républicains!) et aux relents racistes, devenue son noyau électoral, frustrations et récriminations instrumentalisées par beaucoup de grandes fortunes du pays (on pense ici aux frères Koch ou à Sheldon Adelson, entre autres) par leurs généreuses donations aux hommes et aux mouvements les plus réactionnaires qui ont émergé à l’intérieur du parti (comme Newt Gingrich, Karl Rove ou Steve Miller), soit qui ont conduit des OPA réussies de l’extérieur (comme le Tea party ou Steve Bannon).
Les campagnes d’une violence inouïes menées contre les centristes Barack Obama et Hillary Clinton par le Parti républicain (et pas seulement par ses dirigeants ou ses candidats) démontre la réalité sans équivoque de ce déplacement idéologique et de la volonté d’y demeurer.
Dès lors, il semble illusoire d’attendre un recentrage des républicains dans les années à venir parce que le cœur de leur électorat n’est plus au centre, pire, est constitué d’adversaires résolus, voire haineux, des valeurs centristes.
C’est plutôt le contraire qui pourrait se produire car même les rébellions qui se font jour actuellement contre Trump ne viennent pas de centristes mais de conservateurs comme par exemple ceux qui ont mis sur pied le «Lincoln project» et souhaitent la défaite du populiste démagogue en novembre prochain face à Joe Biden afin de sauver le parti de l’extrême-droite et le pays du chaos.
Ce qui désespérant dans cette lente dérive vers l’extrémisme, c’est que Nixon, Reagan et Bush junior ont été réélus pour un second mandat, le seul qui n’a pas réussi était Bush sénior pourtant le moins éloigné du Centre…
Tous ont eu, en outre, maille à partir avec des scandales, Nixon avec le Watergate, Reagan avec les Contras, W. Bush avec la guerre en Irak.
Quant à Trump, il y en a tellement…

Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC


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