samedi 4 septembre 2021

Vues du Centre. Afghanistan et l’improbable retour du néo-conservatisme

Par Aris de Hesselin

Dans cette rubrique, nous publions les points de vue de personnalités centristes qui ne reflètent pas nécessairement ceux du CREC. Ces points de vue ont pour but d’ouvrir le débat et de faire progresser la pensée centriste.
Aris de Hesselin est un avocat international, centriste et un européen, défenseur d’une mondialisation humaniste.

Dernier soldat américain quittant Kaboul

Qui a vu, entendu et lu les reproches faits au centriste Joe Biden suite à sa décision de quitter l’Afghanistan n’ont pas du en croire leurs yeux et leurs oreilles.

Au-delà des émotions légitimes provenant de l’inquiétude sur les futurs agissements des talibans sur le peuple afghan, au-delà des attaques politiciennes émises par ses opposants systématiques où il leur fallait critiquer pour critiquer (s’il avait décidé de rester, les mêmes auraient trouver à y redire…), ce sont surtout les diatribes emphatiques d’une partie des commentateurs et de la presse qui sont surprenantes surtout quand on s’aperçoit qu’elles reprennent tous les poncifs des néo-conservateurs par ceux-là même qui n’ont cessé de les critiquer depuis l’époque de Ronald Reagan!

Rappelons que le néo-conservatisme, en matière de politique étrangère, est une idéologie le plus souvent portée par d’anciens activistes de gauche qui se sont convertis en faucons défenseurs d’un interventionnisme de droite dont l’objectif est l’importation de grès ou de force du modèle de la démocratie – en réalité, leur vision de la démocratie – dans le monde entier et d’une lutte sans merci contre tous les régimes liberticides.

On pensait que les faits avaient montré que ces thèses étaient spéculativement erronées et inapplicables concrètement face aux revers qu’elles ont subis à travers le monde ces dernières décennies, notamment avec l’invasion de l’Irak et le renversement du barbare sanguinaire Saddam Hussein dont les néo-conservateurs du cercle rapproché de George W Bush ont été les architectes puis les ardents promoteurs, ce qui, in fine, a renforcé l’Iran et permis l’émergence de Daesh tout en ayant un effet très limité sur une véritable démocratisation du pays.

Eh bien non puisque on les retrouve en pleine forme pour s’indigner du retrait américain d’Afghanistan!

Et ils se sont même fait des alliés de circonstance improbables tant à droite, au centre et à gauche, qui viennent nous dire que ce retrait est une honte parce qu’on laisse tomber un pays alors que, depuis vingt ans, on a essayé de le structurer et lui donner une assise démocratique minimum en dépensant des sommes astronomiques.

D’autant, que nous ne devons jamais oublier que nous ne sommes pas allés en Afghanistan pour faire du «nation building», construire un pays de toute pièce, mais pour le punir d’être allié avec Al Qaida, l’organisation terroriste des attentats d’une 11 septembre dont on fêtera dans quelques jours le triste vingtième anniversaire.

Comme l’a dit ici Alexandre Vatimbella, si les Américains avaient décidé de demeurer sur place, quelles accusations de néo-colonialisme et d’impérialisme n’aurait-on pas entendu des mêmes qui s’érigent en censeur facile de l’actuel président américain.

Tout cela ne veut pas dire que les Occidentaux n’ont pas fait d’erreurs dans leur gestion de l’Afghanistan au cours de ces deux décennies passées sur place – dont celle de n’avoir pas fait grand-chose pour lutter vraiment contre la corruption à tous les niveaux qui gangrènent le pays –, ni que le retrait n’a pas été une totale réussite, loin de là.

Reste que la décision de partir était la bonne et la débandade de l’armée afghane le prouve parce qu’elle aurait été identique quel que soit le moment où le retrait aurait eu lieu.

C’est un moment bien douloureux pour tous les défenseurs de la liberté de voir l’Afghanistan se rediriger vers les temps obscurs.

Mais cet échec de la démocratisation d’un pays dont le peuple n’a pas lutté –sauf rares exceptions – pour vivre libre quand la menace était là, doit nous faire réfléchir sur la manière dont nous devons promouvoir la démocratie dans le monde entier et aider tous ceux qui veulent leur liberté et leur dignité.

Parce que la démocratie est, reste et restera bien l’unique régime humaniste dont tout individu est légitime de le réclamer pour lui et pour les autres.

Aris de Hesselin

 

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