mercredi 6 mars 2019

Actualités du Centre. François Bayrou: «Du grand débat va sortir un nouveau projet national»

François Bayrou
François Bayrou n’en démord pas, du Grand débat national et du mouvement de foule des gilets jaunes va sortir «un nouveau projet national».
C’est ce qu’il a redit lors d’un entretien à la chaine CNews.
Un nouveau projet dont il n’indique pas le contenu mais qui est, selon lui, indispensable pour faire de la politique autrement et parce que «le moment que nous sommes en train de vivre, c'est le plus périlleux que nous ayons connu depuis 50 ans, pour notre pays, pas seulement pour les grands principes de la planète, pour notre pays, pour nos intérêts».
Cette dramatisation de la situation actuelle est désormais une constante chez le président du MoDem et lui permet, notamment, de se poser en une sorte de conscience d’Emmanuel Macron à qui il prétend, sans plus de réserves, prodiguer moult conseils et visions politiques.
Dans cet entretien, Bayrou parle également des enjeux des européennes en estimant qu’il faut un volontarisme, tel celui proposé par le Président de la République pour faire bouger les choses et «retrouver la prise sur notre propre destin» (celui des peuples de l’UE).

Extraits de l’entretien de François Bayrou

Dans sa lettre aux citoyens de l'Europe, Emmanuel Macron propose une renaissance européenne, une souveraineté européenne. On a envie de dire: ce n'est pas demain la veille.
Vous vous trompez.
Au Conseil des Ministres, Bruno Lemaire va présenter tout à l'heure la taxe française contre les GAFAM, les géants mondiaux du numérique. La France est seule, les autres européens se planquent, ils ont peur.
Et alors, vous proposez que l'on se croise les bas et qu’on laisse faire? C’est cela?
Vous dites: au fond, c'est très difficile donc il faut renoncer.
C’est justement parce qu’on est tout seul et que les autres ne veulent pas qu’il faut y aller?
Eh bien, voilà, c'est très difficile sans aucun doute. La loi du monde, la loi de l'univers, on la connaît bien, c'est la loi des intérêts et pas la loi des principes. En face de cette loi des intérêts, nous, les Français, parce que c'est notre histoire, et parce que ce sont nos valeurs, nous opposons des lois plus morales, si j’ose dire, en tout cas un horizon dans lequel nous n'abandonnons pas les valeurs qui sont les nôtres. C'est exactement ce que le Président de la République a dit dans cette tribune très importante publiée dans tous les pays européens et dont vous avez vu qu'elle a des échos dans tous les pays européens. Qu'est-ce qu'il dit? Il dit: La question des peuples aujourd'hui, c'est la souveraineté. Comment retrouver la prise sur notre propre destin.
C’est-à-dire la souveraineté nationale ou la souveraineté européenne qui passe par la souveraineté nationale?
La souveraineté des peuples et, aujourd'hui, on ne peut pas imaginer la souveraineté des peuples s'il n'y a pas cette construction que nous avons faite ensemble qui est en face des empires sans scrupule, empires j'allais dire sans loi et sans foi pour ce qui est de leurs intérêts. En face des intérêts des empires, à ce moment-là, il faut que nous bâtissions, nous, quelque chose qui nous permette de résister et de faire entendre et si possible notre voix.
Mais en même temps, sans oublier les intérêts nationaux. Là on voit que c'est le GAFAM…
Comprenez-moi, c'est la même chose. Le fait qu'il y a d'immenses intérêts privés, ce dont on va parler ce matin au Conseil des ministres c’est: puissances numériques de la planète, Google, Amazon, Facebook, etc.
Domination du monde.
Ces puissances-là, industrielles et financières et les puissances des empires, de la Chine, des États-Unis, de tout ce qui se passe aujourd'hui et de tout ce qui se met en place sur la planète, en face de cela, nous n'avons qu'un recours, et ce recours c'est que les pays européens se rassemblent et se rapprochent pour défendre ensemble l'essentiel.
Il n'est jamais trop tard pour le faire.
Ce n'est pas seulement qu’il ne soit pas trop tard, c'est qu'il est urgent de le faire. C'est cette urgence-là. Vous voyez bien la question des frontières, la question des vagues migratoires, la question des mafias, comment vous voulez que l'on y résiste seul ?
Il y a un lien d’ailleurs entre les mafias et les migrants. Il y a d'autres choses, sur les migrants, puisque vous y venez, il y a peut-être un changement assez net à l'égard des migrants chez le Président de la République. Il demande à tous les Européens de négocier un nouveau Schengen, c'est-à-dire qu'est-ce qu’on met dedans?
C'est une chose très importante.
C'est ce que réclamait la droite il n'y a pas longtemps.
Oui, ce que réclament les gens qui connaissent le sujet. De quoi s'agit-il ? Nous pouvons constituer ensemble un espace qui comprend les pays déterminés à lutter contre ces trafics parce qu'il y a beaucoup de trafics derrière. Il y a d'immenses intérêts mafieux qui vendent du rêve aux migrants et qui prospèrent sur leurs dos, quitte à ce qu'ils perdent la vie, ils s’en moquent.
Donc il faut fermer les frontières et laisser les migrants dans les mains des passeurs et des trafiquants?
Cet ensemble de pays souverains décidés à faire respecter leurs lois, ils vont faire deux choses. D’abord défendre ensemble le territoire qui est le leur, des frontières.
Il y a déjà Frontex.
Oui, et je ne suis pas sûr que cela suffise. Ensuite, avoir pour l'asile la même loi, c'est-à-dire que l'on ne puisse plus se trouver dans la situation où nous sommes aujourd'hui dans laquelle il suffit, à un migrant qui se voit refuser le droit d'asile dans un pays européen, de passer dans le pays voisin pour recommencer tout le processus.
Emmanuel Macron est Bayrouïste ou Bayrou est macroniste ?
L'essentiel est que nous sommes sur les mêmes orientations profondes. Je suis sûr que vous vous rendez compte, mais peut-être on ne le dit pas assez, le moment que nous sommes en train de vivre, c'est le plus périlleux que nous ayons connu depuis 50 ans, pour notre pays, pas seulement pour les grands principes de la planète, pour notre pays, pour nos intérêts. On est comme cela sous la menace de puissances qui veulent nous imposer leurs lois, de puissances dont on considérait hier qu'elles étaient de notre côté de la barrière.
Le grand débat a fini par mobiliser une grande partie des citoyens qui avaient probablement besoin de se parler, d'échanger. Qui perd, qui gagne dans ce grand débat ?
Je pense que c'est la France qui gagne. Vous voyez bien ce qui s'est passé.
Même ceux qui critiquent?
Oui, vous en avez fait le reportage très souvent. On a eu 30 ans pendant lesquels, chaque fois, il y avait une élection présidentielle, les sujets profonds et les attentes du pays surgissaient, on votait, un nouveau régime ou censé être nouveau se mettait en place et on retrouvait exactement les défauts et les faiblesses d’hier.
Ce n’est pas ce qui va arriver ?
Je ne le crois pas.
Parce que vous pensez que, du grand débat, va sortir quoi?
Du grand débat va sortir, formulé par le Président de la République au nom du pays, un nouveau projet national.
Avec quoi dedans?
Laissez s'élaborer le projet.
Vous dites le pouvoir d'achat, vous dites la ré-indexation des retraites ?
Il y a un aspect social. Qu'est-ce que la solidarité, sans oublier ce que tout le monde sait que, pour la solidarité, il faut des moyens, et les moyens sont ceux de la Nation. Alors, certains disent, à juste titre, il faut accentuer sur la fraude fiscale, à condition qu'on l'identifie, j'en suis d'accord. C'est au fond ce que l'on va dire au Conseil des ministres ce matin avec cet impôt nouveau sur les GAFA, les grandes puissances numériques de la planète et qui vont devoir payer, en France, puisqu'on n'a pas réussi à mettre tout le monde autour de la table. Cela, un aspect social. Il y a un aspect d'économie, il y a un aspect de démocratie. Les gens très souvent ont dit pendant cette crise qu'ils ne se sentaient pas représentés.
Donc ils le seront?
Donc, il y aura des réponses de ce point de vue-là et il y aura une grande réponse, j'espère, plus importante qui est: qu'est-ce que la France défend dans le monde aujourd'hui? Parce que tous les pays sont interpénétrés, tous se tiennent.
C'est ce que l'on dit depuis le début.
C'est déjà très bien qu’on le dise.
Au-delà de la philosophie, par exemple, il peut continuer avec le même gouvernement?
Oui, si les orientations ou quand orientations seront clairement fixées, c'est le Président de la République qui forme son gouvernement et je ne crois pas qu'il soit bon de changer tout le temps de gouvernement.
Il y a un papier dans l'opinion aujourd'hui, plutôt favorable à François Bayrou qui dit que vous avez parfois des petits tiraillements avec Édouard Philippe. Vous avez milité pour qu’il reste ou pour qu’il s'en aille?
J'ai eu des divergences, tout le monde le sait, je les ai exprimées en public, avec un certain nombre d'orientations publiques au moment où elles ont été prises. Mais tout ceci est derrière nous. Nous sommes aujourd'hui dans une situation dans laquelle le gouvernement, qui conduit une action très importante, songez aux retraites, qu'il va bien va falloir traiter, mérite le soutien de la majorité.
Les élections européennes, est-ce qu’il y aura une seule tête de liste ou un trio?
Je crois une tête de liste. C'est la même chose pour toutes les listes. On a beau dire: on met une équipe en tête.
On dit que vous aviez d'emblée milité en faveur d'Agnès Buzyn. Elle a des compétences européennes?
Je pense que c'est une femme qui, par les responsabilités qu'elle a exercées et aussi par la vie de médecin qui a été la sienne, a quelque chose qui peut en effet parler au nom de la France mais il y en a d'autres candidatures, on parle de Nathalie Loiseau.
Et vous, que dites-vous?
Je ne milite pas pour les uns ou pour les autres? J'essaie de trouver, ou de recommander si je peux, l'équipe qui, non seulement fera de la politique en Europe, mais parlera au nom des Français avec une sensibilité que les Français reconnaîtront.


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